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14/07/2023 | LUXEMBOURG | N°46433

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juillet 2023, 46433


Tribunal administratif N° 46433 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:TADM:2023:46433 4e chambre Inscrit le 6 septembre 2021 Audience publique du 14 juillet 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse en matière de traitement

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 46433 du rôle et déposée le 6 septembre 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat

à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …...

Tribunal administratif N° 46433 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg ECLI:TADM:2023:46433 4e chambre Inscrit le 6 septembre 2021 Audience publique du 14 juillet 2023 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse en matière de traitement

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JUGEMENT

Revu la requête inscrite sous le numéro 46433 du rôle et déposée le 6 septembre 2021 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Marie Bauler, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, professeur, demeurant à L-…, tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse du 9 juin 2021, refusant de « procéder à la rectification des décharges concernant les leçons données au … pour les années scolaires 2016/2017 à 2019/2020 ».

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Jonathan Holler, en remplacement de Maître Jean-Marie Bauler, en sa plaidoirie à l’audience publique du 10 mars 2023.

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Par courrier recommandé du 26 décembre 2020, Monsieur … s’adressa au directeur du …, dénommés ci-après respectivement « le directeur » et « le … », avec la demande suivante :

« (…) J'ai donné des cours de mathématiques par voie de décharges en classes de 5e de la 2e voie de qualification offerte par le … (…) pendant les années scolaires 2016/17 à 2019/20.

Vous - respectivement Madame la directrice adjointe … avant votre entrée en fonction - avez toujours prétendu que le nombre de leçons à mettre en compte pour une décharge auprès de mon lycée de nomination … à … (…), s'élevait à un total de 10h hebdomadaires, càd 2x4h de cours et 2h de régence. Vous avez avancé que le … n'opère pas en tant que lycée du Ministère de l'éducation nationale et ne serait pas sujet aux instructions ministérielles du 17 octobre 2016 respectivement du 11 juillet 2018 portant sur l'organisation scolaire des lycées.

Cependant, les cours dont question ont été organisés en coopération avec des lycées nationaux (…). Les résultats des élèves ont été discutés et retenus dans des conférences semestrielles et annuelles au sein des lycées partenaires et les bulletins et certifications officielles issus aux élèves ont été établies par les lycées mentionnés.

1 De cette manière, il est évident que le calcul de mes décharges aurait bel et bien dû se faire suivant les instructions ministérielles mentionnées en haut suivant le tableau en annexe.

Par conséquent, je vous demande de procéder à une rectification des demandes de décharges pour les années scolaires en question auprès du … de manière à ce que je puisse bénéficier d'une rémunération (respectivement d'une comptabilisation du congé épargne temps) appropriée rétroactivement.

Dans l'attente d'une réponse affirmative de votre part dans les meilleurs délais, je vous prie d'agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de mes sentiments distingués. (…) ».

En date du 15 janvier 2021, le directeur répondit comme suit :

« (…) J'ai en main votre lettre du 26 décembre 2020, par laquelle vous demandez que nous procédions à une rectification des demandes de décharges pour les années scolaires 2016/17 à 2019/20.

D'un commun accord avec la direction du … et du Lycée …, vos tâches ont été fixées pour les années en question. Le décompte de la tâche a été signé et approuvé par vous.

Le règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 stipule dans son article 6 (4) : « La somme des décharges qui peuvent être accordées à un enseignant ne peut pas dépasser la tâche normale ».

Comme vous étiez déchargé complétement de vos tâches à …, une augmentation de tâche n'est pas possible.

Ainsi, il ne m'est pas possible de donner une suite à votre demande. (…) ».

Suite à un recours hiérarchique de la part de Monsieur …, introduit par le biais d’un courrier de son litismandataire du 10 février 2021, le ministre de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse, ci-après dénommé le « ministre », répondit, par un courrier du 9 juin 2021, dans les termes suivants :

« (…) En main vos courriers datés du 10 février et du 19 mai 2021 portant recours hiérarchique, pour le compte de votre mandant, Monsieur …, à l'encontre de la décision du 15 janvier 2021 de Monsieur …, Directeur du …, par laquelle il a été refusé de procéder à la rectification des décharges de Monsieur … concernant ses leçons données au … pour les années scolaires 2016/2017 à 2019/2020.

