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31/05/2022 | LUXEMBOURG | N°44050

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 31 mai 2022, 44050


Tribunal administratif N° 44050 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 janvier 2020 4e chambre Audience publique du 31 mai 2022 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre de la Fonction publique en matière de résiliation de contrat

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44050 du rôle et déposée le 24 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Cyril Chapon, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à

Luxembourg, au nom de Madame …, née le …, demeurant à L-…, tendant principalement à la ré...

Tribunal administratif N° 44050 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 24 janvier 2020 4e chambre Audience publique du 31 mai 2022 Recours formé par Madame …, …, contre une décision du ministre de la Fonction publique en matière de résiliation de contrat

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44050 du rôle et déposée le 24 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif par Maître Cyril Chapon, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le …, demeurant à L-…, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre de la Fonction publique du 25 octobre 2019 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 31 octobre 2019 et récupération de la rémunération à partir du 1er août 2019 ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Patrick Kinsch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom et pour le compte de l’Etat du Grand-

Duché du Luxembourg, du 10 mars 2020 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif en date du 16 juillet 2020 par Maître Patrick Kinsch, au nom et pour le compte de l’Etat du Grand-Duché du Luxembourg ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 29 septembre 2020 par Maître Cyril Chapon au nom et pour le compte de sa mandante ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif en date du 27 octobre 2020 par Maître Patrick Kinsch au nom et pour le compte de l’Etat du Grand-Duché du Luxembourg ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Vu l’article 1er de la loi modifiée du 19 décembre 2020 portant adaptation temporaire de certaines modalités procédurales en matière civile et commerciale1 ;

Vu les communications respectives de Maître Patrick Kinsch du 15 septembre 2021 et de Maître Cyril Chapon du 18 janvier 2022 suivant lesquelles ils marquent leur accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans leur présence ;

1 « Les affaires pendantes devant les juridictions administratives, soumises aux règles de la procédure écrite et en état d’être jugées, pourront être prises en délibéré sans comparution des mandataires avec l’accord de ces derniers. » Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 21 janvier 2022, les parties étant excusées.

Par contrat à durée déterminée du 28 octobre 2016, Madame … fut engagée en qualité d’employé de l’Etat auprès du ministère …, pour la période du 1er novembre 2016 au 31 octobre 2017, ledit contrat ayant été remplacé par un contrat de travail à durée indéterminée du 23 mai 2017, avec prise d’effet au 1er juin 2017.

Par lettre du 3 avril 2019, le ministre … s’adressa au ministre de la Fonction publique, ci-après désigné par « le ministre », en vue de la saisine de la Caisse nationale d’Assurance Pension, ci-après désignée par « la CNAP », du dossier de Madame …, pour cause d’absence continue pour raisons de santé depuis le 27 juin 2018.

Par courrier du 16 mai 2019, le ministre saisit la CNAP du dossier de Madame … ayant été absente de façon continue pour raisons de santé depuis le 27 juin 2018, à savoir plus de dix mois au cours des derniers douze mois, pour que celle-ci se prononce sur l’invalidité professionnelle de Madame … au sens des dispositions légales concernant l’assurance-pension des salariés.

Après que le médecin-conseil auprès du Contrôle médical de la Sécurité sociale eut procédé à l’examen médical de Madame … le 8 juillet 2019, la CNAP informa le ministre, par courrier du 24 juillet 2019, que Madame … n’était pas à considérer comme invalide au sens de l’article 187, alinéa 1er du Code de la sécurité sociale et que, par conséquent, un droit à la pension d’invalidité de la part de la CNAP n’existait pas dans le chef de cette dernière. Par conséquent, le 8 juillet 2019, le Contrôle médical de la sécurité sociale saisit la Commission mixte de reclassement des travailleurs incapables à exercer leur dernier poste de travail, ci-

après désignée par « la Commission mixte », de l’affaire de Madame … en application de l’article L. 552-2, paragraphe (1) du Code du travail.

Par décision du 10 septembre 2019, la Commission mixte décida le reclassement interne de Madame … auprès du ministère … avec une réduction de son temps de travail de 50%.

Par courrier du 24 septembre 2019, le ministre informa Madame … de son intention de procéder à la résiliation de son contrat de travail et de récupérer la partie de sa rémunération correspondant à la période d’absence non-excusée et l’invita à prendre position dans un délai de huit jours, sur base des considérations suivantes :

« (…) Je viens d’être informé par Monsieur le Ministre … des faits suivants qui sont contraires à vos devoirs d’employée de l’Etat.

Depuis le 1er août 2019 vous avez été absente pour raisons de santé jusqu’à ce jour.

En cas d’absences pour raisons de santé, l’agent doit respecter l’article 28-3 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat qui dispose comme suit :

« Le fonctionnaire empêché d’exercer ses fonctions par suite de maladie ou d’accident doit en informer son chef d’administration avant le début de son temps de présence obligatoire.

2 Il doit aussi informer son chef d’administration de tout changement d’adresse même temporaire pendant son congé pour raisons de santé.

Ce congé est accordé sans production d’un certificat médical pour une période de trois jours de service consécutifs au plus.

Pour toute incapacité de travail dépassant trois jours de service consécutifs, le fonctionnaire doit présenter un certificat médical mentionnant la durée de l’incapacité de travail, le lieu du traitement et l’indication si les sorties sont médicalement contre-indiquées ou non. Le certificat médical doit parvenir au chef d’administration au plus tard deux jours après sa délivrance.

