Tribunal administratif N° 48365 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2025:48365 4e chambre Inscrit le 13 janvier 2023 Audience publique du 29 avril 2025 Recours formé par Madame (A), … (Allemagne), contre une décision du conseil communal de la Ville de … et contre une décision du ministre de l’Intérieur en matière de résiliation de contrat
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JUGEMENT
Vu la requête, inscrite sous le numéro 48365 du rôle et déposée le 13 janvier 2023 au greffe du tribunal administratif par Maître Olivier UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame (A), demeurant à D-… (Allemagne), …, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du conseil communal de la Ville de … du 28 octobre 2022 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022, ainsi que contre la décision d’approbation du ministre de l’Intérieur prise en date du 27 décembre 2022 ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice suppléant Christine KOVELTER, en remplacement de l’huissier de justice Martine LISÉ, demeurant à Luxembourg, du 18 janvier 2023 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville de …, représentée par son collège des bourgmestre et échevins actuellement en fonctions, établie et ayant sa maison communale sis à L-… ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 avril 2023 ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 18 avril 2023 par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de l’administration communale de la Ville de …, préqualifiée ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 11 mai 2023 par Maître Olivier UNSEN pour compte de Madame (A), préqualifiée ;
Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 23 mai 2023 ;
Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 juin 2023 par Maître Anne-Laure JABIN, au nom et pour le compte de l’administration communale de la Ville de …, préqualifiée ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Paul SCHINTGEN en sa plaidoirie à l’audience publique du 26 novembre 2024, Maître Olivier UNSEN et Maître Anne-Laure JABIN s’étant excusés.
Vu l’avis du tribunal administratif du 23 avril 2025 prononçant la rupture du délibéré en vue d’un changement de composition ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 25 avril 2025, les parties étant excusées.
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Par contrat de travail à durée déterminée du 1er mars 2017, Madame (A), ci-après dénommée « Madame (A) », fut engagée sous le régime d’employé communal par l’administration communale de la Ville de …, ci-après dénommée « la Commune de … », en qualité d’éducateur diplômé au sein du service des structures d’accueil de ladite commune à partir du 1er mars 2017 jusqu’au 28 février 2018, à raison de 30 heures par semaine.
Par contrat de travail à durée indéterminée du 8 mars 2018, Madame (A) fut engagée sous le régime d’employé communal par la Commune de … en qualité d’éducateur diplômé au sein du service des structures d’accueil de ladite commune avec effet au 1er mars 2018, à raison de 30 heures par semaine.
Par avenant du 14 juin 2018, le temps de travail de Madame (A) fut porté à 40 heures par semaine avec effet au 1er juillet 2018.
Madame (A) se trouva en arrêt de maladie à partir du 8 octobre 2020.
Suite à un examen médical de contrôle demandé par la Commune de … par courrier daté au 6 juillet 2021, le médecin de contrôle, le Dr. R.K., déclara, en date du 26 juillet 2021, l’incapacité de travail justifiée jusqu’au 30 juillet 2021 inclus, tout en observant que Madame (A) serait « capable de travailler à partir du 31.07.2021 ».
Madame (A) fut en congé de récréation du 31 juillet 2021 jusqu’au 24 août 2021, date à partir de laquelle elle fut à nouveau en arrêt de maladie, constaté tant par un certificat médical de son médecin généraliste, le Dr S.B., que par celui d’une clinique indiquant que Madame (A) y serait en traitement jusqu’au 29 septembre 2021.
Madame (A) fut ainsi en arrêt de maladie du 24 août 2021 au 6 décembre 2021.
Par courrier recommandé du 8 novembre 2021, la Commune de … s’adressa à Madame (A) dans les termes suivants :
« (…) Conformément à l’article 7, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 déterminant le régime des indemnités des employés communaux et étant donné que vous vous trouvez en congé de maladie depuis le 8 octobre 2020, on voulait vous informer que le délai de six mois d’absences pour raisons de santé est écoulé et que le conseil communal est en droit de résilier le contrat de travail en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raison de santé de l’employé communal qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires communaux.
2 Par la présente on voulait vous prévenir que vous pouvez demander sur base d’un rapport médical circonstancié de votre médecin traitant, une prolongation du délai précité d’une durée de trois mois supplémentaires. Sur base de ce rapport médical, le collège des bourgmestre et échevins décide du moment de déclencher la procédure de résiliation. (…) ».
Suite à la réception du dossier médical de Madame (A), le collège échevinal de la Commune de … informa cette dernière en date du 2 décembre 2021 de sa décision de lui accorder une prolongation du délai de trois mois avant le déclenchement de la procédure de résiliation, soit jusqu’au 23 février 2022.
Suite à des nouveaux certificats médicaux versés par Madame (A), attestant son incapacité de travail jusqu’au 31 janvier 2022, la Commune de …, en date du 20 décembre 2021, demanda un examen médical de Madame (A) auprès du médecin du travail conformément à l’article 6, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 concernant la santé et la sécurité du travail et le contrôle médical dans la fonction publique, désigné ci-après par « le règlement grand-ducal du 5 mars 2004 », demande suite à laquelle le médecin du travail, le Dr. C.M., fit les observations suivantes en date du 2 février 2022 : « (…) Madame (A) a été examinée et informée.
Comme elle est en congé de maladie, je ne peux pas me prononcer sur son aptitude à son poste de travail.
