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27/01/2003 | MALI | N°010

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 27 janvier 2003, 010


Texte (pseudonymisé)
20030127010
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème CHAMBRE CIVILE
POURVOI N°74 DU 08 DECEMBRE 2000 ARRET N°010 DU 27 JANVIER 2003
RECLAMATION DE CHAMPS --SERMENT - VIOLATION DES ARTICLES 295 ET SUIVANTS DE LA LOI N°87-AN/RM DU 29 AOUT 1987 FIXANT LE REGIME GENERAL DES OBLIGATIONS
L'article 295 de la loi n°87 31/ AN-RM du 29 août 1987 fixant le régime général des obligations définit le serment comme « l'affirmation sous une forme solennelle civile religieuse et coutumière d'un fait profitable à celui qui le prête. »
L'art 296 du même texte qui classe

le serment judiciaire en deux espèces indique que le serment qu'une partie défèr...

20030127010
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE
2ème CHAMBRE CIVILE
POURVOI N°74 DU 08 DECEMBRE 2000 ARRET N°010 DU 27 JANVIER 2003
RECLAMATION DE CHAMPS --SERMENT - VIOLATION DES ARTICLES 295 ET SUIVANTS DE LA LOI N°87-AN/RM DU 29 AOUT 1987 FIXANT LE REGIME GENERAL DES OBLIGATIONS
L'article 295 de la loi n°87 31/ AN-RM du 29 août 1987 fixant le régime général des obligations définit le serment comme « l'affirmation sous une forme solennelle civile religieuse et coutumière d'un fait profitable à celui qui le prête. »
L'art 296 du même texte qui classe le serment judiciaire en deux espèces indique que le serment qu'une partie défère à l'autre pour en faire dépendre le jugement de la cause est appelé décisoire ; et l'article 297 précise qu'il est décisoire lorsqu'il est déféré par une partie à l'autre en toute matière et en tout état de cause sur un fait personnel à la partie à laquelle on le défère, tandis que les articles 298, 299, 300 et 301 traitent respectivement de la sanction du serment déféré, de la possibilité de la présence de témoin contre la volonté de l'adversaire et du juge du serment supplétoire relevant du domaine propre du juge.
Attendu que les articles 329 et suivants du code de procédure civile, commerciale et sociale règlent les modalités de la procédure civile, commerciale et sociale
Attendu que les juges d'appel en statuant que « les modes de preuve parfaite tels la preuve littérale et le serment décisoire, de même que ceux de preuve imparfaite comme la preuve testimoniale et le serment supplétoire, sont clairement réglés par le code de procédure civile commerciale et sociale ; que le juge ne saurait, sans violer ce principe et excéder ses pouvoirs, y suppléer par un autre mode de preuve, même proposé par les plaideurs, surtout lorsque la portée de celui-ci est la mort d'un de ceux-ci. », pour infirmer le jugement d'instance, en méconnaissant la combinaison des articles 295 et suivants du code de procédure civile, commerciale et sociale régissant le serment judicaire et en faisant fi de leur propre jurisprudence.. ont manifestement violé la loi et leur décision doit être censurée.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi.

EN LA FORME :
Par acte du greffe n°74 du 06 décembre 2000, Ap Ai B Représentant Ai B, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°103 rendu le même jour par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Mopti dans une instance en réclamation de champ opposant son mandant à Ae Ab B représentant Am Af B ;
Suivant certificat de dépôt n°94/2001 du 16 mai 2001, l'amende de consignation a été acquittée par le demandeur en cassation ;
Par l'organe de ses conseils, il a déposé mémoire ampliatif qui a été notifié au défendeur qui a répliqué par le truchement de son conseil en concluant au rejet de l'action ; Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.
AU FOND :
LES MOYENS DE CASSATION
Le mémorant présente à l'appui de sa demande les moyens de cassation ci-après :
I. SOUS LA PLUME DE MAITRE ALHOUSSEYNI MOHAMED MAÏGA
1. Premier moyen basé sur la violation de la loi
Ce moyen est subdivisé en deux branches :
a.Première branche tirée de la violation des articles 300 et 301 de la loi n°87-31/AN-RM du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations :
En ce que l'arrêt querellé en assimilant le serment ordonné par le juge à une règle de preuve coutumière et en rangeant le serment parmi les preuves traditionnelles admises par la coutume alors que d'une part, ce serment est prévu par les articles 300 et 301 de la loi sus-visée et qui disposent respectivement que « le juge peut déférer à l'une des parties le serment pour faire dépendre la décision de la cause ou seulement pour déterminer le montant de la condamnation », et, « le serment supplétoire ne peut être déféré par le juge que pour compléter le bien fondé d'une demande ou d'une exception déjà justifiée par un commencement de preuve légale ou lorsqu'il existe un doute sur le caractère décisif des preuves produites », et, d'autre part, le serment ordonné par le juge est une preuve légale, a méconnu les dispositions des articles visés au moyen et encourt la cassation.
b.Deuxième branche tirée de la violation de la loi
En ce que l'arrêt attaqué en méconnaissant les conséquences de droit résultant du serment, mode de preuve légale ordonné par le juge exécuté par l'huissier de justice pour faire dépendre la solution du litige, a violé la loi.
2.Deuxième moyen basé sur la dénaturation des faits et du défaut de motifs équivalant à un manque de base légale :
En ce que, en assimilant le creusement d'un puits par la famille de Am B sur la

