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17/12/2024 | LUXEMBOURG | N°52047R

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 17 décembre 2024, 52047R


Tribunal administratif N° 52047R du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI: LU: TADM:2024: 52047R Inscrit le 4 décembre 2024 Audience publique du 17 décembre 2024 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Monsieur (A), …, par rapport à un bulletin émis par l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 52047R du rôle et déposée le 4 décembre 2024 au greffe du tribunal ad

ministratif par la société en commandite simple BONN STEICHEN & PARTNERS S.E.C.S., établie et ...

Tribunal administratif N° 52047R du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI: LU: TADM:2024: 52047R Inscrit le 4 décembre 2024 Audience publique du 17 décembre 2024 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Monsieur (A), …, par rapport à un bulletin émis par l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 52047R du rôle et déposée le 4 décembre 2024 au greffe du tribunal administratif par la société en commandite simple BONN STEICHEN & PARTNERS S.E.C.S., établie et ayant son siège social à L-3364 Leudelange, 11, rue du Château d’Eau, inscrite à la liste V du Tableau de l’Ordre des avocats du Barreau de Luxembourg, représentée par son gérant commandité actuellement en fonctions, à savoir la société à responsabilité limitée BSP S.AR.L., établie et ayant son siège social à L-3364 Leudelange, 11, rue du Château d’Eau, elle-même représentée aux fins de la présente procédure par son gérant, Maître Pol MELLINA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, au nom de Monsieur (A), gérant de sociétés, demeurant professionnellement à …, tendant à voir instituer une mesure provisoire, à savoir l’instauration du sursis par rapport à l’exécution d’un bulletin d’appel en garantie de l’administration des Contributions directes émis en date du 19 avril 2024 déclarant le requérant redevable d’un montant total de …- euros, en principal et intérêts, dû au titre d’impôts de l’année 2023 redûs par la société (AA), établie et ayant son siège social à … et immatriculée au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg sous le numéro …, déclarée en faillite par un jugement n° … du 15 mars 2024 du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, un recours au fond, inscrit sous le numéro 52043 du rôle, ayant par ailleurs été déposé au greffe du tribunal administratif en date du même jour ;

Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin d’appel en garantie déféré ;

Maître Pol MELLINA et Monsieur le délégué du gouvernement Steve COLLART entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 12 décembre 2024.

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Le 19 avril 2024, le bureau d’imposition RTS … de l’administration des Contributions directes émit un bulletin d’appel en garantie (« Haftungsbescheid ») en vertu du paragraphe 118 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », déclarant Monsieur (A) redevable d’un montant total de … euros, en principal et intérêts, dû au titre d’impôts de l’année 2023 redûs par la société à responsabilité limitée (AA), établie et ayant son siège social à …, ledit bulletin étant motivé comme suit :

1« Il est dû à l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg par la société (AA), immatriculée sous le numéro fiscal …, à titre de l’impôt sur les traitements et salaires Année 2023 … principal … intérêts Total … principal … intérêts Il résulte de la publication au Registre de Commerce et des Sociétés numéro … du …2023 que vous avez été nommé gérant de la société (AA) à partir du 16.10.2023 et rayé par le numéro … du 23.01.2024. En cette qualité vous avez disposé du pouvoir d’engager l’entreprise sous votre seule signature à partir de cette date.

En votre qualité d’(e)administrateur/gérant vous avez été en charge de la gestion journalière pour l’année 2023. Durant cette période, l’impôt sur les traitements et salaires d’une somme de …- € est resté en souffrance.

En vertu de l’article 136 alinéa 4 de la loi modifiée du 4 novembre 1967 sur l’impôt sur le revenu, l’employeur est tenu de retenir et de verser l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel. Dans le cas d’une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au § 103 AO.

Aux termes du § 103 AO vous étiez, en tant que gérant, personnellement tenu, à l’accomplissement de toutes les obligations fiscales incombant à la société, dont notamment le paiement des impôts dus par la société à l’aide des fonds administrés.

Conformément au § 106 AO, il vous incombait de prélever sur les fonds administrés les fonds nécessaires pour acquitter les impôts nés avant la disparition de la société (BB) et d’assurer leur paiement.

Durant la période du 16.10.2023 au 23.01.2024, il vous appartenait de retenir, de déclarer et de payer la retenue ; or durant cette période, la retenue d’impôt dû sur les traitements et les salaires n’a pas été payée.

Cette omission de payer les sommes dues à titre de retenue d’impôt est une inexécution fautive de vos obligations en tant que représentant de la société (AA) (CA du 6 mai 2003 no 15989C).

Suite à votre comportement fautif le receveur de l’Administration des contributions directes n’a pas perçu les retenues d’impôt d’un montant de ….- € qui se compose comme suit Année 2023 … principal … intérêts Il y a lieu de relever qu’en vertu du § 110 AO, votre responsabilité pour les actes accomplis pendant la période de vos fonctions survit à l’extinction de votre pouvoir de représentation.

Sur base des éléments qui précèdent, votre responsabilité personnelle se trouve engagée en application du § 109 AO et vous êtes co-débiteur solidaire des retenues d’impôt qui auraient dû être effectuées par la société (AA) sur les traitements et salaires de son personnel.

2En tant que codébiteur solidaire vous êtes invité à payer sans délai le montant de … euros, sans préjudice des intérêts de retard ultérieurs, à Monsieur le receveur de l’Administration des contributions directes à … au CCPL …, tout en indiquant le numéro .fiscal …. ».

Par courrier de son mandataire du 10 mai 2024, Monsieur (A) adressa au directeur de l’administration des Contributions directes une réclamation à l’encontre du bulletin d’appel en garantie du 19 avril 2024 précité, réclamation enregistrée le même jour par l’administration des Contributions directes, ladite réclamation étant libellée comme suit :

« Par la présente, nous avons l’honneur d‘introduire, au nom et pour le compte de notre mandant, Monsieur (A), gérant de sociétés, demeurant professionnellement à … (ci-après le « Réclamant »), une réclamation au sens du §228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931 (Abgabenordnung, ci-après la « AO ») à l’encontre du bulletin d’appel en garantie émis à son encontre en date du 19 avril 2024 (ci-après le « BAG », Pièce 1).

Le BAG cause torts et griefs au Réclamant en ce qu’il retient - de manière injustifiée -

une inexécution fautive des obligations fiscales qui lui incombaient en sa qualité d’ancien gérant de la société (AA) (n° de dossier …) et met à sa charge un montant principal de retenue de l’impôt sur les traitements et salaires de EUR … et un montant d’intérêts de retard de ….

La présente réclamation tend à l’annulation du BAG pour les motifs de droit détaillés ci-dessous (section II) à la suite d’un bref récapitulatif des faits pertinents (section I).

I.

EN FAIT [1.] La société à responsabilité limitée (AA) (ci-après la « Société ») a été constituée par acte authentique passé par-devant Maître …, notaire de résidence à …, en date du … 1998. La Société, établie et ayant son siège social à … et immatriculée au Registre de Commerce et des Sociétés de Luxembourg (ci-après le « RCS ») sous le numéro …, a pour objet social principal l’exploitation d’une entreprise de construction, de façades et de carrelages, ainsi que l’achat et la vente d’articles de la branche.

[2] L’intégralité des parts sociales de la Société est détenue, depuis le … 2021, par la société à responsabilité de droit luxembourgeois (CC) (ci-après la « Société Mère »), elle-même intégralement détenue et gérée par Monsieur (B).

[3.] La Société est gérée, depuis sa constitution, par Monsieur (B), agissant tantôt en qualité de gérant unique, tantôt en qualité de co-gérant de la Société. Monsieur (B) a notamment été gérant unique de la Société depuis le … 2014 jusqu’à la nomination (contestée par lui, y n° … du Réclamant (Pièce° 2).

[4.] Le … 2023, la société (DD) (ci-après la « Société Prêteuse »), dont le Réclamant est l’actionnaire unique, a, en qualité de prêteur, conclu avec Monsieur (B), bénéficiaire économique et gérant unique de la Société, agissant en qualité d’emprunteur, un contrat de prêt (ci-après le « Prêt ») aux fins de financement de son activité professionnelle. Afin de garantir le remboursement effectif du Prêt, Monsieur (B) a consenti à la Société Prêteuse un gage de premier rang sur toutes les parts sociales qu’il détient dans la Société Mère, conformément à un contrat de gage sur parts sociales conclu le même jour (ci-après le « Gage »).

3[5] Le 16 octobre 2023, alors que Monsieur (B) restait en défaut de rembourser le Prêt qu’il avait contracté à son échéance. La Société Prêteuse s’est s’aperçue que Monsieur (B) avait, lors de la conclusion dudit Prêt, faussement déclaré n’avoir connaissance d’aucun élément susceptible d’avoir des conséquences substantielles sur sa situation et de nature à compromettre le remboursement du Prêt. Cette déclaration n’était pas correcte dans la mesure où l’ensemble des biens immobiliers de Monsieur (B) étaient grevés d’hypothèques de différents rangs. La Société Prêteuse informa alors la Société Mère et Monsieur (B) de son intention d’exercer les droits de vote attachés aux parts sociales gagées en raison de la survenance d’un « Cas d’Exigibilité Anticipé » au sens du contrat de Prêt, autrement dit du non-respect par Monsieur (B) de ses engagements (Pièce n° 3).