Il s'avère que la rétribution de Monsieur … s'est faite moyennant l'attribution de décharges et que cela a été accepté par lui.

Or, Monsieur … sait pertinemment que les décharges ne sont pas affectées de coefficients. En acceptant cette façon de procéder, et de surcroît pendant une période considérable, celui-ci a marqué son accord à ce que les cours qu'il a donnés ne soient pas affectés de coefficients.

2 Je vous renvoie également aux dispositions du règlement grand-ducal modifié du 24 juillet 2007 portant fixation de la tâche des enseignants des lycées et lycées techniques, et notamment à l'article 6(4).

Partant, je vous informe que je confirme la décision du 15 janvier 2021. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 6 septembre 2021, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation sinon à l’annulation de la décision précitée du ministre du 9 juin 2021, refusant de « procéder à la rectification des décharges concernant les leçons données au … pour les années scolaires 2016/2017 à 2019/2020 ».

Il y a de prime abord lieu de relever que l’Etat n’a pas fourni de mémoire en réponse dans le délai légal, bien que la requête introductive d’instance lui ait été valablement notifiée par la voie du greffe en date du 6 septembre 2021. Conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, dénommée ci-après « la loi du 21 juin 1999 », le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties par un jugement ayant les effets d’une décision contradictoire, même si la partie défenderesse n’a pas comparu dans le délai prévu par la loi.

Dans la mesure où l’article 2 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif, ci-après désignée par « la loi du 7 novembre 1996 », dispose qu’un recours en annulation n’est recevable qu’à l’égard des décisions non susceptibles d’un autre recours d’après les lois et règlements, il n’y a pas lieu de statuer sur le recours en annulation lorsqu’un recours en réformation est prévu par la loi1.

Aux termes de l’article 26 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, dénommée ci-après « le statut général », « Les contestations auxquelles donneront lieu les décisions relatives à la fixation des traitements en principal et accessoires et des émoluments des fonctionnaires de l’Etat sont de la compétence du Tribunal administratif, statuant comme juge du fond.

Ces recours seront intentés dans un délai de trois mois à partir du jour de la notification de la décision. Ils ne sont pas dispensés du ministère d’avocat. ».

Etant donné que le présent litige a trait à la rétribution pour les leçons dispensées dans le cadre de décharges, le tribunal est compétent pour connaître du recours principal en réformation dirigé contre la décision déférée du 9 juin 2021, telle que précitée, lequel est encore recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il s’ensuit qu’il n’a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur fait préciser, tout en passant en revue les rétroactes cités ci-avant, avoir été admis au stage de la fonction publique le 1er février 2005 et exercer, depuis l'année scolaire 2007/2008, la fonction de professeur ingénieur.

1 Trib. adm., 4 décembre 1997, n° 10404 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Recours en réformation, n° 4 et les autres références y citées.

3 Ayant toujours été affecté au Lycée … de …, dénommé ci-après « le … », il aurait, depuis l'année scolaire 2016/2017, dispensé des cours de mathématiques, par voie de décharges, auprès du ….

Ainsi, à côté de chaque fois 8 heures de décharges auprès du ministère de l’Education nationale, de l’Enfance et de la Jeunesse, dénommé ci-après « le ministère », il aurait eu, pour les années en question, une décharge de 10 leçons au bénéfice du …, d’abord au sein de … à … pour l’année scolaire 2016/2017, ensuite au sein du … pour 2017/2018 et finalement au sein de la structure … pour les années scolaires 2018/2019, respectivement 2019/2020.

En droit, le demandeur conclut en premier lieu à une violation de l'obligation de motivation, telle qu’elle serait prévue par l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l´Etat et des communes, dénommé ci-après « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », alors qu’il devrait faire face à des motivations contradictoires, sinon incompréhensibles, selon les intervenants successifs dans la procédure, ce qui porterait manifestement atteinte à ses droits de la défense.

