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24/11/1998 | MALI | N°104

Mali | Mali, Cour suprême, Section judiciaire, 24 novembre 1998, 104


Texte (pseudonymisé)
19981124104
COUR SUPREME DU MALI ********* SECTION JUDICIAIRE *********
1ère Chambre Civile
ARRET N° 404 DU 24 NOVEMBRE 1998
Possession - Emprise évidente et permanente.
Si l'article 128 du Code domanial et foncier (loi n°86-91/ANRM du 12 juillet 1986) régit le transfert et la modification des droits coutumiers collectifs ou individuels, il n'est pas apte à déterminer la propriété des dits droits.Dans le cas d'espèce dès lors qu'il ne s'agit point de transfert ni de modification de droits coutumiers collectifs ou individuels mais plutôt de constater les droits

coutumiers d'une collectivité villageoise sur la terre, il convenait d'app...

19981124104
COUR SUPREME DU MALI ********* SECTION JUDICIAIRE *********
1ère Chambre Civile
ARRET N° 404 DU 24 NOVEMBRE 1998
Possession - Emprise évidente et permanente.
Si l'article 128 du Code domanial et foncier (loi n°86-91/ANRM du 12 juillet 1986) régit le transfert et la modification des droits coutumiers collectifs ou individuels, il n'est pas apte à déterminer la propriété des dits droits.Dans le cas d'espèce dès lors qu'il ne s'agit point de transfert ni de modification de droits coutumiers collectifs ou individuels mais plutôt de constater les droits coutumiers d'une collectivité villageoise sur la terre, il convenait d'appliquer l'article 129 du dit code dont les termes et spécifications essentielles à savoir l'emprise évidente et permanente sur le sol et la mise en valeur se devaient d'être recherchées et vérifiées entres les parties ; que faute d'y avoir procédé et en appliquant une disposition qui ne sied pas au litige, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; d'où il suit que les moyens invoqués sont pertinents et la cassation de l'arrêt s'impose.
La Cour :
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
EN LA FORME :
Par acte pris au greffe n° 52 du 14 Mars 1996 de la Cour d'appel de Bamako, maître Bassidiki Traoré, Avocat à la Cour, agissant au nom et pour ke compte de Aa Ad et Ac Ab, a déclaré se pourvoir en cassation contre l'arrêt n° 98 du 13 mars 1996 rendu par la Chambre Civile de ladite Cour dans la procédure ci-dessus spécifiée.
Il résulte d'un certificat de dépôt en date du 10 juin 1997 établi par le greffier en chef de la Cour Suprême que les demandeurs ont consigné l'amende de consignation et produit des mémoires ampliatifs qui, notifiés aux défendeurs, a fait l'objet de réponse, le tout dans les forme et délai de la loi. Il appert donc que le pourvoi est recevable en la forme.
AU FOND ;
A-PRESENTATION DES MOYENS DE CASSATION
Les demandeurs par l'organe de leurs conseils ont soulevé les moyens suivants : MAÎTRE BASSIDIKI TRAORE :
1° Du moyen tiré du manque de base légale:
En ce que l'argumentaire de la Cour d'Appel selon lequel la zone contestée a de tout temps été propriété coutumière des défendeurs au pourvoi, de même que celui consistant à déclarer le village de Kotoumou plus ancien que celui de Mougna ne repose que sur des affirmations gratuites, démenties par les chroniqueurs de la région ; que la Cour d'Appel aurait dû approfondir ses investigations ; que ne l'ayant pas fait, son arrêt encourt la cassation.
2° Du moyen tiré de la violation de l'article 128 du Code domanial et foncier:
En ce que l'article 128 du Code domanial et foncier dispose « les droits coutumiers ou individuels ne peuvent être transférés ou modifiés qu'au profit de collectivités ou individus susceptibles de posséder les mêmes droits en vertu des règles coutumières et seulement dans les conditions et limites qu'elles prévoient » ; que la zone litigieuse a été coutumièrement attribuée aux mémorants depuis des décades par le chef de village de Mougna ; que ceux-ci y ont construit des cases et n'ont jamais été troublés dans leur jouissance depuis lors ; qu'il n'est jamais donc normal que les mémorants soient évincés au profit d'autres usagers sous le prétexte d'un découpage administratif ; qu'il appert que l'arrêt querellé procède d'une violation manifeste de la loi et doit par conséquent être censuré.
MAÎTRE ISSIAKA KEITA :
1° Du moyen tiré de l'insuffisance de motifs:
En ce qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni du jugement entrepris un témoignage attestant de la propriété coutumière des villages de Kotoumou et de Konota sur la zone litigieuse ;
Que la Cour d'appel devrait préciser les témoignages lui permettant d'affirmer que la zone litigieuse est la propriété des défendeurs au pourvoi ; qu'elle aurait dû apporter une précision historique quant aux premiers occupants de la zone litigieuse ; qu'elle ne rapporte pas non plus la preuve de son assertion selon laquelle, le village de Kotoumou serait plus ancien que celui de Mougna ; qu'il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué procède d'une insuffisance notoire de motifs équivalant à un défaut de motifs ; qu'il doit par conséquent être censuré.
2° Du moyen tiré de la violation de la loi:
En ce que l'arrêt querellé tire argument des dispositions de l'article 128 du Code domanial et foncier alors que les cas d'espèce, il ne s'agit point de transfert, ni de modification de droits coutumiers collectifs ou individuels ; qu'il s'agit plutôt de constater les droits coutumiers d'une collectivité villageoise (celle de Mougna) sur une zone litigieuse (le Pimpan), droit résultant de sa qualité de première occupante des lieux et la mise en valeur de ceux-ci par elle ; que c'est plutôt l'article 128 du Code domanial et foncier qui sied à la situation ; que ceci est d'autant vrai que les défendeurs au pourvoi ont eux-mêmes reconnu que la communauté villageoise de Mougna a mis en valeur le « Pimpan » ; que l'arrêt querellé ne fournit aucune précision quant à l'installation de la communauté villageoise de Kotoumou et de Konota sur la zone litigieuse ; qu'en aucun cas, un découpage administratif ne saurait conférer de droits coutumiers ; que l'arrêt querellé a manifestement violé la loi et devrait par conséquent être censuré ;
Les défendeurs au pourvoi, dans leur mémoire en réponse, ont conclu au rejet du pourvoi comme mal fondé.
B-ANALYSE DES MOYENS
Les moyens soulevés dans les deux mémoires ampliatifs en raison de leur similitude, peuvent être analysés ensemble
1° Du moyen tiré de l'insuffisance de base légale et du défaut de motifs :
En ce que la Cour d'appel a admis, sans en apporter la preuve que la zone litigieuse a de tout temps été la propriété coutumière des villages de Kotoumou et de Konota ; que le premier village cité était plus ancien que Mougna (village des demandeurs) ; que ces assertions ne reposent sur aucun témoignage ni autre élément pouvant asseoir la conviction des juges ; que la Cour d'appel aurait dû mener une enquête sur ces points ne serait-ce que pour savoir quels ont été les premiers occupants de la zone litigieuse ; qu'ayant statué comme elle l'a fait, sa décision manque de base légale ;
Attendu qu'il résulte de la lecture des pièces du dossier que chacune des parties au dossier, a produit des témoins qui ont déposé dans les sens des thèses de ceux qui les ont fait citer (confère côte 27, 31, 33, 34, et 85 du dossier) ;
Que dès lors, la Cour d'appel se devait d'asseoir sa conviction par d'autres moyens d'investigations ; qu'elle ne l'a pas fait que l'arrêt procède de motifs souvent démentis par des pièces du dossier ; (cf. témoignage versé au dossier à la côte 27) ;
Que dans ces conditions, d'avantage investigations paraissent nécessaires ; qu'il appert que le moyen invoqué est pertinent ; que l'arrêt ne repose sur aucune base légale et doit être censuré.
2° Du moyen tiré de la violation de l'article 128 du Code domanial et foncier :
En ce que l'arrêt querellé tire argument de l'article 128 du Code Domanial et Foncier alors que dans le cas d'espèce, il ne s'agit ni de transfert, ni de modification de droits coutumiers collectifs ou individuels ; que l'article 129 du même code cadre mieux à la situation ; qu'en faisant application d'une disposition qui ne sied pas au litige, la Cour d'appel expose son arrêt à une censure certaine ;
Attendu que la Cour d'Appel a adopté le motif ci-après « que le premier juge, en décidant dans ce sens a fait une bonne appréciation des faits et de la coutume, du caractère non écrit des droits coutumiers ; que la propriété des terres de culture s'acquiert par l'autorité de l'occupation et conformément à l'article 128 du Code domanial et foncier qui stipule que les droits coutumiers collectifs ou individuels ne peuvent être transférés ou modifiés qu'au profit des collectivités ou individus susceptibles de posséder les mêmes droits en vertu des règles coutumières et seulement dans les conditions et limites qu'elles prévoient ;
Attendu que si l'article 128 du Code domanial et foncier ci-dessus cité régit le transfert et la modification des droits coutumiers collectifs ou individuels ; il n'est pas apte à déterminer la propriété desdits droits traités du reste par l'article 129 dudit Code, article dont les termes et spécifications essentielles à savoir l'emprise évident et permanent sur le sol et la mise en valeur se devaient d'être recherchées et vérifiées entre les parties ; que faute d'y avoir procédé et en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'Appel n'a pas donné de base légale à sa décision ; d'où suit que les moyens invoqués sont pertinents et la cassation de l'arrêt s'impose.
PAR CES MOTIFS :
En la forme : Reçoit les pourvois de Aa Ad et de Ac Ab ;
Au fond : Casse et annule l'arrêt attaqué ; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Mopti autrement composée ; Ordonne la restitution de l'amende de cassation ; Met les dépens à la charge du Trésor Public ;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus ;
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET GREFFIER


Synthèse
Formation : Section judiciaire
Numéro d'arrêt : 104
Date de la décision : 24/11/1998
1ère chambre civile

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ml;cour.supreme;arret;1998-11-24;104 ?
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