[6] La Société Mère prit ainsi, le même jour, par l’intermédiaire de la Société Prêteuse exerçant seule les droits de vote attachés à ses parts sociales, la décision de révoquer Monsieur (B) de ses fonctions de gérant de la Société Mère et de nommer Monsieur (C)et le Réclamant en tant que nouveaux gérants de la Société Mère (Pièce n° 4).

[7] Le nouveau conseil de gérance de la Société Mère, représenté par le Réclamant et Monsieur (C), décida dans la foulée de nommer le Réclamant en tant que nouveau gérant de la Société, aux côtés de Monsieur (B) (Pièce n° 5). La nomination du Réclamant au poste de gérant de la Société est également constatée dans les résolutions de la Société prises par la Société Mère, le 16 octobre 2023, en sa qualité d’associée unique (Pièce n° 6). Monsieur (B) fût avisé de ces résolutions par courrier daté du même jour (Pièce n° 7). Il y a encore lieu de préciser que ces résolutions prévoient expressément qu’une signature conjointe des deux gérants est nécessaire pour engager valablement la Société et que, par conséquent, aucun des deux gérants ne peut valablement engager la Société par sa seule signature.

[8] Par courriers datés du 18 octobre 2023 adressés à la Société Prêteuse (Pièces n° 8 et 9), Monsieur (B) et la Société Mère, représentée par Monsieur (B) en sa qualité de - prétendu - gérant unique, ont contesté l’existence d’un « Cas d’Exigibilité Anticipée » au sens du contrat de Prêt, ayant justifié l’exercice, par la Société Prêteuse, des droits de vote attachés aux parts sociales de la Société Mère. Sont dans le même temps contestées l’ensemble des résolutions susvisées prises subséquemment à l’exercice de ces droits de vote par l’associé unique et le conseil de gérance de la Société Mère et par la Société Mère en sa qualité d’associé unique de la Société et, particulièrement, la nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société.

[9] La nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société a été publiée au RCS en date du 19 octobre 2023. L’extrait RCS portant publication de cette nomination prévoit également, spécifiquement, que le pouvoir de signature de chaque gérant suppose nécessairement la signature conjointe de l’autre gérant (Pièce n° 10).

[10] Par courrier daté du 20 octobre 2023 (Pièce n° 11), le mandataire de la Société Prêteuse à l’époque des faits, a répondu au courrier de Monsieur (B) du 18 octobre 2023, soulignant notamment l’existence avérée d’un « Cas d’Exigibilité Anticipée », la mauvaise foi de Monsieur (B) face à l’exercice, par la Société Prêteuse, des droits de vote attachés aux parts sociales de la Société Mère, alors même qu’il s’agissait de la voie la moins préjudiciable pour lui et que la Société Prêteuse aurait été en droit de réaliser le Gage sur les parts sociales de la Société Mère. Le mandataire de la Société Prêteuse relève encore l’absence de valeur du courrier adressé par la Société Mère, représentée par Monsieur (B) en sa qualité de - prétendu - gérant unique, à la Société Prêteuse, alors que ce dernier avait déjà, à cette date, été révoqué de sa fonction de gérant et n’avait, partant, plus le pouvoir de représenter ni d’engager la Société 4Mère.

[11] Sont ainsi nés d’importants désaccords entre le Réclamant et Monsieur (B), ayant eu des conséquences directes sur l’exercice, par Le Réclamant, de son mandat de gérant de la Société. En effet, le Réclamant n’a, au cours de son mandat, en raison du contexte particulièrement litigieux de sa nomination, jamais pu obtenir accès aux documents sociaux et comptables ou encore aux comptes bancaires de la Société, et n‘a donc jamais pu effectivement exercer son mandat de gérant.

[12] Le Réclamant et Monsieur (B) sont finalement, après près de deux mois de conflits, parvenus à trouver un accord qui s’est soldé par la conclusion d’une convention entre Monsieur (B) et la Société Prêteuse, le 8 décembre 2023 (ci-après la « Convention Transactionnelle », Pièce n° 12), dans laquelle Monsieur (B) et la Société Prêteuse s’entendent notamment sur le remboursement des montants dus au titre du Prêt par Monsieur (B) et sur la démission et décharge du Réclamant pour l’exercice de son mandat de gérant de la Société Mère et de la Société. Il y a encore lieu de relever que la Convention Transactionnelle contient une mention, acceptée par Monsieur (B), qui confirme explicitement que le Réclamant n’a jamais pu effectivement exercer son mandat de gérant et aux termes de laquelle « 2.2. Monsieur (A) déclare que, depuis sa nomination en qualité de gérant de la (AA), il n’a posé aucun acte juridique pour le compte de (AA) ».

[13] En exécution de la Convention Transactionnelle, le Réclamant a, le même jour, adressé un courrier à la Société l’informant de sa démission de ses fonctions de gérant avec effet immédiat et priant la Société de procéder aux formalités requises afin de rendre cette démission opposable aux tiers (Pièce n° 13). Cette démission n’a cependant été publiée au RCS, par la Société, qu’en date du 23 janvier 2024 (Pièce n° 14).

[14] Par un jugement n° …7 du 15 mars 2024 du Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, la Société a été déclarée en faillite (Pièce 15). Maître … a alors été nommé curateur de la faillite de la Société (ci-après le « Curateur »).

[15] Le 19 avril 2024, le Bureau d’imposition RTS … de l’ACD (ci-après le « Bureau d’Imposition ») a émis le BAG à l’encontre du Réclamant dans lequel sont formulés à son encontre les reproches suivants « En votre qualité d(e)administrateur/gérant vous avez été en charge de la gestion journalière pour l’année 2023. Durant cette période, l’impôt sur les traitements et salaires d’une somme de …-€ est resté en souffrance.

En vertu de l’article 136 alinéa 4 de la loi modifiée du 4 novembre 1967 sur l’impôt sur le revenu, l’employeur est tenu de retenir et de verser l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel. Dans le cas d ‘une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au § 103 AO.

Aux termes du § 103 AO vous étiez, en tant que gérant, personnellement tenu, à l’accomplissement de foutes les obligations fiscales incombant à la société, dont notamment le paiement des impôts dus par la société à l’aide des fonds administrés.

5Conformément au § 106 AO, il vous incombait de prélever sur les fonds administrés les fonds nécessaires pour acquitter les impôts nés avant la disparition de la société (AA) et d’assurer leur paiement.

Durant la période du 16.10.2023 au 23.01.2024, il vous appartenait de retenir, de déclarer et de payer la retenue ; or durant cette période, la retenue d’impôt dû sur les traitements et les salaires n’a pas été payée.

Cette omission de payer les sommes dues au titre de retenue d’impôt est une inexécution fautive de vos obligations en tant que représentant de la société (AA) (CA du 6 mai 2003 no 15989C).

Suite à votre comportement fautif le receveur de l’Administration des contributions directes n’a pas perçu les retenues d’impôt d’un montant de … €.

Sur base des éléments qui précédent, votre responsabilité personnelle se trouve engagée en application du § 109 AO et vous êtes co-débiteur solidaire des retenues d‘impôt qui auraient dû être effectuées par la société (AA) sur les traitements et salaires de son personnel. » [16] En conséquence, le Réclamant est considéré comme codébiteur solidaire des retenues d’impôt, qui auraient dû être effectuées par la Société sur les traitements et salaires de son personnel au titre de l’année 2023 et continuées à l’ACD, d‘un montant principal de EUR … auquel s‘ajoutent les intérêts de retard d’un montant de EUR …, soit un montant total de EUR …. Le Bureau d’Imposition motive cette décision par le fait que le Réclamant se serait, en sa qualité de gérant de la Société, rendu coupable d’une inexécution fautive de ses obligations pour ne pas avoir veillé au paiement de la retenue sur traitements et salaires à l’ACD.

[17] Le Réclamant conteste cependant s’être rendu coupable d’une quelconque inexécution fautive de ses obligations. La présente réclamation tend, dès lors, à l’annulation du BAG émis à l’encontre du Réclamant.

EN DROIT [18.] A titre liminaire, le Réclamant souhaite mettre en lumière diverses affirmations formulées par le Bureau d’Imposition dans le BAG qu’il estime incorrectes et conteste formellement.

