Tribunal administratif N° 52624 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:52624 4e chambre Inscrit le 1er avril 2025 Audience publique du 29 avril 2025 Recours formé par Monsieur (A), alias …, …, contre trois décisions du ministre des Affaires intérieures en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 52624 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 1er avril 2025 par Maître Samira MABCHOUR, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur (A), né le … à … (Tunisie), de nationalité tunisienne, alias …, né le … à … (Libye), alias …, né le …, de nationalité tunisienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation 1) d’une décision du ministre des Affaires intérieures du 13 mars 2025 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, 2) de la décision ministérielle du même jour portant refus de faire droit à sa demande de protection internationale et 3) de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 14 avril 2025 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;
Le soussigné entendu en son rapport, ainsi que Maître Samuel BECHATA, en remplacement de Maître Samira MABCHOUR et Madame le délégué du gouvernement Sarah ERNST en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 22 avril 2025.
Le 8 février 2024, Monsieur (A), alias …, dénommé ci-après « Monsieur (A) », introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires intérieures, direction générale de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Les déclarations de Monsieur (A) sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale dans un rapport du même jour.
Une recherche effectuée à la même date dans la base de données EURODAC révéla que l’intéressé avait auparavant introduit une demande de protection internationale en Italie, le 17 mai 2017.
1Le 16 février 2024, il fut entendu par un agent du ministère en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement Européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III ».
Le 22 février 2024, les autorités luxembourgeoises adressèrent à leurs homologues italiens une demande de reprise en charge de Monsieur (A) sur base de l’article 18, paragraphe (1), point b) du règlement Dublin III, laquelle fut acceptée de manière tacite par ces derniers en date du 8 mars 2024.
Une demande de réadmission de Monsieur (A) sur le territoire italien au vu de ses documents italiens, versés en copie au ministère par ses soins, fut refusée par les autorités italiennes en date du 29 novembre 2024, confirmé le 16 janvier 2025, au motif que la demande de protection internationale de Monsieur (A) avait été refusée en date du 8 novembre 2017 et qu’il serait dès lors à considérer comme irrégulier en Italie.
Le transfert n’ayant pas pu être effectué dans les délais, le ministère informa Monsieur (A) en date du 4 octobre 2024 que le Luxembourg était devenu responsable de sa demande de protection internationale.
En date du 14 octobre 2024, le ministère procéda à une audition de Monsieur (A) sur les motifs de sa demande de protection internationale.
En date du 27 novembre 2024, Monsieur (A) fut encore entendu par un agent du ministère sur la recevabilité de sa demande de protection internationale.
Par décision du 13 mars 2025, notifiée à l’intéressée par courrier recommandé en date du 17 mars 2025, le ministre des Affaires intérieures, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur (A) qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 27, paragraphe (1), points a), c) et h) de la loi du 18 décembre 2015 et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui enjoignant de quitter le territoire dans un délai de trente jours.
Cette décision est libellée comme suit :
« (…) 1. Quant aux faits et rétroactes procéduraux En date du 8 février 2024, vous vous êtes présenté auprès des autorités luxembourgeoises prétendant vous nommer (A) et être de nationalité tunisienne. Lors de votre entretien mené avec le Service de Police Judiciaire sur votre identité et votre itinéraire pour venir au Luxembourg, vous avez affirmé avoir quitté la Tunisie en 2017 pour l'Italie où vous auriez introduit une demande de protection internationale. Vous n'y seriez resté que pendant huit mois avant de partir en Suisse où vous auriez travaillé au noir pendant une année. Par la suite, vous seriez allé à Monaco où vous auriez séjourné pendant cinq mois auprès d'une amie. Ensuite, vous seriez parti en France, Etat où vous auriez également travaillé au noir. Après un séjour de deux années en France vous seriez parti en Allemagne et y auriez séjourné pendant cinq mois auprès d'un ami. Vous auriez encore séjourné pendant six mois à Metz auprès de membres de votre famille. « Die restlichen 18 2Monate bin ich zwischen Frankfurt, Metz und Paris gependelt. Ich hatte keine Dokumente, ich war illegal » (rapport de police page 2). Vous déclarez encore que vous voudriez « jetzt einen Asylantrag stellen da ich müde bin » (rapport de police page 2). Vous seriez spécialement venu au Luxembourg « da Luxemburg reich und klein ist » et parce qu'on y parlerait le français.
Suivant résultat des recherches effectuées dans la base de données Eurodac, vous avez introduit une demande de protection internationale en Italie en date du 17 mai 2017. Aux fins de déterminer l'Etat compétent pour le traitement de votre demande de protection Internationale introduite au Luxembourg, vous avez été entendu dans le cadre d'un entretien Dublin III en date du 16 février 2024. Vous avez déclaré dans ce contexte que vous auriez déjà fait usage d'une autre identité, à savoir …, et que ce serait « le gouvernement italien [qui] m'a donné ce nom par mesure de sécurité » (rapport Dublin III page 2). Vous seriez en possession de documents italiens alors que vous auriez aidé les autorités italiennes dans le cadre d'une affaire pénale concernant des passeurs, de sorte que les autorités italiennes vous auraient, en contrepartie, délivré un titre de séjour sous une autre identité par moyen de sécurité. Vous auriez introduit une demande de protection internationale en Italie et, suite à la procédure au tribunal, « ils disaient qu'ils allaient me protéger » (entretien Dublin III page 6). Vous auriez quitté l'Italie alors que vous y seriez menacé en par la mafia qui aurait déjà essayé de vous tuer en vous blessant avec un pistolet et « ils vont surtout l'essayer une deuxième fois » (entretien Dublin III page 6). Vous déclarez encore avoir introduit une demande de protection internationale au Luxembourg « pour faire la procédure sur mon propre nom » alors que vous ne voudriez plus de l'identité que les autorités italiennes vous auraient attribuée mais récupérer votre propre identité tunisienne.
En date du 16 avril 2024, les autorités luxembourgeoises ont considéré la demande de reprise en charge adressée aux autorités italiennes en application des dispositions du règlement Dublin comme tacitement acceptée depuis le 8 mars 2024. Dans la mesure où votre transfert en Italie n'a pas pu être mené à bien, les autorités luxembourgeoises vous ont informé par courrier du 4 octobre 2024 que le Luxembourg était devenu responsable du traitement de votre demande de protection internationale conformément aux dispositions de l'article 29(2) du règlement Dublin III précité.
En date du 14 octobre 2024, vous avez donc été entendu sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale. Hormis vos motifs invoqués par rapport à des problèmes que vous auriez eus en Tunisie avant votre départ pour l'Italie en 2017, vous avez encore déclaré dans ce contexte que vos documents d'identité et de séjour que les autorités italiennes vous auraient délivrés sous cette autre identité se trouveraient auprès des autorités allemandes lesquelles auraient eu un doute sur votre identité et « ils voulaient mon passeport » (entretien page 5). Vous auriez été renvoyé du territoire allemand, de sorte que vous seriez venu au Luxembourg alors que « le Luxembourg est stratégique, et en plein cœur de l'Europe, et à cause de la langue française » (entretien page 5).
Sur question afférente de savoir pourquoi les autorités italiennes vous auraient donné des documents sous l'identité d'une autre personne, vous déclarez « je ne sais pas. C'est la police frontière italienne qui m'a donné cette identité » (entretien page 5) pour que le capitaine d'un yacht ne vous retrouverait pas. Rendu attentif au fait que vous aviez déclaré lors de votre entretien avec le service de police judiciaire que vous auriez introduit une demande de protection internationale alors que vous seriez fatigué, vous déclarez solliciter une protection à cause de la « grosse affaire » que vous auriez eue en Italie en juillet 2017 et pour laquelle vous auriez dû témoigner lors d'une audience qui aurait duré trois jours. Vous déclarez encore, sur question de votre mandataire, que vous ne seriez pas retourné en Tunisie car vous auriez, à l'occasion de cette 3affaire en Italie, dû signer un témoignage qui « enfoncerait » seize Tunisiens qui auraient été passagers dudit yacht et au risque que les familles de ces seize Tunisiens vous attendraient à votre retour dans votre pays d'origine. Vous ne seriez par ailleurs pas en possession de documents probants par rapport à cette affaire et estimez « Si vous voulez des documents, vous devrez contacter l'Italie ». Vous-même ne contacteriez pas les autorités italiennes alors qu' « il faut de l'agent et demander un avocat » (entretien page 6).
Par courriel du 25 octobre 2024, votre mandataire a fait parvenir aux autorités copie de divers documents concernant l'identité qui vous aurait été donnée par les autorités italiennes pour vous protéger de représailles liées à votre témoignage dans cette procédure criminelle en Italie.
Ces copies de documents, tous établis: sous l'identité de …, de nationalité libyenne, comprendraient selon un listing établi par votre mandataire :
« - Carte de santé Italie - Fiche professionnelle Italie - Résumé des données de la CI et du titulaire émis par le Ministère de l'Intérieur italien ;
- Timbre fiscal pour ses documents d'identité en Italie - Carte de santé Italie - Carte de santé provisoire Italie - Carte de séjour Italie [étant précisé qu'il s'agit d'une carte d'identité et non pas d'un titre ou d'une carte de séjour] - Carte d'identité italienne - Certificat de résidence à … - Certificat de sécurité sociale Allemagne - Contrat de travail à l'Hôtel … … - Identification fiscale en Allemagne - Sécurité sociale Allemagne 28.03.20 - Carte de sécurité sociale Allemagne ».
Aucun des documents n'est versé en original. Par ailleurs, aucun des documents italiens n'est traduit dans une des langues administratives applicables au Luxembourg.
Dans la mesure où vous aviez prétendu être en possession de documents d'identité et de séjour en Italie qui vous permettraient d'y légalement séjourner, vous avez été entendu en date du 27 novembre 2024, conformément aux dispositions de l'article 13 de la Loi de 2015, dans le cadre d'un entretien sur la recevabilité de votre demande de protection internationale. Par rapport à vos documents vous délivrés sous votre identité libyenne, vous estimez que « la police a fait tout ça, autour de l'histoire du yacht, que j'ai racontée lors du dernier entretien » (entretien sur la recevabilité page 2). Vous n'auriez pas introduit de demande de protection internationale en Italie « je n'ai même pas demandé l'asile tout court ». L'Italie vous aurait « utilisé » pour régler le souci dont vous auriez déjà parlé. Les autorités italiennes auraient changé votre nom, votre date de naissance et votre nationalité pour vous protéger par rapport à l'histoire dans laquelle vous auriez été témoin. Vous rajoutez que vous n'auriez en outre plus d'argent et plus d'endroit où aller.
Une demande de réadmission adressée aux autorités italiennes en date du 28 novembre 2024 au vu des copies de documents italiens versées à l'appui de votre demande est restée sans résultat, les autorités italiennes informant simplement que votre demande de protection internationale introduite en Italie en tant que ressortissant tunisien avait été rejetée en date du 8 novembre 2017, de sorte que vous seriez en séjour illégal sur le territoire italien.
