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20/07/2023 | LUXEMBOURG | N°49170

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 20 juillet 2023, 49170


Tribunal administratif Numéro 49170 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49170 Inscrit le 14 juillet 2023

JUGEMENT

du 20 juillet 2023 sur la régularité d’une décision de prolongation de rétention administrative Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2023, enrôlée sous le n° 49170 ;

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Tribunal administratif Numéro 49170 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:LU:TADM:2023:49170 Inscrit le 14 juillet 2023

JUGEMENT

du 20 juillet 2023 sur la régularité d’une décision de prolongation de rétention administrative Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2023, enrôlée sous le n° 49170 ;

de Monsieur …, né le … à … (Togo) et de nationalité togolaise, avisé par télécopie ;

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Vu les articles 120 (3) et 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu l’arrêté du 8 mars 2023 pris par le ministre de l’Immigration et de l’Asile à l’encontre de Monsieur … déclarant son séjour irrégulier, tout en lui ordonnant de quitter le territoire luxembourgeois sans délai et en prenant, à son égard, une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de trois ans ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 8 mars 2023 ordonnant le placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 6 avril 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois avec effet au 8 avril 2023 ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 26 avril 2023, inscrit sous le n° 48857 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle 6 avril 2023 ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 5 mai 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 31 mai 2023, inscrit sous le n° 48961 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle du 5 mai 2023 ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 7 juin 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 27 juin 2023, inscrit sous le n° 49059 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle du 7 juin 2023 ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois avec effet au 8 juillet 2023 ;

Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2023, enrôlée sous le n° 49170 ;

Vu le dossier administratif ;

Vu la convocation émise par le greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2023 convoquant les parties à l’audience publique du 19 juillet 2023, notifiée en mains propres à Monsieur … en date du 14 juillet 2023 ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Marcel MARIGO, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de Monsieur …, déposée au greffe du tribunal administratif le 14 juillet 2023 ;

Monsieur le délégué du gouvernement Felipe LORENZO entendu en ses explications à l’audience publique de vacation du 19 juillet 2023.

L’affaire ayant été prise en délibéré à l’audience publique de vacation du 19 juillet 2023.

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Quant à la recevabilité de la requête :

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 14 juillet 2023 et enrôlée sous le numéro 49170, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », a saisi le président du tribunal administratif d’une demande tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté ordonnant la 4ème prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois avec effet au 8 juillet 2023.

Conformément à l’article 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après « la loi du 29 août 2008 », « Lorsque le ministre décide de prolonger la durée de rétention en vertu de l’article 120, paragraphe (3), alinéa 2, il doit saisir d’office, par requête introduite dans les cinq jours ouvrables de la notification de la décision, le président du Tribunal administratif qui statue d’urgence comme juge du fond et en tout cas dans les dix jours du dépôt de la requête, la personne retenue dûment convoquée par les soins du greffe ».

Il résulte du dossier administratif et des pièces versées en cause que Monsieur … s’est vu notifier en date du 7 juillet 2023 un arrêté du ministre daté du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation de son placement en rétention pour une durée supplémentaire d’un mois avec effet au 8 juillet 2023.

La requête, introduite le 14 juillet 2023, est partant à déclarer recevable pour avoir été introduite endéans cinq jours ouvrables conformément aux dispositions de l’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008.

Quant à la procédure :

Conformément à l’article 121 (1) de la loi du 29 août 2008, « La notification des décisions visées à l’article 120 est effectuée par un membre de la Police grand-ducale qui a la qualité d’officier de police judiciaire. La notification est faite par écrit et contre récépissé, dans la langue dont il est raisonnable de supposer que l’étranger la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés », ladite notification devant faire l’objet, conformément au paragraphe 2 de cette même disposition, d’un procès-verbal dressé par l’officier de police judiciaire qui y a procédé, mentionnant la date de la notification de la décision, la déclaration de la personne retenue qu’elle a été informée de ses droits mentionnés, ainsi que toute autre déclaration qu’elle désire faire acter, la langue dans laquelle la personne retenue fait ses déclarations, ledit procès-verbal devant soit être signé par la personne retenue, soit, en cas de refus de signature, devant mentionner le refus et les motifs du refus.

Conformément à l’article 122 (2) et (3) de la loi du 29 août 2008, « (2) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de prévenir sa famille ou toute personne de son choix. Un téléphone est mis à sa disposition à titre gratuit à cet effet. (3) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de se faire examiner dans les vingt-quatre heures de son placement en rétention, par un médecin et de choisir un avocat à la Cour d’un des barreaux établis au Grand-Duché de Luxembourg ou de se faire désigner un avocat par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Luxembourg. Le mineur non accompagné d’un représentant légal se voit désigner, dans les meilleurs délais, un administrateur ad hoc ».

Il résulte du dossier administratif et des pièces versées en cause que la notification opérée en date du 7 juillet 2023 l’a été conformément aux prescriptions légales, la personne retenue ayant signé le procès-verbal de notification. Il résulte encore du dossier administratif que la personne retenue s’est régulièrement vue rappeler les droits qui lui sont reconnus pendant la période de rétention.