[19] Tout d’abord, le BAG mentionne, à plusieurs reprises, la période du « 16 octobre 2023 » au « 23 janvier 2024 » comme étant celle au cours de laquelle le Réclamant était gérant de la Société. Or, tel que cela a été précédemment évoqué, le Réclamant a démissionné, avec effet immédiat, de ses fonctions de gérant, par un courrier adressé à la Société en date du 8 décembre 2023. Alors même qu’il a invité la Société, dans ce courrier, à procéder aux formalités requises afin de rendre cette démission opposable aux tiers, la publication de sa démission au RCS n’a finalement été effectuée qu’en date du 23 janvier 2024. Bien que cette démission n’ait donc été portée à la connaissance des tiers que bien plus tardivement que ce qu’il aurait espéré, le Réclamant considère que son mandat de gérant a pris fin à une date bien antérieure à celle du 23 janvier 2024, à savoir au 8 décembre 2023, date à laquelle il e effectivement démissionné.

Il estime, partant, avoir été en fonctions pendant une période beaucoup plus courte que celle retenue par le Bureau d’imposition.

6[20] En outre, le Bureau d‘Imposition affirme, dans le BAG, que le Réclamant aurait, en sa qualité de gérant de la Société, disposé du pouvoir d’engager l’entreprise sous sa « seule signature ». Indépendamment de son incapacité de s’occuper effectivement de la gestion de la Société, en raison du litige avec Monsieur (B), ce dont il sera plus amplement discuté ci-dessous, cette affirmation n’est, encore, pas correcte. En effet, il ressort des résolutions de l’associé unique de la Société (Pièce n° 6) et de l’extrait RCS concernant la nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société, publié en date du 19 octobre 2023 et annexé à la présente réclamation en tant que Pièce n° 10, que chacun des co-gérants de la Société, à savoir Monsieur (B) et le Réclamant, disposait d’un pouvoir de signature conjoint avec l’autre gérant. Tant la signature de Monsieur (B) que celle du Réclamant était, dès lors, requise pour engager valablement la Société au cours de la période litigieuse. Ainsi, le Réclamant ne disposait nullement du pouvoir d’engager la Société sous sa seule signature.

[21] Enfin, le Bureau d’Imposition soutient que le Réclamant aurait été « en charge de la gestion journalière » de la Société. Tel n’est cependant pas le cas dans la mesure où le Réclamant n’a jamais été désigné « délégué à la gestion journalière » de la Société comme le permettent les dispositions de l’article 710-15 de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales (ci-après la « LSC »).

[22] Ces précisions étant faites, le Réclamant s’attachera d’abord (A) à détailler les conditions légales de rappel en garantie d’un représentant légal, avant de démontrer (B) que ces dernières conditions ne sont pas remplies en l’espèce s’agissant des reproches formulés par le Bureau d’Imposition au Réclamant et (C) que le Bureau d’Imposition est en défaut d’expliquer son choix quant à la personne à appeler en garantie au regard des exigences d’équité et d’opportunité.

A.

Conditions légales de l’appel en garantie d’un représentant légal [23] Le §109 (1) AO dispose que :

« Die Vertreter und die übrigen in den §103 bis 108 bezeichneten Personen haften insoweit persönlich neben dem Steuerpflichtigen, als durch schuldhafte Verletzung der ihnen den §103 bis 108 auferlegten Pflichten Steueransprüche verkürzt oder Erstattungen oder Vergütungen zu Unrecht gewährt worden sind. » [24.] Selon le §103 AO le représentant légal d’une société est tenu par les obligations fiscales suivantes :

« Die gesetzlichen Vertreter juristischer Personen (.) haben alle Pflichten zu erfüllen, die den Personen, die sie vertreten, obliegen: insbesondere haben sie dafür zu sorgen, dass die Steuern aus den Mitteln, die sie verwalten, entrichtet werden [25] La responsabilité personnelle d’un représentant légal d’une société par voie d’un bulletin d’appel en garantie ne peut être engagée en vertu du §109 AO qu’en cas d’inexécution fautive (« schuldhafte Verletzung ») de ses obligations fiscales, prévues au §103 AO. Suivant une décision de principe « MIHNJAK » du Tribunal administratif :

« Le simple constat d’un manquement à une obligation fiscale découlant du paragraphe 103 AO précité dans le chef d’un gérant de société, n’est pas suffisant pour engager sa responsabilité personnelle en application du § 109 (1) AO et pour voir émettre à son encontre 7un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant en effet posé à cet égard l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive, « schuldhafte Verletzung » -, des obligations du représentant de la société envers le fisc. » [26] Partant, un représentant légal ne peut être tenu responsable que dans les conditions particulières prévues au §109 AO, ajoutant l’exigence d’une caractérisation du comportement fautif suivant des éléments d’appréciation concrets. Une décision litigieuse qui « se limite à constater objectivement le manquement du demandeur à ses obligations fiscales, sans pour autant qualifier un quelconque comportement fautif dans son chef tenant à des circonstances particulières de l’espèce, ni encore de retracer les raisons susceptibles, en raison et en équité, de justifier la décision de poursuivre le demandeur (..) » constitue une erreur en droit et doit être annulée.

[27] De cet effet, le §109 AO n’a pas instauré une responsabilité de plein droit, mais une responsabilité pour faute qu’il échet d’établir. Il prévoit un régime de responsabilité des représentants d’une société qui soumet la mise en œuvre de cette responsabilité à la triple condition de l’existence d’une faute (« schuldhafte Verletzung ») (1), d’un dommage (2) et d’un lien de causalité entre le dommage et la faute (3).

1.

La faute (« schuldhafte Verletzung ») [28] Afin que la faute d’un représentant légal puisse être retenue, il faut qu’elle présente une gravité certaine (« wesentliches Verschulden »), qui doit soit consister en une faute intentionnelle, sinon en une négligence grossière (« grobe Fahrlässigkeit ») :

« Es ist aber anerkannt, dass die Haftung des § 109 ein wesentliches Verschulden, mangels Vorsatzes eine grobe Fahrlässigkeit, m. a. W. Leichtfertigkeit im Sinne des § 402 voraussetzt (vgl. BFH 11. 5. 62 BStB1111 343; RFH 18. 7. 30 StW Air 1038; 25. 7. 34 StW Nr.

608). Es besteht keine Verpflichtung, vorhandene Mittel in erster Linie für Steuerzahlungen zu verwenden (OVerwG Berlin 12. 7. 55 BB 56, 263). » [29] Il faut que le bureau d’imposition détermine et qualifie le comportement fautif allégué comme étant suffisamment grave dans le chef du représentant légal, sur base des circonstances particulières de l’espéce, avant de pouvoir émettre un bulletin d’appel en garantie. Un simple manquement ou une faute légère ne sont pas suffisants pour justifier l’application du §109 AO. La jurisprudence luxembourgeoise est constante en la matière. Ainsi, même si le gérant d’une société est tenu de payer les impôts sur les fonds qu’il gère, il ne peut être tenu « personnellement responsable du non-paiement des impôts dus par la société que dans les conditions plus particulièrement prévues au paragraphe 109 AO ». La simple déduction d’un comportement fautif du non-paiement de l’impôt n’est pas justifiée. Le non-paiement d’impôts ne fait que constater qu’une obligation légale n’a pas été respectée. Pouvant avoir de nombreuses raisons il n’est pas nécessairement le résultat d’une faute du représentant légal en vertu du §109 AO.

[30.] La faute requise en vertu du §109 AO est ensuite une faute personnelle, c’est-à-

dire qu’elle doit résulter uniquement du comportement fautif personnel du représentant légal de la société. Le standard à appliquer pour l’analyse est celui d’un dirigeant normalement diligent qui n’aurait sans doute jamais commis une telle faute. Il faut ainsi comparer le dirigeant en cause en l’espèce à celui d’un dirigeant normalement diligent et prudent, placé dans les mêmes circonstances et disposant des mêmes qualifications et connaissances. Ce n’est que dans 8l’hypothèse où la faute commise par le dirigeant est à qualifier de « faute impardonnable », qu’un dirigeant « bon père de famille » n’aurait jamais commise, que la responsabilité personnelle en vertu du §109 AO pourra être engagée.

[31.] Par conséquent, un bulletin d’appel en garantie émis par l’administration au motif qu’il est basé sur « des motifs stéréotypés qui se contentent d’une part de renvoyer aux dispositions applicables, sinon de paraphraser celles-ci » et se limite « à constater de fait le manquement du demandeur à ses obligations fiscales, sans pour autant qualifier in specie un quelconque comportement fautif dans son chef tenant à des circonstances particulières de l’espèce, rendant ainsi impossible toute vérification du caractère légal et réel des motifs à la base de la décision critiquée » doit être annulé.

2.

Le dommage [32.] Le dommage à établir consiste dans « l’insuffisance de l’impôt légalement » à l’État, non réglé par la société que le gérant représente. Plus précisément, c’est « l’insuffisance patente de l’impôt effectivement perçu par rapport à celui légalement dû conformément aux bulletins d’impôt émis à l’égard de la société (…), ensemble avec les intérêts de retard y relatifs (…) ».

3.

Lien de causalité entre le dommage et la faute [33.] Le lien de causalité à établir entre le dommage et la faute pour engager la responsabilité personnelle du représentant légal d’une société en vertu du §109 AO se caractérise par « le fait que l’insuffisance [de l’impôt perçu par rapport à l’impôt légalement dû] est la conséquence du comportement fautif du représentant [de la personne morale] ».