4 Il ressort encore des informations obtenues, en date du 23 décembre 2024, à travers le Centre de Coopération policière et douanière (CCPD), que vous êtes signalé par les autorités allemandes, sous votre identité libyenne, pour diverses infractions, à savoir :
« - zur Aufenthaltsermittlung — unerlaubte Einreise durch STA … vom 19.06.2024 - zur Aufenthaltsermittlung Körperverletzung durch Amtsgericht … vom 16.05.2024 - zur Aufenthaltsermittlung — Nötigung durch Amtsgericht … vom 08.07.2024 Person ist mehrfach (4x) erfasst mit erkennungsdienstlicher Behandlung :
- wegen unerlaubter Einreise (mehrfach) und wegen Verstoß Betäubungsmittelgesetz ».
Il en ressort encore que vous avez fait, depuis 2019, l'objet de plusieurs entrées irrégulières sur le territoire allemand et que vous faites l'objet d'un ordre de quitter le territoire.
Il ressort encore des informations obtenues par les autorités italiennes en date du 16 janvier 2025, suite à une demande leur adressée sur base de l'article 34 du règlement Dublin III, que vous êtes connu en Italie sous l'identité …, né le …, de nationalité tunisienne, et que votre demande de protection internationale y introduite en mai 2017 a été rejetée en novembre 2017.
Le recours juridictionnel introduit contre cette décision a été rejeté par jugement du 4 octobre 2018. Vous ne seriez en Italie en possession d'aucun titre de séjour valable.
Dans la mesure où les autorités italiennes n'ont pas pris position par rapport à vos documents italiens desquels il ressort que vous seriez de nationalité libyenne, une demande d'informations complémentaires dans ce contexte leur a été adressée. Il ressort des courriers de réponse y afférents des 22 janvier 2025 et 4 février 2025 que vous n'êtes pas enregistré auprès des services italiens et que « dans notre documentation, la personne en objet n'a aucune liaison avec la Libye », de même que les autorités italiennes ont considéré que vos déclarations ne seraient pas crédibles.
2. Quant aux motifs de fuite invoqués à la base de votre demande de protection internationale A l'appui de votre demande, vous déclarez vous nommer en réalité (A), être né le … à …/Tunisie, être de nationalité tunisienne, et de confession musulmane. Avant votre départ pour l'Italie en 2017, vous auriez vécu à Ben Arous avec vos parents et vos deux frères. Vous auriez débuté des études en économie et gestion à l'Université de Radés que vous n'auriez pas terminées.
A compter de 2007, vous auriez travaillé avec votre père dans le domaine immobilier. En Tunisie, votre dernier emploi aurait été « premier responsable » dans la société de votre père.
Vous auriez quitté la Tunisie en 2017 alors que vous y seriez menacé. Vous auriez en effet été propriétaire d'une salle de jeux à …/Tunisie de 2009 à 2011. Lors de la révolution vous auriez dû fermer ce local pendant un mois et, à la réouverture, des partisans d'Ennahda auraient commencé à faire des descentes sur les lieux tout en vous ordonnant d'enlever des posters de M.
Jackson, de M. Carey et d'autres stars. Ces gens auraient vu votre commerce comme une dérive alors qu'il y aurait eu des tables de billard, des ordinateurs, des consoles de jeux et un comptoir avec des films et de la musique.
Fin 2011, vous auriez en outre commencé à recevoir des avertissements écrits de la municipalité et du gouverneur de … vous imposant leurs choix des horaires d'ouverture et de fermeture de votre commerce. Ils auraient également commencé « à envoyer des petits jeunes » qui auraient cassé et saccagé votre matériel. Votre père aurait ainsi ordonné la fermeture de la 5salle de jeux en août 2012 et « c'est tout » (entretien page 2). Sur question de savoir si vous aviez des documents probants concernant ces avertissements écrits, vous déclarez « ça fait dix ans, j'ai tellement voyagé depuis » (entretien page 5).
Invité à clarifier comment vous auriez pu savoir que ces personnes seraient des partisans d'Ennahda, vous estimez que grâce à la caméra de surveillance, « je voyais d'autres visages » (entretien page 4) et vous rajoutez qu'un ordinateur serait tombé en panne trois fois par semaine et que « c'est clairement fait par quelqu'un ». Ces mêmes individus auraient en outre dit à votre père « dis à ton fils de fermer cet endroit de débauche» (entretien page 4).
Ces gens seraient venus dans votre local en permanence pendant 4 mois. Il y aurait en outre eu deux bagarres de sorte que votre père vous aurait dit de fermer la salle. Vous auriez donc pris la décision de quitter la Tunisie pour aller en Libye où vous auriez séjourné et travaillé de 2014 à fin 2016 avant de retourner en Tunisie.
Vous n'auriez pas porté plainte en Tunisie alors que ces partisans d'Ennahda seraient infiltrés partout.
Convié à faire état de vos craintes concrètes en cas de retour en Tunisie, vous ne répondez pas à la question et relatez que vous auriez « gagné pas mal d'argent en Libye » que vous auriez voulu investir dans un petit projet en Tunisie. Or, pour avoir une autorisation de commerce, on vous aurait demandé de payer des arriérés calculées par rapport à votre ancien commerce. En gros, on aurait fermé votre premier commerce tout en voulant prendre l'argent que vous auriez épargné en Libye pour le paiement des arriérés d'impôt à hauteur d'environ 20 000 à 22 000 dinars tunisiens.
Sur question de clarifier vos déclarations précédentes aux termes desquelles ce serait votre père qui aurait ordonné la fermeture de cette salle de jeux, vous estimez alors que votre père n'aurait rien voulu avoir avec les islamistes aux fins d'éviter des problèmes. Vous auriez fait une demande de clôture de la salle de jeux, mais le bureau local du ministère des finances ne l'aurait pas enregistrée et aurait continué à « cumuler les mensualités » (entretien page 4).
Vous ne vous seriez pas installé dans une autre région de votre pays d'origine alors que « j'avais deux choix, payer et rester pauvre ou prendre l'argent et essayer une vie ailleurs (entretien page 6). Vous auriez risqué d'être emprisonné pour ne pas avoir pu payer les arriérés d'impôts.
A votre retour en Tunisie depuis la Libye fin 2016, vous y seriez encore resté pendant six mois et auriez pris la décision de quitter la Tunisie en mai 2017 pour l'Italie. Après votre séjour en Italie, vous seriez parti à Monaco où vous seriez resté pendant une semaine, puis en Suisse, à Lausanne, pendant dix jours. Vous auriez par la suite encore été aux Pays-Bas pendant deux mois et à Copenhague pendant trois à quatre mois. Vous seriez ensuite allé à Francfort pour deux mois et auriez encore travaillé à … pendant trois années.
Sur question de savoir pourquoi vous auriez attendu jusqu'en 2024 pour introduire une demande de protection internationale au Luxembourg, vous estimez « je ne sais pas. On m'a renvoyé de l'Allemagne ». Vous n'auriez pas eu d'argent et votre carte bancaire aurait été annulée.
La Suisse « ça n'allait pas, ce n'est pas un pays jeune (la retraite) » et Amsterdam, « je n'ai pas aimé ». Au Danemark, ce serait la langue et en Allemagne « j'ai été renvoyé ». Vous auriez été renvoyé du territoire allemand alors que les autorités allemandes auraient eu « un doute sur mon 6identité » (entretien page 5). Vous seriez donc venu au Luxembourg qui serait un pays stratégique, en plein cœur d'Europe et où on parlerait le français.
Hormis les copies de documents versées par votre mandataire et concernant l'identité libyenne que les autorités italiennes vous auraient attribuée, vous ne remettez aucun document susceptible de soutenir vos dires, ni par rapport à votre identité réelle, ni par rapport aux motifs qui vous auraient poussé à quitter la Tunisie en 2017. Concernant vos documents d'identité, vous déclarez que « je n'ai rien » (entretien page 2) à part des photos de votre carte d'identité tunisienne, une photo de la dernière page de votre passeport ainsi qu'une photo de votre extrait d'acte de naissance. Votre carte d'identité, vous l'auriez perdue en Italie en 2018. Vous auriez fait une déclaration de perte auprès des autorités italiennes dont le document se trouverait auprès de votre avocat Italien « mais je ne suis pas sûr » (entretien page 2).
3. Quant à l'application de la procédure accélérée Je tiens tout d'abord à vous informer que conformément à l'article 27 de la Loi de 2015, il est statué sur le bien-fondé de votre demande de protection internationale dans le cadre d'une procédure accélérée alors qu'il apparaît que vous tombez sous trois des cas prévus au paragraphe (1), à savoir :
« c) le demandeur a induit les autorités en erreur en ce qui concerne son identité ou sa nationalité, en présentant de fausses indications ou de faux documents ou en dissimulant des informations ou des documents pertinents qui auraient pu influencer la décision dans un sens défavorable; » Il échet en premier lieu de noter que des doutes évidents doivent être émis par rapport à votre identité, que ce soit celle dont vous faites état en tant que ressortissant tunisien et laquelle serait votre réelle identité, à savoir (A), de nationalité tunisienne, mais surtout concernant votre récit par rapport à l'identité, à savoir …, de nationalité libyenne, que les autorités italiennes vous auraient attribuée dans le cadre d'une grosse affaire criminelle dans laquelle vous auriez, selon vos dires, été une sorte de témoin-clé.
En effet, en vertu des articles 12, paragraphe (2), et 37, paragraphes (1) et (2), de la Loi de 2015, vous avez, en tant que demandeur de protection internationale, l'obligation de remettre, aussi rapidement que possible, vos documents d'identité ainsi que toute autre pièce utile à l'examen de votre demande et de présenter tous les éléments nécessaires pour étayer votre demande de protection internationale, ces éléments correspondent, notamment, à tous les documents dont le demandeur dispose concernant son âge, son passé, y compris ceux des parents à prendre en compte, son identité, sa ou ses nationalité(s), le ou les pays ainsi que le ou les lieux où il a résidé auparavant, ses demandes d'asile antérieures, son itinéraire, ses titres de voyage, ainsi que les raisons justifiant la demande de protection internationale. Il en ressort qu'en tant que demandeur de protection internationale, vous avez l'obligation de collaborer, notamment dans l'établissement de votre identité.
Dans la mesure où l'autorité est dépendante de votre collaboration dans l'analyse des éléments de votre demande, le refus de fournir des renseignements ou des moyens de preuves que vous devriez parfaitement être en mesure de produire permet de conclure au manque de crédibilité de vos allégations avancées dans ce contexte. En effet, un demandeur de protection internationale ne doit en principe pas tirer avantage de son défaut de collaboration, à tout le moins lorsque celui-
ci apparaît fautif. En particulier, un demandeur de protection internationale ne doit pas être traité 7plus favorablement que celui qui a coopéré à satisfaction. C'est pourquoi l'appréciation des faits - qui tient compte de toutes les circonstances importantes et de l'attitude de la personne concernée en cours de procédure - tourne généralement au désavantage de celui qui n'a pas collaboré. En d'autres termes, le défaut de preuve va au détriment de la partie qui entendait tirer un droit d'un fait non prouvé, ou paralysera l'action administrative dont le fait non prouvé était la condition.
