Tribunal administratif N° 52911 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52911 Inscrit le 27 mai 2025 Audience publique du 20 juin 2025 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par (A), contre une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire
__________________________________________________________________________
ORDONNANCE
Vu la requête inscrite sous le numéro 52911 du rôle et déposée le 27 mai 2025 au greffe du tribunal administratif par la société anonyme KRIEGER ASSOCIATES S.A., inscrite sur la liste V du Tableau de l’Ordre des Avocats du Barreau de Luxembourg, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Georges KRIEGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de :
1) (A) … 49) … tendant à voir ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 6 février 2024, n° 2022/3184, ayant autorisé la Ville de Luxembourg à procéder à la construction d’une passerelle, d’un ascenseur et d’un bâtiment technique ainsi que l’aménagement d’un espace public et d’une aire de jeux sur les parcelles inscrites au cadastre sous les numéros 574/5610, 609/5611, 559/2751, 559/3157, 559/2750, 559/3156, 637/5536 de la section ED de Neudorf et sis 149, rue de Neudorf à Luxembourg, cette autorisation étant encore attaquée au fond par une requête en annulation introduite le 3 mai 2024, portant le numéro 50416 du rôle ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Kelly FERREIRA SIMOES, en remplacement de l’huissier de justice Carlos CALVO, demeurant à Luxembourg, du 17 juin 2022, portant signification de la prédite requête en institution d’une mesure provisoire, à l’administration communale de la Ville de Luxembourg, du 26 mai 2025 ;
Vu la constitution d’avocat à la Cour de la société anonyme ARENDT & MEDERNACH, inscrite sur la liste V de l’Ordre des avocats de Luxembourg, pour la Ville de Luxembourg, du 28 juin 2025 ;
Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Maître Sébastien COUVREUR et Maître Jean-Claude KIRPACH, en remplacement de Maître Georges KRIEGER, pour les parties requérantes, ainsi que Maître Martial BARBIAN, en qualité de représentant de la société anonyme ARENDT & MEDERNACH, 1 pour la Ville de Luxembourg, entendus en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 10 et 13 juin 2025.
Il résulte des rétroactes et des explications contenues dans la requête introductive d’instance que la Ville de Luxembourg annonça courant de l’année 2010 son intention de construire une passerelle pour piétons et cyclistes enjambant la rue de Neudorf et reliant le quartier du Cents au Weimershof, projet qui rencontra rapidement l’opposition notamment du (A) et de divers particuliers, opposition se matérialisant au fil des années par des pétitions, par des courriers d’objection, par des demandes d’informations, d’interventions auprès du ministre ayant l’Environnement en ses compétences, ou encore par des demandes d’études supplémentaires.
Par courrier du 25 novembre 2022, la Ville de Luxembourg fit adresser au bourgmestre de la Ville de Luxembourg une demande d’autorisation de bâtir en vue de la construction d’une passerelle, d’un ascenseur et d’un bâtiment technique.
Au courant du mois de décembre 2022, Ville de Luxembourg fit afficher aux abords du terrain situé à Luxembourg, 149, rue de Neudorf, en application de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, un avis au public ayant eu pour objet d’informer le public intéressé qu’une demande d’autorisation de bâtir avait été introduite en vue de la construction à cet endroit d’une passerelle, d’un ascenseur et d’un bâtiment technique.
Le 16 janvier 2023, la Ville de Luxembourg fit à nouveau afficher aux abords du terrain situé à Luxembourg, 149, rue de Neudorf un avis au public portant sur l’introduction de la demande d’autorisation de bâtir en vue de la construction à cet endroit d’une passerelle, d’un ascenseur et d’un bâtiment technique.
Par arrêté du 21 février 2023, le ministre ayant l’Environnement en ses compétences accorda à la Ville de Luxembourg l’autorisation pour la construction d’une passerelle Cents-
Neudorf-Weimershof et pour une destruction de biotopes.
En date du 22 mai 2023, un recours en annulation, inscrit au rôle sous le numéro 48955, fut introduit à l’encontre de cette décision ministérielle du 21 février 2023.
En date du 23 août 2023, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg informa par courriers les personnes qui avaient précédemment manifesté leur désapprobation à propos du projet de construction de la passerelle, de leur possibilité de consulter le dossier de la demande d’autorisation de bâtir et de formuler des observations écrites jusqu’au 25 septembre 2023, possibilité dont de nombreuses personnes intéressées firent usage.
Finalement, le 6 février 2024, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg accorda l’autorisation pour la construction d’une passerelle, d’un ascenseur et d’un bâtiment technique, ainsi que pour l’aménagement d’un espace public et d’une aire de jeux sur les parcelles inscrites au cadastre sous les numéros 574/5610, 609/561 1,55912751, 559/3157, 559/2750, 559/3156, 637/5536 de la section ED de Neudorf et sis 149, rue de Neudorf à Luxembourg, autorisation qui fut affichée conformément à l’article 37 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain le 13 février 2024 aux abords des numéros 147-149, rue de Neudorf, 24, rue des Bleuets et 159, boulevard Jules Salentiny.
2 Aussi, le (A), ensemble avec 48 particuliers, listés ci-dessus, ci-après « (A) et consorts », par requête déposée le 3 mai 2024 et inscrite sous le numéro 50416 du rôle, ont fait introduire un recours en annulation contre la prédite autorisation de construire du 6 février 2024, et par requête séparée déposée le 27 mai 2025, inscrite sous le numéro 52911 du rôle, ces requérants ont demandé à voir prononcer un sursis à exécution de ladite autorisation de construire déférée en attendant la solution de leur recours au fond, étant donné que les travaux de terrassement auraient débuté le 18 mars 2025.
(A) et consorts estiment que l’exécution de l’autorisation déférée les exposerait à un risque de préjudice grave et définitif.
Ainsi, les travaux de construction de la passerelle, notamment les travaux de terrassement avec de gros engins en haut de la falaise du Grès de Luxembourg, engendreraient un risque élevé d’éboulements de rochers, de sorte que les maisons de Neudorf et leurs jardins, sis à petite distance en contrebas de la falaise seraient exposés au risque de roches tombant d’une hauteur de 20 mètres, ce qui entrainerait un risque élevé de dommages matériels et corporels.
La situation même de la passerelle, sise au-dessus des maisons d’habitation avec leurs jardins et terrasses, et au-dessus des espaces verts et lieux publics, entrainerait une diminution de la luminosité, un risque de chute d’objets jetés par les usagers du pont et susceptibles de générer des dommages aux maisons d’habitation, ainsi qu’une sensation d’oppression et de menace pour les personnes résidant directement en dessous ou à proximité immédiate.
Les usagers de la passerelle bénéficieraient encore d’une vue directe dans l’espace privatif des jardins et terrasses mais aussi en partie dans les pièces des maisons situées en dessous de la passerelle, de sorte que les résidents des maisons tant situées immédiatement en-
dessous de la passerelle que ceux des maisons situées à quelque distance seraient exposés à une atteinte à leur vie privée et à leur intimité, tandis que la passerelle avec l’ascenseur et les ouvrages connexes enlèveraient à un grand nombre de résidents la vue libre dont ils auraient pu profiter jusqu’à présent, ce qui renforcerait la sensation d’oppression pour tous ceux qui y passent leur vie quotidienne.
Comme le projet de construction de la passerelle nécessiterait le défrichement de parties de forêt et la dégradation de la nature utilisées à des fins récréatives par les résidents de Neudorf, notamment à travers l’utilisation d’un sentier pédestre et d’un parcours fitness, ils seraient exposés à une diminution de leur qualité de vie.
(A) et consorts relèvent ensuite que l’association « (B) » du Cents aurait demandé que leur cité jardinière, actuellement complètement ouverte, soit fermée en cas de réalisation du projet de la passerelle, afin d’éviter des actions de vandalisme « de la part des personnes sans domicile qui circuleront aux alentours des infrastructures de la passerelle », tandis que « certaines personnes du Cents » auraient encore demandé pour la même raison que l’ascenseur de la passerelle soit fermé pendant la nuit.
Les requérants donnent encore à considérer que la place au niveau de l’entrée de l’ascenseur où seront implantés divers bâtiments desservant la passerelle généreraient un trafic et une circulation importante.