parcelle litigieuse à une première occupation et en conséquence à un droit de propriété coutumière, et, en se fondant sur des témoignages contradictoires et moins probants, alors que d'une part, il ressort du procès verbal de constat dressé par le chef d'antenne Centrale de Bankass en date du 30 mai 1998 que la parcelle litigieuse se situe à environ 200 mètres à l'est du hameau d'Omekèdiou, et, relève de la propriété coutumière du village de Ogoténé d'où est originaire le mémorant, séparée du hameau d'Omékediou par une piste praticable reliant Ah à Bankass et se distingue des champs propres au hameau d'Omékédiou par le fait qu'aucun puits utilisable ne s'y trouve, et, d'autre part, le procès -verbal de constat sus-visé, la déposition du chef de village de Ogoténé authentifiée par l'autorité administrative établissement que les ressortissants de Ogoténé ont exploité les terres d'Omekédiou bien avant l'installation des habitants de Ah ne dépassant pas 20 ans, l'arrêt recherché pêche par dénaturation des faits, défaut de motifs et de base légale, et, mérite la censure de la Cour Suprême ;
3.Troisième moyen pris de l'excès de pouvoir :
En ce que l'arrêt l'entrepris en déclarant que le champ litigieux est la propriété coutumière de Ae Ab B représentant Am Af B alors qu'il est prouvé que les droits coutumiers du mémorant dont l'occupation est centenaire sont plus anciens que ceux du défendeur, procède d'un excès de pouvoir et encourt la cassation.
II. SOUS LA PLUME DE MAITRE HAMADOUN DICKO :
Le mémorant présente les moyens de cassation ci -après :
-Premier moyen basé sur la violation de la loi par fausse interprétation de la loi
En ce que la Cour d'Appel en refusant le serment coutumier largement admis adopté par les parties consistant à manger de la terre et à jurer de remettre la terre à l'adversaire et en disant que la conséquence soit la mort dans les 3 mois, sur le fondement de l'article 329 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale alors que ledit article stipule que les parties sont libres de déférer le serment et que la seule restriction est son admissibilité, a fait une fausse interprétation dudit article et violé la règle coutumière exposant ainsi sa décision à la censure de la Cour Suprême.
-Deuxième moyen tiré de la violation de l'article 9 du Code de Procédure civile, Commerciale et sociale
En ce que cet article disposant que « il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention », le mémorant a soutenu que le défendeur a trouvé la mort dans le délai prescrit par la coutume, l'arrêt querellé en faisant fi de ces éléments a violé l'article visé au moyen et mérite la cassation.
-Troisième moyen basé sur la violation de la dénaturation des faits En ce que l'arrêt attaqué en statuant que le puits fut creusé sur la parcelle litigieuse par la famille de Am, qu'en plus Ad Aj fut invité à l'abandonner et que le mémorant ne rapporte aucune preuve « ni par écrit, ni par témoignage » a dénaturé les faits en ce sens que d'une part, il résulte des déclarations des autorités coutumières dont Aa B chef de village de Ogoténé, Aa X chef de quartier des Foutanké et Ao An B de Orobeye que le village de Ogoténa (village du mémorant) est plus ancien que Ah Cvillage du défendeur), et que Am n'a pas creusé un puits dans la parcelle litigieuse (cf. relevé des notes d'audience du 16/04/1999 et jours suivants, pages 5,6 et 7 ), et, d'autre part, en réalité, le puits ne se trouve pas dans la parcelle litigieuse mais dans le champ de Am différent de celui objet du litige et qu'il faut retenir que les parties sont limitrophes, que chacune exploite une parcelle, le litige est né à … d'un dépassement de limite ; que l'expulsion de Ad Aj est faite avec l'accord du mémorant le lieu occupé n'étant pas l'objet du litige, et en fin que plusieurs témoins ont soutenu l'exploitation des lieux par le mémorant ( cf. notes d'audience du 16 avril 1999 et jours suivants pages 4 et 7, 3 et 4, 6 et 7); que de tout ce précède, la cassation est encourue.
ANALYSE DES MOYENS