Ainsi, après s’être vu expliquer par le directeur que le … n'opérait pas en tant que lycée du ministère, de sorte que les instructions ministérielles du 17 octobre 2016 respectivement du 11 juillet 2018 portant sur l'organisation scolaire des lycées ne lui seraient pas applicables, le demandeur fait relever qu’il se serait fait opposer, par le directeur que la somme des décharges ne pourrait pas dépasser la tâche normale, pour finalement se faire reprocher par le ministre son acceptation de sa rétribution moyennant l'attribution de décharges, lesquelles ne seraient pas affectées de coefficients, le tout avec un renvoi aux dispositions du règlement grand-ducal modifié du 24 juillet 2007 portant fixation de la tâche des enseignants des lycées et lycées techniques, dénommé ci-après « le règlement grand-

ducal du 24 juillet 2007 », et notamment à son article 6, paragraphe (4), disposition qu’il estime non pertinente en l’espèce, alors que cette dernière ne ferait nullement référence à un quelconque accord donné par le fonctionnaire.

En deuxième lieu, le demandeur conteste que le prétendu « accord » de sa part aurait la moindre pertinence dans cette affaire, alors que la simple validation informatique de sa part du quantum des décharges, via le système informatique « UNTIS », dont l'objet ne serait que de permettre au fonctionnaire de confirmer que le relevé correspond bien à la demande de décharge faite par le …, ne saurait emporter un quelconque accord concernant leur rétribution.

En effet, le système d'acceptation des décharges serait purement administratif, alors que leur rétribution serait d'ordre statutaire, statut auquel il ne saurait être dérogé, même en cas d’accord des parties.

En troisième lieu le demandeur invoque une violation de l’article 6, paragraphe (4) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, lequel ne serait pas applicable à sa situation.

En effet, en ce qui concerne le postulat de l'article 6, paragraphe (4) alinéa 1er dudit règlement grand-ducal, selon lequel la somme des décharges qui peuvent être accordées à un enseignant ne peut pas dépasser la tâche normale, le demandeur fait relever que la somme des décharges lui accordées, sur le fondement de l'article 6 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 ne dépasserait pas la tâche normale laquelle se chiffrait à 22 en application de l'article 2, paragraphe (1) du même règlement grand-ducal.

4 Dans ce contexte, le demandeur expose que sa tâche se composerait de seulement 10 décharges auprès du … et de 8 décharges auprès du ministère, c’est-à-dire, en tout de 18 leçons hebdomadaires en décharge, soit bien en deçà de la limite des 22 leçons hebdomadaires, étant donné que ses 4 décharges pour ancienneté ne sauraient être comptabilisées au titre de la tâche normale au sens du paragraphe (4) de l'article 6 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 en raison du fait que ces dernières relèveraient seulement de l'article 8 « section 4 (…) Décharges pour ancienneté » du règlement grand-

ducal du 24 juillet 2007.

En quatrième lieu, le demandeur fait plaider que la décision déférée violerait les instructions ministérielles des 17 octobre 2016 et 11 juillet 2018 concernant l'organisation scolaire des lycées, réglementant à la fois les coefficients correcteurs applicables aux leçons et le système des décharges, sinon le principe général de confiance légitime, alors qu’aucune de ces deux instructions ministérielles n'excluraient expressément les professeurs enseignant dans le cadre de la … du bénéfice des coefficients correcteurs prévus aux points 2.2.1. « Modulation de la tâche — Coefficients ». Au contraire, ces deux textes énonceraient clairement des décharges accordées pour activités d'enseignement dans le cadre de la … et de l'e-bac, en ce que les cours donnés par les professeurs, instituteurs, maîtres de cours spéciaux et maîtres d'enseignement technique dans le cadre de la … et préparant à un diplôme de l'enseignement secondaire ou de l'enseignement secondaire technique seraient affectés des mêmes coefficients que les cours correspondants de l'enseignement de jour, augmentés de 0,15, ces coefficients variant en fonction des effectifs d'élèves suivant les tableaux reproduits au chapitre 2.