3 Par ailleurs, les terrains et les maisons situés en dessous de la passerelle, ainsi que ceux de la rue des Bleuets, situés le long de l’accès à la passerelle, connaîtraient une diminution importante de leur valeur économique, de sorte que les propriétaires affectés subiraient un impact financier direct, sans possibilité de dédommagement ultérieur. Dans ce contexte particulier, les requérants relèvent qu’un terrain à bâtir appartenant « à l’une des requérantes », situé dans la rue de Bleuets et inscrit au cadastre sous le numéro (P1), subirait une dévalorisation particulièrement grave, puisqu’il se trouverait en contrebas du chemin sur lequel sera aménagé l’accès à la passerelle. Comme ce chemin en lui-même ne serait pas assez large, il y aurait à craindre un empiétement de la voie d’accès à la passerelle sur le terrain de cette requérante. Par ailleurs, du côté de la passerelle proprement dite, un talus considérable devrait être érigé entre le niveau d’implantation de la passerelle et le niveau du terrain de la requérante, de sorte qu’il y aurait à craindre que de ce côté une partie du terrain s’affaisse lors des travaux, ce qui affecterait la surface limitée de ce terrain, de sorte que la réalisation de la voie d’accès à la passerelle et l’aménagement du talus du côté de la passerelle proprement dite risqueraient de rendre ce terrain impropre à la construction d’une maison, laquelle, en tout état de cause, ne serait pas agréable à vivre pour ses habitants, étant donné la proximité immédiate des deux infrastructures.
Les requérants relèvent encore, toujours dans le cadre de l’affirmation d’un risque de préjudice grave et définitif, que la piste cyclable présente sur le tronçon adjacent à la passerelle du côté de Weimershof présenterait une pente de 20 %, ce qui représenterait une difficulté pour les cyclistes, difficulté qui aurait pu être évitée par le choix d’un autre site d’implantation.
Toujours dans le contexte d’un risque pour les usagers cyclistes, les requérants affirment également que la rue des Bleuets se caractériserait par un trafic intense quatre fois par jour en raison du fonctionnement de l’école Saint-Sophie, de sorte que le projet de passerelle, débouchant à Weimerskirch dans la rue des Bleues, exposerait les cyclistes à un danger.
Enfin, pendant la phase du chantier, les résidents seraient exposés à une atteinte à leur qualité de vie, notamment par le bruit, la poussière, les vibrations, et de l’impossibilité de se recréer dans la nature.
Dès lors, le préjudice généré par une exécution immédiate de la décision querellée serait grave parce qu’il dépasserait par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société ; il serait encore définitif dans la mesure où le projet une fois achevé, il ne pourrait plus jamais être supprimé, puisqu’il serait hautement improbable que, même après annulation de l’autorisation de bâtir par le tribunal administratif, les juridictions judiciaires condamnent la Ville de Luxembourg à la démolition du pont et la remise du site en son état antérieur.
En termes de plaidoiries, (A) et consorts se sont encore prévalus lors de l’audience publique du 10 juin 2025 de l’importance du projet, érigé en surplomb de la rue de Neudorf, de sorte qu’il serait particulièrement visible.
(A) et consorts se prévalent ensuite devant les juges du fond des moyens d’annulation suivants, qui peuvent être très sommairement résumés comme suit :
1. violation du principe de collaboration, dans la mesure où les parties requérantes reprochent à la Ville de Luxembourg l’absence de dialogue et de collaboration avec les administrés, notamment en ce qui concerne certaines modalités d’exécution du projet et le choix du lieu d’implantation de la passerelle, les parties requérantes s’emparant à 4 cet égard de l’article 1er de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse ainsi que l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes.
2. violation par l’autorisation de bâtir querellée du principe de précaution dans la mesure où le bourgmestre n’aurait pas tenu compte, lors de la délivrance de l’autorisation en question, des risques d’éboulement et de chutes de rochers susceptibles de causer des dommages aux immeubles situés en contre-bas des aménagements à réaliser au niveau des plateaux de Weimershaff et du Cents, le bourgmestre se voyant reproché, malgré ces risques, de ne pas avoir refusé la délivrance de l’autorisation.
3. violation du principe de bonne administration et notamment du principe de minutie, le bourgmestre se voyant reprocher d’avoir délivré l’autorisation litigieuse sans avoir fait procéder à une étude très approfondie des risques et des mesures de précaution et de protection à envisager et sans avoir fait procéder à une analyse des coûts, respectivement à une analyse financière des trois variantes proposées par les parties requérantes ou encore à une étude de l’impact environnemental.
4.
recours abusif par le bourgmestre à l’utilité publique, les parties requérantes soutenant en substance à l’appui de ce moyen que la passerelle pour vélos faisant l’objet de l’autorisation de bâtir litigieuse ne répondrait pas à un but d’utilité publique mais serait contraire aux articles 11bis et 41 de l’ancienne Constitution.
5.
violation de l’article 19 du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, ci-
après « PAG », relatif aux zones forestières, dans la mesure où il y aurait dans une telle zone une interdiction absolue de construire, exception faite pour des aménagements et des constructions d’utilité publique, ce qui ne serait pas le cas de la passerelle, que les parties requérantes considèrent comme constituant une « lubie politique considérant qu’il serait appréciable politiquement parlant que de relier les quartiers Cents, Neudorf et Weimershof, sans qu’une étude sérieuse et approfondie des variantes possibles, n’ait été réalisée ».
6.
violation de l’article 6 du PAG applicable à la « zone de bâtiments et d’équipements publics » (ci-après « zone BEP »), les parties requérantes soutenant en substance que comme les plans indiqueraient la présence d’une loge dans les lieux, il ne serait pas exclu qu’il s’agisse d’un logement pour le gardien, et non d’un simple bureau, si l’ascenseur était destiné à fonctionner aussi pendant la nuit : or, un tel logement en zone BEP ne serait pas admis. Les parties requérantes maintiennent par ailleurs également dans le cadre de ce moyen que le projet litigieux ne serait pas compatible avec la notion d’utilité publique.
7.
violation des articles 15 et 16 du PAG relatifs aux zones de jardin familiaux et aux zones spéciales de cités jardinières, qui seraient traversées par le projet litigieux. Les parties requérantes soutiennent que si ces dispositions prévoiraient certes la possibilité de réaliser des « accès » carrossables et autres accès dans ces zones, elles ne permettraient pas la réalisation de « constructions », et encore moins d’une passerelle, tandis que la construction d’un pont érigé au-dessus des jardins ne garantirait pas une bonne intégration dans le site.
5 8.
violation de l’article 1er du PAG concernant la zone HAB-1, réservée aux maisons d’habitation unifamiliales, bi-familiales ou plurifamiliales, à l’exclusion notamment de toute construction qui par sa nature, son importance, son étendue, son volume et son aspect serait incompatibles avec la sécurité, la salubrité, la commodité et la tranquillité d’un quartier d’habitation ou dont l’intégration dans l’îlot ou dans la rue n’est pas garantie, ce qui serait pourtant le cas en l’espèce, puisque la passerelle litigieuse ne serait pas compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité du quartier d’habitation se situant en contrebas.
9.
violation des dispositions de la partie écrite du plan d’aménagement particulier « quartier existant » (« PAP-QE ») régissant le secteur HAB-1-c qui s’appliqueraient aussi au projet de passerelle, lequel, par conséquent, ne respecterait ni les prescriptions relatives à la hauteur maximale des constructions, ni celles relatives à la profondeur maximale de construction et aux marges de reculement.
10.
violation de l’obligation d’élaborer un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier » (« PAP-NQ »), puisque l’accès autorisé vers la passerelle et devant être réalisé sur la partie du domaine public communal longeant au nord la parcelle n° (P1) n’aurait pas été précédé de l’adoption d’un PAP-NQ, dans la mesure où la réalisation de l’accès vers la passerelle entraverait la viabilisation et partant la constructibilité de la parcelle n° (P1), de sorte à être contraire au schéma directeur « SD-WH 13 Rue des Bleuets », qui exigerait la viabilisation de cette parcelle dans le cadre d’un PAP NQ.
11.
violation de la loi du 7 janvier 2022 portant sur l’accessibilité à tous des lieux ouverts au public, des voies publiques et des bâtiments d’habitation collectifs, dans la mesure où le certificat de conformité établi par un contrôleur technique, exigé par l’article 8 (1), alinéa 2, de la loi du 7 janvier 2022 n’existerait pas.
Lors de l’audience publique du 10 juin 2025, le mandataire de parties requérantes a explicitement déclaré ne pas maintenir ce dernier moyen, partant y renoncer, au vu des explications fournies par la Ville de Luxembourg dans ses écrits déposés devant les juges du fond.
La Ville de Luxembourg conclut d’abord au rejet du recours au fond pour défaut d’intérêt à agir et, partant, en ce qui concerne le recours en obtention d’un sursis à exécution, pour défaut de tout préjudice grave et définitif dans le chef des parties requérantes.
Elle conclut encore à l’absence de tout moyen sérieux susceptible d’entrainer l’annulation de la décision déférée devant les juges du fond.