Le fonctionnement de la commission mixte lui a été expliqué suite au fait qu’elle se trouve en congé de maladie à long terme. (…) ».
Par courrier du 8 février 2022, Madame (A) présenta une proposition de reprise progressive de travail à la Commune de …, laquelle fut refusée par cette dernière en date du 14 février 2022.
Le 16 février 2022, la Commune de … saisit la Caisse nationale d’Assurance Pension, ci-après désignée par « la CNAP », afin que cette dernière se prononce sur l’invalidité professionnelle de Madame (A).
Par courrier du 26 juillet 2022, la CNAP informa la Commune de … que Madame (A) « (…) n’est pas à considérer comme invalide au sens de l’alinéa 1 de l’article 187 du Code de la Sécurité Sociale. (…) », de sorte à ne pas avoir droit à une pension d’invalidité.
Par courrier du 25 août 2022, Madame (A) s’adressa à la Commune de … en vue de solliciter un examen médical auprès du médecin du travail.
En date du 6 septembre 2022, la Commune de … demanda un examen médical pour Madame (A) auprès du médecin du travail conformément à l’article 6, alinéa 1er du règlement grand-ducal du 5 mars 2004, demande suite à laquelle le médecin du travail, le Dr. C.M., fit les observations suivantes en date du 15 septembre 2022 : « (…) Madame (A) s’est présentée en visite médicale le 15/09/2022 L’agente est sous couvert d’un certificat d’ITT, un avis d’aptitude/in aptitude ne peut être délivré par conséquent. Suivant l’examen de ce jour, une reprise à temps complet paraît difficilement envisageable.
Une reprise progressive du travail pour raison thérapeutique est conseillée lorsqu’une reprise est envisagée. (…) ».
Par courrier du 7 septembre 2022, le collège échevinal de la Commune de … informa Madame (A) de son intention de procéder à la résiliation de son contrat de travail, tout en l’invitant à prendre position dans un délai de huit jours, sur base des considérations suivantes :
« (…) A l’issue de la procédure prévue à l’article 7, point 3, du règlement grand-ducal modifié du 28 juillet 2017 déterminant le régime des employés communaux, nous sommes au regret de vous informer que le collège échevinal a pris la décision de proposer au conseil communal de résilier votre contrat de travail signé en date du 1er mars 2017.
Cependant on voulait vous rendre attentif qu’en vertu de l’article 9 du règlement grand-
ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes et arrêt 46817C de la Cour administrative du 3 mai 2022, un délai de huit jours vous est accordé pour présenter vos observations et pour demander un rendez-vous auprès du collège échevinal de de la Ville de … pour être entendu en personne. (…) ».
Une entrevue eut lieu en date du 18 octobre 2022 permettant à Madame (A), accompagnée de son litismandataire, de faire des observations. Un rapport de cette entrevue fut dressé.
Par courrier du 18 octobre 2022, Madame (A) présenta une nouvelle proposition de reprise progressive de travail à la Commune de …, laquelle fut acceptée par cette dernière en date du 20 octobre 2022, sous condition d’une décision conforme du conseil communal lors de sa séance du 28 octobre 2022.
En date du 28 octobre 2022, le conseil communal décida, dans sa séance du même jour, de prononcer la résiliation du contrat de travail de Madame (A), la délibération du conseil communal étant rédigée dans les termes suivants :
« (…) Vu la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 ;
Vu le règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 déterminant le régime et les indemnités des employés communaux et notamment son article 7(3) ;
Considérant qu'en sa séance du 10 février 2017, point de l'ordre du jour n°14b), le conseil communal a procédé à l'engagement de Madame (A), née le … et demeurant actuellement à D-…, à durée déterminée jusqu'au 28 février 2018 auprès de la Maison Relais de la Ville de … (décision approuvée par l'autorité supérieure en date du 18 avril 2017, réf.
n°EC/2310/17) ;
Considérant qu'en sa séance du 9 mars 2018, point de l'ordre du jour n°14, le conseil communal a procédé à l'engagement de Madame (A) en tant qu'employée communale dans le groupe d'indemnité B1, sous-groupe éducatif et psycho-social, à durée indéterminée (décision approuvée par l'autorité supérieure en date du 1er juin 2018, réf. n°EC/2451/18) ;
Considérant que le contrat de travail y relatif conclu en date du 8 mars 2018 est entré en vigueur avec effet rétroactif au 1er mars 2018 ;
Notant que Madame (A) se trouve en congé de maladie depuis le mois d'octobre de l'année 2020 ;
4 Considérant qu'en date du 16 février 2022, le collège échevinal a décidé de lancer la procédure de résiliation du contrat de travail conformément à l'article 7 (3) du règlement grand-ducal susmentionné et de saisir la Caisse nationale d'Assurance Pension (CNAP) pour qu'elle se prononce sur l'invalidité professionnelle de l'employée communale ;
Considérant que par son courrier du 26 juillet 2022, la CNAP a donné un avis négatif quant à l'invalidité professionnelle de Madame (A) ;
Après en avoir dûment délibéré conformément à la loi ;
décide avec 9 voix oui et 1 abstention (procédant, par scrutin secret) de résilier le contrat de travail conclu en date du 8 mars 2018 portant engagement de Madame (A), née le … et demeurant actuellement à D-…, en tant qu'employée dans le groupe d'indemnité B1, sous-groupe éducatif et psycho-social, et ce avec effet au 1er novembre 2022.
présente délibération sera transmise à l'autorité supérieure aux fins d'approbation. (…) ».