[34.] En outre, le §109 AO exige l’application de la théorie de la causalité adéquate.

En effet, d’après la doctrine luxembourgeoise, il faut considérer que seuls les faits fautifs qui sont de nature à empêcher la perception de l’impôt peuvent être considérés comme ayant un lien causal avec le dommage.

[35.] La charge de la preuve pour établir que le dommage résultant du non-paiement des impôts constitue la conséquence de la faute commise par le dirigeant pèse sur le bureau d’imposition. Le lien de causalité entre la faute et le dommage doit être direct : c’est parce qu’il y a eu faute que le dommage s‘est produit. Le bureau d’imposition doit dès lors démontrer, en prenant en considération les circonstances du cas d’espèce, que l’insuffisance d’impôt a eu pour cause une inexécution fautive des obligations fiscales incombant au dirigeant appelé en garantie.

Il faut établir que le dommage ne se serait pas produit pour l’autorité fiscale, si le représentant légal avait respecté ses obligations fiscales vis-à-vis du bureau d’imposition.

B.

Reproches formulés par le Bureau d’Imposition au Réclamant [36] Le Bureau d’Imposition fonde l’émission du BAG à l’encontre du Réclamant sur le constat du défaut de paiement à I’ACD de la retenue d’impôt sur les traitements et salaires versés au personnel de la Société, au titre de l’année 2023, d’un montant principal de EUR …, auquel s’ajoute un montant de EUR … d’intérêts. En effet, selon le Bureau d’Imposition, le Réclamant aurait été, en sa qualité de gérant de la Société, « personnellement tenu à l’accomplissement, de toutes les obligations fiscales incombant à la société, dont notamment le paiement des impôts dus 9par la société à l’aide des fonds administrés ». A ce titre, II lui aurait incombé de prélever sur les fonds administrés les fonds nécessaires pour acquitter les impôts nés avant la disparition de la société … et d’assurer leur paiement » et de « retenir, de déclarer et de payer la retenue ».

Enfin, selon le Bureau d’Imposition, « cette omission de payer les sommes dues à titre de retenue d’impôt est une inexécution fautive » des obligations du Réclamant en sa qualité de représentant de la Société.

[37.] Le Réclamant déduit de ces affirmations, sans doute de loin trop générales pour justifier le constat d’une quelconque « inexécution fautive » de ses obligations au sens du §109 AO, qu’il lui est reproché de ne pas avoir procédé au paiement des impôts dus par la Société.

[38] Comme mentionné ci-dessus (v. n° [35.]), c’est au Bureau d’Imposition qu’incombe la charge de la preuve et qu’il revient d’établir que le non-paiement de l’impôt a eu pour cause une inexécution fautive, par le Réclamant, des obligations fiscales de la Société. Or, force est de constater que le Bureau d’Imposition n’a pas détaillé en quoi le fait de ne pas avoir payé l’impôt dû constituait, dans la situation particulière dans laquelle se trouvait le Réclamant en l’espèce, une faute d’une telle gravité qu’un dirigeant normalement diligent n’aurait jamais pu commettre (v. n° [30.]). Le BAG se contente de constater le manquement à l’obligation consistant dans le paiement des impôts dus sans pour autant définir le comportement fautif du Réclamant ni apporter d’élément de preuve de son comportement fautif, permettant la mise en œuvre d’un appel en garantie. Or, tel que mentionné ci-dessus (v. n° [26.]), une décision litigieuse qui se limite à constater objectivement le manquement du demandeur à ses obligations fiscales, sans pour autant qualifier un quelconque comportement fautif dans son chef tenant à des circonstances particulières de l’espèce, ni encore de retracer les raisons susceptibles, en raison et en équité, de justifier la décision de poursuivre le demandeur (…) » constitue une erreur en droit et doit être annulée.

[39] La jurisprudence luxembourgeoise a également eu l’occasion de retenir, dans des affaires dans lesquelles les faits se rapprochaient de ceux en l’espèce, l’absence d’inexécution fautive du dirigeant permettant de justifier l’émission d’un bulletin d’appel en garantie à son encontre.

[40] La Cour administrative a notamment retenu :

« Le cadre légal ainsi tracé, la Cour rejoint le délégué du gouvernement en ce qu’il fait état d’une situation personnelle dans le chef de l’appelant se présentant prima facie comme celle d’un administrateur voire administrateur-délégué d’une société qui a omis de procéder ou de veiller à faire procéder, ceci pendant plusieurs mois au courant de l’année 2014, au paiement, sur les fonds de la société, qu’il était appelé à administrer, des impôts dont elle est redevable pour compte de ses salariés et retenus par elle à cette fin.

Cette apparence première est cependant largement ébranlée par un exposé très détaillé relativement à une détaillé des choses tout à fait singulière au niveau de romanisation et du fonctionnement de la société … caractérisée par la présence d’un administrateur-délégué en la personne de feu Monsieur qui semble avoir tenu seul les reines de la société …, tant au niveau de l’orientation de la politique d’activité que de la gestion journalière étant relevé Qu’il aurait notamment avoir seul eu le pouvoir de faire fonctionner les comptes bancaires de la société, le rôle des autres administrateur, voire celui de l’appelant en tant que deuxième administrateur-

délégué ne paraît avoir été qu’essentiellement théorique.

Il s’y ajoute que le manquement pointé du non-paiement d’impôts sur salaire pendant 10plusieurs mois ne se situe qu’au cours de l’année 2014 et particulièrement au cours des derniers mois d’activités de la société …, que l’appelant n’a pas personnellement eu les pouvoirs de procéder directement au règlement de la dette, faute de disposer d’un pouvoir sur le fonctionnement des comptes bancaires de la société et qu’il paraît raisonnablement pouvoir être suivi en ce qu’il excipe de son ignorance des agissements effectifs de Monsieur et de la situation exacte dans laquelle la société se trouvait et dans laquelle elle était vouée à sombrer.

[.. .] Au vu de l’ensemble de ces éléments, le caractère fautif des manquements reprochés à l’appelant n’est pas suffisamment démontré en droit et en fait par la partie étatique, de sorte que les conditions pour la mise en œuvre de sa responsabilité personnelle pour les retenues d’impôt visées dans le bulletin litigieux ne se trouvent pas réunies à suffisance en cause. » [41.] Les juridictions administratives ont encore eu l’occasion de relever, concernant la durée du mandat du dirigeant, que celle-ci est « effectivement à prendre en compte pour apprécier la faute au sens de l’article 109 AO ».

[42] En l’espèce, il y a ainsi lieu de prendre en compte les circonstances particulières de la nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société ainsi que celles dans lesquelles il s’est trouvé durant son mandat. En effet, le Réclamant est devenu co-gérant de la Société dans un contexte contentieux, celui du non-remboursement du Prêt et de déclarations inexactes faires sous le Prêt accordé par la Société Prêteuse à Monsieur (B), Afin de remédier à cette situation et d’aboutir au remboursement anticipé du Prêt (conformément aux stipulations contractuelles entre parties), la Société Prêteuse a exercé les droits de vote attachés aux parts sociales de la Société Mère, lui conférés en vertu du contrat de Gage et permettant au final au Réclamant d’être nommé co-gérant de la Société Mère aux côtés de Monsieur (C) et co-gérant de la Société aux côtés de Monsieur (B) (v. n° [5.] - [7.]).

[43] Cette situation a donné lieu à un conflit entre le Réclamant et Monsieur (B) qui n’a jamais accepté la nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société et, partant, l’idée que le Réclamant puisse s’immiscer dans la gestion de la Société dont Monsieur (B) était le gérant unique depuis presque dix ans, en plus de sa qualité de seul bénéficiaire effectif. Les courriers échangés entre Monsieur (B) et le mandataire de la Société Prêteuse (Pièces n° 9 et 11) en témoignent à suffisance de droit.

[44.] Dans ce contexte conflictuel et dans la mesure où il contestait la validité de la nomination du Réclamant en tant que co-gérant de la Société, il est évident et facilement imaginable que Monsieur (B) n’a jamais souhaité - et s’est opposé vigoureusement à l’idée -

que le Réclamant soit en mesure d’exercer effectivement son mandat, de participer à une quelconque décision en qualité de gérant ou encore plus généralement de poser un quelconque acte en qualité de gérant de la Société. Il n’a ainsi jamais donné au Réclamant accès aux documents sociaux et comptables de la Société, ni à ses comptes bancaires et le Réclamant n’a donc jamais pu exercer son mandat de gérant, Le fait que le Réclamant n’ait jamais pu exercer son mandat de gérant de la Société ressort par ailleurs de la Convention Transactionnelle conclue avec Monsieur (B) afin de mettre fin à leur différend qui mentionne expressément que le Réclamant n’a « posé aucun acte juridique pour le compte de (AA) » depuis sa nomination en qualité de gérant et ce jusqu’à sa démission.

[45.] A cela s’ajoute encore le fait que le mandat du Réclamant en tant que co-gérant de la Société n’a, en raison de tout ce qui précède, été que de très courte durée.