En vertu de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.
Ainsi, le sursis à exécution ne peut être institué que lorsque notamment (mais non exclusivement) l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif, un préjudice étant grave au sens de l’article 11 de la loi du 21 juin 1999 6 lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et doit dès lors être considéré comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Il est définitif lorsque le succès de la demande présentée au fond ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal, la seule réparation par équivalent du dommage qui se manifeste postérieurement à son annulation ou sa réformation ne pouvant être considérée à cet égard comme empêchant la réalisation d’un préjudice définitif.
Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.
L’affaire au fond a été introduite le 3 mai 2024 ; bien que les délais légaux d’instruction fixés par la loi du 21 juin 1999 soient tous arrivés à échéance et que les mémoires admissibles aient tous été échangés, l’affaire, compte tenu des délais de fixation actuels du tribunal administratif - elle se trouve actuellement fixée au 2 décembre 2026 pour plaidoiries -, ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.
Le fait que l’intégralité des mémoires ont été déposés n’est pas de nature à énerver ce constat. En effet, la disposition faisant interdiction au président du tribunal d’ordonner une mesure provisoire au cas où l’affaire est en état d’être plaidée s’inscrit étroitement dans le contexte du risque d’un préjudice grave et définitif, dans ce sens qu’en général, un tel préjudice ne risque pas de se produire au cas où l’affaire peut être plaidée au fond dans un délai rapproché. Il en découle cependant qu’il y a lieu d’excepter l’hypothèse dans laquelle un préjudice grave et définitif risque de se réaliser intégralement avant le jugement au fond, n’intervenant pas avant début 2027, ce qui, théoriquement, est le cas, - la question concrète de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif étant analysée ci-dessous - en l’espèce au vu du commencement des travaux et de leur probable achèvement avant le prononcé d’un jugement par les juges du fond.
Appréciation du risque de préjudice grave et définitif :
En ce qui concerne le préjudice grave et définitif, il convient d’abord de rappeler que l’existence du préjudice allégué, sa gravité et son caractère difficilement réparable, doivent s’apprécier au cas par cas, sur le vu de l’exposé du demandeur d’une mesure provisoire, ensemble les pièces justificatives produites par celui-ci1.
A cet égard, le soussigné tient en premier lieu à rappeler que pour pouvoir prétendre à l’instauration d’une mesure provisoire telle que prévue par l’article 11 de la loi du 21 juin 1999, le préjudice invoqué ne doit non seulement être grave et définitif, mais doit de surcroît être personnel2 ; en effet, conformément à la règle « nul ne plaide par procureur » un requérant n’est admis qu’à se prévaloir de la lésion de ses propres intérêts, et non pas de ceux d’individus non identifiés, ces derniers devant le cas échéant personnellement faire valoir la lésion de leurs droits devant le juge administratif. En effet, les citoyens ne sont pas recevables à se pourvoir dans l’intérêt de la collectivité à seule fin de faire respecter la règle de droit en général et de juger la loi violée ou la morale juridique méconnue, à moins d’admettre, en droit administratif, l’action populaire, ce qui n’est pas le cas en droit positif luxembourgeois actuel3.
1 Trib. adm. (prés.) 16 mai 2012, n° 30478 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 708.
2 Trib. adm (prés.) 10 août 2010, n° 27149 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 673, et autres références y citées ; voir aussi trib. adm. (prés). 9 avril 2021, n° 45830 du rôle.
3 Trib. adm. 18 mai 2015, n° 34275, confirmé par arrêt du 17 décembre 2015, n° 36488C, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 203.
7 Plus particulièrement, dans le domaine du cadre de vie, l’intérêt à agir des personnes physiques n’est généralement reconnu qu’aux riverains susceptibles d’être affectés personnellement et de façon directe par le projet, cet intérêt étant traditionnellement apprécié au regard de critères relativement restrictifs, à savoir, d’une part, la distance qui sépare leur lieu de résidence des actes et travaux litigieux et, d’autre part, la nature et l’importance de la nuisance. En revanche, les personnes qui souhaitent agir contre des projets qui affectent l’environnement de façon globale, sans que leur situation puisse être distinguée, par la force des choses, de celle d’autres citoyens moins vindicatifs, se voient le plus souvent éconduire par le juge administratif au motif que leur intérêt n’est pas « suffisamment » personnel et spécifique.
S’il peut certes être critiqué que le juge administratif est ouvert à la défense subjective et égoïste du cadre de vie de l’administré intéressé, mais qu’il en exclut les personnes désintéressées et altruistes, il n’en demeure pas moins qu’il appert à l’étude de la jurisprudence des juges du fond que dès lors que des requérants entendent défendre l’intérêt général et agissent, en quelque sorte, au nom de la population entière, leur action n’est pas recevable. En effet, selon les juges du fond, les tribunaux sont conçus et organisés pour résoudre les litiges individuels et non à juger et à sanctionner des agissements politiques visant la population entière. Des dysfonctionnements se manifestant sur ce terrain doivent trouver leur sanction, en théorie du moins, sur le plan politique, c’est-à-dire, en dernière analyse, lors d’élections générales où le citoyen est appelé à juger et à sanctionner l’action des gouvernants4.
L’établissement d’un tel lien direct et personnel exige ainsi une démarche probatoire :
la partie requérante ne peut pas se limiter à des imprécisions et à des généralités. Elle doit, au contraire, invoquer des éléments très concrets dont il ressort qu’elle subit ou risque de subir personnellement un préjudice grave difficilement réparable. En effet, il doit être possible, pour le juge, d’estimer avec une précision suffisante s’il existe un risque de préjudice grave difficilement réparable et, pour la partie défenderesse, de se défendre à l’égard des faits et des arguments allégués par la partie requérante.
Il en résulte que la reconnaissance d’un risque de préjudice grave et définitif dans le chef d’un requérant implique nécessairement l’existence dans son chef non seulement d’un intérêt à agir, mais encore la démonstration concrète d’un grief d’une intensité supérieure à celui requis pour justifier d’un « simple » intérêt à agir5, démonstration qui implique que le requérant donne concrètement des indications concernant la nature et l’ampleur du préjudice prévu, et qui démontrent le caractère difficilement réparable du préjudice6.
En présence d’une multitude de requérants, cette exigence d’un risque de préjudice grave et définitif implique encore nécessairement une individualisation concrète, au moins sommaire, des différents risques mis en avant au regard des différents requérants et de leurs situations particulières respectives, un requérant donné ne pouvant en effet pas se prévaloir de manière générale du risque de préjudice auquel serait confronté un autre requérant, voire un tiers.
4 Trib. adm. (prés.) 5 juillet 2005, n° 20035 du rôle ; trib. adm. 11 janvier 2012, n° 27576 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 205, et autres références y citées.
5 Voir trib. adm. (prés.) 26 avril 2021, n° 45861 du rôle.
6 Trib. adm. (prés.) 10 juillet 2013, n° 32820 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 715.
8 Par ailleurs, l’institution d’une mesure provisoire devant rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère, de sorte que le juge statuant au provisoire est en droit d’attendre du rédacteur de la requête, avocat et partant professionnel de la postulation, un acte de procédure intelligible et cohérent, ne requérant pas une analyse poussée aux seuls fins de comprendre la finalité et l’argumentation de la requête7.
De surcroît, lorsque la mesure sollicitée, telle qu’en l’espèce l’arrêt des travaux du projet litigieux, constitue une mesure grave, susceptible d’avoir des conséquences financières et économiques importantes pour le bénéficiaire de l’autorisation querellée et d’engager, le cas échéant, la responsabilité du magistrat appelé à prendre une telle mesure, ce dernier est en droit d’attendre que le requérant prenne explicitement position par rapport aux deux conditions prévues par la loi et, en particulier, convainque le juge du provisoire de la nécessité d’ordonner la mesure sollicitée afin d’empêcher précisément la survenance d’un dommage grave et irréversible dans son chef.
En tout état de cause, l’institution d’une mesure provisoire devant rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère, sévérité accentuée, telle qu’exposée ci-avant, lorsqu’il s’agit d’imposer le sursis à exécution d’une autorisation de construire.
Enfin, le préjudice grave et définitif est à apprécier par rapport à l’objet de la décision litigieuse, en ce que cet objet, ou la réalisation de cet objet, est de nature à nuire au requérant.
La Ville de Luxembourg conteste ainsi l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif dans le chef des différentes parties requérantes.