Par courrier recommandé du 28 octobre 2022, Madame (A) fut informée par le collège échevinal de la Commune de … que le conseil communal avait décidé, dans sa séance du même jour, de prononcer la résiliation de son contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022, ce courrier étant libellé dans les termes suivants :
« (…) A l’issue de la procédure prévue à l’article 7, point 3, du règlement grand-ducal modifié du 28 juillet 2017 déterminant le régime des employés communaux, nous sommes au regret de vous informer que le conseil communal a pris la décision lors de sa séance du 28 octobre 2022 de résilier votre contrat de travail signé en date du 1er mars 2017. La résiliation prendra effet le 1er novembre 2022. Ainsi, votre dernier jour de travail sera le lundi 31 octobre 2022.
Nous vous prions de bien vouloir nous remettre votre badge et vos clés lors de votre dernier jour de travail et de contacter le bureau des ressources humaines concernant votre congé et votre compte épargne temps restant. (…) ».
Par courrier recommandé du 2 novembre 2022, le collège échevinal de la Commune de … rectifia une erreur matérielle dans le courrier de résiliation du 28 octobre 2022, portant sur la date de début de son contrat de travail à durée indéterminée laquelle ayant été le 1er mars 2018 et non pas le 1er mars 2017 tel qu’erronément indiqué dans ledit courrier.
Par courriel du 9 novembre 2022, le litismandataire de Madame (A) contesta la résiliation de son contrat de travail et demanda la communication de son dossier administratif.
Par courrier du 9 novembre 2022, le litismandataire de la Commune de … notifia les motifs de résiliation à Madame (A) et l’informa que la décision d’approbation était en cours.
Par courriel du 16 décembre 2022 et courrier du 15 décembre 2022, le litismandataire de Madame (A) contesta les motifs de résiliation de son contrat de travail et réitéra sa demande de communication du dossier administratif de cette dernière.
Par courriel du 21 décembre 2022, le litismandataire de la Commune de … demanda au litismandataire de Madame (A) de préciser sa demande de communication du dossier administratif.
En date du 27 décembre 2022, le ministre de l’Intérieur, ci-après désigné par « le ministre », porta approbation de la décision précitée du conseil communal de la Commune de … du 28 octobre 2022.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 13 janvier 2023, inscrite sous le numéro 48365 du rôle, Madame (A) a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision précitée du conseil communal de la Commune de … du 28 octobre 2022 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022, ainsi que de la décision d’approbation du ministre prise en date du 27 décembre 2022.
I) Recours contre la décision prise par la Commune Aux termes de l’article 10 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, « Les contestations résultant du contrat d’emploi, de la rémunération et des sanctions et mesures disciplinaires sont de la compétence du tribunal administratif, statuant comme juge du fond.
(…) », de sorte que le tribunal administratif est compétent pour statuer comme juge du fond pour connaître des contestations résultant du contrat d’emploi des employés communaux, parmi lesquelles sont comprises celles relatives à la résiliation dudit contrat.
Ainsi, le recours principal en réformation dirigé contre la décision du conseil communal de la Commune de … du 28 octobre 2022 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022, est recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.
Il n’y a, dès lors, pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.
Le tribunal relève encore que se pose en l’espèce une question de compétence du tribunal en ce qui concerne la demande figurant au dispositif de la requête introductive d’instance tenant à voir ordonner la « réintégration progressive » de Madame (A).
Force est en effet de relever que si le tribunal dispose en l’espèce d’un pouvoir de réformation, c’est-à-dire qu’il est en principe appelé à remplacer la décision viciée, dans les limites de l’objet du recours, par une décision nouvelle, conforme à la loi, il se trouve cependant dans l’impossibilité d’ordonner la réintégration de la demanderesse à défaut de base légale l’autorisant à formuler des injonctions à l’égard de l’employeur1, de sorte qu’il doit se déclarer incompétent pour ce volet du recours.
1 Trib. adm., 26 mai 2020, n° 41893 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Fonction publique, n° 720.A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse reprend les rétroactes gisant à la base de la décision déférée, et explique qu’elle souffrirait, entre autres, d’une fibromyalgie, ainsi que de douleurs chroniques.
Elle soutient que lors de son examen médical du 26 juillet 2021 auprès du médecin du travail, il y aurait été convenu qu’elle serait déclarée provisoirement apte à travailler à partir du 31 juillet 2021, alors qu’au mois de juin 2021, elle aurait obtenu l’accord pour un congé allant du 2 août 2021 au 27 août 2021. La demanderesse indique, dans ce contexte, que pendant son congé, il lui aurait été demandé d’essayer de maîtriser à nouveau son quotidien d’une façon autonome, notamment faire des courses, conduire en voiture et sortir, ce qui n’aurait pas été possible pendant son incapacité de travail. Elle fait encore souligner que ses responsables auraient été au courant qu’elle aurait fait une demande pour un traitement stationnaire au Reha-
Zentrum Bernkastel-Kues lequel aurait été accordé pendant son congé et fixé du 25 août 2021 au 29 septembre 2021. A sa sortie du traitement stationnaire, elle explique qu’elle aurait toujours été inapte à reprendre le travail.