11 [46.] Or, dans ces circonstances, qui ne peuvent être qualifiées de normales, le Réclamant, qui n’a jamais pu exercer son mandat de gérant occupé essentiellement « sur papier » pendant une très courte période, ne saurait, se voir reprocher un quelconque comportement fautif en relation avec le défaut de paiement de la retenue à la source sur les traitements et salaires du personnel de la Société à l’ACD.

[47.] Il y a, enfin, lieu de relever que le Réclamant est le gérant / l’administrateur de plusieurs autres entités luxembourgeoises, toutes en règle avec leurs obligations fiscales, tant du point de vue des impôts directs que de la taxe sur la valeur ajoutée, et dont aucune n’a de contentieux ni avec l’ACD, ni avec l’Administration de l’Enregistrement, des Domaines et de la TVA. Il s’agit bien là d’un élément de nature à démontrer que le Réclamant agit, lorsqu’il en a la possibilité, comme un gérant normalement diligent et prudent.

[48.] Il ne fait donc nul doute que, dans des circonstances normales d’exercice de son mandat de gérant de la Société, le Réclamant, qui aurait eu accès aux documents sociaux et comptables de la Société ainsi qu’à ses comptes bancaires, aurait été en mesure de se rendre compte des montants de retenue à la source sur les traitements et salaires restés en souffrance au titre de l’année 2023 et aurait donc, dans la mesure du possible et en prenant évidemment en considération la situation financière de la Société, veillé au paiement de cette retenue à la source à l’ACD.

[50.] Il y a donc lieu de conclure de tout ce qui précède que le BAG, n’est pas fondé en ce qu’il n’établit aucune faute de la part du Réclamant dans le non-paiement des impôts dus.

Le dommage que l’ACD a éventuellement subi a d’autres causes qu’une prétendue inexécution fautive des obligations fiscales du Réclamant, qui n’existe pas en l’espèce.

[51.] Partant, même si le Bureau d’Imposition veut donner l’impression, sur base d’un faisceau d’indices éparses et non causales, que le Réclamant aurait adopté un comportement critiquable (quod non), il y a lieu de conclure sur base de ce qui précède que les conditions de mise en œuvre de sa responsabilité au sens du §109 AO ne sont pas remplies. Par conséquent, il y a lieu d’annuler le BAG.

Choix dans le gérant à appeler en garantie [52.] D’après le §7 (3) de la loi d’adaptation fiscale modifiée du 16 octobre 1934, maintenue en vigueur par l’arrêté grand-ducal du 26 octobre 1944 (Steueranpassungsgesetz, ci-après « StAnpG »), le pouvoir du bureau d’imposition d’engager des poursuites contre un tiers responsable et, plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir d’appréciation dans son chef et ce à un double titre : d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée et, ensuite, en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.

[53.] Il résulte encore du §2 al (1) StAnpG que l’administration investie d’un pouvoir d’appréciation doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières susceptibles en raison et en équité de fonder sa décision. De plus, en cas de pluralité de responsables potentiels, le bureau d’imposition a la possibilité de les poursuivre simultanément tous, sans pour autant être obligé de le faire. Le bureau d’imposition peut limiter son recours contre un ou plusieurs 12d’entre eux. En toute hypothèse, il appartient au bureau d’imposition de relever les circonstances particulières qui ont déterminé son choix.

[54.] En l’espèce, la décision du Bureau d’Imposition n’a pas suivi les principes susmentionnés, notamment pour ce qui concerne l’appréciation de considérations d‘opportunité.

[54] Selon la doctrine luxembourgeoise, la notion d’opportunité (« Zweckmässigkeit ») comporte deux limites une limite « extérieure » en ce que la mesure envisagée doit être conforme au but et à l’intention de la loi et une limite « intérieure » en ce que cette mesure permette le mieux d’atteindre utilement le but de la loi.

[55] Or, tel que cela a été démontré dans les développements ci-dessus, le BAG ne démontre aucune faute de la part du Réclamant mais se borne à simplement constater le non-

respect d’une obligation de la Société. Or, le législateur n’a pas souhaité imposer aux dirigeants une responsabilité de plein droit (v. n° [27], ni les rendre responsables de l’impôt de la société dont ils ont la gestion en cas d’absence de faute qui leur est imputable dans l’exécution des obligations fiscales. Ainsi donc la limite « extérieure » de la notion d’opportunité a déjà été franchie en l’espèce dans la mesure où le BAG en cause va au-delà du but de la loi tel que décrit ci-dessus.

[56] D’autre part, en ayant appelé en garantie le Réclamant en raison du seul fait que ce dernier a un jour eu la qualité de gérant de la Société alors même qu’il n’était en fonction que pendant une période très courte et qu’il n’a jamais été en mesure, dans les faits, d’exercer son mandat, tandis que Monsieur (B) tenait seul les rênes de la Société pendant une période ininterrompue de près de dix ans et le restait - dans les faits - jusqu’au prononcé de la faillite, la limite « intérieure » de la notion d’opportunité a également été franchie.

[57.] Ainsi, le bureau d’Imposition a violé les dispositions de la StAnpG en ne prenant pas en compte tous les éléments et circonstances de faits, afin de limiter son recours aux gérants responsables du non-paiement de l’impôt dû. Le BAG encourt pour cette raison encore l’annulation. […] ».

Par courrier de son mandataire du 10 mai 2024, Monsieur (A) sollicita encore le bénéfice d’un sursis à exécution sur base du § 251 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », demande qui lui fut refusée par décision du préposé du bureau d’imposition RTS … du 15 mai 2024.

Un recours hiérarchique introduit en date du 28 mai 2024 à l’encontre de cette décision du 15 mai 2024 resta sans réponse de la part du directeur de l’administration des Contributions directes.

En dépit de la réclamation précitée, le bureau de recette … de l’administration des Contributions directes émit en date du 24 juin 2024 une contrainte à l’encontre de Monsieur (A), suivie d’un commandement de payer le 26 juin 2024.

Aussi, à défaut de réaction lui parvenue de la part du directeur de l’administration des Contributions directes, désigné ci-après « le directeur », Monsieur (A) a, par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 4 décembre 2024, inscrite sous le numéro 52043 du rôle, fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation du bulletin d’appel en 13garantie du 19 avril 2024 et, par requête déposée le même jour, enrôlée sous le numéro 52047R, il a encore fait introduire un recours tendant à voir ordonner le sursis à exécution par rapport à ce bulletin d’appel en garantie du 19 avril 2024.

Le requérant estime que les deux conditions légalement posées par l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après dénommée la « loi du 21 juin 1999 », seraient remplies en cause.

Au titre de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif, le requérant relève d’abord que le fait que le directeur s’abstienne de prendre position sur la réclamation introduite par lui à l’encontre du bulletin d’appel en garantie du 19 avril 2024, tout en mettant néanmoins en œuvre des mesures permettant de procéder au recouvrement de la dette fiscale contenue dans ledit bulletin d’appel en garantie, serait était constitutif d’un abus de droit.

Il relève ensuite que l’administration des Contributions directes lui réclame la somme de … euros de retenue d’impôt sur les traitements et salaires auquel s’ajoutent les intérêts de retard d’un montant de … euros, soit un montant total de … euros, somme dont il ne disposerait toutefois pas.

Ainsi, ses propres revenus se limiteraient au montant perçu au titre de sa retraite française soit un montant net mensuel avant prélèvement de l’impôt sur le revenu de … euros ainsi qu’au montant net mensuel perçu au titre de sa retraite complémentaire de … euros et d’une rente viagère française d’un montant brut annuel de … euros. S’il devait certes encore percevoir à l’avenir d’une pension de vieillesse du système de retraite public luxembourgeois, les montants escomptés ne devraient toutefois pas être très élevés en raison de sa période d’activité limitée au Grand-Duché.

Monsieur (A) affirme encore que les montants figurant sur ses comptes bancaires témoigneraient de liquidités insuffisantes au paiement des montants réclamés dans le bulletin d’appel en garantie, le requérant affirmant à cet égard, pièces à l’appui, disposer de quelques … euros.

Enfin, s’il détenait encore des actifs non liquides, sous forme d’actions et de parts sociales de sociétés, il s’agirait de sociétés non cotées en bourse, de sorte que les titres ne seraient pas liquides, tout comme il bénéficierait encore de deux créances détenues en compte courant, d’un montant global de plus … euros. Or, en l’absence de mesure provisoire entraînant le sursis à l’exécution du bulletin d’appel en garantie, il n’aurait d’autre choix que d’essayer de céder les participations qu’il détient ou de réclamer le remboursement anticipé de ses créances en compte courant, ce qui perturberait de manière irrémédiable sa situation patrimoniale, puisque même dans l’hypothèse où il obtiendrait gain de cause dans le cadre de l’instance au fond et qu’il se verrait restituer toutes les sommes payées, sa situation initiale ne pourrait plus être rétablie. Par ailleurs, dans l’hypothèse d’un remboursement des créances détenues à l’encontre des deux sociétés, une telle hypothèse, qui lui permettrait certes de payer les montants qui lui sont réclamés dans le bulletin d’appel en garantie, serait purement théorique et serait de nature à causer aux sociétés concernées un préjudice grave et irréparable pouvant aller jusqu’à leur faillite, ces dernières ne disposant pas les liquidités nécessaires à de tels remboursements, ce que le requérant entend encore documenter en versant des pièces à l’appui de son argumentation.