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt recherché d'avoir procédé par violation de la loi notamment la violation des articles 300 et 301 de la loi 87-31 du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations, par dénaturation des faits, défaut de motifs et de base légale, par violation de la loi par fausse interprétation de l'article 329 du Code de Procédure civile, Commerciale et Sociale, par violation de l'article 9 du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale ;
Attendu que les moyens interfèrent et peuvent être examinés ensemble ;
Attendu que la violation de la loi par fausse application ou refus d'application de la loi suppose qu'à partir de faits matériellement établis, correctement qualifiés, les juges du fond ont fait une mauvaise application de la loi au prix d'une erreur le plus souvent grossière soit qu'ils aient ajouté à la loi une condition qu'elle ne pose pas, soit qu'ils aient refusé d'en faire application à une situation qui manifestement rentrait dans son champ d'application (cf. la Technique de cassation de Aq Ar Ag At et Ac At p. 138) ; Attendu, sur le premier moyen, qu'il est reproché à l'arrêt entrepris d'avoir violé les dispositions de la loi relativement au serment et à ses conséquences juridiques ; Attendu que l'article 295 de la loi n°87-31/ANRM du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations définit le serment comme « l'affirmation sous une forme solennelle civile religieuse et coutumière d'un fait profitable à celui qui le prête » Que l'article 296 du même texte qui classe le serment judiciaire en deux espèces indique que le serment qu'une partie défère à l'autre pour en faire dépendre le jugement de la cause est appelé décisoire ; que l'article 297 précise qu'il est décisoire lorsqu'il est déféré par une partie à l'autre en toute matière et en tout état de cause sur un fait personnel à la partie à laquelle on le défère, tandis que les articles 298, 299, 300 et 301 traitent respectivement de la sanction du serment déféré, de la possibilité de la présence de témoins contre la volonté de l'adversaire et du juge, et enfin du serment supplétoire relevant du domaine propre du juge ; Attendu que les articles 329 et suivants du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale règlent les modalités de la procédure du serment judiciaire ;
Attendu que les juges d'appel en statuant que « les modes de preuve parfaite tels la preuve littérale, et le serment décisoire, de même que ceux de preuve imparfaite, comme la preuve testimoniale et le serment supplétoire, sont clairement réglés par le Code de Procédure civile, commerciale et Sociale ; que le juge ne saurait, sans violer ce principe et excéder ses pouvoirs, y suppléer par un autre mode de preuve, même proposé par les plaideurs, surtout lorsque la portée de celui-ci est la mort d'un de ceux-ci », pour infirmer le jugement d'instance, en méconnaissant la combinaison des articles 295 et suivants de la loi 87-31/AN-RM du 29 août 1987 fixant le Régime Général des Obligations et des dispositions des articles 329 et suivants du Code de Procédure Civile, Commerciale et Sociale régissant le serment judiciaire et en faisant fi de leur propre jurisprudence ( cf. arrêt n°112 du 14 décembre 2000

aff Al As A et autre contre Ak A et autres ) ont manifestement violé la loi et leur décision doit être censurée ;
Et, attendu que l'arrêt encourant la cassation, il est superfétatoire d'examiner les autres moyens.
PAR CES MOTIFS
En la forme : Reçoit le pourvoi ; Au fond : Casse et annule l'arrêt déféré ; Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Bamako autrement composée; Ordonne la restitution de l'amende de consignation ; Met les dépens à la charge du trésor Public.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement es jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER.


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 010
Date de la décision : 27/01/2003
2ème chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2003-01-27;010 ?
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