La demanderesse fait encore valoir que lors de l’examen médical du 2 février 2022 auprès du médecin du travail, ce dernier lui aurait expliqué la procédure de reclassement et lui aurait proposé une reprise progressive du travail.
Elle soutient, par ailleurs, que suivant une information reçue par la CNAP en date du 10 août 2022 par téléphone, la Commune de … aurait reçu un courrier de la CNAP indiquant qu’elle ne serait pas invalide, mais qu’une procédure de reclassement devrait être lancée.
La demanderesse indique avoir participé à une entrevue en date du 19 août 2022 avec les responsables des structures d’accueil et Madame … de la Commune de …, mais que la Commune aurait refusé de saisir le médecin du travail d’une demande de reclassement pour son compte. Lors de son examen médical auprès du médecin du travail en date du 19 septembre 2022, celui-ci lui aurait conseillé une reprise progressive du travail pour raison thérapeutique.
Suite à l’entrevue du 18 octobre 2022 en vue de la résiliation de son contrat de travail, la demanderesse soutient qu’elle aurait à nouveau soumis une proposition de son médecin traitant en vue d’une reprise progressive de son travail et indique avoir repris son travail à partir du 24 octobre 2022.
En droit, la demanderesse invoque d’abord une violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017.
Elle conclut, dans ce contexte, à un défaut de motivation, d’une part, de la notification de la résiliation de son contrat de travail datée au 28 octobre 2022, sinon datée au 2 novembre 2022, et, d’autre part, de la délibération du conseil communal du 28 octobre 2022, transmise à son litismandataire par courriel du 21 décembre 2022, alors que cette délibération ne contiendrait pas de motivation justifiant la résiliation de son contrat de travail.
La demanderesse fait encore valoir, à cet égard, que la décision du conseil communal du 28 octobre 2022 n’aurait fait l’objet d’une approbation du ministre de l’Intérieur qu’en date du 27 décembre 2022, de sorte que la notification de la résiliation de son contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022 serait contraire à la loi, de sorte à encourir la réformation.
Elle invoque, deuxièmement, une violation de l’article 7 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, au motif que la Commune de … ne l’aurait pas informée deux mois avant l’écoulement du délai de six mois d’absences pour raisons de santé de l’approche de la fin de ce délai de six mois. La demanderesse soutient avoir repris progressivement son travail à partir du 24 octobre 2022, de sorte que la Commune de … aurait renoncé à procéder à la résiliation de son contrat de travail et aurait ainsi accepté la proposition de réintégration progressive au poste de travail, rendant ainsi la notification de la résiliation du contrat de travail avec effet au 1er novembre 2022, contraire à la loi.
En troisième lieu, la demanderesse reproche à la décision litigieuse d’avoir violé l’article 11 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004, lequel stipulerait que si un deuxième avis conclurait à l’inaptitude de l’agent à son poste de travail, le collège des bourgmestre et échevins devrait dans la mesure du possible lui proposer un autre poste, correspondant aux mêmes grades et niveau de rémunération que ceux du poste pour lequel il serait déclaré inapte par le médecin du travail. Ainsi, dans la mesure où le médecin du travail aurait, lors de son examen médical du 19 septembre 2022, conclut qu’une reprise à temps complet paraîtrait difficilement envisageable et qu’une reprise progressive du travail pour raison thérapeutique serait conseillée, la demanderesse estime qu’elle aurait présenté une inaptitude partielle temporaire à son poste de travail, de sorte que le collège des bourgmestre et échevins, n’ayant pas réclamé contre la déclaration d’inaptitude partielle constatée par le médecin du travail, aurait dû lui appliquer les dispositions de l’article 11 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004 en saisissant le médecin du travail d’une demande de reclassement, sinon continuer la reprise progressive de travail telle qu’elle aurait été entamée et proposée par le médecin du travail et le médecin traitant.
La demanderesse conclut finalement à un excès de pouvoir en ce que la décision litigieuse violerait le principe de proportionnalité. Elle rappelle, à cet égard, qu’au moment d’adopter un acte, une autorité administrative devrait se fonder sur des faits réels, entreprendre une appréciation correcte, faire une application exacte du droit applicable, respecter les principes et les textes auxquels elle serait soumise et poursuivre un but conforme à celui pour lequel ses pouvoirs lui seraient conférés. Le tribunal administratif devrait, de son côté, sanctionner tout dépassement indu de la marge d’appréciation de la part de l’autorité administrative ayant pris la décision litigieuse. Elle fait encore plaider que le principe de proportionnalité, sans être, à proprement parler, une composante de l’Etat de droit, serait néanmoins traditionnellement considéré comme constituant une garantie essentielle, voire un support nécessaire, à l’Etat de droit de même qu’il serait un principe constitutionnel.
A cet égard, la demanderesse estime que la décision portant résiliation de son contrat de travail serait disproportionnée par rapport au but recherché dans la mesure où le médecin du travail et son médecin traitant auraient proposé des mesures de reprise progressive de travail et qu’elle aurait effectivement repris son travail progressivement à partir du 24 octobre 2022. Elle reproche ainsi à la Commune de … de ne pas lui avoir organisé un remplaçant, tout en faisant encore valoir que la résiliation de son contrat de travail lui aurait fait subir un préjudice injustifié alors qu’elle se serait retrouvée sans emploi bien qu’une reprise progressive de travail aurait déjà commencé et aurait été réalisable sans problème au sein de la maison relais de la Commune de ….