En l'espèce, et tel que relevé-ci avant, vous prétendez que les autorités italiennes vous auraient attribué l'identité …, de nationalité libyenne et que vous seriez titulaire à cet égard de documents d'identité et de séjour valables en Italie. Vous avez, dans ce contexte, fait parvenir aux autorités luxembourgeoises, diverses copies de documents en langue italienne, dont ce que votre mandataire qualifie de « carte de séjour ». Or, l'analyse de ce document a permis de constater qu'il s'agit d'une simple « carta d'identitata », délivrée à tout demandeur de protection internationale en Italie, étant précisé qu'il ressort du document intitulé « Modulo - Schenda anagrafica - professionale », que vous seriez titulaire d'un « permesso » pour « richienda asilo politico », donc d'une autorisation de vous maintenir sur le territoire italien en tant que demandeur de protection internationale, de sorte que vous laissez de remettre aux autorités un quelconque document qui prouverait l'existence dans votre chef, sous votre identité libyenne alléguée, d'un titre de séjour valable quelconque qui vous permettrait de séjourner légalement en Italie, un ressortissant de pays tiers en sa qualité de demandeur de protection internationale n'ayant en effet que le simple droit de se maintenir sur le territoire de l'Etat dans lequel il a introduit sa demande et uniquement durant le temps de l'analyse de sa demande.
Les doutes concernant cette identité libyenne que les autorités italiennes vous auraient attribuée ressort en outre du simple constat que vous refusez de soumettre aux autorités luxembourgeoises un document quelconque, tel un jugement des juridictions italiennes, qui serait de nature à prouver que vous auriez témoigné dans une affaire criminelle d'envergure et que les autorités italiennes vous auraient, par mesure de sécurité, attribué cette nouvelle identité, votre affirmation aux termes de laquelle vous estimez ne pas contacter vous-même les autorités italiennes alors qu' « il faut de l'agent et demander un avocat » (entretien page 6) et que « Si vous voulez des documents, vous devrez contacter l'Italie » n'étant clairement pas de nature à vous décharger de votre obligation de collaboration. En effet, tel que relevé ci-avant, c'est vous qui avez la charge de la preuve de vos dires, étant précisé que vous vous trompez grossièrement en estimant pouvoir renverser cette charge sur les autorités luxembourgeoises. Par ailleurs, votre affirmation aux termes de laquelle il faudrait de l'argent et l'assistance d'un avocat ne vous exonère pas de non plus alors qu'il échet de vous rappeler que vous êtes assisté par un avocat au Luxembourg, vous mis à disposition à titre gratuit, respectivement financé par des deniers publics.
Vous avez partant à votre disposition tous les moyens nécessaires pour faire parvenir aux autorités toutes les preuves utiles par rapport à vos allégations avancées dans ce contexte, ce que vous n'avez à ce jour pas fait. Votre refus de collaboration permettant de la sorte de jeter un doute considérable sur la crédibilité de vos dires et de conclure que les documents que vous avez remis sont, soit des faux documents, soit que vous avez fait état auprès des autorités italiennes de votre commune de résidence de fausses indications sur votre identité en prétendant être un ressortissant libyen.
Votre tentative d'induction en erreur des autorités par rapport à votre identité est encore clairement établie alors qu'il paraît pour le moins étrange que vous avez introduit une demande de protection internationale en Italie en 2017, sous l'identité …, né le …, de nationalité tunisienne, et partant sous les mêmes nom, prénom et date de naissance que les autorités italiennes vous auraient attribués par la suite par mesure de sécurité, sauf que les autorités italiennes auraient fait de vous un ressortissant libyen dans le contexte de cette affaire criminelle. Il est de surcroît 8tout à fait improbable que les autorités italiennes vous auraient attribué, tel que cela ressort des copies de documents versés, la nationalité libyenne au titre d'un simple demandeur de protection internationale dans le cadre d'une affaire criminelle aux fins de vous protéger, entre autre, contre un éloignement vers la Tunisie alors que, tel que relevé ci-avant, un demandeur de protection internationale n'est, en termes de séjour, pas titulaire d'un titre de séjour, mais d'un simple droit de se maintenir sur le territoire.
Que vos déclarations par rapport à votre identité vous attribuée par les autorités italiennes manquent de crédibilité et consistent uniquement en une tentative vaine de duper les autorités luxembourgeoises aux fins de pouvoir régulariser votre situation sous le couvert de l'introduction d'une demande de protection internationale ressort encore du constat que les autorités italiennes vous connaissent uniquement sous l'identité …, né le …, de nationalité tunisienne et que « dans notre documentation, la personne en objet n'a aucune liaison avec la Libye ».
En tout cas, votre histoire avec cette identité libyenne manque de toute crédibilité et il est plutôt probable que vous vous soyez procuré des documents en tant que faux ressortissant libyen pour éviter d'être rapatrié en Tunisie par les autorités italiennes suite au rejet définitif de votre demande de protection internationale y introduite en 2017.
Dans la mesure où il vient d'être retenu que vos déclarations par rapport à votre identité libyenne que les autorités italiennes vous auraient attribuée sont à considérer comme constituant une manœuvre d'induire en erreur les autorités luxembourgeoises, vos motifs en lien avec des Tunisiens qui vous chercheraient en Tunisie parce que vous auriez témoigné contre eux se doivent également d'être retenues comme non crédibles et partant non fondés.
Ceci dit, vous ne jouez manifestement également pas franc-jeu avec les autorités concernant votre réelle identité. En effet, il ressort des éléments de votre dossier administratif, que vous avez introduit une demande de protection internationale en Italie en 2017 sous l'identité …, né le …, de nationalité tunisienne, tandis que vous vous présentez actuellement comme vous nommant (A), né le …, de nationalité tunisienne, tout en prétendant que cette dernière identité serait votre réelle identité. Or, et dans la mesure où vous laissez également de verser une preuve quelconque par rapport à cet égard, votre identité laisse d'être établie. Vous déclarez en outre être en possession de photos de divers documents d'identité que vous n'avez cependant à ce jour pas versées, de même que vous prétendez avoir fait en Italie une déclaration de perte de votre carte d'identité tunisienne, document que vous ne versez pas non plus alors même que cette déclaration de perte se trouverait dans votre dossier auprès de votre avocat italien. Votre comportement par rapport à la preuve de votre réelle identité se traduit donc également dans un refus de collaboration manifeste dans votre chef dans l'établissement d'un élément-clé de toute demande de protection internationale, à savoir votre identité.
Il peut dans ce contexte en outre être relevé qu'il est pour le moins étrange que vous avez, en tant que personne qui aurait fui son pays d'origine, fait état lors de l'introduction de votre demande de protection internationale en Italie, d'une identité qui ne serait pas votre réelle identité, alors qu'il ressort des éléments de votre dossier que vous êtes connu des autorités italiennes uniquement sous l'identité de …, de nationalité tunisienne. Si, tel que vous le prétendez, votre identité réelle serait celle de (A), vous avez donc manifestement également tenté d'induire en erreur les autorités italiennes, et ce dès votre arrivée en Italie, en faisant état de fausses déclarations dans ce contexte. Or, un demandeur de protection internationale, dont la vie est en danger dans son pays d'origine, n'éprouve aucun besoin, d'une part, d'introduire une demande de protection internationale sous une fausse identité, d'autre part, une telle personne fait le 9nécessaire pour soumettre aux autorités desquelles elle estime devoir obtenir une protection des pièces et documents susceptibles de prouver son identité, preuves que vous devriez pouvoir remettre sans aucun problème majeur, ce d'autant plus que vous estimez « je peux en avoir au consulat » (entretien sur la recevabilité page 2), prouvant de surcroît que vous ne semblez avoir aucun problème avec les autorités de votre pays d'origine.
Dans la mesure vous avez utilisé diverses identités et nationalités, vous êtes actuellement malvenu de simplement affirmer que votre identité avancée auprès des autorités luxembourgeoises serait votre réelle identité sans, néanmoins verser une quelconque preuve dans ce contexte, votre comportement consistant en une tentative de leurrer les autorités sur votre identité et de jouer la montre dans le seul but faire traîner en longueur la procédure et partant prolonger votre séjour en Europe.
Il suit des considérations ci-dessus que vous tentez d'induire en erreur les autorités sur votre identité en faisant état de fausses indications ou de faux documents, sinon en dissimulant des informations et documents pertinents dans ce contexte.
« h) le demandeur est entré ou a prolongé son séjour illégalement sur le territoire et, sans motif valable, ne s'est pas présenté aux autorités ou n'a pas présenté une demande de protection internationale dans les délais les plus brefs compte tenu des circonstances de son entrée ; » Il ressort des éléments de votre dossier administratif que vous avez introduit une demande de protection internationale en Italie en 2017 dont vous avez définitivement été débouté par décision des juridictions italiennes en octobre 2018. Vous n'êtes en outre en Italie, contrairement à vos dires, en possession d'aucun document ou titre de séjour et partant dans l'obligation de quitter le territoire. Or, vous avez, de manière irrégulière, séjourné dans divers Etats européens, dont la France, la Suisse, le Monaco, l'Allemagne, les Pays-Bas ou le Danemark, pendant plusieurs années jusqu'au moment où vous avez eu l'idée de venir au Luxembourg pour y introduire une demande de protection internationale « da ich müde bin » (rapport de police page 2).
Or, non seulement, n'avez-vous pas obtempéré à votre obligation de quitter l'Espace Schengen suite au rejet de votre demande de protection internationale en Italie par décision juridictionnelle rendue en 2018, encore avez-vous préféré séjourner de manière irrégulière dans divers Etats européens tout en y travaillant au noir, mais surtout sans ressentir le besoin d'introduire une demande de protection internationale dans un de ces Etats.
Tel n'est néanmoins pas le comportement d'une personne dont la vie est en danger dans son pays d'origine, une telle personne ne séjournant pas de manière irrégulière en Europe pendant des années. En effet, et si jamais vous deviez avoir été d'avis que les autorités italiennes n'auraient pas convenablement statué sur votre demande de protection internationale, il vous aurait appartenu d'y introduire une deuxième demande de protection internationale. Par ailleurs, et au plus tard au moment où les autorités allemandes vous ont notifié une décision de retour, décision impliquant donc un retour dans votre pays d'origine, il vous aurait appartenu de faire état de votre besoin allégué en protection, ce que vous n'avez néanmoins pas fait, laissant ainsi suggérer que vous ne craignez rien dans votre pays d'origine.