En ce qui concerne le (A), la Ville de Luxembourg relève que cette partie omettrait de préciser l’intérêt corporatif caractérisé et la lésion de cet éventuel intérêt corporatif, distinct de l’intérêt des autres parties requérantes et plus loin de l’intérêt général de la collectivité, qui giseraient à la base de sa démarche contentieuse, le (A) demeurant ainsi en défaut de démontrer que la défense des intérêts qu’elle poursuit à travers son action contentieuse ne se confond pas avec l’intérêt général de la collectivité dans son ensemble, tout comme il ne résulterait pas de la requête sous analyse que toutes ou partie des particuliers, autres parties à l’instance, seraient membres du (A), de sorte qu’il ne serait pas établi que tous ses membres seraient personnellement exposé à un risque de préjudice grave et définitif.
La Ville de Luxembourg critique ensuite la requête sous analyse qui invoquerait au titre d’un risque de préjudice grave et définitif « pêle-mêle et de manière purement abstraite et hypothétique » « un risque élevé d’éboulements de rochers à l’occasion des travaux de construction susceptibles de causer des dommages matériels et corporels, diminution de la luminosité », « un risque de chute d’objets », « une vue directe dans les jardins des maisons » par les usagers de la passerelle, une « dégradation de la nature » qui serait jusqu’à présent utilisée « à des fins récréatives par les résidents de Neudorf », une « atteinte à la vie privée et à l’intimité », des risques d’« éboulements de pente » et de « dommages aux maisons », la 7 Trib. adm. (prés.) 9 février 2018, n° 40722 du rôle ; trib. adm. prés. 15 septembre 2018, n° 41789 du rôle ; trib.
adm. prés. 16 novembre 2018, n° 41954 du rôle ; trib. adm. prés. 6 mars 2019, n° 42433 du rôle ; trib. adm. (prés.) 14 juin 2019, n° 43039 ; trib. adm. (prés.) 9 juin 2019, n° 43163 du rôle, 9 suppression d’une « vue libre » et un « blocage optique » qui renforcerait une « sensation d’oppression », une augmentation du « trafic », une « diminution de [la] valeur économique » de terrains et de maisons, une « pente de 20% » du tablier de la passerelle, des « dangers pour les cyclistes » en raison du trafic dans la rue des Bleuets, ou encore une « atteinte à la qualité de vie des résidents » pendant la réalisation des travaux de construction de l’ouvrage, sans que les différentes parties requérantes n’apportent le moindre commencement d’explication et de démonstration concernant les prétendus nuisances et risques mis en avant.
Il se serait par ailleurs avéré qu’une très grande majorité des parties requérantes résiderait à plusieurs centaines de mètres de la future passerelle, voire pour certaines d’entre elles à plusieurs kilomètres de ce futur ouvrage, dans des quartiers distincts de la Ville et dans des rues éloignées. Ainsi, sur les 49 parties requérantes, seulement moins de la moitié, soit 22 parties requérantes, résiderait a priori dans la rue de Neudorf, tandis que le domicile de certains de ces résidents de la rue de Neudorf serait encore très éloigné du lieu d’implantation prévu de la passerelle, de sorte que seules les parties requérantes sub 5), 7), 8), 9), 11), 23), 25), 28), 30), 34), 37) et 40) résideraient a priori à proximité de l’emplacement retenu pour la construction de la passerelle, lesquelles seraient les seules à avoir une vue sur la passerelle litigieuse, de sorte que ces parties requérantes ne pourraient pas se prévaloir d’un risque effectif de préjudice grave et définitif.
Il appert qu’en l’espèce, à l’instar de ce qui a été plaidé par la Ville de Luxembourg, que les requérants restent au niveau de leur requête en obtention d’un sursis à exécution en défaut d’identifier concrètement et clairement un risque de préjudice ayant une incidence directe, concrète et significative sur les conditions de vie individuelles et personnelles de chaque requérant, de sorte qu’à défaut d’une telle individualisation, ils doivent être considérés, au niveau de la requête en obtention d’un sursis à exécution, comme se prévalant en fait, de manière générale, de problèmes de voisinage, de problèmes environnementaux respectivement de qualité de vie, de circulation de risques d’éboulement affectant le quartier, sinon la rue de Neudorf, sinon de manière plus particulière de risques pour les cyclistes ou encore pour une association, à savoir l’association « (B) », non partie à l’instance, ces différents risques demeurant par ailleurs de simples allégations, non concrètement étayées.
Par ailleurs, ces risques tirés de la destruction, sinon de la dégradation alléguée du cadre de vie, résultant d’une circulation importante, que ce soit au pied de la tour-ascenseur ou dans la rue des Bleuets, ou encore de l’existence d’une pente de 20 % pour accéder à la passerelle, ce qui serait difficilement surmontable pour les cyclistes, s’inscrivent en partie dans l’intérêt général et ne sauraient, en tout état de cause, être qualifiés de préjudice personnel8.
Il convient encore de constater plus particulièrement que le risque d’éboulement tel que mis en avant n’est pas établi d’une quelconque manière, alors que les requérants auraient eu tout loisir, depuis l’introduction de leur recours au fond en date du 3 mai 2024, de faire établir une étude géotechnique attestant d’un tel risque.
En ce qui concerne l’atteinte dénoncée à une partie de la forêt de Neudorf, comportant un sentier pédestre et un parcours fitness, utilisées prétendument à des fins récréatives par les résidents de Neudorf, outre qu’aucun des requérants n’établit, voire seulement affirme, fréquenter personnellement ces lieux et que le sentier pédestre et le parcours fitness seraient directement impactés par le projet de construction, le fait que le projet litigieux rende par 8 Trib. adm. (prés.) 9 avril 2021, n° 45830 du rôle.
10 exemple les promenades plus difficiles, voire impossibles ou encore le fait que les promeneurs soient incommodés par le chantier futur, de telles incommodités ne sauraient être qualifiées d’incommodités graves au sens de l’article 11 de la loi du 21 juin 1999, étant rappelé à cet égard qu’un préjudice est grave au sens de cette même disposition légale, lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et doit dès lors être considéré comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques9. Le préjudice ainsi mis en avant, à savoir le bruit qu’engendrait les travaux autorisés ou encore les gênes occasionnées par ces mêmes travaux en ce qui concerne les habitudes de promenade des habitants du quartier de Neudorf, s’analyse dès lors en un simple préjudice d’agrément qui ne saurait justifier l’instauration d’une mesure de sauvegarde10.
Quant au fait, tel qu’allégué globalement, que les résidents seraient exposés pendant la phase du chantier à une atteinte à leur qualité de vie, notamment par le bruit, la poussière, les vibrations, et de l’impossibilité de se recréer dans la nature, il convient de rappeler qu’à défaut de toute circonstance particulière, l’existence d’un chantier ne saurait par définition pas être considérée comme représentant un préjudice grave, mais comme une sujétion mineure imposée à la collectivité, au nom de l’intérêt général poursuivi a priori par les travaux publics, relevant des inconvénients normaux de la vie sociale que sont tenus de supporter les administrés, et encore moins comme un préjudice définitif, un tel chantier n’ayant évidemment pas vocation à perdurer mais étant par définition temporaire11.
Si les requérants se prévalent encore de manière générale de leur qualité de voisin plus ou moins proche du projet - certains requérants habitant dans des quartiers non directement impactés par le projet de passerelle et à ce à plus d’un kilomètre de ce projet - il convient ensuite à cet égard de relever en sus que d’après la jurisprudence récente12, la seule et simple qualité de voisin ne suffit en tout état de cause pas à établir l’intérêt pour agir - encore que cette notion soit plus large que celle du préjudice grave et définitif - contre un permis de construire, alors que pour disposer d’un intérêt à agir suffisant devant les juridictions administratives, il doit établir une atteinte aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de sa propre propriété13 ; c’est en effet au regard de l’incidence concrète14 du projet sur la situation du demandeur que l’intérêt pour agir de ce demandeur devant le juge de l’excès de pouvoir doit être apprécié. En effet, le juge tiendra compte pour apprécier la qualité de voisins d’une construction autorisée par le permis de construire querellé, à la fois, de la distance entre le projet et leurs domiciles respectifs, de la nature et de l’importance du projet, ainsi que de la configuration des lieux. La seule situation de voisin, même direct, n’implique dès lors pas, ipso facto, automatiquement, l’existence d’un préjudice grave et définitif.
Dès lors, faute de toute information détaillée y relativement, le risque d’un préjudice grave et définitif n’est par conséquent pas justifié à suffisance de droit au niveau de la requête en obtention d’un sursis à exécution.
9 Trib. adm. (prés.) 28mai 2001, n°13446 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 704 et les autres références y citées.