Le code « COUSO », désignant les décharges accordées pour les activités d'enseignement dans le cadre de la … et de l'e-bac, correspondrait justement à la qualification de la décharge lui accordée pour les 10 leçons prestées dans le cadre du … depuis la rentrée 2016/2017, tel que cela ressortirait notamment de son relevé des tâches pour l'année scolaire 2017/2018 qu’il verse en tant que pièce.

Ainsi, il serait évident que les 10 décharges prestées pour le … devraient être augmentées des coefficients applicables en fonction des effectifs d'élèves, le demandeur relevant qu’il serait de jurisprudence que les directives internes d’une autorité administrative, émises dans le cadre de son champ de compétence, s’imposeraient à elle en vertu de l'adage « tu patere legem quam ipse fecisti ».

Finalement, le demandeur estime que le principe d'égalité de traitement, se dégageant de l’article 10bis de la Constitution se trouverait violé, alors qu’il se trouverait incontestablement dans une situation similaire à tous ses collègues enseignants au sein des lycées luxembourgeois, en effectuant le même travail, dans les mêmes conditions et selon le même calcul des tâches conformément à l'article 2, paragraphe (1) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, sans pour autant bénéficier des coefficients correcteurs contrairement à tous ses collègues exerçant la même fonction et ce, en l’absence de toute cause objective, rationnelle et proportionnée susceptible de justifier une telle différence de traitement.

Force est à titre liminaire au tribunal de constater que l’Etat n’a pas pris position dans le cadre du présent litige du fait de ne pas avoir déposé de mémoire en réponse endéans les délais légaux.

5 Il échet de rappeler qu’en matière de contentieux administratif, la charge de la preuve est partagée entre les parties demanderesse et défenderesse. Ainsi, si le régime administratif de la preuve fait en premier lieu peser le fardeau de la preuve sur le demandeur, lequel doit effectivement combattre et démentir le contenu et la légalité de l’acte administratif critiqué, il n’en reste pas moins que l’administration, c’est-à-dire la partie défenderesse, ne saurait rester purement passive.

Faute par la partie étatique d’avoir présenté ses observations dans le délai légalement imparti, le tribunal considère que les faits allégués dans la requête introductive d’instance, qui ne sont pas contredits par les pièces produites en cause, sont à considérer comme établis, dans la mesure où la partie demanderesse apporte des indices et des indications de nature à sous-

tendre ses prétentions.

Etant donné que l’Etat a néanmoins versé un dossier administratif dans cette affaire et à défaut pour le demandeur d’avoir soulevé une quelconque contestation y relative, la demande de ce dernier de voir ordonner à l'Etat de communiquer sans autres délais le dossier administratif conformément à l'article 8 paragraphe 5 de la loi du 21 juin 1999 encourt d’ores et déjà le rejet.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n'est pas lié par l'ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l'effet utile s'en dégageant, de manière que les moyens tenant à la validité formelle d'une décision doivent être examinés, dans une bonne logique juridique, avant ceux portant sur son caractère justifié au fond.2 En ce qui concerne d’abord la légalité externe de la décision déférée, et plus particulièrement le moyen tenant à une violation de l’article 6 règlement grand-ducal du 8 juin 1979, il échet d’abord de rappeler les termes pertinents de cette disposition, selon laquelle « Toute décision administrative doit baser sur des motifs légaux.

La décision doit formellement indiquer les motifs par l´énoncé au moins sommaire de la cause juridique qui lui sert de fondement et des circonstances de fait à sa base, lorsqu’elle :

- refuse de faire droit à la demande de l´intéressé ; (…) - intervient sur recours gracieux, hiérarchique ou de tutelle ; (…) » Force est d’abord au tribunal de relever, dans ce contexte, que la seule décision déférée est celle prise par le ministre en date du 9 juin 2021, de sorte que ni les motifs invoqués par le directeur précédemment, que ce soit de manière informelle ou formelle dans sa décision du 15 janvier 2021, ni la comparaison entre lesdits motifs et la motivation de la décision déférée ne sont d’une quelconque pertinence dans le cadre de ce moyen.