Il est partant clair que vous avez prolongé votre séjour illégalement en Europe depuis au moins six années et que vous n'avez, sans motif valable, pas présenté une demande de protection internationale dans les délais les plus brefs, votre affirmation aux termes de laquelle vous seriez 10venu au Luxembourg à cette fin alors qu'« on m'a renvoyé de l'Allemagne », sinon que vous n'auriez pas eu d'argent ou encore que la Suisse ne serait pas « mon genre de pays. La vie y est trop cher [sic]» (entretien Dublin III page 5) et Amsterdam « je n'ai pas aimé », de même que vous n'auriez pas apprécié le climat au Danemark « il faisait trop froid » (entretien Dublin III page 5), n'étant en effet pas à considérer comme motifs valables pour n'avoir introduit une demande de protection internationale qu'en octobre 2024 et ce spécifiquement au Luxembourg, Etat que vous auriez choisi à cette fin parce que ce serait un pays « reich und klein » (rapport de police page 2), et donc pour des raisons de pure convenance personnelle, notamment économiques.
« a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n'a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l'examen visant à déterminer s'il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ; » Tel qu'il ressort de l'analyse de votre demande de protection internationale ci-dessous développée, il s'avère que le point a) de l'article 27(1) se trouve également être d'application pour les raisons étayées ci-après.
4. Quant à la motivation du refus de votre demande de protection internationale Suivant l'article 2 point h) de la Loi de 2015, le terme de protection internationale désigne d'une part le statut de réfugié et d'autre part le statut conféré par la protection subsidiaire.
• Quant à la crédibilité de vos déclarations Avant tout autre développement, il y a lieu de rappeler qu'il incombe au demandeur de protection internationale de rapporter, dans toute la mesure du possible, la preuve des faits ainsi que des craintes d'être victime de persécutions ou d'atteintes par lui alléguées, sur base d'un récit crédible et cohérent et en soumettant aux autorités compétentes le cas échéant les documents, rapports, écrits et attestations nécessaires afin de soutenir ses affirmations. Il appartient donc au demandeur de protection internationale de mettre les autorités en mesure de saisir l'intégralité de sa situation personnelle. Il y a lieu de préciser également dans ce contexte que l'analyse d'une demande de protection internationale ne se limite pas à la pertinence des faits allégués par un demandeur de protection internationale, mais il s'agit également d'apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations, la crédibilité du récit constituant en effet un élément d'évaluation fondamental dans l'appréciation du bien-fondé d'une demande de protection internationale, et plus particulièrement lorsque des éléments de preuve matériels font défaut.
En effet, tel que relevé ci-avant, vous avez, en vertu de l'article 37 de la Loi de 2015, un devoir de collaboration et l'obligation de présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer votre demande de protection internationale. Or, le refus de fournir des renseignements ou des moyens de preuves que vous devriez parfaitement être en mesure de produire permet de conclure au manque de crédibilité de vos dires.
Tel qu'il ressort des conclusions ci-dessus relatées, aucune crédibilité ne saurait être accordée à vos déclarations concernant votre identité, que ce soit votre identité réelle ou celle que les autorités italiennes vous auraient attribuée dans le cadre cette affaire pénale d'envergure. Le même constat s'impose par rapport à vos déclarations concernant vos motifs vous ayant prétendument amené à quitter la Tunisie en 2017, à savoir que vous auriez dû fermer votre salle de jeux à Ben Arous en août 2012 alors que vous auriez eu des ennuis avec des partisans 11d'Ennahda, sinon parce que vous auriez eu des dettes fiscales à hauteur d'environ 22 000 dinars tunisiens.
En effet, vous laissez de fournir tous les éléments nécessaires pour étayer vos dires, notamment que vous auriez réellement été en possession d'un local de jeux qui aurait été fermé en 2012, de même que des preuves relatives aux avis écrits que vous auriez reçus fin 2011 ou encore que vous auriez eu des arriérés d'impôts, preuves que vous devriez facilement être en mesure de soumettre aux autorités, votre tentative de justifier l'absence de documents probants par le fait que « ça fait dix ans, j'ai tellement voyagé depuis » (entretien page 5), n'étant évidemment pas de nature entériner votre inaction dans ce contexte, ce d'autant plus que vous n'avez pas quitté la Tunisie de manière précipitée, mais seulement en 2017, de même que vous n'avez pas quitté la Tunisie en raison des problèmes que vous auriez eus avec des partisans d'Ennahda en 2011/2012, mais parce que vous n'auriez pas voulu payer des arriérés d'impôt.
Vous ne sauriez évidemment pas non plus profiter du bénéfice du doute concernant vos déclarations conformément à l'article 37 (5) de la Loi de 2015 alors que vous ne remplissez pas les conditions y inscrites, lesquelles sont d'ailleurs d'application cumulative. En effet, et hormis le constat que vous ne vous êtes manifestement pas efforcé d'étayer votre demande et que vous n'avez pas présenté tous les éléments pertinents ou fourni une explication satisfaisante quant à l'absence d'éléments probants, il résulte des considérations ci-dessus et des éléments non contestables de votre dossier que vous n'avez manifestement pas présenté votre demande de protection internationale dès que possible. Si vous aviez introduit une demande de protection internationale en Italie en 2017, de surcroît sous une autre identité, il n'existe aucune raison valable pour avoir attendu l'année 2024, soit plus de sept années, pour à nouveau introduire une demande de protection internationale, étant encore précisé que votre demande de protection internationale a déjà été traitée et rejetée par les autorités italiennes en 2017.
Vous faites en outre des déclarations totalement contradictoires par rapport à ce commerce alors que vous affirmez au départ que votre salle de jeux aurait été détruite par des islamistes (rapport de police page 2). Lors de votre entretien au fond, vous déclarez néanmoins que votre père aurait ordonné la fermeture de votre salle de jeux, pour ensuite encore changer de propos en déclarant qu' « on » aurait fermé votre salle de jeux, pour ensuite faire état encore d'une quatrième version en affirmant que vous-même auriez sollicité la fermeture de votre commerce mais que les autorités auraient refusé d'enregistrer cette demande.
Partant, au vu de l'absence de tout document de preuve par rapport à vos déclarations et des déclarations totalement vagues, disparates et contradictoires par rapport aux éléments-clés de votre récit, la crédibilité générale de vos dires se doit d'être mise à mal.
A titre subsidiaire, il peut encore être noté que la gravité de votre situation en Tunisie peut être mise en doute alors que les faits dont vous faites état auraient eu lieu fin 2011, mais que vous n'avez quitté la Tunisie qu'en mai 2017 et ce non pas parce que vous auriez eu des problèmes avec des partisans d'Ennahda, mais parce que vous n'auriez pas voulu payer vos arriérés d'impôts, constat confirmé par votre affirmation aux termes de laquelle « j'avais deux choix, payer et rester pauvre ou prendre l'argent et essayer une vie ailleurs » (entretien page 6), laissant ainsi transparaître des motifs économiques à la base de votre départ de Tunisie, sinon un tentative de vous soustraire à vos obligations de vous acquitter de dettes fiscales, et non parce que vous auriez été soumis à une persécution ou des mauvais traitements quelconques en 2017. Il est par ailleurs pour le moins étrange que vous auriez préféré investir, selon vos dires, 15 000 euros pour votre 12départ en Italie et 38 000 euros pour votre voyage d'Italie au Danemark au lieu de simplement vous acquitter de votre dette fiscale d'environ 6 500 euros auprès des autorités tunisiennes.
Par ailleurs, il peut également être admis que vous tentez simplement d'intégrer des partisans du parti politique Ennahda dans votre récit aux fins d'augmenter vos chances, selon vos estimations, pour obtenir un titre de séjour au Luxembourg. En effet, si, après 2011, le parti Ennahda a été au pouvoir en Tunisie, il échet de relever que vos déclarations aux termes desquels les gens qui vous auraient embêté dans votre salle de jeux seraient des partisans de ce parti politique se résument à de simples allégations. En effet, le fait que vous auriez vu « d'autres visages » (entretien page 4) sur la caméra de surveillance ou encore qu'un ordinateur aurait été en panne à trois reprises endéans une semaine et que cela serait « clairement fait par quelqu'un » (entretien page 4), ne permet nullement de considérer que ces personnes auraient été des partisans dudit parti. Par ailleurs, rien de grave ne vous est arrivé dans ce contexte. Finalement, il peut encore être relevé à titre subsidiaire que ces faits, datant de 2011/2012 ne sauraient manifestement pas servir de fondement à l'introduction d'une demande de protection internationale en 2024 alors qu'ils dateraient de plus d'une douzaine d'années actuellement. En outre, le parti Ennahda n'est plus au pouvoir en Tunisie aujourd'hui, étant encore relevé que son ancien leader se trouve en prison et a été condamné récemment à une lourde peine d'emprisonnement.
Il suit des considérations ci-dessus que votre demande de protection internationale introduite au Luxembourg en 2024, après que les autorités allemandes vous ont notifié une décision de quitter le territoire, et après votre séjour irrégulier en Europe depuis 2017, doit être considérée pour avoir été introduite non pas parce que votre vie serait en danger en cas de retour en Tunisie par rapport à des faits non prouvés qui dateraient de 2011, mais pour des motifs de pure convenance personnelle, et notamment économiques, constat confirmé par le fait que vous déclarez au départ avoir introduit une demande de protection internationale au Luxembourg « da ich müde bin » (rapport de police page 2) et parce que le Luxembourg serait un pays petit et riche.
En outre, votre comportement-même prouve qu'aucune crédibilité ne saurait être accordée à votre récit puisque ce comportement est incompatible avec celui d'une personne se sentant réellement persécutée. En effet, et hormis les considérations ci-dessus concernant votre séjour illégal dans plusieurs Etats européens depuis 2018, il échet encore de relever que vous ne semblez pas estimez nécessaire vous tenir aux règles élémentaires en termes de comportement alors que vous êtes connu pour être impliqué dans de multiples infractions. Ainsi, il ressort des éléments de votre dossier administratif que vous êtes connu des autorités allemandes pour « (..) unerlaubte Einreise durch STA … vom 19.06.2024, (…) Körperverletzung durch Amtsgericht … vom 16.05.2024, (…) Nötigung durch Amtsgericht … vom 08.07.2024, (…) wegen unerlaubter Einreise (mehrfach) und wegen Verstoss Betäubungsmittelgesetz ». Pareillement, vous avez mis à jour un comportement inacceptable dans votre foyer d'accueil alors qu'il ressort de divers comptes-rendus d'incidents que vous manquez cruellement de respect envers le personnel encadrant en proférant des menaces et insultes (« je vais vous brûler, fils de pute, je vais vous tuer à l'extérieur, les Luxembourgeois c'est des fils de pute, les racistes », « Je vais revenir avec une bombe pour tous vous exploser »), tel n'étant évidemment pas le comportement d'une personne dont la vie serait en danger dans son pays d'origine et qui chercherait refuge en Europe.
Il suit de l'ensemble des considérations ci-dessus que, d'une part, vous ne jouez manifestement pas franc-jeu avec les autorités concernant votre identité, d'autre part, votre récit manque de crédibilité générale, et il est clair que vous avez introduit une demande de protection internationale pour des raison de confort personnel, notamment pour des motifs économiques, lesquels ne sauraient néanmoins justifier l'octroi d'une protection internationale alors qu'ils ne 13rentrent, ni dans le champ d'application de la Convention de Genève, ni dans celui de la Loi de 2015.