10 Trib. adm. (prés.) 9 avril 20212, n° 2021, n° 45830 du rôle.
11 Trib. adm. (prés.) 9 novembre 2016, n° 38648 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 749.
12 Cour adm. 12 octobre 2017, n° 39490C du rôle, ainsi que 17 octobre 2017, n° 39527C et 39542C du rôle.
13 Voir trib. adm. 21 février 2018, n° 38029 du rôle.
14 Cour adm. 12 décembre 2017, n° 39672C du rôle.
11 A l’audience des plaidoiries du 13 juin 2025, le mandataire des requérants a toutefois précisé quels requérants seraient directement et immédiatement impactés par le projet litigieux, lequel surplomberait quasiment leurs habitations respectives, de sorte qu’ils seraient, en tant que tels, exposés à un risque de préjudice grave et définitif résultant d’une perte de vue, d’ensoleillement et d’intimité, tiré du fait que leurs habitations seraient surplombés par un élément massif et illuminé la nuit, ainsi que par un risque lié à une potentielle chute de rocher sur leurs propriétés.
Il s’agirait en l’occurrence des requérants figurant sous les n° 3, 5, 7, 8, 9, 11, 17 et 18, 23, 25, 27, 30, 33, 34 et 40, à savoir, exception faite de la requérante sub 3) habitant dans la rue des Bleuets, de requérants habitant tous la rue de Neudorf, respectivement aux numéros … de cette rue, sis tous aux abords du projet de passerelle, dont les bâtiments techniques et le pylône se situent au n° 149 de la rue de Neudorf.
Le mandataire des parties requérantes a précisé, à l’égard de ces requérants déterminés, le préjudice pressenti comme résultant d’une perte d’ensoleillement, d’une perte de vue par l’existence d’un ouvrage massif surplombant leurs maisons respectives, d’un risque de chute de rochers ou risque d’éboulement, ainsi que d’une perte d’intimité, les requérants s’étant encore prévalus d’un risque de chute d’objets.
Le risque de chute de rochers ayant été écarté ci-avant comme non étayé, il convient d’analyser les autres risques de préjudice ainsi spécifiés par rapport à ces requérants déterminés.
A cet égard, tel que soutenu par la Ville de Luxembourg, force est de constater que contrairement aux affirmations contenues dans le recours, aucune parcelle accueillant une maison d’habitation existante, et a fortiori aucun des terrains situés à l’adresse de l’une des parties requérantes définies ci-dessus, n’est situé verticalement directement en dessous de l’emplacement prévu pour la passerelle et son tablier ; cette circonstance n’est toutefois pas de nature à écarter le préjudice dénoncé résultant d’une perte d’ensoleillement, de vue, ou encore d’intimité, celui-ci pouvant également impacter de manière oblique sur les différentes propriétés.
Il appert ensuite que de manière générale la vue et l’ensoleillement ne sauraient constituer des droits acquis, sauf à rendre impossible toute évolution du tissu construit, même s’il n’est pas urbain15, de sorte qu’une diminution de la vue ou de l’ensoleillement dont profitait auparavant une propriété ne saurait, per se et automatiquement, constituer un préjudice grave.
En effet, nul n’est assuré de conserver son environnement, en termes de vue et d’ensoleillement, et ce n’est que s’il peut être démontré que la perte d’ensoleillement ou de vue est significative et présente un caractère anormal par rapport aux inconvénients normaux du voisinage qu’un tel préjudice grave et définitif peut être retenu.
Plus précisément, une simple privation ou altération de la vue préexistante ne constitue pas une atteinte grave aux intérêts des requérants, la visibilité, pour être retenue comme constituant un préjudice grave et définitif, devant être telle qu’elle affecte réellement les conditions de jouissance des biens dont les requérants sont propriétaires, compte tenu de la distance de l’ouvrage, de la configuration des lieux et de celle de ces biens.
15 Cour d’appel de Toulouse, 1ère chambre, 17 septembre 1991, n°2330/89 ; trib. adm. (prés.) 7 décembre 2020, n° 45232 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 739, et les autres références y citées.
12 En l’espèce, les requérants, dont les propriétés respectives sont toutes sises en zones constructibles, devaient s’attendre à la réalisation d’une construction dans leur voisinage, de sorte qu’une perte d’ensoleillement, de vue ou d’intimité résultant d’une construction usuelle, telle qu’une maison d’habitation uni- ou plurifamiliale, n’est pas de nature à constituer un préjudice grave et définitif. Une telle conclusion ne signifie toutefois pas que tout inconvénient lié à la présence d’une nouvelle construction doive être nécessairement considéré comme normal, mais exige un degré d’incommodité supérieur à la normale, dépassant les inconvénients normaux du voisinage et de l’existence d’une construction usuelle dans celui-ci.
Concrètement, en l’espèce, cela signifie que les requérants, s’ils ne sauraient se plaindre d’une construction normalement admissible et partant prévisible par application des règles d’urbanisme, se trouvent toutefois confrontés à un projet de construction comportant une passerelle, certes de construction légère et diaphane, au tablier d’une largeur de quelques 6 mètres et d’une longueur totale de 200 mètres, ainsi qu’un pylône et une tour-ascenseur d’une hauteur de 60 mètres, en rupture totale avec le bâti environnant de la rue de Neudorf et impactant de manière certaine sur la vue, jusqu’alors dégagée, des requérants vers le ciel.
La réalisation de ce projet aura pour effet de modifier le cadre de vie des requérants déterminés ci-dessus de manière conséquente et excède les inconvénients normaux du voisinage dans la mesure où il génère une perte d’intimité importante et une perte d’ensoleillement n’ayant pas été prévisible à cet endroit de la rue de Neudorf.
Plus particulièrement, il convient de retenir l’existence d’un risque réel de perte d’intimité due à la vue directe, encore qu’oblique, à partir de la passerelle en surplomb vers les jardins, terrasses et maisons des requérants définis ci-dessus, susceptible d’entrainer une diminution sensible des qualités résidentielles du voisinage direct. Si, comme relevé ci-avant, les requérants résidant dans le rue de Neudorf à proximité du projet de construction litigieux ne sauraient prétendre, dans un quartier résidentiel construit de manière relativement dense, à la pérennité de la situation actuelle, et devraient admettre une construction plus importante que les constructions sises dans leur environnement immédiat, engendrant nécessairement une vue moins dégagée et une perte relative de luminosité, ils ne sauraient toutefois être présumés devoir accepter la construction d’une passerelle, certes aérienne, mais néanmoins d’un gabarit conséquent, à une hauteur de quelques 60 mètres au-dessus de la rue de Neudorf, ainsi que les nuisances en résultant, dépassant manifestement les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société.
Par ailleurs, au vu de la jurisprudence des juridictions judiciaires qui refusent d’ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d’une autorisation administrative annulée dans la suite16, le préjudice tel allégué serait encore définitif au cas où la construction de la passerelle et de ses bâtiments annexes serait achevée sous le couvert de l’autorisation attaquée, alors même qu’elle serait annulée, puisque le caractère définitif d’un préjudice est établi dès lors que le succès de la demande au fond, c’est-à-dire un jugement d’annulation ou de réformation, ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal : en d’autres termes, l’existence d’un préjudice définitif, dans le sens d’un préjudice pas ou difficilement réparable, est établie et retenue comme telle que si le risque allégué est réel et n’est pas seulement aléatoire et que s’il résulte des circonstances concrètes de fait exposées par le requérant que l’exécution de la 16 Voir notamment Cour d’appel 30 juin 1993, n° 13662 du rôle ; 11 janvier 1995, n° 15963 du rôle.
13 décision attaquée risque de provoquer des effets irréversibles, qui ne pourraient être annihilés en cas d’annulation ultérieure.
Il suit de ce qui précède que le risque de préjudice allégué par les requérants figurant sous les n° 5, 7, 8, 9, 11, 17 et 18, 23, 25, 27, 30, 33, 34 et 40 de la requête en obtention d’une mesure provisoire est grave et définitif au sens de l’article 11 de la loi du 21 juin 1999.
Cette conclusion en revanche ne s’applique pas à la requérante figurant sub 3) de la requête, étant une résidante de la rue des Bleuets, et ne pouvant dès lors pas se prévaloir d’une perte d’ensoleillement, de vue et d’intimité du fait de la présence de la passerelle devant surplomber la rue de Neudorf.
Appréciation sommaire des moyens Il convient ensuite de rappeler que, concernant les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre l’autorisation de construire querellée, le juge appelé à en apprécier le caractère sérieux ne saurait les analyser et discuter à fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite des moyens présentés, et accorder le sursis, respectivement la mesure de sauvegarde lorsqu’il paraît, en l’état de l’instruction, de nature à pouvoir entraîner l’annulation ou la réformation de la décision critiquée, étant rappelé que comme le sursis d’exécution, respectivement l’institution d’une mesure de sauvegarde doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’ils constituent une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.