Monsieur (A) estime aussi que son recours au fond présenterait de sérieuses chances de succès.

Dans ce contexte, il estime d’abord que le défaut de réponse du directeur à sa réclamation 14dirigée contre le bulletin d’appel en garantie devrait être suffisant pour en déduire le caractère sérieux de ses moyens invoqués à l’appui de sa réclamation.

Ensuite, si ledit bulletin d’appel en garantie retiendrait qu’il aurait été en sa qualité de co-gérant de la société (AA) personnellement tenu de retenir, de déclarer et de payer la retenue d’impôt sur les traitements et salaires versés au personnel de celle-ci durant la période d’exercice de ses fonctions de gérant et que le défaut de paiement des sommes dues au titre de la retenue d’impôt de l’année 2023 serait constitutif d’une inexécution fautive dans son chef, il estime toutefois, au contraire, ne s’être rendu coupable d’aucune inexécution fautive.

Il explique être devenu co-gérant de la société (AA) dans un contexte contentieux, à savoir celui du non-remboursement d’un prêt accordé à Monsieur (B) par la société (DD), et de déclarations inexactes faites dans le cadre de ce prêt par Monsieur (B). Afin de remédier à cette situation et d’aboutir au remboursement anticipé du prêt en question, la société prêteuse aurait exercé les droits de vote attachés aux parts sociales gagées de l’associée unique de la société (AA), de sorte à lui permettre au final d’être nommé co-gérant de la société (AA) aux côtés de Monsieur (B).

Cette situation aurait toutefois donné lieu à un conflit entre lui-même et Monsieur (B), qui se serait opposé à la présence d’un co-gérant, de sorte que le requérant n’aurait jamais pu obtenir accès aux documents sociaux et comptables de la société (AA), ni à ses comptes bancaires, ni n’aurait pu participer à une quelconque décision en qualité de gérant, ni encore plus généralement pu poser un quelconque acte en qualité de gérant de cette société, tandis que Monsieur (B) aurait continué à gérer seul la société, le requérant relevant encore la durée très courte de son mandat de gérant de la société (AA), qui aurait débuté le 16 octobre 2023 pour prendre fin le 8 décembre 2023, le requérant soulignant avoir démissionné par un courrier adressé à la société en date du 8 décembre 2023, même si celle-ci n’aurait publié sa démission au Registre du Commerce et des Sociétés qu’en date du 23 janvier 2024.

En droit, se prévalant essentiellement des moyens et arguments d’ores et déjà opposés au bulletin litigieux dans sa réclamation, le requérant relève notamment que le paragraphe 109 AO n’aurait pas instauré une responsabilité de plein droit, mais une responsabilité pour faute qu’il y aurait lieu d’établir. Or, afin que la faute d’un représentant légal puisse être retenue, il faudrait qu’elle présente une gravité certaine, laquelle soit consister en une faute intentionnelle, sinon en une négligence grossière ; en l’espèce toutefois, le bulletin d’appel en garantie se contenterait de constater le manquement à l’obligation consistant dans le paiement des impôts dus sans pour autant définir son comportement fautif ni apporter d’élément de preuve de son comportement fautif, permettant la mise en œuvre d’un appel en garantie.

Monsieur (A) estime encore qu’il conviendrait en tout état de cause de prendre en compte les circonstances particulières de sa nomination en tant que co-gérant de la société (AA) ainsi que celles dans lesquelles il se serait trouvé durant son mandat, circonstances qui ne pourraient pas être qualifiées de normales, puisqu’il n’aurait pas pu exercer son mandat de gérant occupé qu’essentiellement « sur papier » pendant une très courte période, de sorte qu’il ne saurait se voir reprocher un quelconque comportement fautif en relation avec le défaut de paiement de la retenue à la source sur les traitements et salaires du personnel de la société à l’administration des Contributions directes.

Enfin, compte tenu de ces circonstances particulières, il conteste le choix de l’administration des Contributions directes d’avoir retenu sa responsabilité en tant que gérant 15de la société, alors pourtant que le bureau d’imposition aurait dû, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, tenir compte de considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation effective et explicite des circonstances particulières pour fonder son choix, le requérant rappelant n’avoir été, pour sa part, en fonction que pendant une période très courte et n’avoir jamais été en mesure, dans les faits, d’exercer son mandat, tandis que Monsieur (B) aurait tenu seul les rênes de la société (AA) pendant une période ininterrompue de près de dix ans et le serait resté dans les faits jusqu’au prononcé de la faillite.

Le délégué du gouvernement soutient quant à lui qu’aucune des conditions requises pour l’institution d’une mesure provisoire ne serait remplie en l’espèce. Il insiste plus particulièrement sur l’absence de risque de préjudice grave et définitif pour ensuite conclure au rejet des moyens avancés au fond.

Il insiste sur le fait que, d’un côté, selon les publications effectuées au Registre de commerce et des sociétés Monsieur (A) aurait bien été nommé gérant de la société (AA), tandis que de l’autre côté aucun indice n’existerait qui permettrait d’énerver le contenu de ces publications, le délégué du gouvernement relevant en particulier l’attitude passive du requérant ;

il considère en substance que le requérant ne saurait se contenter d’affirmer être une victime pour échapper à sa dette fiscale, sans chercher à établir positivement cette prétendue circonstance.

En vertu de l’article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

L’affaire au fond ayant été introduite le 4 décembre 2024 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi du 21 juin 1999, elle ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.

Concernant les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la demande, il convient de rappeler que le juge appelé à en apprécier le caractère sérieux ne saurait les analyser et discuter à fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite des moyens présentés, et accorder le sursis, respectivement la mesure de sauvegarde lorsqu’il paraît, en l’état de l’instruction, de nature à pouvoir entraîner l’annulation ou la réformation de la décision critiquée, étant rappelé que comme le sursis d’exécution, respectivement l’institution d’une mesure de sauvegarde doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’ils constituent une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.

Ainsi, le juge des référés est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant 16susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le requérant apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation de la décision attaquée.

La compétence du président du tribunal est restreinte à des mesures essentiellement provisoires et ne saurait en aucun cas porter préjudice au principal. Il doit s’abstenir de préjuger les éléments soumis à l’appréciation ultérieure du tribunal statuant au fond, ce qui implique qu’il doit s’abstenir de prendre position de manière péremptoire. Il doit donc se borner à apprécier si les chances de voir déclarer recevable le recours au fond paraissent sérieuses, au vu des éléments produits devant lui. Au niveau de l’examen des moyens d’annulation invoqués à l’appui du recours au fond, l’examen de ses chances de succès appelle le juge administratif saisi de conclusions à des fins de sursis à exécution, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et à vérifier si un des moyens soulevés par la partie requérante apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation voire la réformation de la décision critiquée.

Il doit pour cela prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l’issue du litige - que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec - n’est plus affectée d’un aléa.

Or, en ce qui concerne ensuite l’argumentation développée par le requérant relative à l’absence de tout comportement fautif dans son chef en sa qualité de co-gérant de la société faillie (AA), cette argumentation ne s’impose en l’état actuel d’instruction du dossier et des éléments soumis au juge du provisoire pas à première vue.

En ce qui concerne ensuite l’absence d’implication et a fortiori d’inexécution fautive de Monsieur (A), le soussigné constate, au terme d’un examen nécessairement sommaire, qu’il appert que, d’une part, Monsieur (A) se voit réclamer les arriérés de la société au titre de la retenue d’impôt sur les salaires et traitements pour la période de février 2023 à janvier 2024 et, d’autre part, de manière incontestée, que le requérant a été nommé en date 16 octobre 2023 en qualité de co-gérant de la société et qu’il a été radié de cette même fonction suivant une information déposée par la société (AA) au Registre de Commerce et des Sociétés en date du 23 janvier 2024, son co-gérant, Monsieur (B) étant devenu gérant unique avec effet au 19 janvier 2024, de sorte qu’il appert, a priori, que le requérant a démissionné de son mandat avec effet à cette date, à savoir au 19 janvier 2024, étant encore souligné qu’une éventuelle démission, ou plutôt volonté de démissionner, prétendument émise antérieurement par le requérant, n’est a priori pas opposable aux tiers - dont le fisc - pour ne pas avoir respectée, en l’état actuel du dossier, les formalités prescrites par l’article 9 de la loi modifiée du 10 août 1915 concernant les sociétés commerciales.

Au vu de ce qui précède, il est dès lors probable que les juges du fond retiennent à première vue l’implication directe, du moins théorique, du requérant dans la gestion de la société (AA).