Si la décision déférée rentre bien dans le champ d’application de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, alors qu’elle a pour effet de ne pas faire droit à la demande du demandeur et qu’elle intervient sur recours hiérarchique, il échet néanmoins de relever qu’au-delà du fait qu’un défaut de motivation formelle d’une décision administrative n’est pas de nature à entraîner l’annulation de cette dernière, mais seulement la suspension du 2 Trib. adm. du 31 mai 2006, n °21060 du rôle, Pas. adm. 2022, V° Procédure contentieuse, n° 515, 2e volet, et les autres références y citées.

6 délai de recours contre cette dernière, alors que l’autorité administrative peut toujours compléter sa motivation, même en cours d’instance, l’article 6 précité du règlement grand-

ducal du 8 juin 1979 n’impose pas une motivation exhaustive et précise, mais seulement une motivation sommaire est expressément exigée.

En l’espèce, si en cours d’instance, la partie gouvernementale, du fait d’avoir fait défaut, n’a certes pas fourni de plus amples détails relatifs à la motivation de la décision déférée du 9 juin 2021, force est néanmoins de relever que cette dernière se réfère non seulement, en droit, au « règlement grand-ducal modifié du 24 juillet 2007 portant fixation de la tâche des enseignants des lycées et lycées techniques, et notamment à l'article 6(4) », mais également en fait à la considération que le demandeur aurait accepté que sa rétribution se fasse par l'attribution de décharges, lesquelles ne seraient pas affectées de coefficients, de sorte qu’elle comporte bien une motivation sommaire au sens de l’article 6 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979. Le moyen y relatif encourt dès lors le rejet, sans que cette conclusion ne soit énervée par la mise en cause, par le demandeur de la pertinence ou la cohérence des motifs invoqués, alors que ces contestations concernant le bien-fondé de la décision déférée, dont l’analyse est une question de fond.

En ce qui concerne ensuite la légalité interne de la décision, force est d’abord de relever qu’il est constant en l’espèce que le demandeur, bien qu’affecté au …, n’y a pas exercé au cours des années scolaires 2016/2017 à 2019/2020 du fait d’avoir bénéficié, les années en question, des décharges hebdomadaires suivantes : 4 heures de décharges pour ancienneté (code : ANCIE), 8 heures de décharges au bénéfice du ministère (code : MINED) et 10 heures de décharges pour le … (code COUSO), de sorte à atteindre le quantum de la tâche normale des professeurs, laquelle est fixée, en application de l’article 2 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, à 22 leçons hebdomadaires, étant relevé que ce seuil constitue le volume de travail hebdomadaire obligatoire équivalant à la contrepartie du traitement mensuel touché par un enseignant et non un maximum de leçons à ne pas dépasser, comme le suggère le demandeur, soulignant erronément, dans ce contexte, qu’en ayant assuré 18 leçons par semaine, il serait resté bien en deçà de ce seuil.

C’est en effet à tort que demandeur estime que ses 4 heures de décharges pour ancienneté ne seraient pas à comptabiliser dans le calcul de sa tâche normale, alors qu’une décharge d’âge, correspondant à une dispense de travail équivalente, doit nécessairement être comprise dans le décompte des leçons à prendre en compte pour le calcul du volume de la tâche normale, sous peine de ne pas pouvoir avoir l’effet escompté.

Cette conclusion n’est pas énervée par la circonstance que la décharge d’âge est prévue à l’article 8 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 et non à l’article 6 du même texte, lequel précise, à son paragraphe 4, alinéa 1, 2e phrase que « La somme des décharges qui peuvent être accordées à un enseignant ne peut pas dépasser la tâche normale », alors que l’annexe dudit règlement reprend bien, parmi le « tableau des décharges prévues à l’article 6(4) », en dixième position, la décharge accordée pour ancienneté (code ANCIE).

Il suit de ces considérations que le moyen tenant à une violation de l’article 6, paragraphe (4) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 est à rejeter.