L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.
Ainsi, le juge des référés est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le requérant apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation de la décision attaquée.
La compétence du président du tribunal est restreinte à des mesures essentiellement provisoires et ne saurait en aucun cas porter préjudice au principal. Il doit s’abstenir de préjuger les éléments soumis à l’appréciation ultérieure du tribunal statuant au fond, ce qui implique qu’il doit s’abstenir de prendre position de manière péremptoire. Il doit donc se borner à apprécier si les chances de voir déclarer recevable le recours au fond paraissent sérieuses, au vu des éléments produits devant lui. Au niveau de l’examen des moyens d’annulation invoqués à l’appui du recours au fond, l’examen de ses chances de succès appelle le juge administratif saisi de conclusions à des fins de sursis à exécution, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et à vérifier si un des 14 moyens soulevés par la partie requérante apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation voire la réformation de la décision critiquée.
Il doit pour cela prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l’issue du litige - que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec - n’est plus affectée d’un aléa.
1.
En ce qui concerne la violation du principe de collaboration, principe concrétisé par l’article 1er de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse ensemble, selon les parties requérantes, avec l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, force est de constater, au terme d’un examen nécessairement sommaire, que ce principe de collaboration procédurale est seulement énoncé à l’article 1er, alinéa 3 de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse, mais se trouve précisé à travers plusieurs dispositions du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, telles que l’article 3, imposant à toute autorité administrative d’appliquer le droit applicable à l’affaire dont elle est saisie, l’article 6, prévoyant une obligation de motivation des décisions administratives individuelles, ou encore l’article 9, obligeant, sauf l’hypothèse d’un péril en la demeure, l’autorité qui se propose de révoquer ou de modifier d’office pour l’avenir une décision ayant créé ou reconnu des droits à une partie, ou qui se propose de prendre une décision en dehors d’une initiative de la partie concernée, d’informer de son intention la partie concernée en lui communiquant les éléments de fait et de droit qui l’amènent à agir.
L’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, plus spécifiquement invoqué par les parties requérantes, aux termes duquel « lorsqu’une décision administrative est susceptible d’affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l’autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens. Dans la mesure du possible, l’autorité administrative doit rendre publique l’ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision. Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations. La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations », ne paraît en revanche pas porter sur le principe de collaboration, mais sur l’obligation d’information préalable à la prise d’une décision administrative.
Au-delà de ce constat, il appert que la Ville de Luxembourg, représentée par son collège des bourgmestre et échevins, a soumis le projet litigieux, en sa qualité de maître d’ouvrage de celui-ci, à une très large publicité, permettant ainsi aux habitants intéressés, dont les parties requérantes, à faire valoir leurs revendications, observations et inquiétudes à un stade précoce, étant relevé que le principe de collaboration ne signifie pas nécessairement comporter une obligation de suivre, partiellement ou totalement, ces revendications et observations.
Il n’appert par ailleurs pas qu’une éventuelle violation du principe de collaboration au niveau du maître d’ouvrage, même si celui-ci est comme en l’espèce une entité publique telle que la Ville de Luxembourg, soit de nature à entrainer une illégalité de l’autorisation prise par le bourgmestre dans le cadre de l’article 37, alinéa 2, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », aux termes duquel « L’autorisation n’est accordée que si les travaux sont conformes au plan ou au projet d’aménagement général et, le cas échéant, au plan d’aménagement particulier «nouveau quartier», respectivement au plan ou projet d’aménagement particulier « quartier existant » et au règlement sur les bâtisses, les voies publiques et les sites », 15 disposition interprétée de manière constante par la jurisprudence comme limitant le pouvoir du bourgmestre à l’occasion de la délivrance d’une autorisation de construire à la vérification de la conformité du projet aux dispositions règlementaires communales, à l’exclusion de toute considération y étrangère.
Dans la mesure où le moyen des parties requérantes tend toutefois à se prévaloir d’un défaut d’information préalable à la prise par le bourgmestre de l’autorisation de bâtir déférée, il apparait à première vue que la demande d’autorisation de bâtir a fait l’objet d’une information ex ante des tiers intéressés en bonne et due forme, notamment par le biais d’un affichage régulier de la demande, que les tiers intéressés qui le désiraient ont pu consulter le dossier de la demande d’autorisation et qu’ils ont eu de larges possibilités de faire valoir leurs observations préalablement à la prise de décision, dont un certain nombre des actuels requérants, dont notamment le (A).
Le moyen en question n’est dès lors en l’état actuel pas suffisamment sérieux pour justifier le sursis à exécution sollicité.
2.
Le moyen basé sur une violation par l’autorisation de bâtir querellée du principe de précaution, dans la mesure où le bourgmestre n’aurait pas tenu compte, lors de la délivrance de l’autorisation en question, des risques d’éboulement et de chutes de rochers susceptibles de causer des dommages aux immeubles situés en contre-bas des aménagements à réaliser au niveau des plateaux de Weimershaff et du Cents, ne paraît pas non plus, au vu de la jurisprudence, comme présentant le sérieux requis.
En effet, il résulte explicitement d’une jurisprudence récente17 que si le bourgmestre est chargé de l’exécution des lois et règlements de police et s’il lui incombe de façon générale, dans le cadre de sa mission d’exécution des lois de police, de faire jouir les habitants de la commune des avantages d’une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques, il n’en reste pas moins que lors de la délivrance d’une autorisation de construire, il est appelé, en application de l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004, à vérifier la conformité d’une demande d’autorisation uniquement par rapport aux plans d’aménagement et au règlement sur les bâtisses de la commune et il ne lui appartient pas, sous ce rapport, de prendre en outre en considération, notamment, le principe de précaution18.
En d’autres termes, le bourgmestre ne saurait se prévaloir du principe de précaution pour refuser une autorisation de construire pour un projet de construction conforme à la réglementation urbanistique communale19.
Enfin, il appert, au terme d’une analyse nécessairement superficielle, que la substance de ce moyen, réside dans la crainte, par les divers requérants, d’un préjudice apporté à leurs propriétés par la réalisation de la construction autorisée ; plus précisément, les requérants ne semblent pas critiquer à travers ce moyen précis la légalité même de l’autorisation par rapport aux législation et règlementation applicables, mais les effets concrets de la réalisation de la construction.
17 Trib. adm. 27 janvier 2025, n° 48344 du rôle.
18 Cour adm., 7 mars 2017, n° 38339C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Urbanisme, n° 957 et l’autre référence y citée 19 Trib. adm. 27 janvier 2025, n° 48344 du rôle.
16 A cet égard, il convient d’abord de souligner que la loi ne permet pas au président du tribunal administratif de prendre des mesures ayant pour objet des droits civils20.
Il convient ensuite de souligner qu’il résulte de la jurisprudence que le bourgmestre, à l’occasion de la délivrance d’une autorisation de construire, ne doit prendre en considération que les prescriptions administratives et qu’il ne lui appartient pas de prendre en compte des considérations d’intérêt privé sans commettre un excès de pouvoir. Le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de construire, se prononcerait donc uniquement du point de vue administratif, l’exécution concrète de l’installation, ainsi que les litiges sur le droit de propriété restant l’affaire des bénéficiaires de l’autorisation21.
Cette conclusion se dégagerait encore du fait que le permis de construire est délivré sous réserve des droits des tiers : les droits généralement quelconques des tiers étant réservés, il leur appartient de les faire valoir devant le juge compétent, à savoir les juridictions civiles.
Ainsi, le bourgmestre, en délivrant l’autorisation de bâtir, constate dans la forme passive d’une autorisation que la réalisation du projet est permise. Cet acte d’administration ne peut avoir pour l’administration aucune conséquence civile, parce que l’administration ignore le point de droit civil et qu’elle ne prend aucune responsabilité technique22.
3.
En ce qui concerne la violation du principe de bonne administration et notamment du principe de minutie, le bourgmestre se voyant reprocher d’avoir délivré l’autorisation litigieuse sans avoir fait procéder à une étude très approfondie des risques et des mesures de précaution et de protection à envisager et sans avoir fait procéder à une analyse des coûts, respectivement à une analyse financière des trois variantes proposées par les parties requérantes ou encore à une étude de l’impact environnemental, il résulte là également de la jurisprudence récente précitée23 que le principe général de bonne administration en soi n’a pas de contenu précis et ne peut sans indication plus circonstanciée pas fonder l’annulation d’un acte administratif.
4.