Au vu des conclusions ci-dessus, aucune protection internationale ne vous est accordée.
Votre demande en obtention d'une protection internationale est dès lors refusée dans le cadre d'une procédure accélérée.
Suivant les dispositions de l'article 34 (2) de la Loi de 2015, vous êtes dans l'obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera coulée en force de chose décidée respectivement en force de chose jugée, à destination de la Tunisie, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisé à séjourner. (…) ».
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er avril 2025, Monsieur (A) a fait déposer un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision du ministre du 13 mars 2025 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, de la décision du même ministre du même jour portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.
Etant donné que l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre les décisions de refus d’une demande de protection internationale prises dans ce cadre et contre l’ordre de quitter le territoire prononcé dans ce contexte, et attribue compétence au président de chambre ou au juge qui le remplace pour connaître de ce recours, le soussigné est compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre les trois décisions du ministre du 13 mars 2025, telles que déférées.
Il n’y a partant pas lieu de statuer sur les recours subsidiaires en annulation.
A l’appui de son recours et en fait, le demandeur, outre de passer en revue les rétroactes cités ci-avant, explique être ressortissant tunisien et avoir fui son pays en raison de menaces subies entre 2011 et 2017 dans le cadre de ses activités commerciales à …, puis en raison d'une situation à haut risque liée à son implication dans une affaire judiciaire en Italie.
Il aurait possédé, en Tunisie, une salle de jeux proposant billards, consoles, films et musiques, laquelle aurait, après la révolution de 2011, attiré l'hostilité de groupes se revendiquant d'Ennahda, au motif que cet établissement serait contraire aux mœurs islamiques, de sorte que ces groupes auraient saccagé le matériel, menacé son personnel et exigé la fermeture du local. Ces pressions auraient été suivies d'avertissements municipaux, jusqu'à la fermeture définitive du lieu en 2012. Ces faits ayant été ignorés par les autorités tunisiennes et craignant des représailles, le demandeur explique ne pas avoir déposé de plainte.
Il aurait, par la suite, tenté avec son père de relancer un projet commercial, mais se serait heurté à des exigences fiscales de plus de 20.000 dinars que l'administration lui aurait réclamées malgré sa demande de radiation du registre de commerce, de sorte qu’il aurait décidé de quitter la Tunisie en mai 2017 pour l'Italie, où il aurait été impliqué comme témoin dans une affaire de trafic de migrants impliquant seize autres ressortissants tunisiens. Ayant coopéré avec les autorités italiennes lors d'une audience pénale de plusieurs jours à …, il aurait, en contrepartie, bénéficié 14d'une identité de substitution, à savoir …, ainsi que d'un titre de séjour temporaire, alors que sa demande de protection internationale aurait été rejetée.
Il aurait ensuite dû partir de manière précipitée d'Italie en raison des menaces directes provenant de proches des accusés dans l'affaire précitée, lesquels auraient même tenté de l'assassiner. Son périple l’aurait conduit à se retrouver dans plusieurs pays européens, tels que l'Allemagne, les Pays-Bas, la France, la Suisse et Monaco. Alors qu’il aurait été expulsé de l'Allemagne, où il aurait été arrêté à plusieurs reprises, il aurait décidé, en février 2024, d’introduire une demande d'asile au Luxembourg sous sa véritable identité.
En droit, le demandeur estime d’abord que le recours à la procédure accélérée serait injustifié, étant donné qu’il serait abusif de lui reprocher l’utilisation d’une fausse identité, alors qu'il aurait justement, au Luxembourg, déclaré sa véritable identité.
Il rappelle dans ce contexte, qu’il aurait coopéré avec les autorités italiennes dans le cadre d'une procédure pénale contre des passeurs, de sorte à avoir, pour des raisons de sécurité, bénéficié, dans le cadre de cette coopération, d’une nouvelle identité, à savoir …, de nationalité libyenne, situation qui serait crédible du fait à correspondre à une pratique bien documentée dans les affaires de criminalité organisée en Italie, tel qu’également relaté par la presse française. À la suite de son témoignage, il aurait été sérieusement menacé par des réseaux mafieux, jusqu'à être blessé par balle, ce qui l'aurait contraint à fuir l'Italie par crainte pour sa vie.
Il donne encore à considérer que sa situation présenterait une complexité particulière, à plusieurs égards, notamment du fait que l'identité sous laquelle il aurait circulé dans différents États membres ne résulterait pas d'une volonté de fraude de sa part, mais d'une mesure de protection orchestrée par les autorités italiennes, ce qui ressortirait des documents italiens qu’il aurait produit en copie.
S’il concède que les documents fournis par les autorités italiennes n'auraient pas permis de lever toutes les ambiguïtés, et ne répondraient pas aux questions posées quant à la cohérence entre les identités utilisées et les mesures de sécurité évoquées, il estime néanmoins que cette absence de clarté dans la position des autorités italiennes aurait dû inciter le ministre à la prudence en accordant à sa demande de protection internationale un traitement approfondi dans le cadre d’une procédure normale.
S'agissant plus particulièrement du point c) de l’article 27, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015, le demandeur fait plaider qu’il ne serait nullement établi qu’il aurait volontairement induit en erreur les autorités quant à son identité, dès lors que l'usage de l'identité … découlerait d'une instruction officielle des autorités italiennes.
Il fait relever que la Cour européenne des droits de l'homme, ci-après dénommée « la CourEDH », aurait déjà admis que des identités fictives pouvaient être légalement utilisées dans le cadre de la coopération judiciaire contre des réseaux criminels, dès lors que leur usage découlerait d'un objectif de protection, de sorte que le fait d’assimiler cela à une fraude reviendrait à ignorer la complexité des mécanismes de protection en matière pénale transnationale.
Par ailleurs, le grief fondé sur le point h) serait également infondé, alors que la prolongation de son séjour dans l'espace Schengen après le rejet de sa demande en Italie ne pourrait être analysée isolément, sans prendre en compte le contexte de menace et de précarité dans lequel il se serait trouvé.
15 La Cour de justice de l’Union Européenne, dénommée ci-après « la CJUE », aurait rappelé que les États devraient tenir compte des justifications apportées par un demandeur quant à un éventuel retard ou séjour irrégulier, dès lors que ces circonstances seraient liées à un besoin de protection ou à un danger immédiat.
Quant au « point j) », le demandeur estime qu’il ne saurait être sérieusement soutenu que les faits qu’il aurait exposés seraient sans pertinence pour l'examen de sa demande, alors que l'ensemble de ses déclarations seraient directement liées aux critères de reconnaissance du statut de réfugié, à savoir la crainte fondée de persécution pour avoir collaboré avec la justice contre des réseaux criminels organisés.
En raison du recours à la procédure accélérée, sa demande d'asile n’aurait pas pu faire l'objet d'un examen équitable, complet et individualisé, avec une possibilité réelle pour exposer l'ensemble de la situation. De plus, la brièveté des délais et l'impossibilité pratique d'obtenir des documents officiels italiens dans un laps de temps aussi restreint compromettraient irrévocablement ses droits à la défense.
Or, toute limitation des droits procéduraux, telle que l'accélération de l'examen d’une demande de protection internationale, devrait être strictement proportionnée au regard des droits fondamentaux en jeu.
En outre, le ministre n'aurait pas procédé à une évaluation spécifique de sa vulnérabilité, en violation des exigences de l'article 24 de la directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale, dénommée ci-après « la directive 2013/33/UE », alors qu’il présenterait pourtant des signes clairs de vulnérabilité, liés à des traumatismes, à son implication dans une affaire criminelle, ainsi qu’aux menaces dont il ferait l'objet.
Par ailleurs, le ministre procèderait à un renversement indu de la charge de la preuve, exigeant de sa part qu'il obtienne et produise seul, dans un délai restreint, des éléments que seules les autorités italiennes pourraient fournir, alors que l'article 4 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection, ci-après dénommée la directive 2011/95/UE, imposerait un partage de la charge probatoire entre le demandeur et l'Etat, surtout lorsque le contexte rendrait difficile la production de preuves matérielles et que les autorités d'un autre Etat membre seraient réticentes à coopérer.
Enfin, la motivation de la décision déférée serait lacunaire en ce qu’elle ne répondrait pas aux exigences de transparence et d'individualisation imposées par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, dénommée ci-après « la Charte ». En effet, la motivation serait standardisée, sans lien précis avec les faits propres à sa situation, ce qui empêcherait tout contrôle juridictionnel effectif.
Au fond, le demandeur conteste le rejet de sa demande de protection internationale ainsi que la mise en cause de la crédibilité des motifs de fuite invoqués, en relevant que selon l'article 37 de la loi du 18 décembre 2015, tout demandeur d'asile ne serait tenu d'apporter les éléments permettant d'établir la réalité des faits allégués que dans la mesure de ses possibilités.
16 De même l’exigence de crédibilité ne saurait être interprétée de manière rigide ou formaliste et ne devrait pas ignorer les conditions de précarité dans lesquelles vivraient de nombreux demandeurs, souvent contraints à l'errance, démunis de leurs biens et dans l'impossibilité matérielle de préserver des documents sur une longue période.
En l'espèce, il aurait présenté un récit long, constant, précis et en parfaite cohérence avec le contexte socio-politique tunisien, tel qu'il ressortirait de rapports établis notamment par les organisations Amnesty International et Human Rights Watch.
De surcroît, il aurait produit plusieurs éléments d'identification, parmi lesquels une photo de sa carte nationale d'identité tunisienne, une photo de la dernière page de son passeport, ainsi qu'une photo de son extrait d'acte de naissance. La perte ultérieure de ses documents originaux, intervenue en Italie en 2018, aurait été dûment déclarée aux autorités italiennes, de sorte que ses explications y relatives seraient claires, crédibles et concorderaient avec les situations vécues par de nombreux migrants en transit.
En ce qui concerne le reproche selon lequel ses déclarations seraient fluctuantes, le demandeur soutient que son récit serait constant sur l'essentiel, à savoir, tel que développé en fait, qu’il aurait été victime de menaces par des islamistes en Tunisie, poursuivi fiscalement pour un commerce fermé depuis des années et exposé à des menaces sérieuses en Italie à la suite de son implication comme témoin dans une affaire pénale.
Quant aux agissements des groupes religieux extrémistes après la révolution tunisienne, le demandeur explique qu’il serait notoire que des groupes islamistes auraient, à cette époque, cherché à imposer leur autorité dans les quartiers et à intimider toute forme de pratique culturelle perçue comme occidentale, tel que cela serait relaté par un article de fond, intitulé : « Entre crise interne et répression : quel avenir pour Ennahda ? », lequel aurait rappelé qu’à partir de 2012, des dizaines de commerces perçus comme contraires à la morale religieuse auraient été visés par des militants islamistes, souvent avec la bénédiction ou l'indifférence des autorités locales.