Dans le cadre de son mémoire en réplique, la demanderesse réitère, en substance, les mêmes moyens développés dans le cadre de sa requête introductive d’instance.
Concernant le moyen tiré d’une disproportion de la décision litigieuse, la demanderesse conteste toute prétendue difficulté de procéder à son remplacement durant son incapacité de travail et estime qu’une telle difficulté ne serait pas établie en l’espèce. Quant au premier refus de la Commune de … de procéder par une reprise progressive de travail, en février 2022, la demanderesse fait valoir que ledit refus n’aurait pas été justifié, alors qu’elle aurait repris progressivement son travail en octobre 2022 sans qu’aucune difficulté d’organisation n’aurait été causée. Elle donne encore à considérer que la continuité des services de la maison relais n’aurait jamais été en péril.
La demanderesse conclut finalement qu’en l’espèce, la décision de résilier son contrat de travail aurait été disproportionnée par rapport au but recherché par la Commune de …, notamment dans la mesure où cette dernière n’aurait pas été obligée d’organiser un remplaçant pour elle et aurait pu disposer « d’une Maison Relais qui fonctionne bien », tout en relevant que tant le médecin du travail que son médecin traitant auraient proposé des mesures de reprise progressive de travail, et qu’elle aurait effectivement repris progressivement son travail à partir du 24 octobre 2022 sans causer la moindre difficulté d’organisation.
Tant le délégué du gouvernement que la Commune de … concluent au rejet du recours pour n’être fondé en aucun de ses moyens.
A titre liminaire, le tribunal relève qu’il n’est pas tenu de suivre l’ordre dans lequel les moyens sont présentés par une partie demanderesse mais, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, peut les traiter suivant un ordre différent2.
En ce qui concerne d’abord le moyen tiré d’une absence de la motivation de la décision déférée, il y a lieu de se référer à l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, dénommé ci-
après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », en vertu duquel « [t]oute décision administrative doit baser sur des motifs légaux. La décision doit formellement indiquer les motifs par l´énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu´elle: (…) révoque ou modifie une décision antérieure, sauf si elle intervient à la demande de l´intéressé (…) ».
Ainsi, toute décision administrative doit reposer sur des motifs légaux et elle doit formellement indiquer les motifs par l’énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle révoque ou modifie une décision antérieure, étant souligné que l’article 6 précité n’impose pas une motivation exhaustive et précise, alors que seule une motivation « sommaire » est expressément exigée.
En l’occurrence, force est de retenir qu’il ressort de la lecture de la décision déférée du conseil communal du 28 octobre 2022 que cette dernière suffit aux exigences de l’article 6 précité du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, en ce qu’elle est motivée tant en droit qu’en fait. En effet, le conseil communal a non seulement invoqué la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, ainsi que l’article 7, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 en tant que base légale de la résiliation, mais a également fourni des éléments de fait sous-
jacents, à savoir le fait que la demanderesse avait conclu un contrat de travail avec la Commune 2 Trib. adm., 21 novembre 2001, n° 12921 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 545 (1er volet) et les autres références y citées.de … en date du 8 mars 2018, qu’elle se trouve en congé de maladie depuis le mois d’octobre 2020, qu’en date du 16 février 2022 le collège échevinal a décidé de lancer la procédure de résiliation du contrat de travail de la demanderesse en vertu de l’article 7, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 et de saisir la CNAP afin que celle-ci se prononce sur l’invalidité professionnelle de la demanderesse, et finalement que la CNAP a donné un avis négatif quant à une éventuelle invalidité professionnelle de la demanderesse.
Il s’ensuit que le moyen tenant à un défaut de motivation de la décision déférée du conseil communal du 28 octobre 2022 encourt le rejet, étant encore relevé, à cet égard, qu’un prétendu défaut de motivation du courrier du 28 octobre 2022, informant la demanderesse de la résiliation de son contrat, respectivement du courrier du 2 novembre 2022, rectifiant le prédit courrier d’information du 28 octobre 2022, n’est pas pertinent en l’espèce, ledit courrier ne faisant pas l’objet du présent recours.
Concernant ensuite le moyen tiré d’une violation de l’article 5 du règlement grand-
ducal du 28 juillet 2017 lequel dispose que « La résiliation du contrat de travail est prononcée par une décision motivée du conseil communal sous l’approbation du ministre de l’Intérieur. », en ce que la résiliation n’aurait pas pu avoir un effet avant son approbation ministérielle, force est au tribunal de constater que cette disposition légale prévoit expressément que la décision de résiliation d’un contrat de travail est prise par le conseil communal lequel devra solliciter une approbation ministérielle.
Dans la mesure où l’approbation ministérielle prévue à l’article 5 du règlement grand-
ducal du 28 juillet 2017 n’est pas prévue comme condition préalable à la prononciation de la décision de résiliation par le conseil communal, il y a lieu de conclure que la décision déférée prise par le conseil communal en date du 28 octobre 2022 n’encourt aucune critique et pouvait valablement prendre effet le 1er novembre 2022, de sorte que le moyen afférent tablant sur une violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 est à rejeter.