Les parties requérantes reprochent ensuite au bourgmestre de recourir abusivement à l’utilité publique, les parties requérantes soutenant en substance à l’appui de ce moyen que la passerelle pour vélos faisant l’objet de l’autorisation de bâtir litigieuse ne répondrait pas à un but d’utilité publique, mais serait contraire aux articles 11bis (sic) et 41 de l’ancienne Constitution.
Il résulte à cet égard des explications de la Ville de Luxembourg que la passerelle litigieuse réservée aux piétons et cyclistes serait destinée à faciliter significativement la connexion entre le quartier de Neudorf, celui du Cents et celui du Kirchberg, en permettant en particulier aux habitants du quartier de Neudorf à accéder plus facilement, par l’ascenseur desservant la passerelle, aux quartiers voisins situés sur les deux plateaux enserrant la rue de Neudorf et notamment au réseau de tram circulant à quelques centaines de mètres de l’accès à la passerelle sise du côté Kirchberg, permettant aux habitants du quartier de Neudorf encore par ce moyen à accéder aisément à l’ensemble du territoire communal, du Findel à la Cloche d’Or, sans recourir à des moyens de transport individuels.
20 Trib. adm. (prés.) 24 septembre 2008, n° 24817 du rôle.
21 Trib. adm. 8 novembre 2012, n°28985 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Urbanisme, n° 958.
22 Trib. adm. 6 octobre 2010 , n° 25782; 25786 à 25788 du rôle, confirmé par Cour adm. 22 mars 2011, n° 27480C à 27483Cdu rôle, Pas. adm. 2024, V° Urbanisme, n° 972 et les autres références y citées.
23 Trib. adm. 27 janvier 2025, n° 48344 du rôle.
17 Il ne paraît dès lors guère contestable que la passerelle litigieuse poursuit un but d’utilité publique.
Dans la mesure où les parties requérantes entendent ensuite s’emparer de la théorie du bilan, pour reprocher au bourgmestre de ne pas avoir veillé à trouver un équilibre entre deux intérêts collectifs, à savoir, d’une part, l’éventuelle utilité publique intérêt général dont pourrait relever une passerelle dédiée à la mobilité douce, et, d’autre part, la protection des droits fondamentaux des parties requérantes, et notamment de leur droit à la protection de l’environnement humain et naturel, il n’appert toutefois pas, au terme d’un examen sommaire de ce moyen, que le bourgmestre, en privilégiant le projet d’utilité publique de la passerelle au détriment éventuel de l’intérêt collectif défendu par les parties requérantes, ait porté atteinte au principe de proportionnalité ou au principe de l’égalité devant la loi, étant rappelé en particulier que selon la jurisprudence, il conviendrait d’abord de pouvoir dégager deux situations comparables par rapport auxquelles une inégalité de traitement puisse être utilement invoquée pour que le principe d’égalité puisse être valablement mis en œuvre 24.
Ledit moyen ne présente dès lors pas un caractère suffisamment sérieux pour fonder la mesure sollicitée.
5.
Les parties requérantes entendent encore s’emparer d’une violation de l’article 19 du PAG, relatif aux zones forestières, dans la mesure où il y aurait dans une telle zone une interdiction absolue de construire, exception faite pour des aménagements et des constructions d’utilité publique, ce qui ne serait pas le cas de la passerelle.
Le soussigné vient toutefois de retenir ci-avant au provisoire que la passerelle litigieuse semble bien relever d’un but d’utilité publique.
Or, conformément à l’article 19, alinéa 2, du PAG, « Dans les zones forestières, constituant la zone verte au sens de la loi sur la protection de la nature et des ressources naturelles, il y a interdiction absolue de construire à l’exception des bâtiments et installations nécessaires à l’exploitation forestière et cynégétique ainsi que des aménagements et des constructions d’utilité publique à réaliser par la Ville, l’Etat ou des gestionnaires de réseaux, à condition que leur implantation se limite au strict minimum, qu’un soin particulier soit apporté à leur intégration dans le site et sans préjudice de l’autorisation du ministre ayant la protection de la nature et des ressources naturelles dans ses attributions », de sorte qu’il y a lieu d’en déduire au provisoire que « des aménagements et des constructions d’utilité publique à réaliser par la Ville, l’Etat ou des gestionnaires de réseaux » sont autorisables en la zone forestière.
Dès lors, la passerelle, relevant a priori d’un but d’utilité publique, réalisée par la Ville de Luxembourg, semble bien rentrer dans les prévisions de l’article 19, alinéa 2, du PAG, tandis que, tel que relevé par la Ville de Luxembourg, son intégration dans le site forestier semble être couverte et avalisée par l’arrêté du 21 février 2023 du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable ayant autorisé la Ville de Luxembourg à procéder à une destruction et à réaliser des mesures compensatoires en vertu de la loi modifiée du 18 juillet 24 Cour adm. 22 juin 2017, n° 39166C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Lois et règlements, n° 5 ; voir aussi en ce sens trib. adm. 21 juin 2024, n° 49658 du rôle, et trib. adm. 13 janvier 2025, n° 49251 du rôle.
18 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ainsi qu’à construire la passerelle litigieuse.
Cette illégalité soulevée par les parties requérantes ne paraît dès lors pas comme présentant à ce stade le sérieux requis.
6.
Il en va de même en ce qui concerne le moyen basé sur une violation de l’article 6 du PAG applicable à la zone BEP. Dans ce contexte, les parties requérantes soutiennent en substance que comme les plans indiqueraient la présence d’une loge dans les lieux, il ne serait pas exclu qu’il s’agisse d’un logement pour le gardien, et non d’un simple bureau, qui ne serait pas admis en zone BEP.
Or, aux termes de l’article 6 du PAG, « les zones de bâtiments et d’équipements publics sont réservées aux constructions, aux établissements, aux équipements et aux aménagements d’intérêt général ou d’utilité publique et sont destinées à satisfaire des besoins collectifs.
Ces zones sont notamment réservées :
a) aux édifices d’intérêt général ou d’utilité publique avec leurs équipements et infrastructures nécessaires ; bâtiments et administrations publics, établissements scolaires et parascolaires, crèches, maisons relais, églises, théâtres, halles polyvalentes, centres pour activités culturelles et sportives, parkings publics et de quartier. […] Y sont admis des logements de services ainsi que les logements situés dans les structures médicales ou paramédicales, les maisons de retraite, les internats, les logements pour étudiants, les logements locatifs sociaux ».
Le soussigné venant de retenir ci-avant au provisoire que la passerelle litigieuse semble bien relever d’un but d’utilité publique, tandis qu’en tout état de cause un « logement de services » serait admissible en zone BEP, le moyen afférent ne présente pas le sérieux nécessaire.
Par ailleurs, il résulte des plans annexés à l’autorisation de bâtir litigieuse, et plus particulièrement du plan « Rez-de-chaussée - Bâtiment technique » que le bâtiment technique projeté sur la parcelle n° 574/5610, classée en zone BEP, est destinée à accueillir notamment l’ascenseur-tour, un local pour le gardien, des toilettes publiques, des locaux techniques et une aire de jeux, de sorte à être à première vue conforme à la destination prévue à l’article 6 du PAG.
7.
En ce qui concerne la violation alléguée des articles 15 et 16 du PAG relatifs aux zones de jardin familiaux et aux zones spéciales de cités jardinières, qui seraient traversées par le projet litigieux, il échet d’abord de constater qu’il n’appert pas, à l’étude des plans versés en cause et des explications de la Ville de Luxembourg, que le projet de construction litigieux touche, matériellement, l’une de ces deux zones. Plus précisément, il n’appert pas que les éléments structurels de l’ouvrage, à savoir les deux culées, le pylône central avec la tour-
ascenseur, et le tablier, seront construits sur les terrains classés dans ces zones.
19 Si les parties requérantes estiment que le fait que des éléments du projet de construction passeraient « au-dessus » de ces zones ferait de ces éléments des éléments soumis aux dispositions de ces zones, il échet de retenir qu’à première vue, la règlementation urbanistique a pour objet de régler notamment le mode et le degré d’utilisation du sol, impliquant a priori la nécessité d’un ancrage au sol, que la construction ou aménagement soit enterrée (sous-sol) ou construite hors-sol, l’article 5, alinéa 1er, de la loi du 19 juillet 2004, tel qu’invoqué par la Ville de Luxembourg, définissant en effet le PAG comme un ensemble de prescriptions graphiques et écrites à caractère réglementaire qui « arrêtent l’utilisation du sol ».
La question de savoir si un projet de construction enjambant un zonage déterminé à une certaine altitude, sans ancrage matériel dans cette zone, constitue pour sa part une question de droit à première vue inédite.
