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28/01/2002 | MALI | N°13

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 28 janvier 2002, 13


Texte (pseudonymisé)
2002012813
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE 2ème Chambre Civile
POURVOI N° 152 DU 19 AVRIL 2001 ARRET N°13 DU 28 JANVIER 2002
REPARATION DE PREJUDICE -COMMUNE VI DU DISTRICT DE BAMAKO ET EROL DU MALI -PEREMPTION D'INSTANCE (ARTICLE 390 CPCCS) -APPRECIATION DES FAITS PAR LES JUGES DU FOND -LIMITES
S'il est de principe généralement admis que l'appréciation des faits relève de la souveraineté du juge du fond, il demeure qu'il leur est fait obligation de préciser les faits déduits des documents de preuve.
Qu'il s'agit dans le cas d'espèce de la détermination d

e faits constitutifs ou non de voie de fait, autrement dit, d'un problème ...

2002012813
COUR SUPREME DU MALI SECTION JUDICIAIRE 2ème Chambre Civile
POURVOI N° 152 DU 19 AVRIL 2001 ARRET N°13 DU 28 JANVIER 2002
REPARATION DE PREJUDICE -COMMUNE VI DU DISTRICT DE BAMAKO ET EROL DU MALI -PEREMPTION D'INSTANCE (ARTICLE 390 CPCCS) -APPRECIATION DES FAITS PAR LES JUGES DU FOND -LIMITES
S'il est de principe généralement admis que l'appréciation des faits relève de la souveraineté du juge du fond, il demeure qu'il leur est fait obligation de préciser les faits déduits des documents de preuve.
Qu'il s'agit dans le cas d'espèce de la détermination de faits constitutifs ou non de voie de fait, autrement dit, d'un problème de qualification de faits.
Attendu que les juges d'appel en se contentant d'affirmer dans le dernier considérant de l'arrêt querellé que la démolition entre dans la gestion quotidienne d'un maire selon la loi et que la dite démolition intervient en application d'arrêtés ministériels sans préciser les textes référencés et leur contenu, et, sans indiquer les faits à en déduire et qui sont pris pour base de la non responsabilité, ne permettent pas à la cour suprême d'avoir la connaissance des faits indispensable à l'exercice du contrôle de qualification ; que leur décision manque indiscutablement de base légale ; qu'il s'en suit que le moyen est pertinent et doit être accueilli.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EN LA FORME :
Par lettre missive datée du 18 avril 2001 enregistrée au greffe sous le numéro 152 du 19 avril 2001, Maître Lamissa COULIBALY Avocat à la Cour, agissant au nom et pour le compte de Ad A, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n°231 rendu le 18 avril 2001 par la Chambre Civile de la Cour d'Appel de Bamako dans une instance en réparation de préjudice opposant son client à la Mairie de la Commune VI du District de Bamako et I'Etat du Mali ;
Suivant certificat de dépôt n°181/2001 l'amende de consignation a été acquittée ; Par l'organe de son conseil, le demandeur a produit mémoire ampliatif qui a été notifié aux défendeurs qui ont répliqué par le truchement du contentieux du Gouvernement en concluant au rejet de l'action ;
Pour avoir satisfait aux exigences de la loi, le pourvoi est recevable en la forme.

AU FOND :
Les moyens de cassation :
Sous la plume de son conseil, le mémorant présente à l'appui de sa demande les moyens de cassation ci-après :
Premier moyen tiré de la violation de la loi par violation des articles 390 et 394 du CPCCS
En ce que l'arrêt querellé en écartant l'exception de péremption sur la base d'une jurisprudence introuvable alors qu'il a été démontré que c'est sur appels de la Commune VI du District de Bamako et de l'Etat du Mali suivant actes au greffe nos 135 et 137 des 6 et 7 novembre 1999 que la Cour d'Appel de Bamako a statué en autorisant un premier acte après diligence du mémorant (cf. copie du dernier avenir en date du 8 février 2001 et qu'il est indéniable que l'article 390 susvisé dispose expressément que « l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans » et méconnu les dispositions des textes visés au moyen et mérite la cassation.
Deuxième moyen basé sur la dénaturation des faits par leur mauvaise appréciation
En ce que les motivations des juges du fond sont basées essentiellement sur le prétendu respect strict d'un arrêté n°4377/MTPUC du 07 octobre 1988 alors qu'il est constant que le mémorant, bénéficiaire d'une parcelle, a entrepris des constructions sur ladite parcelle et que c'est dans le cadre de la mise en valeur de cette parcelle que le maire de la Commune VI du District de Bamako a procédé à la démolition de ses réalisations ;
Qu'il est de jurisprudence établie que le Maire ne peut procéder à la démolition des constructions sans autorisation judiciaire au risque de violer le Décret n°90 -133/PRM du 19 février 1990 portant règlementation de la délivrance du permis de construire ;
Que ce comportement, par l'irrégularité grave, manifeste et grossière qui le caractérise constitue réellement une voie de fait ayant entraîné des préjudices réparables ;
Que la voie de fait est constituée dès lors que l'administration procède à une opération matérielle dans des conditions manifestement insusceptibles de se rattacher à l'exercice d'un de ses pouvoirs, et, portant atteinte soit à une liberté publique, soit à la propriété mobilière ou immobilière ;
Que les juges judiciaires deviennent alors compétents pour connaître de cette irrégularité, à titre exécutif pour connaître de l'action en responsabilité, et concurremment avec la juridiction administrative pour prononcer l'annulation de l'acte ;
Qu'il est de jurisprudence établie que lorsque la voie de fait est constante, le juge judiciaire peut la constater, la faire cesser et réparer ses conséquences dommageables (cf. arrêts n°152 du 29 avril 1998 et n°236 du 23 juin 1993 de la Cour d'Appel de Bamako) ;
Que la décision visée dans les motivations c'est -à-dire la décision n°116/YB du 03 août 1998 n'a jamais été ni notifiée au mémorant, ni versée au dossier ;