L’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008 prévoit que le président s’assure que la personne retenue a été touchée par la convocation.

Il résulte à cet égard des pièces versées en cause que Monsieur … s’est bien vu notifier en mains propres la convocation du 14 juillet 2023 pour l’audience publique du 19 juillet 2023.

Quant au fond :

Quant au fond, l’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 prévoit ce qui suit : « Afin de préparer l’éloignement en application des articles 27, 30, 100, 111, 116 à 118, (…), l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne 3 puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. (…) ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120 (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. ».

L’article 120 (1) de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120 (3) de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de trois conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours et que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise.

Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme1, il faut que l’éloignement de la personne retenue soit une perspective réaliste.

1 CourEDH, 25 juin 2019, Al Husin c. Bosnie-Herzégovine (n° 2), req. n° 10112/16.Enfin, en vertu de l’article 120 (3), in fine, de la même loi, si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut encore être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire.

En l’espèce, il résulte des éléments de la cause que la personne retenue se trouve toujours actuellement en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.

En effet, comme indiqué ci-avant, par arrêté du 8 mars 2023 portant décision de retour, le ministre constata que le séjour de la personne retenue sur le territoire luxembourgeois était irrégulier, lui ordonna de quitter le territoire sans délai et prononça, à son égard, une interdiction d’entrée sur le territoire pour une durée de trois ans, décision coulée en autorité de chose décidée en son triple volet.

Il est partant constant en cause que la personne retenue est en situation irrégulière au Luxembourg, ce qui ressort, par ailleurs, de l’arrêté ministériel, précité, du 8 mars 2023, de sorte que l’existence, dans son chef, d’un risque de fuite est présumé, en vertu de l’article 111 (3), c), point 1. de la loi du 29 août 2008. Etant donné qu’à l’heure actuelle, Monsieur …, dont il n’est pas contesté qu’il est en situation irrégulière sur le territoire luxembourgeois, qu’il n’est pas en possession d’un document d’identité et de voyage valables, ni d’un visa en cours de validité - celui dont il disposait pour entrer en Allemagne ayant expiré depuis le 11 octobre 2022-, ni d’une autorisation de séjour valable pour une durée supérieure à trois mois, ni encore d’une autorisation de travail et qu’il ne justifie ni l’objet et les conditions de son séjour envisagé, ni des ressources personnelles suffisantes, ne fournit toujours pas d’éléments susceptibles de renverser la présomption de risque de fuite qui existe dans son chef.

Il est constant en cause que la décision précitée du 8 mars 2023 n’a à ce jour pas été énervée.

Il s’ensuit que les conditions initiales ayant justifié que le ministre ait placé l’intéressé en rétention afin d’organiser son éloignement perdurent actuellement.

En ce qui concerne ensuite les diligences effectuées en vue de l’éloignement de la personne retenue, la soussignée relève tout d’abord qu’elle est uniquement saisie d’une requête tendant au contrôle d’office de la décision du ministre de proroger une 4ème fois la mesure de rétention de Monsieur …, de sorte qu’il lui appartient seulement d’examiner le bien-fondé de ladite décision en s’assurant qu’à l’heure actuelle le dispositif d’éloignement est toujours en cours et poursuivi avec la diligence nécessaire et que les conditions spécifiques à une telle 4ème prorogation, à savoir qu’il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, sont données, le tribunal étant appelé toutefois, le cas échéant, à relever d’office, sur la base des éléments du dossier portés à sa connaissance, tels que complétés ou éclairés lors de la procédure contradictoire devant lui, l’éventuel non-respect d’une condition de légalité qui n’a pas été invoquée par la personne concernée2.

2 CJUE, grande chambre, 8 novembre 2022, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid contre C. et X., C-704/20 et C-39/21.Les dispositions de l’article 120 de la loi du 29 août 2008, citées ci-avant, sont à entrevoir, notamment, à l’aune de l’article 15 (4) de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, ci-après désignée par « la directive 2008/115 », aux termes duquel « Lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspective raisonnable d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autres […] la personne concernée est immédiatement remise en liberté ».

Selon la Cour de Justice de l’Union européenne3, l’article 15 (4) de la directive 2008/115 doit être interprété en ce sens que seule une réelle perspective que l’éloignement puisse être mené à bien eu égard aux délais fixés aux paragraphes (5) et (6) de ce même article correspond à une perspective raisonnable d’éloignement et que cette dernière n’existe pas lorsqu’il paraît peu probable que l’intéressé soit accueilli dans un pays tiers eu égard auxdits délais.

Il échet de prime abord de constater que dans le cadre des jugements précités des 26 avril, 31 mai et 27 juin 2023, le tribunal administratif a retenu que les démarches accomplies par les autorités luxembourgeoises à ces dates respectives devaient être considérées comme étant suffisantes au regard des exigences de l’article 120 de la loi du 29 août 2008.