Quant au moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 3, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, et plus particulièrement d’un vice de procédure dans l’application de cette disposition légale à l’égard de la demanderesse, en ce qu’elle n’aurait pas été informée de l’écoulement du délai de six mois d’absences au moins deux mois avant, il échet d’abord de rappeler que ladite disposition légale prévoit qu’« Au moins deux mois avant l’écoulement du délai de six mois d’absences pour raisons de santé et du déclenchement prévu de ladite procédure prévus à l’alinéa 1er, le collège des bourgmestre et échevins informe l’employé concerné de l’approche de ce délai de six mois. L’employé peut demander, sur base d’un rapport médical circonstancié de son médecin traitant, une prolongation du délai précité d’une durée de trois mois supplémentaires. Sur base de ce rapport médical, le collège des bourgmestre et échevins décide du moment de déclencher la procédure de résiliation. ».
L’article 7, paragraphe 3, alinéa 2 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 impose ainsi au collège des bourgmestre et échevins d’informer l’employé communal concerné, au moins deux mois à l’avance de l’approche du délai de six mois d’absences pour raison de santé permettant le déclenchement de la procédure de résiliation du contrat de travail. Dans ces circonstances, l’agent concerné a la possibilité de demander, sur base d’un rapport médical circonstancié de son médecin traitant, une prolongation dudit délai de six mois pour une durée de trois mois supplémentaires et le collège des bourgmestre et échevins peut alors, en considération dudit rapport médical, décider du moment du déclenchement de la procédure de résiliation.
Force est au tribunal de relever, à cet égard, qu’il a été retenu que le délai de prévenance n’instaure qu’un délai maximum de neuf mois dont peut bénéficier l’agent concerné en état de maladie avant de pouvoir faire l’objet de la résiliation de son engagement de travail3.
S’il est vrai comme l’affirme la demanderesse, que la loi impose l’information préalable de l’employé communal au moins deux mois avant l’arrivée du terme des six mois d’absence pour raisons de santé avant le déclenchement de ladite procédure, cette disposition vise à permettre à l’intéressé de demander, sur base d’un rapport médical circonstancié de son médecin traitant, une prolongation du délai précité d’une durée de trois mois supplémentaires, faculté dont la demanderesse a, en l’espèce, bien pu bénéficier dans les faits, de sorte que le non-respect de cette formalité reste, en l’occurrence, sans conséquence. Alors même qu’il convient de relever que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces versées au dossier qu’il a été susceptible d’exercer une influence sur le sens de la décision prise, ou qu’il a privé l’intéressé d’une garantie4.
En effet, la possibilité d’annulation d’un acte administratif en raison d’une violation des formes destinées à protéger les intérêts privés, est une mesure destinée à sanctionner les vices de forme et plus précisément les formalités substantielles conçues pour protéger les intérêts des administrés5. Une irrégularité de la procédure est à considérer comme substantielle, notamment si elle conduit à priver l’administré d’un droit ou d’une garantie. L’annulation de l’acte administratif ne saurait ainsi constituer une fin en soi, mais ne doit intervenir que lorsque le contenu de la nouvelle décision à intervenir à la suite de l’annulation est susceptible de différer de celui de la décision annulée6, ou si la procédure préalable était constitutive d’une garantie et si la personne concernée était privée de cette garantie en raison du vice constaté7.
En l’espèce, force est de constater que le vice de forme allégué, même si établi, est sans influence sur le contenu de la décision déférée du conseil communal, ainsi que sur le déroulement et l’issue de la procédure subséquente, de sorte que le contenu de la nouvelle décision à intervenir suite à une annulation éventuelle de la décision du conseil communal en raison du prétendu vice de forme n’est pas susceptible de différer de celui d’une potentielle décision subséquente.
De même, le tribunal ne saurait déceler une quelconque violation des intérêts privés de la demanderesse, respectivement une privation d’une garantie de celle-ci, étant donné qu’il ressort des pièces versées en cause que, d’une part, Madame (A) était non seulement informée de l’écoulement du délai de six mois d’absence le 8 novembre 2021 où elle accusait déjà treize mois en arrêt de maladie, mais aussi que, d’autre part, elle s’était bien vue accorder une prolongation du délai d’absences pour raisons de santé de trois mois en date du 2 décembre 2021, de sorte qu’elle a finalement bien pu bénéficier du délai de neuf mois prévu par l’article 7, paragraphe 3, alinéa 2 de la loi du 25 mars 2015.
3 Trib. adm., 21 octobre 2022, n° 44350 du rôle, disponible sur jurad.etat.lu.
4 Voir en ce sens Conseil d’Etat français, 23 décembre 2011, Danthony, n°335033.
5 Rusen Ergec, Le contentieux administratif en droit luxembourgeois, Pas. adm. 2024, n°76.
6 Trib. adm., 9 juin 2016, n° 35780 du rôle, disponible sur www.jurad.etat.lu.
7 Voir en ce sens Conseil d’Etat français, 23 décembre 2011, Danthony, n°335033.Ce constat n’est pas énervé par l’argumentation de la demanderesse suivant laquelle le fait qu’elle aurait progressivement repris son travail en date du 24 octobre 2022 constituerait une renonciation dans le chef de la Commune de … de procéder à la résiliation de son contrat de travail, alors qu’il ressort clairement des pièces du dossier administratif que la proposition de reprise progressive de travail du 18 octobre 2022 avait été acceptée par la Commune de … sous réserve expresse de la décision du conseil communal dans sa séance du 28 octobre 2022 quant aux relations de travail futures avec Madame (A), de sorte qu’il ne saurait être conclu à une renonciation dans le chef de la Commune de … de procéder à la résiliation du contrat de l’intéressée, étant encore relevé que la reprise de travail n’a eu lieu que quatre jours avant la séance du conseil communal.