Qu'il est unanime que l'administration ne dispose que de deux mois pour annuler ou retirer de l'ordonnancement juridique un acte qu'elle avait pris au risque de dépasser sa compétence ;
Qu'en démolissant les investissements réalisés par le mémorant sur la base d'une décision administrative intervenue plus de deux mois après que les effets de la lettre d'attribution du mémorant soient devenus intangibles, le Maire de la Commune VI a procédé par voie de fait ;
Qu'en qualifiant autrement les agissements du Maire de la Commune VI, l'arrêt querellé pêche par une mauvaise appréciation et mérite la censure de la Cour Suprême.
ANALYSE DES MOYENS
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt déféré d'avoir procédé par violation de la loi et par mauvaise appréciation des faits de la cause ;
Attendu que la violation de la loi suppose qu'à partir de faits matériellement établis, correctement qualifiés, les juges du fond ont fait une mauvaise application de la loi au prix d'une erreur le plus souvent grossière, soit qu'ils aient ajouté à la loi une condition qu'elle ne pose, soit qu'ils aient refusé d'en faire application à une situation qui manifestement rentrait dans son champ d'application (cf. la technique de cassation de Ab Ac Af Ae et Aa Ae, p. 138, 3ème éd) ;
Attendu que l'article 390 du code de procédure Civile, Commerciale et Sociale dont la violation est arguée dispose que « l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligence pendant deux ans » ;
Attendu à cet égard qu'il ressort des énonciations de l'arrêt querellé que le dossier fut inscrit au Rôle Général du greffe de la Cour d'Appel de Bamako sous le numéro 405 de l'année 2001 ;
Que le bordereau d'envoi transmettant le dossier de la procédure à la Cour d'Appel de Bamako est daté du 06 février 2001 (cf. BE n°12 du 06 février 2001);
Que l'avenir citation évoqué date du 08 février 2001, ( cf. côte 2 ) que la décision de la Cour d'Appel est intervenue le 18 avril 2001, qu'il s'en suit qu'il ne s'est pas écoulé un temps permettant de retenir la péremption, le point de départ du délai de deux ans s'appréciant à partir des termes de l'article 658 du CPCCS ; que la décision des juges d'appel rejetant cette exception ne viole aucunement la loi le moyen n'est par conséquent pas opérant et doit être rejeté ;
Attendu, sur le deuxième moyen, que s'il est de principe généralement admis que l'appréciation des faits relève de la souveraineté du juge du fond, il demeure qu'il leur est fait obligation de préciser les faits déduits des documents de preuve ;
Qu'il s'agit dans le cas d'espèce de la détermination de faits constitutifs ou non de voie de fait, autrement dit, d'un problème de qualification de faits ;
Attendu que les juges d'appel en se contentant d'affirmer dans le dernier considérant de l'arrêt querellé que la démolition entre dans la gestion quotidienne d'un maire, selon la loi et que ladite démolition intervient en application d'arrêtés ministériels sans préciser les textes
référencés et leur contenu, et, sans indiquer les faits à en déduire et qui sont pris pour base de la non responsabilité, ne permettent pas à la Cour Suprême d'avoir la connaissance des faits indispensable à l'exercice du contrôle de qualification des faits ; que leur décision manque indiscutablement de base légale ; qu'il s'en suit que le moyen est pertinent et doit être accueilli.
PAR CES MOTIFS
En la forme : reçoit le pourvoi ; Au fond : casse et annule l'arrêt querellé ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour de d'Appel de Bamako autrement composée Ordonne la restitution de l'amende consignation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public. Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jours mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 13
Date de la décision : 28/01/2002
2ème chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;2002-01-28;13 ?
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