Or, ne présente en revanche pas un caractère sérieux suffisant, un moyen soulevant un simple doute quant à l’issue du recours, un moyen basé sur une jurisprudence fluctuante ou minoritaire ou lorsqu’il n’existe pas de jurisprudence qui permettrait de répondre aisément aux questions devant être tranchées en l’espèce par le jugement à rendre ultérieurement sur le fond, surtout lorsqu’il s’agit de questions de principe inédites qui ne sauraient être tranchées, pour la première fois, par le juge des référés, mais requièrent un examen approfondi dans le cadre de la procédure principale : le juge du référé est réellement le juge de l’évidence car il est cantonné à une position, sur ce problème, d’archiviste se contentant de reprendre à son compte une position adoptée par une autre juridiction25, tout comme il est réduit à un office de simple spectateur réduit au constat de l’existence d’un moyen propre à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision26.
L’office du juge des référés s’avère limité dans sa recherche du doute sérieux et ne se détermine qu’en l’état de la jurisprudence27 ; il ne lui appartient pas de dégager de nouveaux principes généraux du droit28, ni même de se prononcer dans un sens contraire à la jurisprudence établie29.
Le moyen en question n’est dès lors en l’état actuel pas suffisamment sérieux pour justifier le sursis à exécution sollicité.
Au-delà de ce constat, il apparaît encore à première vue que contrairement aux affirmations des parties requérantes, tant la zone de jardins familiaux (article 15 du PAG) que la zone spéciale de cités jardinières (article 16 du PAG) permettent l’« aménagement d’accès carrossables et autres accès » ; si les parties requérantes font certes plaider que de tels accès se limiteraient aux seuls accès desservant spécifiquement les jardins, il convient toutefois de rappeler que dans la mesure où les dispositions d’une réglementation d’urbanisme limitent l’usage du droit de propriété, elles sont d’interprétation stricte30, de sorte qu’à défaut d’une restriction dans le sens voulu par les parties requérantes découlant de la règlementation 25 J. Piasecki, L’office du juge administratif des référés : Entre mutations et continuité jurisprudentielle. Droit, Université du Sud Toulon Var, 2008, n° 337, p.197.
26 Idem, n°312, p.181.
27 CE fr., 19 février 2003, Cave coopérative Les remparts, n° 251495.
28 CE fr., ord. réf., 21 octobre 2005, Association Aides et autres, n° 285577.
29 Pour une solution implicite : CE fr., 9 décembre 2005, Ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer c/ Vidot, Rec. p. 704 et 941 30 Cour adm. 26 janvier 2006, n° 20285C du rôle, Pas. adm. 2024, V° Urbanisme, n° 32, et les autres références y citées.
20 urbanistique applicable, il n’appert pas qu’il y ait lieu de limiter l’« aménagement d’accès carrossables et autres accès » aux seuls accès desservant exclusivement les jardins.
8.
Les parties requérantes considèrent ensuite que l’autorisation de construire litigieuse violerait l’article 1er, alinéa 5, du PAG concernant la zone HAB-1, réservée aux maisons d’habitation unifamiliales, bi-familiales ou plurifamiliales, dans la mesure où la passerelle litigieuse ne serait pas compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité du quartier se situant en contrebas.
Comme retenu ci-avant, les éléments structurels du projet trouvent exclusivement ancrage en la zone BEP et non dans la zone HAB-1, uniquement surplombée par la passerelle.
Le moyen basé sur une application directe de dispositions d’un zonage déterminé uniquement surplombé par un ouvrage, sans que celui-ci n’y ait un quelconque ancrage au sol, ne constitue, comme retenu ci-dessus, pas un moyen sérieux.
9.
Les parties requérantes s’emparent encore d’une violation des dispositions de la partie écrite du PAP-QE régissant le secteur HAB-1-c qui s’appliqueraient aussi au projet de passerelle, lequel, par conséquent, ne respecterait ni les prescriptions relatives à la hauteur maximale des constructions, ni celles relatives à la profondeur maximale de construction et aux marges de reculement.
Il appert toutefois là également que le projet de construction litigieux, pris en ses différents éléments structurels, à savoir les deux culées, le pylône central avec la tour-
ascenseur, et le tablier, seront construits en zone HAB-1, ces éléments étant en effet construits comme relevé ci-avant dans une zone BEP.
Le moyen basé sur une application directe de dispositions d’un zonage déterminé uniquement surplombé par un ouvrage à ce dernier, sans que celui-ci n’y ait un quelconque ancrage au sol, ne constitue, comme retenu ci-dessus, pas un moyen sérieux.
10.
Les parties requérantes s’emparent enfin d’une violation de l’obligation d’élaborer un PAP-NQ, puisque l’accès autorisé vers la passerelle et devant être réalisé sur la partie du domaine public communal longeant au nord la parcelle n° (P1) n’aurait pas été précédé de l’adoption d’un PAP-NQ, dans la mesure où la réalisation de l’accès vers la passerelle entraverait la viabilisation et partant la constructibilité de la parcelle n° (P1), de sorte à être contraire au schéma directeur « SD-WH 13 Rue des Bleuets », qui exigerait la viabilisation de cette parcelle dans le cadre d’un PAP QE.
Il est constant en cause que la parcelle n° (P1) ainsi concernée appartient à la requérante figurant sub 3) de la requête tendant à l’obtention d’un sursis à exécution, habitant la rue des Bleuets, et par rapport à laquelle une absence de préjudice grave et définitif étayé et individualisé a été retenue.
Il y a ensuite lieu de rappeler que la demande de suspension a pour objet d’empêcher, temporairement, la survenance d’un préjudice grave et définitif ; les effets de la suspension étant d’interdire à l’auteur de l’acte de poursuivre l’exécution de la décision suspendue. Par ailleurs, comme le sursis à exécution doit rester une procédure exceptionnelle, puisqu’il constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des 21 décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.
Il en résulte qu’un sursis à exécution ne saurait être ordonné que si le préjudice invoqué par le requérant résulte de l’exécution immédiate de l’acte attaqué, la condition légale n’étant en effet pas remplie si le préjudice ne trouve pas sa cause dans l’exécution de l’acte attaqué :
en d’autres termes, la décision contestée doit porter préjudice ou atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, aux intérêts du requérant.
Dans cette optique, propre au cadre strict et exceptionnel des demandes en obtention de mesures provisoires devant le juge administratif, ce dernier n’est pas tenu d’examiner tous les moyens du requérant, en ce compris des moyens dépourvus de toute incidence sur la situation concrète de celui-ci, mais peut se limiter à analyser sommairement les seuls moyens du requérant en relation directe avec le préjudice grave et irréversible allégué, le propre du référé administratif étant, comme relevé ci-avant, précisément d’éviter à un administré la survenance d’un préjudice grave et irréparable. En d’autres termes, le juge du provisoire n’est pas tenu d’examiner des moyens qui éventuellement pourraient aboutir à l’annulation de la décision déférée, mais qui, s’agissant de moyens sans incidence de fait ou de droit sur la situation de l’administré, ne présentent aucun lien avec le préjudice allégué qu’il conviendrait d’éviter d’urgence.
En l’espèce, si le moyen sous analyse concerne certes, directement, la parcelle n° (P1) et dès lors la partie requérante figurant sub 3) de la requête tendant à l’obtention d’un sursis à exécution, il ne concerne pas les parties requérantes par rapport auxquelles un risque de préjudice grave et définitif a été retenu ci-avant.
S’agissant dès lors d’un moyen sans incidence de fait ou de droit sur la situation de ces parties requérantes ayant valablement fait valoir un risque de préjudice grave et définitif, à savoir des habitants définis de la rue de Neudorf, il s’agit d’un moyen ne présentant aucun lien avec le préjudice allégué, résultant d’une perte de lumière, de vue et d’intimité, qu’il conviendrait d’éviter d’urgence, de sorte que ce moyen ne saurait être examiné dans le cadre des présentes.
Le soussigné, sur base d’un examen nécessairement sommaire, arrive dès lors à la conclusion provisoire que les différents moyens d’annulation tels qu’avancés par les parties requérantes ayant valablement fait valoir un risque de préjudice grave et définitif ne présentent pas le sérieux nécessaire pour justifier la mesure sollicitée : ces parties requérantes sont partant à débouter de leur demande en institution d’une mesure provisoire.
Les parties requérantes sont partant toutes à débouter de leur demande en institution d’un sursis à exécution.
La demande en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000.- euros tel que formulée par les parties requérantes laisse également d’être fondée, les conditions légales afférentes n’étant pas remplies en cause.
Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;
22 rejette la demande en obtention d’un sursis à exécution ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par les parties requérantes ;
condamne les parties requérantes aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 20 juin 2025 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.
s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 20 juin 2025 Le greffier du tribunal administratif 23