Au vu des considérations qui précèdent, le moyen relatif à une violation de la procédure prévue par l’article 7, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 est à rejeter pour ne pas être fondé.
Concernant le moyen de la demanderesse tenant à une violation de l’article 11 du règlement grand-ducal du 5 mars 2004, notamment dans la mesure où elle estime qu’un reclassement interne aurait dû lui être proposé conformément au prédit article 11, il y a lieu de relever qu’en vertu de ladite disposition légale « L’agent, le ministre du ressort respectivement le Collège des Bourgmestre et échevins ont le droit d’adresser une réclamation auprès du ministre ayant la Fonction publique dans ses attributions contre la décision du médecin constatant l’inaptitude totale et définitive de l’agent à son poste de travail suite à un des examens précités. Sous peine de forclusion la réclamation est à introduire endéans un délai de quarante jours suivant notification de la décision à l’agent et au ministre du ressort respectivement au Collège des Bourgmestre et échevins.
Suite à la réclamation, un réexamen auprès d’un praticien au libre choix de l’agent doit être effectué.
Si le deuxième avis conclut également à l’inaptitude totale et définitive de l’agent à son poste de travail, le ministre du ressort respectivement le Collège des Bourgmestre et échevins doit dans la mesure du possible lui proposer un autre poste, correspondant aux mêmes grade et niveau de rémunération que ceux du poste pour lequel il est déclaré inapte par le médecin.
Si le deuxième avis ne conclut par contre pas à l’inaptitude totale et définitive de l’agent à son poste de travail, le médecin désigne un médecin spécialiste pour faire un réexamen et l’avis de ce dernier est décisif. ».
S’il est vrai que la demanderesse a fait l’objet d’un examen médical auprès du médecin du travail en date du 15 septembre 2022, ce dernier n’a cependant pas constaté d’inaptitude totale et définitive de la demanderesse à son poste de travail, alors qu’il a au contraire retenu que « L’agente est sous couvert d’un certificat d’ITT, un avis d’aptitude/inaptitude ne peut être délivré par conséquent », de sorte que c’est à bon droit que la Commune de … a conclu que Madame (A) ne se trouvait pas dans les conditions exigées par l’article 11 du règlement grand-
ducal du 5 mars 2004, aucun avis d’inaptitude n’ayant été dressé à son égard, aucune réclamation afférente n’ayant dès lors pu intervenir de même qu’il n’y a pas non plus eu de deuxième avis d’inaptitude, conditions nécessaires pour l’obtention d’un reclassement interne.
Il s’ensuit que ledit moyen est également à rejeter pour manquer de fondement.
En ce qui concerne finalement le reproche de la demanderesse selon lequel la décision déférée du conseil communal violerait le principe de proportionnalité, force est d’abord de rappeler que la décision déférée a été prise en application de l’article 7, paragraphe 3 durèglement grand-ducal du 28 juillet 2017 aux termes duquel « Sans préjudice des paragraphes 1 et 2, le conseil communal est en droit de résilier le contrat en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raison de santé de l’employé communal qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires communaux. Le collège des bourgmestre et échevins déclenche la procédure de résiliation lorsque, au cours d’une période de douze mois, l’employé communal a été absent pour raison de santé pendant six mois consécutifs ou non. À cet effet, et avant de prendre sa décision, il saisit la Caisse nationale d’Assurance Pension pour qu’elle se prononce sur l’invalidité professionnelle de l’employé communal au sens des dispositions du Code de la sécurité sociale. Sont mises en compte pour une journée entière toutes les journées d’absences pour cause de maladie, même si ces absences ne couvrent pas des journées entières. ».
Cette disposition légale prévoit que le conseil communal est « en droit » de résilier le contrat d’un employé communal en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raisons de santé, dès qu’au cours d’une période de douze mois, l’employé a été absent pour raisons de santé pendant six mois, consécutifs ou non et à condition d’avoir, préalablement à sa décision, saisi la CNAP pour que celle-ci se prononce sur l’invalidité professionnelle de l’employé au sens des dispositions du Code de la sécurité sociale.
Il s’ensuit que la décision de licenciement est une décision discrétionnaire de sorte qu’elle doit nécessairement respecter le principe de proportionnalité, alors même que les conditions précitées sont bien remplies et la procédure respectée, tel que c’est le cas en l’espèce.
En ce qui concerne l’argumentation de la demanderesse selon laquelle des mesures de reprise progressive de travail avaient été proposées et qu’elle aurait notamment repris son travail progressivement à partir du 24 octobre 2022, force est de relever que de telles considérations manquent de pertinence dans le cadre d’une résiliation du contrat de travail dans sur base de l’article 7, paragraphe 3 du règlement grand-ducal du 28 juillet 2017, laquelle est basée sur un nombre d’absences, continues ou non, pour raisons médicales jugé démesuré et dans le cadre de laquelle il appartient seulement au conseil communal de vérifier si ces absences ne sont pas dues à une invalidité de l’agent concerné, question à laquelle la CNAP a, en l’espèce, répondu négativement, constat qui n’est, par ailleurs, pas contesté par la demanderesse.