En ce qui concerne les diligences accomplies depuis lors, il résulte d’une note au dossier administratif du 30 juin 2023 qu’en date du même jour un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, s’est entretenu, à l’occasion des journées consulaires ayant eu lieu les 29 et 30 juin 2023, avec un attaché de l’Ambassade du Togo à Bruxelles lequel lui a confirmé que l’identification du passeport de Monsieur … était en cours, demande ayant été envoyée aux autorités togolaises compétentes, tout en précisant encore que la lenteur de l’avancement du dossier serait à mettre en relation avec le fait que lesdites autorités seraient confrontées à de multiples cas de falsification de documents cette année. Il se dégage en outre du dossier administratif qu’en date du 3 juillet 2023, l’autorité ministérielle a contacté les services consulaires togolaises à Bruxelles afin de connaître l’état d’avancement du dossier et que celles-ci ont répondu, par un courrier électronique du même jour, qu’elles sont toujours en attente d’une réponse quant à l’authentification du passeport de Monsieur … par les autorités togolaises.

Au vu de ces éléments, la soussignée est amenée à conclure que les diligences ainsi déployées par l’autorité ministérielle luxembourgeoise doivent être considérées, dans les circonstances de l’espèce et à ce stade, comme suffisantes, de manière que dans ces conditions la nécessité requise au sens de l’article 120 (3) de la loi du 29 août 2008 pour la prolongation de la mesure de rétention est vérifiée en l’espèce.

Dès lors, il convient, en l’état actuel du dossier, de retenir qu’à ce jour, l’éloignement du retenu est une perspective raisonnable mais encore prévisible au vu de la coopération des des services consulaires togolaises, ainsi qu’au vu du fait que Monsieur … a d’ores et déjà été identifié comme ressortissant togolais, seule l’authentification de son passeport devant encore être finalisée. En effet, il n’appert à l’heure actuelle pas d’élément permettant de conclure que l’éloignement vers le Togo ne puisse pas être mené à bien.

3 CJUE, grande chambre, 30 novembre 2009, Said Shamilovich Kadzoev (Huchbarov), C-357/09 PPU.

Concernant finalement la possibilité d’application de mesures moins coercitives, les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008 sont à interpréter en ce sens qu’en vue de la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement, les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125 (1), à savoir l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement auprès des services ministériels après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ou encore l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros, sont à considérer comme mesures proportionnées bénéficiant d’une priorité par rapport à une rétention pour autant qu’il soit satisfait aux deux exigences posées par ledit article 125 (1), pour considérer ces autres mesures moins coercitives comme suffisantes et que la rétention ne répond à l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité que si aucune des autres mesures moins coercitives n’entre en compte au vu des circonstances du cas particulier.

L’article 125 (1) de la loi du 29 août 2008 prévoit plus particulièrement que le ministre peut prendre la décision d’appliquer, soit conjointement, soit séparément, les trois mesures moins coercitives y énumérées à l’égard d’un étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, est reportée pour des motifs techniques, à condition que l’intéressé présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111 (3), de la même loi, tout en relevant qu’il s’agit d’une simple prérogative pour le ministre et qu’au vu de la présomption légale d’un risque de fuite dans le chef du concerné, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment des garanties de représentation suffisantes.

En l’espèce, il se dégage du dossier administratif que les raisons avancées par la partie étatique pour justifier le recours à la mesure de rétention plus particulièrement en raison d’un risque de fuite dans le chef de Monsieur …, résident surtout dans son séjour irrégulier au Luxembourg et dans le défaut de celui-ci de pouvoir présenter des garanties de représentation effectives propres à prévenir ledit risque de fuite, dans la mesure où il ne dispose ni d’une adresse ni d’une quelconque autre attache au Luxembourg, et dans la mesure où il n’a pas de documents d’identité et de voyage en cours de validité. Enfin, la personne retenue semble ne pas être en mesure de verser une garantie financière de cinq mille euros.

A défaut de toute circonstance et élément énervant actuellement ce constat, il y a lieu de retenir que l’intéressé ne présente toujours pas de garanties suffisantes de représentation, et ne remplit donc pas les conditions préalables afin de bénéficier d’une mesure moins coercitive.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’arrêté ministériel du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur … est à confirmer.

Par ces motifs, la soussignée, juge du tribunal administratif, siégeant en remplacement du président du tribunal administratif, légitimement empêché, statuant contradictoirement et en audience publique ;

déclare recevable la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité de la décision de prolongation de la rétention administrative ;

quant au fond, confirme l’arrêté ministériel du 6 juillet 2023 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur …;

Ainsi jugé et prononcé au tribunal administratif, date qu’en tête, par Emilie DA CRUZ DE SOUSA, juge du tribunal administratif, en présence de Marc WARKEN, greffier.

s.Marc WARKEN s.Emilie DA CRUZ DE SOUSA Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 20 juillet 2023 Le greffier du tribunal administratif 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 49170
Date de la décision : 20/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-07-20;49170 ?

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