L'administration municipale, loin de le protéger, aurait aggravé la situation en lui imposant des restrictions arbitraires sur les horaires d'ouverture et en lui adressant des avertissements écrits, en contradiction avec la liberté d'entreprendre.
Ainsi, son père, inquiet pour sa sécurité, lui aurait demandé de fermer la salle, ce qui l’aurait amené à entreprendre des démarches de clôture administrative, restées pourtant sans suite, de sorte qu’il aurait dû faire face à des arriérés fiscaux injustifiés qui se seraient accumulés et qu’il aurait été dans l'incapacité de payer. Ces faits constitueraient une menace réelle en cas de retour en Tunisie, où le non-paiement d'impôts serait passible de sanctions sévères pouvant aller jusqu'à l'incarcération.
Il serait donc inexact de soutenir que son départ aurait été uniquement dicté par des considérations économiques. Par ailleurs, les dettes fiscales invoquées seraient la conséquence directe de la fermeture sous contrainte de son commerce, résultant elle-même de pressions et d'intimidations, tant de la part de groupes extrémistes que d'agents publics.
Dès lors, les motifs de départ s'inscriraient dans un contexte de persécution fondé à la fois sur l'expression de mœurs et de valeurs libérales et sur l'impuissance, voire la complicité des autorités locales.
17 Il conteste encore avoir modifié sa version des faits quant à la fermeture de son commerce, alors que si ses déclarations auraient pu varier dans les formulations, elles demeureraient fondamentalement cohérentes, dès lors qu’il aurait toujours indiqué que la fermeture aurait été la conséquence d'un climat de menace, d'un harcèlement structurel et de décisions parentales prises dans un cadre sécuritaire.
Par ailleurs, la qualification des auteurs des menaces comme des sympathisants d'Ennahda reposerait sur des faits circonstanciés, à savoir leurs propos tenus sur place, leur apparence physique identifiable, ainsi que leur comportement militant dans un contexte de domination idéologique de la rue.
Quant à l'absence de documents probants relatifs à la fermeture de la salle de jeux ou aux arriérés d'impôts, celle-ci s'expliquerait rationnellement par les nombreuses années passées en exil, les déplacements multiples en Europe et la perte de ses effets personnels. En effet, il serait déraisonnable d'attendre d'un exilé qu'il conserve pendant plus d'une décennie des documents fiscaux, d'autant que ces derniers n'auraient souvent pas été délivrés correctement en Tunisie.
Le demandeur fait plaider, à ce titre, que la jurisprudence européenne admettrait qu'un faisceau d'indices cohérents pourrait pallier l'absence de preuve formelle.
Concernant l'argument tenant au délai ayant précédé l'introduction de sa demande de protection internationale au Luxembourg, le demandeur fait rappeler que la CJUE aurait jugé que l'introduction tardive d'une demande ne pourrait fonder, à elle seule, une décision de rejet, sauf fraude manifeste, ce qui ne serait cependant nullement établi en l’espèce.
Enfin, les allégations concernant son comportement dans les structures d'accueil et les prétendues infractions survenues en Allemagne n'auraient aucune incidence juridique sur le bien-
fondé de sa demande de protection internationale, le demandeur relevant qu’aucun fait n'aurait donné lieu à une condamnation définitive au Luxembourg, et rien ne démontrerait que son comportement reflèterait un manque de sincérité quant à ses craintes de persécution.
De même, l'argument selon lequel la situation politique aurait changé en Tunisie depuis 2011 ne saurait balayer ses craintes fondées, alors que le retrait du parti Ennahda du pouvoir national ne signifierait nullement la disparition de ses réseaux d'influence locale, ni celle des comportements discriminatoires, notamment au sein des administrations.
À cela s'ajouterait le durcissement autoritaire du régime depuis la concentration des pouvoirs entre les mains du président Kaïs Saïed, tel que cela ressortirait de rapports récents dressant un tableau inquiétant pour les opposants au pouvoir, ainsi que pour la séparation des pouvoirs.
Dans ce contexte, il serait manifeste qu’il serait exposé à un risque réel et personnel en cas de retour en Tunisie, pour y avoir déjà été visé et du fait d’être désormais identifié comme témoin dans une affaire pénale impliquant des ressortissants tunisiens.
Le demandeur conteste encore le refus du statut conféré par la protection subsidiaire, alors qu’il devrait pouvoir, en tout état de cause, au vu de sa situation individuelle, bénéficier de la protection subsidiaire sur fondement de l'article 48, point (b) de la loi du 18 décembre 2015.
18Par référence aux recommandations de l’European Union Agency for Asylum (EUAA), ainsi qu’à un arrêt de la Cour EDH, le demandeur fait plaider que les considérations qui devraient être prises en compte lors de l'examen du besoin de protection au titre de l'article 48, point (b) de la loi du 18 décembre 2015, seraient notamment, l'indisponibilité des soins et les conditions socio-
économiques, la violence criminelle, les arrestations arbitraires, la détention illégale et les conditions de détention, ainsi que des mauvaises conditions humanitaires dans le pays de destination, contraires à l'article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dénommée ci-après « la CEDH », lesquelles s'opposeraient à l'exécution d'une mesure d'éloignement.
Quant à l'ordre de quitter le territoire, le demandeur conclut à une erreur manifeste d'appréciation de sa situation particulière au regard de la situation générale prévalant en Tunisie, alors que le renvoi serait contraire à l’article 3 de la CEDH, ainsi qu’aux articles 4 et 19, paragraphe 2, de la Charte, dispositions qu’il faudrait prendre en considération dans ce contexte, tel que l’aurait relevé l’EUAA, de même que la jurisprudence constante des juridictions administratives en la matière, ainsi que celle de la CourEDH.
Dès lors que la responsabilité que l'article 3 ferait peser sur les États contractants dans les affaires de cette nature tiendrait à l'acte consistant à exposer un individu au risque de subir des mauvais traitements. L'existence de ce risque devrait s'apprécier principalement par référence aux circonstances dont l'Etat en cause avait ou devait avoir connaissance au moment de l'expulsion.
En plus, le Haut Commissariat pour les Réfugiés aurait précisé que l'obligation de ne pas refouler un étranger serait également reconnue comme s'appliquant aux réfugiés indépendamment de leur reconnaissance officielle et couvrirait toute mesure attribuable à un État qui pourrait avoir pour effet de renvoyer un demandeur d'asile ou un réfugié vers les frontières d'un territoire où sa vie ou sa liberté serait menacés et où il risquerait une persécution.
Ainsi, contrairement à la Convention de Genève de 1951 sur les réfugiés qui n'accorderait sa protection qu'à un groupe restreint de personnes, la protection accordée contre le refoulement ne serait assortie d'aucune restriction ou dérogation de sorte qu'elle serait absolue, applicable même s’il n’était pas éligible pour un statut de protection internationale Ainsi, il devrait pouvoir bénéficier, en tout état de cause, de la protection contre l'éloignement vers son pays d’origine où il encourrait un risque réel et suffisamment grave d'atteintes pour sa vie et pour son intégrité physique et morale ou d'autres formes de traitements inhumains et dégradants.
Par conséquent, la décision de retour violerait les articles 3 de la CEDH, 4 et 19, paragraphe (2) de la Charte, ainsi que le principe de non-refoulement.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours pour être manifestement infondé en ses trois volets.
Force est au tribunal de relever qu’il ressort de l’alinéa 2 de l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, aux termes duquel « Si le président de chambre ou le juge qui le remplace estime que le recours est manifestement infondé, il déboute le demandeur de sa demande de protection internationale. Si, par contre, il estime que le recours n’est pas manifestement infondé, il renvoie l’affaire devant le tribunal administratif pour y statuer », qu’il appartient au magistrat, siégeant en tant que juge unique, d’apprécier si le recours est manifestement infondé. Dans la négative, le recours est renvoyé devant le tribunal administratif siégeant en composition collégiale pour y statuer.
19A défaut de définition contenue dans la loi du 18 décembre 2015 de ce qu’il convient d’entendre par un recours « manifestement infondé », il appartient au soussigné de définir cette notion et de déterminer, en conséquence, la portée de sa propre analyse.
Il convient de prime abord de relever que l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 dispose que l’affaire est renvoyée ou non devant le tribunal administratif selon que le recours est ou n’est pas manifestement infondé, de sorte que la notion de « manifestement infondé » est à apprécier par rapport aux moyens présentés à l’appui du recours contentieux, englobant toutefois nécessairement le récit du demandeur tel qu’il a été présenté à l’appui de sa demande et consigné dans le cadre de son rapport d’audition.
Le recours est à qualifier de manifestement infondé si le rejet des différents moyens invoqués s’impose de manière évidente, en d’autres termes, si les critiques soulevées par le demandeur à l’encontre des décisions déférées sont visiblement dénuées de tout fondement.
Dans cet ordre d’idées, il convient d’ajouter que la conclusion selon laquelle le recours ne serait pas manifestement infondé n’implique pas pour autant qu’il soit nécessairement fondé. En effet, dans une telle hypothèse, aux termes de l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, seul un renvoi du recours devant une composition collégiale du tribunal administratif sera réalisé pour qu’il soit statué sur le fond dudit recours.
En ce qui concerne d’abord le moyen de légalité externe tenant à une insuffisance de motivation, il échet de préciser à titre liminaire que l’article 41 de la Charte prévoit que « (1) Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions, organes et organismes de l’Union.
(2) Ce droit comporte notamment : (…) c) l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions. (…) ».
Etant donné qu’il ressort clairement du libellé de cette disposition qu’elle ne s’adresse non pas aux Etats membres, mais uniquement aux institutions, aux organes et aux organismes de l’Union européenne, le moyen afférent encourt le rejet.
Il échet ensuite de relever que l’article 34 de la loi du 18 décembre 2015, « (1) Les décisions prises par le ministre en matière de protection internationale sont communiquées par écrit au demandeur dans un délai raisonnable. Toute décision négative est motivée en fait et en droit et les possibilités de recours sont communiquées par écrit au demandeur. (…) ».
Aux termes de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, toute décision administrative doit reposer sur des motifs légaux et les catégories de décisions y énumérées limitativement, en l’occurrence celles refusant de faire droit à la demande de l’intéressé, celles révoquant ou modifiant une décision antérieure, sauf si elles interviennent à la demande de l’intéressé et qu’elles y font droit, celles intervenant sur recours gracieux, hiérarchique ou de tutelle, celles intervenant après procédure consultative, lorsqu’elles diffèrent de l’avis émis par l’organisme consultatif ou lorsqu’elles accordent une dérogation à une règle générale, doivent formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui leur sert de fondement et des circonstances de fait à leur base.