Il est encore probable que les juges du fond, en application d’une jurisprudence constante selon laquelle le paragraphe 103 AO met une obligation personnelle à charge des représentants légaux de la société, en ce compris les dirigeants de fait ou dirigeants apparents, c’est-à-dire ceux 17qui se comportent à l’égard des tiers comme s’ils avaient le pouvoir de disposer, aboutissent à la conclusion qu’en sa qualité de gérant de la société (AA), le requérant a été, en tant que représentant légal de ladite société, responsable de l’accomplissement des obligations fiscales incombant à ladite société au cours de l’exercice fiscal visé par le bulletin d’appel en garantie et notamment celle de veiller à ce que les impôts dus soient provisionnés et payés au trésor public.

Ainsi, en vertu des dispositions de l’article 136 (4) de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, l’employeur est tenu de retenir, de déclarer et de verser l’impôt qui est dû sur les traitements et salaires de son personnel. Dans le cas d’une société, cette obligation incombant aux employeurs est transmise aux représentants de celle-ci, conformément au paragraphe 103 AO qui dispose que « Die gesetzlichen Vertreter juristischer Personen und solcher Personen, die geschäftsunfähig oder in der Geschäftsfähigkeit beschränkt sind, haben alle Pflichten zu erfüllen, die denen Personen, die sie vertreten, obliegen; insbesondere haben sie dafür zu sorgen, dass die Steuern aus den Mitteln die sie verwalten, entrichtet werden. Für Zwangsgeldstrafen und Sicherungsgelder die gegen sie erkannt, und für Kosten von Zwangsmitteln die gegen sie festgesetzt werden, haften neben ihnen die von ihnen vertretenen Personen ».

Quant à la mise en œuvre de la responsabilité personnelle du fait du non-paiement des impôts dont est redevable une personne morale, le paragraphe 109 AO pévoit dans son alinéa 1er ce qui suit : « Die Vertreter und die übrigen in den §§ 103 bis 108 bezeichneten Personen haften insoweit persönlich neben dem Steuerpflichtigen, als durch schuldhafte Verletzung der ihnen in den §§ 103 bis 108 auferlegten Pflichten Steueransprüche verkürzt oder Erstattung oder Vergütung zu Unrecht gewährt worden sind ».

S’agissant de l’appréciation des manquements reprochés au requérant, le soussigné constate que selon la jurisprudence constante des juges du fond, le simple constat d’un manquement à une obligation fiscale découlant du paragraphe 103 AO n’est pas suffisant pour engager la responsabilité personnelle des dirigeants d’une société en application du paragraphe 109 (1) AO et pour pouvoir émettre à leur encontre un bulletin d’appel en garantie, le législateur ayant en effet posé à cet égard l’exigence supplémentaire d’une inexécution fautive (« schuldhafte Verletzung ») des obligations du représentant de la société envers l’administration fiscale.

Par ailleurs, suivant une jurisprudence bien établie en la matière, au vœu du paragraphe 7 (3) StAnpG, disposant que « jeder Gesamtschuldner schuldet die ganze Leistung. Dem Finanzamt steht es frei an welchen Gesamtschuldner es sich halten will. Es kann die geschuldete Leistung von jedem Gesamtschuldner ganz oder zu einem Teil fordern », le pouvoir du bureau d’imposition d’engager une poursuite du tiers responsable, et plus particulièrement, contre le représentant d’une société, ne relève pas d’une compétence liée, mais constitue un pouvoir discrétionnaire dans son chef et ce à un double titre, d’abord en ce qui concerne l’appréciation du degré fautif du comportement de la personne visée, et ensuite en ce qui concerne le choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, chaque fois compte tenu des circonstances particulières de l’espèce. Quant à l’exercice du pouvoir d’appréciation par l’administration, le paragraphe 2 StAnpG dispose que « (1) Entscheidungen, die die Behörden nach ihrem Ermessen zu treffen haben (Ermessensentscheidungen) müssen sich in den Grenzen halten, die das Gesetz dem Ermessen zieht. (2) Innerhalb dieser Grenzen sind Ermessensentscheidungen nach Billigkeit und Zweckmäβigkeit zu treffen ». Ainsi, l’administration investie d’un pouvoir d’appréciation doit procéder selon des considérations d’équité et d’opportunité et partant se livrer à une appréciation 18effective et explicite des circonstances particulières susceptibles en opportunité et en équité de fonder sa décision.

Le soussigné doit encore relever qu’au regard de la jurisprudence en la matière, la faute d’un dirigeant de société n’implique pas de la part de celui-ci un agissement fautif, la responsabilité de l’administrateur peut être engagée par son attitude passive, sa négligence ou son incurie1 et, par conséquent, le comportement d’un dirigeant consistant en une légèreté ou une insouciance impardonnable devrait être considérée comme faute grave, à savoir une faute qu’un dirigeant raisonnablement diligent et prudent n’aurait pas commise et qui heurte les normes essentielles de la vie en société, ou du moins les normes importantes2.

Si Monsieur (A) fait certes plaider qu’il aurait été placé dans l’impossibilité d’agir du fait qu’il aurait été court-circuité par les agissements de son co-gérant, seul véritable maître de l’affaire, et aurait été tenu à l’écart de la gestion journalière, cette explication demeure toutefois en l’espèce et en l’état actuel d’instruction du dossier à l’état de simple allégation, aucun élément probant ne venant étayer une telle mise à l’écart. Certes, s’il résulte des pièces versées en cause qu’un litige financier aurait opposé Monsieur (B) à la société (DD) dont Monsieur (A) serait l’actionnaire, il n’appert pas que Monsieur (A) n’ait, tel qu’allégué, pas eu accès aux documents sociaux et comptables ou encore aux comptes bancaires de (AA) et n’aurait donc jamais pu effectivement exercer son mandat de gérant.

La convention transactionnelle conclue en date du 8 décembre 2023 versée à cette fin en cause n’est pas de nature à énerver le constat de défaut de tout élément probant ; au contraire, tel que mis en exergue par le délégué du gouvernement, ladite convention indique que « (AA) est depuis agrée par deux gérants, à savoir Messieurs (B) et (A) ». Si le requérant n’était certes pas signataire et partie à cette convention, la société dont il est actionnaire, à savoir la société (DD), a toutefois co-signé celle-ci : il paraît dès lors incohérent de soutenir actuellement n’avoir pas été à même de gérer ladite société, mais d’accepter une telle mention dans une convention transactionnelle.

Le fait que ladite convention indique de surcroît que « Monsieur (A) déclare que, depuis sa nomination en qualité de gérant de la (AA), il n’a posé aucun acte juridique pour le compte de (AA) » ne paraît pas devoir être interprété tel que le plaide actuellement le requérant, à savoir que cette indication prouverait qu’il n’aurait jamais pu effectivement exercer son mandat de gérant, cette indication signifiant plutôt que le requérant n’a pas, activement, posé d’acte juridique, mais non qu’il ait été empêché de veiller à la gestion journalière de cette même société en posant des actes matériels, tels que la tenue matérielle de la comptabilité, la préparation des déclarations fiscales sur base de la comptabilité, l’exécution correcte des différents volets du devoir de collaboration avec l’administration et le paiement aux échéances fixées des montants d’impôts résultant des bulletins d’impôt, ainsi que le prélèvement des retenues d’impôts à la source, notamment sur les salaires payés ou les dividendes distribués, et de les reverser directement au fisc.

En tout état de cause, même à admettre que le requérant ait été placé dans l’impossibilité d’agir du fait qu’il aurait été court-circuité par les agissements de Monsieur (B) et tenu à l’écart de la gestion journalière, la jurisprudence retient que dans un tel cas, il aurait appartenu au dirigeant concerné de prendre ses dispositions en démissionnant de ses fonctions, alors que le fait d’exercer sciemment ses fonctions de dirigeant, tout en étant conscient de ne pas avoir accès aux comptes bancaires de la société dont il était censé administrer les fonds, ainsi qu’aux pièces comptables 1 Trib. adm., 11 novembre 2015, nos 35037 à 35039 du rôle, confirmés par Cour adm., 3 mai 2016, nos 37282C à 37284C du rôle, Pas. adm. 2023, V° Impôts, n° 591 et les autres références y citées.

2 Trib. adm. 6 juillet 2016, n° 36437 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

19manifestement nécessaires pour remplir les obligations déclaratives et fiscales de la société dont il était de jure en charge, est en tant que tel à considérer comme étant une faute3.

La Cour administrative4 a d’ailleurs admis à ce sujet que des considérations visant le comportement des autres administrateurs sont étrangères aux dispositions d’ordre public se dégageant des paragraphes 103 et 109 AO et ne peuvent partant exonérer l’appelé en garantie des obligations lui incombant personnellement et de la responsabilité en découlant.