En ce qui concerne le mode de rétribution des cours donnés par le demandeur au …, point principalement litigieux en l’espèce, c’est à bon droit que le ministre a renvoyé à l’article 6, paragraphe (4) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, disposant en son 7 premier alinéa, première phrase : « Les activités connexes sont rémunérées soit par indemnités, soit moyennant décharge de la tâche d’enseignement ».

Etant donné que l’annexe dudit règlement grand-ducal reprend bien, parmi le « tableau des décharges prévues à l’article 6(4) », en vingt-cinquième position, « la décharge accordée pour assurer une tâche d’enseignement dans le cadre de la … » (code COUSO), les cours donnés au … sont nécessairement rémunérés au moyen de décharges, en application de l’article 6, paragraphe (4) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, de sorte que la décision ministérielle déférée est à confirmer sur ce point et ce, peu importe l’accord y relatif du demandeur, alors qu‘il ne s’agit que d’une simple application des textes règlementaires en vigueur.

Cette conclusion n’est pas énervée par le renvoi du demandeur au point 2.2.1 des instructions ministérielles des 17 octobre 2016 et 11 juillet 2018, qu’il verse en copie aux débats, lequel n’exclurait pas expressément du bénéfice des coefficients correcteurs les professeurs donnant des cours dans le cadre de la …, alors qu’au-delà du constat que ce point de la circulaire, dont l’objectif est de synthétiser les règles applicables aux cours organisés dans les lycées et lycées techniques, à savoir notamment les dispositions du règlement grand-

ducal du 24 juillet 2007, ne fait que reprendre les dispositions générales de l’article 9 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, il ne concerne pas les cours donnés dans le cadre de décharges, dont la rétribution se fait, tel que relevé ci-avant, impérativement par l’accord de décharges au sens de l’article 6, paragraphe (4), alinéa 1er, première phrase, du même règlement grand-ducal, disposition spécifique applicable en l’espèce. Il en va de même du renvoi, par le demandeur au tableau figurant dans lesdites instructions ministérielles reprenant à la fois la définition de la décharge dénommée COUSO ainsi que la règle générale de l’article 9 du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007 relative à ces cours, non applicable au demandeur tombant dans le seul champ d’application de l’article 6, paragraphe (4) du même texte.

Il s’ensuit que le moyen tenant à une violation des instructions ministérielles des 17 octobre 2016 et 11 juillet 2018, respectivement du principe de la légitime confiance, est également à rejeter.

Finalement, en ce qui concerne le moyen du demandeur selon lequel il serait discriminé par rapport « à tous ses collègues enseignants au sein des lycées luxembourgeois », du fait de ne pas bénéficier des coefficients correcteurs, force est d’abord de rappeler qu’aux termes de l’article 10bis, paragraphe 1er de la Constitution, « Les Luxembourgeois sont égaux devant la loi. (…) », impliquant une interdiction de traiter de manière différente des situations similaires, à moins que la différenciation ne soit objectivement justifiée.

Or, en l’espèce, au-delà du postulat qu’il ne saurait y avoir d’égalité dans l’illégalité, le demandeur reste en défaut d’établir que d’autres enseignants, se trouvant dans la même situation que lui, à savoir en donnant des cours exclusivement dans le cadre d’une décharge au sens de l’article 6, paragraphe (4) du règlement grand-ducal du 24 juillet 2007, seraient traités différemment, de sorte que ce moyen, non autrement circonstancié, encourt également le rejet.

Il suit de toutes les considérations qui précèdent que le recours dirigé contre la décision déférée du 9 juin 2021 est à rejeter pour n’être fondé en aucun des moyens invoqués.

8 Au vu de l’issue du litige, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de Monsieur … en allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 2.500,- euros présentée en application de l’article 33 de la loi du 21 juin 1999.

Par ces motifs le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare recevable en la forme le recours principal en réformation ;

au fond, le déclare non justifiée et en déboute ;

dit qu’il n’a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que sollicitée par le demandeur ;

condamne le demandeur aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 14 juillet 2023 par :

Françoise Eberhard, premier vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Françoise Eberhard Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 14 juillet 2023 Le greffier du tribunal administratif 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 46433
Date de la décision : 14/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2023-07-14;46433 ?

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