A delà de la considération que la sanction de l’absence de motivation ne consiste pas dans l’annulation de l’acte visé, mais dans la suspension des délais de recours et celui-ci reste a priori valable, l’administration pouvant produire ou compléter les motifs postérieurement et 20même pour la première fois à la phase contentieuse1, force est de constater, à la simple lecture de l’acte litigieux, tel que repris in extenso ci-avant, que le ministre a amplement motivées les décisions y reprises tant en droit qu’en fait, en ce qu’il a résumé les déclarations du demandeur, indiqué les bases juridiques, à savoir les articles 27, paragraphes (1) a), c) et h) et 34, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 et a, par ailleurs, procédé à l’examen de la situation de fait telle que présentée par le demandeur à l’appui de la demande de protection internationale sur plusieurs pages.
Il s’ensuit que le moyen basé sur un défaut de motivation des décisions ministérielles déférées est dès lors à rejeter pour être non fondé.
En ce qui concerne ensuite l’argumentation du demandeur selon laquelle le ministre n’aurait pas procédé à un examen concret des faits, commis une erreur manifeste d’appréciation des faits, respectivement omis de prendre en considération son état de vulnérabilité, force est de retenir que ces reproches concernent essentiellement la mise en cause du bien-fondé des décisions déférées, de sorte à concerner le fond du recours, étant relevé que le seul fait de ne pas avoir réservé une suite favorable à une demande de protection internationale en retenant que lesdites conditions ne sont pas remplies au regard des textes applicables ne saurait manifestement pas permettre de retenir une quelconque illégalité externe desdites décisions.
1) Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée S’agissant en premier lieu du recours dirigé contre la décision ministérielle de statuer sur la demande de protection internationale du demandeur dans le cadre d’une procédure accélérée, le soussigné relève que la décision ministérielle déférée a été prise sur base des dispositions des points a), c), et h) de l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, aux termes duquel « Sous réserve des articles 19 et 21, le ministre peut statuer sur le bien-
fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée dans les cas suivants :
a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n’a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ; (…) c) le demandeur a induit les autorités en erreur en ce qui concerne son identité ou sa nationalité, en présentant de fausses indications ou de faux documents ou en dissimulant des informations ou des documents pertinents qui auraient pu influencer la décision dans un sens défavorable ; (…) h) le demandeur est entré ou a prolongé son séjour illégalement sur le territoire et, sans motif valable, ne s’est pas présenté aux autorités ou n’a pas présenté une demande de protection internationale dans les délais les plus brefs compte tenu des circonstances de son entrée ; (…) ».
Il s’ensuit qu’aux termes de l’article 27, paragraphe (1), point a), c) et h) de la loi du 18 décembre 2015, le ministre peut statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale par voie de procédure accélérée, s’il apparaît que les faits soulevés lors du dépôt de la demande sont sans pertinence au regard de l’examen de cette demande, si le demandeur 1 Cour adm., 20 octobre 2009, n° 25738C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 93 et les autres références y citées.
21a induit les autorités en erreur en ce qui concerne son identité ou sa nationalité, respectivement si ce dernier n’a pas présenté une demande de protection internationale dans les délais les plus brefs délais.
Les conditions pour pouvoir statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée étant énumérées à l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 de manière alternative et non point cumulative, une seule condition valablement remplie peut justifier la décision ministérielle à suffisance.
Le soussigné est dès lors amené à analyser si les moyens avancés par un demandeur à l’encontre de la décision du ministre de recourir à la procédure accélérée sont manifestement dénués de tout fondement, de sorte que leur rejet s’impose de manière évidente ou si les critiques avancées par lui ne permettent pas d’affirmer en l’absence de tout doute que le ministre a valablement pu se baser sur l’article 27, paragraphe (1), point a) c) et h) de la loi du 18 décembre 2015 pour analyser la demande dans le cadre d’une procédure accélérée, de sorte que le recours devra être renvoyé devant une composition collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.
Afin d’analyser d’abord si le demandeur n’a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale, il y a d’abord lieu de relever qu’en vertu de l’article 2, point h) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.
La notion de « réfugié » est définie par l’article 2 f) de ladite loi comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner, et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 45 ».
Par ailleurs, aux termes de l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 :
« Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève doivent:
a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, paragraphe 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
ou b) être une accumulation de diverses mesures, y compris des violations des droits de l’homme, qui soit suffisamment grave pour affecter un individu d’une manière comparable à ce qui est indiqué au point a) ».
Aux termes de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015 : « Les acteurs des persécutions ou atteintes graves peuvent être :
22 a) l’Etat ;
b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci ;
c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions ou atteintes graves ».
Finalement, l’article 40 de la même loi dispose que : « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par :
a) l’Etat, ou b) des partis ou organisations y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.
(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection.
(3) Lorsqu’il détermine si une organisation internationale contrôle un Etat ou une partie importante de son territoire et si elle fournit une protection au sens du paragraphe (2), le ministre tient compte des orientations éventuellement données par les actes du Conseil de l’Union européenne en la matière ».
Il suit de ces dispositions légales que l’octroi du statut de réfugié est notamment soumis à la triple condition que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 f) de la loi du 18 décembre 2015, à savoir la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou l’appartenance à un certain groupe social, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40 de la loi du 18 décembre 2015, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles ne sont à qualifier comme acteurs que dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 40 de la loi du 18 décembre 2015 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine.
Quant au statut conféré par la protection subsidiaire, il convient de souligner qu’aux termes de l’article 2 g) de la loi 18 décembre 2015 est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes (1) et (2), n’étant pas 23applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ».
L’article 48 de la même loi énumère en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), la peine de mort ou l’exécution, la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine, ou encore des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.
Il s’ensuit que l’octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis aux conditions que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, entrent dans le champ d’application de l’article 48 précité de la loi du 18 décembre 2015, à savoir qu’ils répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c) de l’article 48, précité, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 39 et 40 de cette même loi, étant relevé que les conditions de la qualification d’acteur sont communes au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire.
Force est encore de relever que la définition du réfugié contenue à l’article 2 f) de la loi du 18 décembre 2015 retient qu’est un réfugié une personne qui « craint avec raison d’être persécutée », de sorte à viser une persécution future sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur ait été persécuté avant son départ de son pays d’origine. L’article 2 g), précité, définit également la personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire comme étant celle qui avance « des motifs sérieux et avérés de croire que », si elle est renvoyée dans son pays d’origine, elle « courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48 ». Cette définition vise partant une personne risquant d’encourir des atteintes graves futures, sans qu’il n’y ait nécessairement besoin que le demandeur ait subi des atteintes graves avant son départ de son pays d’origine. Par contre, s’il s’avérait que tel avait été le cas, l’article 37, paragraphe (4) de la loi du 18 décembre 2015 établit une présomption simple que les persécutions ou les atteintes graves antérieures d’ores et déjà subies se reproduiront en cas de retour dans le pays d’origine, étant relevé que cette présomption pourra être renversée par le ministre par la justification de l’existence de bonnes raisons de penser que ces persécutions ou atteintes graves ne se reproduiront pas.
Les conditions d’octroi du statut de réfugié, respectivement de celui conféré par la protection subsidiaire devant être réunies cumulativement, le fait que l’une d’elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur ne saurait bénéficier du statut de réfugié, respectivement de la protection subsidiaire.
A titre liminaire, il convient de préciser qu’en vertu de l’article 2, point p) de la loi du 18 décembre 2015, une demande de protection internationale est à analyser par rapport au pays d’origine du demandeur, c’est-à-dire le pays dont il possède la nationalité, de sorte qu’en l’espèce, le risque pour le demandeur de subir des persécutions ou des atteintes graves en Italie n’est d’aucune pertinence dans le présent contexte.
Etant donné ensuite que la décision déférée met en doute la crédibilité du récit du demandeur dans sa globalité, il y a lieu de préciser que le juge doit procéder à l’évaluation de la situation personnelle du demandeur, tout en prenant en considération la situation telle qu’elle se présente à l’heure actuelle dans le pays de provenance. Cet examen ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il s’agit également d’apprécier la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.
24 En effet, l'examen de crédibilité du récit d'un demandeur d'asile constitue une étape nécessaire pour pouvoir répondre à la question si le demandeur d'asile a présenté ou non des raisons pertinentes de craindre d'être persécuté du fait de l'un des motifs prévus par la Convention de Genève relative au statut des réfugiés du 28 juillet 1951, dénommée ci-après « la Convention de Genève », ou de risquer de subir des atteintes graves au sens de l’article 48 de la loi du 19 décembre 2015. Il s’ensuit qu’il appartient au soussigné de se prononcer en premier lieu sur la question de crédibilité du récit, d’autant plus qu’en l’espèce, c’est la crédibilité générale du demandeur qui est mise en doute, influant nécessairement sur l’appréciation du caractère manifestement infondé ou non des différents volets du recours dont le soussigné est saisi.
A cet égard, il y encore lieu de relever que si des éléments de preuve manquent pour étayer les déclarations du demandeur de protection internationale, celui-ci doit bénéficier du doute en application de l’article 37, paragraphe (5) de la loi du 18 décembre 2015, si, de manière générale, son récit peut être considéré comme crédible, s’il s’est réellement efforcé d’étayer sa demande, s’il a livré tous les éléments dont il disposait et si ses déclarations sont cohérentes et ne sont pas en contradiction avec l’information générale et spécifique disponible, le principe du bénéfice du doute étant, en droit des réfugiés, d’une très grande importance alors qu’il est souvent impossible pour les réfugiés d’apporter des preuves formelles à l’appui de leur demande de protection internationale et de leur crainte de persécution ou d’atteintes graves.2 Or, cette présomption n’a pas vocation à jouer en l’espèce, alors que le soussigné se doit de constater que c’est à bon droit que le ministre a relevé que le récit du demandeur manque manifestement de cohérence.
En effet, de prime abord, il y a lieu de constater qu’il y toujours un doute concernant l’identité et la nationalité véritables du demandeur, qui s’est présenté aux autorités luxembourgeoises comme s’appelant (A), de nationalité tunisienne, né … à …, tout en versant, après son entretien sur les motifs de sa demande de protection internationale, des documents italiens, selon lesquels il s’appellerait …, né le … à … en Libye, de nationalité libyenne, étant encore relevé qu’il ressort d’un échange, versé au dossier administratif, entre les autorités italiennes et les services du ministère que ces dernières soulignent que le demandeur n’est connu en Italie que sous le nom de …, né le …, de nationalité tunisienne, identité avec laquelle il avait déposé une demande de protection internationale en Italie en date du 17 mai 2017.
Il convient ainsi de retenir que des doutes évidents subsistent quant à l'identité du demandeur, qu'il s'agisse de celle qu'il revendique en tant que ressortissant tunisien à l’appui de sa demande de protection internationale, actuellement sous examen, ou de celle que les autorités italiennes lui auraient attribuée dans le cadre d'une affaire pénale majeure où il aurait été un témoin clé, étant relevé qu’il ressort des renseignements de la part des autorités italiennes que le demandeur s’était bien présenté sous le nom de …, de nationalité tunisienne, lors de l’introduction de sa demande de protection internationale en date du 17 mai 2017, de sorte que c’est à juste titre que le ministre a relevé qu’il y a une contradiction évidente entre son affirmation appuyée par les documents dont il verse des copies, selon laquelle les autorités lui auraient attribué la nationalité libyenne sur ses papiers, alors qu’il ressort pourtant des 2 Trib. adm. 16 avril 2008, n° 23855, Pas. adm. 2023, V° Etrangers, n° 140 et les autres références y citées.