Il faut encore relever, dans ce contexte, que le conseil communal, sans que cela ne puisse lui être reproché, n’a, en l’espèce, pas pris sa décision à la hâte, étant donné que la demanderesse se trouvait déjà en arrêt maladie de manière continue depuis le 8 octobre 2020, soit depuis plus de deux ans avant la date de la décision déférée portant résiliation de son contrat de travail.
Au vu de cette longue période d’absences pour raisons médicales, sans qu’une quelconque invalidité n’ait été constatée dans le chef de la demanderesse, il ne saurait pas non plus être reproché en l’espèce au conseil communal de ne pas avoir cherché à trouver une alternative à la résiliation du contrat de travail de la demanderesse, telle que le reclassement interne réclamé par cette dernière.
C’est encore à bon droit que la Commune de … a souligné que, dans la mesure où la demanderesse avait été absente pendant deux années de son poste de travail, il n’y avait pas de garantie que la proposition de reprise de travail soit couronnée de succès, de sorte que cetteabsence et cette incertitude quant à sa capacité à, de nouveau, pouvoir travailler auprès d’enfants avait créé une certaine désorganisation dans le fonctionnement de la maison relais.
Il suit de toutes ces considérations que la décision déférée ne peut pas être considérée comme disproportionnée par rapport aux circonstances de l’espèce, respectivement n’est pas viciée par un excès de pouvoir de la part du conseil communal, de sorte que les moyens afférents encourent le rejet.
Le recours est partant à rejeter en tous ses moyens.
Finalement la demanderesse sollicite encore la condamnation de la Commune de … au paiement d’une indemnité de procédure de 3.000 euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, demande qu’il y a lieu de rejeter au vu de l’issue du litige.
II) Recours contre la décision du ministre Aux termes de l’article 5 du règlement grand-ducal modifié du 28 juillet 2017 déterminant le régime et les indemnités des employés communaux, ci-après désignée par « le règlement grand-ducal du 28 juillet 2017 », « La résiliation du contrat de travail est prononcée par une décision motivée du conseil communal sous l’approbation du ministre de l’Intérieur. » Il se dégage de cette disposition que toute décision qui aboutit à une cessation des relations entre la commune et l’agent communal est soumise à approbation tutellaire, de sorte qu’en l’espèce l’approbation ministérielle est requise.
Il ressort des pièces à disposition du tribunal que la décision litigieuse du 28 octobre 2022 a été approuvée par le ministre de l’Intérieur en date du 27 décembre 2022.
En ce qui concerne la compétence du tribunal de statuer sur la décision déférée du ministre du 27 décembre 2022, il convient de relever qu’en matière de tutelle administrative, la décision d’approbation de l’autorité tutélaire et l’acte approuvé constituent à la base deux actes juridiques distincts l’acte d’approbation en particulier étant en lui-même une décision susceptible d’un recours en annulation pour les vices qui lui sont propres8.
Or, à défaut de disposition légale prévoyant un recours au fond en matière de décisions d’approbation ministérielles, seul un recours en annulation a pu être introduit contre la décision, précitée, d’approbation du ministre du 27 décembre 2022, de sorte que le tribunal doit partant se déclarer incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation y afférent.
Le recours subsidiaire en annulation est dès lors recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.
Cette conclusion n’est pas énervée par le fait que le délégué du gouvernement se rapporte à prudence de justice en ce qui concerne la recevabilité en la pure forme dudit recours, car s’il est exact que le fait, pour une partie, de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, il n’en reste pas moins qu’une contestation non autrement étayée est à écarter, 8 Trib. adm., 3 juillet 2006, n° 19214a du rôle, Pas. adm. 2024, V° Tutelle administrative, n° 31 et l’autre référence y citée.étant donné qu’il n’appartient pas au juge administratif de suppléer la carence des parties au litige et de rechercher lui-même les moyens juridiques qui auraient pu se trouver à la base de leurs conclusions9. Dès lors, étant donné que la partie étatique est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la forme du recours n’aurait pas été respectée, le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet.
Force est au tribunal de constater qu’au vu de l’issue du recours dirigé contre la décision du conseil communal de la Commune de … du 28 octobre 2022 et vu qu’à travers son recours contentieux Madame (A) ne formule aucun moyen direct à l’encontre de la décision d’approbation du ministre du 27 décembre 2022, le recours subsidiaire en annulation dirigé contre ladite décision est à rejeter pour manquer de fondement.
Par ces motifs, le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement ;
reçoit en la forme le recours principal en réformation dirigé contre la décision du conseil communal de la Commune de … du 28 octobre 2022 ;
au fond, le déclare non justifié, partant en déboute ;
dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;
se déclare incompétent pour statuer sur la demande de réintégration progressive sollicitée par la demanderesse ;
rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure formulée par la demanderesse à l’encontre de la Commune de … ;
se déclare incompétent pour statuer sur le recours principal en réformation dirigé contre la décision d’approbation du ministre du 27 décembre 2022 ;
reçoit en la forme le recours subsidiaire en annulation dirigé contre la décision d’approbation du ministre du 27 décembre 2022 ;
au fond, le déclare non fondé, partant en déboute ;
condamne la demanderesse aux frais et dépens de l’instance.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 avril 2025 par :
Paul Nourissier, premier vice-président, Olivier Poos, vice-président, Emilie Da Cruz De Sousa, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.
9 Trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2024, V° Procédure contentieuse, n° 930 (2e volet) et les autres références y citées.
s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 29 avril 2025 Le greffier du tribunal administratif 16