Or, en l’espèce, il appert que le requérant n’a, manifestement, pas démissionné compte tenu de sa mise à l’écart, mais, vraisemblablement, compte tenu de la signature de la convention transactionnelle conclue en date du 8 décembre 2023 ayant notamment abouti au paiement par Monsieur (B) à la société (DD) d’une créance de quelques …euros, le mandataire du requérant ayant admis à l’audience que le requérant n’était pas devenu gérant de la société (AA) afin de gérer celle-ci, mais uniquement afin de veiller à ses propres intérêts financiers, objectif fructueusement et précisément rencontré par la signature de ladite convention transactionnelle.

Le soussigné retient qu’en tout état de cause un dirigeant de société diligent, confronté à sa prétendue mise à l’écart par son co-gérant, n’aurait pas manqué, ne serait-ce qu’aux seules fins de se décharger de toute responsabilité, de protester contre et de contester formellement et par écrit une telle situation : or, force est en l’espèce de constater que Monsieur (A) n’a, manifestement, jamais protesté de manière officielle contre sa prétendue mise à l’écart, aucune pièce afférente n’étant versée aux débats.

Or, à cet égard, il se dégage de la jurisprudence5 que le constat de sa prétendue impuissance aurait dû l’amener à agir de manière diligente par l’accomplissement de démarches retraçables permettant de mettre en évidence qu’il a tenté de remédier aux manquements constatés, voire, en cas de situation désespérée, de démissionner à brève échéance pour ne pas se voir reprocher sa passivité.

Concernant la courte durée de son mandat, au-delà des considérations qui précèdent, il convient de retenir que si certes une courte durée d’un mandat social d’administrateur peut, le cas échéant, être prise en considération dans l’appréciation de la faute au sens du paragraphe 109 AO, en ce qu’il n’a peut-être pas pu se rendre immédiatement compte de la situation dans laquelle la société se trouve, - encore que la doctrine6 ne semble réserver l’invocation de l’exercice du mandat social durant une courte période aux seuls représentants qui ne sont pas directement en charge de la gestion de la société - pour se libérer de leur responsabilité personnelle, tel ne saurait être la même approche en présence d’un dirigeant, surtout expérimenté comme c’est le cas en l’espèce, appelé à assurer la gestion journalière, qui ne saurait utilement faire valoir avoir attendu comme en l’espèce plusieurs mois avant d’agir face à une situation où il se voit empêché d’œuvrer normalement7, le requérant, gérant de sociétés professionnel, ne pouvant guère être considéré comme victime crédule.

Le moyen du requérant contestant tout comportement fautif dans son chef en sa qualité de dirigeant de la société faillie, respectivement excipant d’une impossibilité matérielle d’exercer ses obligations légales, ne présente dès lors pas le sérieux nécessaire.

3 Trib. adm. 8 février 2023, n° 46224.

4 Cour adm., 30 mars 2017, n° 38880C.

5 Serge Schroeder, L’appel en garantie, Legitech, p.73.

6 Op. cit., p.65.

7 Cour adm. 13 juillet 2023, n° 48718C 20Les deux autres conditions justifiant un appel en garantie, à savoir l’existence d’un dommage accru au Trésor public, en l’occurrence l’insuffisance d’impôt résultant des défauts de paiement des impôts dus à l’échéance, d’une part, et l’existence d’un lien de cause à effet entre le non-paiement des retenues d’impôt sur salaire litigieuses et ledit dommage, d’autre part, sont, elles aussi, vérifiées en l’espèce pour ne pas être contestées, de sorte que c’est à première vue à bon droit que le bureau d’imposition a retenu que les conditions pour la mise en œuvre de la responsabilité personnelle de Monsieur (A) au sens du paragraphe 109, alinéa 1er AO pour les retenues d’impôt visées dans le bulletin litigieux se trouvent réunies en cause.

En ce qui concerne l’indication du choix du ou des codébiteurs contre lesquels l’émission d’un bulletin d’appel en garantie est décidée, il y a lieu de constater qu’en cas de pluralité de responsables, la possibilité de poursuivre simultanément tous les responsables résulte implicitement du paragraphe 7 StAnpG en vertu duquel ceux qui sont poursuivis en qualité de responsables sont tenus solidairement.

Selon la jurisprudence8, si le bureau d’imposition n’est pas obligé de poursuivre tous les co-responsables et peut limiter son recours contre un ou plusieurs d’entre eux, et s’il a l’obligation de justifier son choix, le bureau d’imposition n’a en revanche pas à justifier un choix particulier lorsqu’il a agi contre l’ensemble des administrateurs de la société.

Comme en l’espèce un bulletin d’appel en garantie a également été émis, de manière non contestée, à l’égard de Monsieur (B), de sorte que tous les dirigeants de la société (AA) ont été appelés en garantie, le moyen du requérant, critiquant le choix du bureau d’imposition eu égard à son obligation d’en justifier l’opportunité, ne présente pas non plus le sérieux nécessaire.

Le soussigné, sur base d’un examen nécessairement sommaire, arrive dès lors à la conclusion provisoire que les différents moyens tels qu’avancés par le requérant ne présentent pas le sérieux nécessaire pour justifier la mesure sollicitée : le requérant est partant à débouter de sa demande en institution d’une mesure provisoire, sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question de l’existence éventuelle d’un risque de préjudice grave et définitif, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.

Il est certes vrai que le requérant a invoqué, au vu d’une jurisprudence du soussigné, le défaut de réponse du directeur de répondre concrètement à la réclamation lui adressée endéans le délai de six mois lui alloué par l’article 8 (3) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, et ce tant au niveau de l’examen de l’existence de moyens sérieux, existence pouvant le cas échéant être présumée au vu de l’absence de réponse, qu’au niveau de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif, pareille existence pouvant également être retenue compte tenu du comportement de l’administration consistant à s’abstenir de sérieusement reconsidérer la légalité du bulletin d’appel en garantie émis, en omettant de rencontrer la réclamation à un stade pré-contentieux, tout en poursuivant néanmoins sans égards l’exécution du bulletin contesté.

A cet égard, il convient de rappeler que si le législateur a permis au contribuable, au travers de l’article 8 (3) de la loi du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, de saisir le tribunal administratif de la décision initiale en cas de silence du directeur perdurant pendant plus de 6 mois, cette possibilité de recours n’a, effectivement, pas été créée afin de consacrer le droit du directeur à ne pas instruire les réclamations portées devant 8 Trib. adm. 8 septembre 2021, n° 42050.

21lui, mais, en revanche, elle a été créée afin de ne pas retarder l’évacuation du contentieux fiscal en cas de silence perdurant du directeur dû à une instruction prolongée de dossiers pouvant présenter une complexité certaine.

Il convient ensuite de rappeler que la jurisprudence citée par le requérant s’inscrit, de manière générale, à l’instar de l’ensemble du contentieux administratif, dans la recherche d’un équilibre entre deux objectifs concurrents, à savoir d’une part, assurer la protection du contribuable et, d’autre part, ne pas paralyser l’activité de l’administration fiscale.

En l’espèce, il résulte des explications du délégué du gouvernement que le défaut de réponse du directeur ne constitue en l’espèce pas un refus de celui-ci de traiter la réclamation lui adressée, attitude considérée par la jurisprudence comme une atteinte tant à la protection du contribuable qu’à son droit à un recours effectif, mais d’une impossibilité matérielle de respecter strictement le délai lui imparti, compte tenu de l’engorgement de l’administration des Contributions directes, mais que ladite réclamation aurait entretemps été traitée, en témoignant la rapide réponse fournie par écrit en date du 9 décembre 2024 par le délégué du gouvernement par rapport aux recours déposés en date 4 décembre 2024.

Par ailleurs, le soussigné ne saurait considérer qu’en l’espèce le requérant aurait été lésé en ses droits en devant introduire un recours contentieux sans connaître les raisons du rejet de sa réclamation et des arguments y contenus, les moyens et arguments circonstanciés contenus dans les recours au fond et en obtention d’un sursis à exécution témoignant au contraire du fait que le requérant connaissait exactement sa situation administrative en fait et en droit et les motifs de son appel en garantie, étant encore rappelé que le bulletin d’appel en garantie critiqué comporte également une motivation, certes sommaire, mais néanmoins suffisamment précise, que le requérant a pu rencontrer tant dans sa réclamation que dans ses recours contentieux.

Enfin, le juge du provisoire, certes confronté initialement du fait du silence du directeur à une argumentation unilatérale, s’est vu soumettre par l’administration des Contributions directes une prise de position détaillée lui permettant, in fine, de procéder à un examen utile sommaire du litige en confrontant les deux argumentations antagonistes et en soupesant les moyens avancés de part et d’autre.

Dès lors, il n’y a pas lieu, compte tenu des circonstances précises du cas d’espèce, de sanctionner le défaut de réponse directoriale.

Le requérant est partant à débouter de sa demande en institution d’un sursis à exécution.

Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;

rejette le recours tendant à l’instauration d’un sursis à exécution ;

condamne le requérant aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 17 décembre 2024 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.

22 s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 17 décembre 2024 Le greffier du tribunal administratif 23


Synthèse
Numéro d'arrêt : 52047R
Date de la décision : 17/12/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2024-12-17;52047r ?

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