25explications de ces dernières que le demandeur ne leur serait connu que sous le nom de …, de nationalité tunisienne.
Force est d’ailleurs de relever que la requête introductive d’instance du demandeur reste en défaut de fournir des explications complémentaires à cet égard. Au contraire, le demandeur concède lui-même, dans son recours, que « les documents fournis par les autorités italiennes n'ont pas permis de lever toutes les ambiguïtés, et ne répondent pas aux questions posées quant à la cohérence entre les identités utilisées et les mesures de sécurité évoquées », de sorte que le recours est à considérer comme étant manifestement en défaut d’établir, à l’ombre de tout doute, les véritables identité, nationalité et date de naissance du demandeur, étant rappelé qu’en raison des incohérences à ce sujet, le demandeur ne saurait plus profiter du bénéfice du doute et de l’affranchissement afférent de son obligation de prouver son récit au sens de l’article 37, paragraphe (5) précité de la loi du 18 décembre 2015.
Si le demandeur a, lors de ses entretiens, toujours affirmé que des documents existeraient pour étayer ses dires, force est de constater qu’il n’a pourtant pas fait le moindre effort pour ce faire en ce qui concerne notamment son identité, sans que cela ne soit énervé par le fait qu’il affirme ne pas avoir eu le temps nécessaire en raison de la procédure accélérée dont il a fait l’objet, alors que le demandeur aurait dû être tout à fait conscient du fait que la question de son identité se poserait au moment de déposer au Luxembourg une demande de protection internationale sous une autre identité que celle utilisée en Italie, de même qu’il a attendu 7 années depuis sa demande de protection internationale en Italie avant de déposer la demande actuellement litigieuse et qu’un délai de plus d’un an s’est encore écoulé entre le dépôt de cette dernière demande et la décision y relative actuellement déférée.
Force est également de relever que le recours reste manifestement en défaut de fournir la preuve de l’existence des documents d’identité tunisiens dont le demandeur aurait disposé, mais qui lui auraient été dérobés en Italie, étant relevé à cet égard que le demandeur se contredit d’ailleurs en affirmant avoir une photo de la dernière page de son passeport tunisien, non versé au débat, alors qu’il avait expliqué, dans le cadre de son entretien, que les autorités tunisiennes lui auraient, au contraire, refusé la délivrance d’un titre de voyage à défaut pour lui d’avoir payé ses arriérés d’impôt.
Le demandeur est également relativement confus en ce qui concerne sa situation administrative en Italie, où il a d’abord prétendu ne pas avoir déposé de demande de protection internationale, pour ensuite avouer que tel aurait bien été le cas, et finalement expliquer s’être vu accorder un titre de séjour valable en Italie, information qui, outre de ne pas être corroborée par les copies de documents qu’il a versé à l’appui de sa demande, est même contredite par les autorités italiennes, selon lesquelles il se trouverait en situation irrégulière en Italie depuis le rejet, lui opposé en 2018, de son recours contentieux dirigé contre la décision de refus de protection internationale.
Il s’ensuit que les explications du demandeur selon lesquelles les gardes-frontières lui auraient octroyé une identité factice de ressortissant libyen en vue de le protéger dans le cadre d’un procès contre des passeurs manquent clairement de crédibilité, alors que le demandeur y est seulement connu sous le nom de …, de nationalité tunisienne, incohérence que le demandeur manque également de combattre par de la documentation afférente qui existerait pourtant en Italie selon lui, de sorte que c’est à bon droit que le ministre a pu retenir que le récit relatif à sa crainte de représailles, en Tunisie, de la part des ressortissants tunisiens contre lesquels il aurait témoigné en justice, manque de crédibilité, sans que la requête introductive d’instance n’ait 26fourni le moindre élément susceptible de corroborer les affirmations du demandeur à cet égard.
En tout état de cause, la référence à des articles de presse, par ailleurs non versés, respectivement à des jurisprudences relatant la possibilité, en Italie, de se voir accorder une autre identité en tant que « collaborateur de justice », ne saurait suffire à cet égard.
Il en va de même des motifs avancés relatifs à la prétendue fermeture de son établissement en Tunisie en 2011 et à son « impossibilité » en 2017 de payer ses arriérés d’impôts, affirmations qu’il assure, dans son entretien, pouvoir démontrer avec la documentation afférente, mais par rapport auxquelles, dans sa requête introductive d’instance, le demandeur se limite à expliquer ne plus être en possession du moindre document y relatif, eu égard à ses errements en Europe depuis son départ de la Tunisie, il y 7 années, et ce, sans fournir une quelconque explication quant à ce changement de position, étant relevé que le demandeur n’explique par exemple pas pourquoi il ne lui serait pas possible de recourir à l’aide de son père, actif dans l’immobilier en Tunisie et qui l’aurait d’ailleurs longtemps soutenu financièrement au cours des dernières années, pour se procurer des documents utiles à cet égard. Par ailleurs, l’impossibilité matérielle de payer ses impôts est encore contredite, tel que souligné par la décision déférée, par les explications du demandeur sur le coût total de sa fuite vers l’Europe pour laquelle il affirme avoir réglé un multiple de sa dette d’impôt.
Cette incohérence renforce le doute quant à la crédibilité générale du récit du demandeur, qui a non seulement attendu 7 années pour déposer sa demande de protection internationale au Luxembourg, mais également affirmé avoir déposé sa demande à un moment où il se serait retrouvé sans moyens et fatigué de ses errances en Europe en situation illégale.
Force est dès lors de retenir que face aux incohérences, zones d’ombre et doutes a priori valablement mis en avant par le ministre dans la décision déférée, telle que reprise en intégralité ci-avant, la requête introductive d’instance du demandeur, reste manifestement en défaut de prendre valablement position quant à cette mise doute de sa crédibilité, mise à part des affirmations non autrement circonstanciées ni documentées, respectivement le renvoi à des informations générales ou jurisprudences sans lien établi avec sa situation personnelle.
Il y a dès lors manifestement un doute sur non seulement sur l’identité véritable du demandeur, mais également, et notamment de ce chef, sur la véracité des faits invoqués, constat qui n’est nullement contrecarré par les explications générales de la requête introductive d’instance, laquelle se limite à de simples contestations et critiques générales de l’appréciation ministérielle sur ce point.
Il s’ensuit que le recours est à considérer comme étant manifestement infondé sur ce point, en ce qu’il ne met pas en cause le doute sur la crédibilité du récit du demandeur, tel que valablement soulevé par le ministre.
Etant donné qu’au vu des considérations qui précèdent, le recours est manifestement infondé en ce qui concerne le volet de la crédibilité du demandeur, laquelle est ainsi irrémédiablement compromise, il en va nécessairement de même pour le recours en ce qu’il est dirigé contre la décision du ministre de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, dans la mesure où, à défaut d’un récit crédible, le demandeur n’est manifestement pas en mesure d’étayer le caractère pertinent des faits invoqués au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale, de sorte qu’il reste manifestement en défaut 27d’invalider le choix du ministre de statuer sur le demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée.
Il s’ensuit que le recours est d’ores et déjà à considérer comme étant manifestement infondé par rapport au point a) de l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, de sorte qu’il n’y a plus lieu de statuer plus en avant sur les autres bases légales alternatives invoquées par le ministre à ce titre.
Il s’ensuit que le recours en réformation contre la décision du ministre de statuer dans le cadre d’une procédure accélérée est à rejeter comme étant manifestement non fondé.
2) Quant au recours en réformation de la décision du ministre portant refus d’une protection internationale En ce qui concerne le volet du recours dirigé contre le refus d’octroi d’une protection internationale, force est de rappeler que le soussigné vient ci-avant de retenir que la crédibilité générale du demandeur est irrémédiablement compromise, de sorte que c’était à bon droit que le ministre a décidé de refuser la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée.
Or, à défaut d’un récit crédible, le demandeur n’est pas en mesure d’établir l’existence d’une persécution ou d’une atteinte grave susceptible de justifier dans son chef la reconnaissance d’une protection internationale, de sorte que le recours relatif à ce deuxième volet de la décision ministérielle déférée est également à rejeter pour être manifestement infondé, sans qu’il n’y ait lieu de statuer plus en avant et notamment sur le moyen relatif à une violation de l'article 37 de la loi du 18 décembre 2015, alors que ce article n’est applicable que dans l’hypothèse d’une instruction du fond de la demande, ce qui n’est pas le cas en l’espèce, au vu du manque de crédibilité du récit dans sa globalité.
C’est ainsi à bon droit que le ministre a partant refusé au demandeur une protection internationale, demande dont il est dès lors également à débouter dans le cadre du présent recours.
3) Quant au recours tendant à la réformation de la décision ministérielle portant ordre de quitter le territoire Aux termes de l’article 34, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015, « une décision du ministre vaut décision de retour. (…) ». En vertu de l’article 2 q) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire ». Si le législateur n’a pas expressément précisé que la décision du ministre visée à l’article 34, paragraphe (2), précité, est une décision négative, il y a lieu d’admettre, sous peine de vider la disposition légale afférente de tout sens, que sont visées les décisions négatives du ministre. Il suit dès lors des dispositions qui précèdent que l’ordre de quitter est la conséquence automatique du refus de protection internationale.
Dans la mesure où le soussigné vient de retenir que le recours dirigé contre le refus d’une protection internationale est manifestement infondé et que c’est partant à juste titre que le ministre a rejeté la demande de protection internationale du demandeur, impliquant qu’un retour du demandeur dans son pays d’origine ne l’expose ni à des actes de persécution ni à des 28atteintes graves, le ministre a valablement pu assortir sa décision de refus d’un ordre de quitter le territoire, sans violer le principe de non refoulement dont le demandeur se prévaut dans ce contexte. Il en va de même en ce qui concerne une éventuelle violation des articles 3 de la CEDH, respectivement 4 de la Charte.
Il s’ensuit et à défaut de tout autre moyen que le recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire est à son tour à rejeter comme étant manifestement infondé.
Par ces motifs, Le vice-président, siégeant en remplacement du premier vice-président, présidant la quatrième chambre du tribunal administratif, statuant contradictoirement ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 13 mars 2025 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale de Monsieur (A) dans le cadre d’une procédure accélérée, contre celle portant refus d’octroi d’un statut de protection internationale et contre l’ordre de quitter le territoire ;
au fond, déclare le recours dirigé contre ces trois décisions manifestement infondé et en déboute ;
déboute le demandeur de sa demande de protection internationale ;
condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 avril 2025 par le soussigné, Olivier POOS, vice-président au tribunal administratif, en présence du greffier Marc WARKEN.
s.Marc WARKEN s.Olivier POOS Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29 avril 2025 Le greffier du tribunal administratif 29