En cas de prolongation de l’incapacité de travail au-delà de la durée prévue par le certificat médical, le fonctionnaire est tenu d’informer son chef d’administration de la prolongation de son congé pour raisons de santé le premier jour ouvré de la prolongation et fournir un nouveau certificat médical au plus tard le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent.

Si le fonctionnaire en congé pour raisons de santé n’informe pas son chef d’administration conformément au présent article, son absence est considérée comme non autorisée et donne lieu à l’application des dispositions prévues à l’article 12.

Le chef d’administration peut faire procéder à un examen par le médecin de contrôle, toutes les fois qu’il le juge indiqué, même si le congé sollicité ne dépasse pas trois jours. » Or, vous êtes absente depuis le 1er août 2019 jusqu’à ce jour, sans présentation de certificat médical au mépris des dispositions de l’article 28-3 de la loi modifiée de 1979, de sorte que toutes ces absences constituent des absences non autorisées.

Par conséquent, j’ai l’intention de résilier votre contrat de travail sur base de l’article 7(1) de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat.

Par ailleurs je vous informe que suivant l’article 12, paragraphe 3 de la loi précitée « le fonctionnaire qui s’absente sans autorisation ni excuse valable perd de plein droit la partie de son traitement à raison d’un trentième par journée d’absence entière ou entamée, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires. » Je vous informe donc que j’ai l’intention de réduire votre traitement à raison de vos jours d’absence depuis le 1er août 2019 (…) ».

Suite à une entrevue avec Madame … en date du 15 octobre 2019, le ministre prit, en date du 25 octobre 2019 la décision suivante :

« (…) Je fais suite à mon courrier du 24 septembre 2019 dans lequel je vous ai fait part des raisons qui m’ont amenées à envisager la résiliation de votre contrat de travail.

Dans mon courrier, il vous a été reproché d’avoir été absente sans présentation de certificat médical depuis le 1er août 2019 jusqu’au 24 septembre 2019.

3 Par courrier du 2 octobre 2019 vous avez sollicité une entrevue qui s’est déroulée en date du 15 octobre 2019 en présence de représentants du Ministère de la Fonction publique, du Ministère … et de la CGFP.

La présente procédure a été engagée sur base de l’article 7, paragraphe 1 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat qui prévoit que le ministre compétent est en droit de résilier le contrat de travail pour des raisons dûment motivées.

Je vous rappelle l’article 28-3 al.4 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat qui dispose comme suit :

« En cas de prolongation de l’incapacité de travail au-delà de la durée prévue par le certificat médical, le fonctionnaire est tenu d’informer son chef d’administration de la prolongation de son congé pour raisons de santé le premier jour ouvré de la prolongation et fournir un nouveau certificat médical au plus tard le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent. » Concernant ces faits, vous avez envoyé le 3 octobre 2019 au Ministère … une copie du certificat d’incapacité de travail couvrant la période du 1er août 2019 jusqu’au 13 septembre 2019, mais qui est daté au 30 septembre 2019.

Lors de l’entrevue du 15 octobre 2019, vous avez indiqué que vous aviez envoyé le certificat de maladie pour la période à partir du 1er août par voie postale. Cependant, le Ministère … n’a jamais reçu ce courrier.

Or, la preuve que le certificat de maladie a été fourni au ministère dans le délai prévu par la loi, incombe à l’agent. Vous étiez donc tenue de vérifier si le certificat de maladie a été déposé au Ministère ….

De plus, vous avez admis, lors de l’entrevue, que vous n’aviez pas prévenu votre chef d’administration de la prolongation de votre congé de maladie, qui est également une obligation pour l’agent.

Par conséquent, et compte tenu des faits relevés dans le courrier précité du 24 septembre 2019 et qui rendent impossible le maintien des relations de travail, j’ai le regret de vous informer que votre contrat de travail est résilié avec effet au 31 octobre 2019.

Par ailleurs, votre rémunération sera récupérée à raison d’un trentième par journée d’absence entière à partir du 1er août 2019 (…) ».

Par requête déposée le 24 janvier 2020 au greffe du tribunal administratif, Madame … a fait introduire un recours principalement en réformation et subsidiairement en annulation de la décision précitée du 25 octobre 2019.

Aux termes de l’article 10, alinéa 1er de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat, dénommée ci-après « la loi du 25 mars 2015 », « Les contestations résultant du contrat d’emploi, de la rémunération et des sanctions et mesures disciplinaires sont de la compétence du tribunal administratif, statuant comme juge du fond ».

En ce qui concerne la compétence du tribunal ainsi que la recevabilité du recours, force est de relever qu’étant donné que la qualité d’employé de l’Etat de Madame … n’est pas litigieuse en l’espèce et qu’en vertu de l’article 10, alinéa 1er précité de la loi du 25 mars 2015, le tribunal administratif statue comme juge du fond pour connaître des contestations résultant du contrat d’emploi des employés de l’Etat, parmi lesquelles sont comprises celles relatives à sa résiliation2 et de la rémunération, le tribunal administratif est compétent pour connaître des recours principal en réformation introduit contre la décision déférée.

Il n’y a dès lors pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation.

Le recours en réformation est encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

Dans son mémoire en réplique, la demanderesse, se rapporte à prudence de justice quant à la recevabilité du mémoire en réponse de la partie étatique en la pure forme.

S’il est vrai que le fait de se rapporter à prudence de justice équivaut à une contestation, force est au tribunal de constater que la partie demanderesse n’a formulé aucune explication concrète à l’appui de sa contestation. Or, une contestation non autrement développée est à écarter. En effet, il n’appartient pas au tribunal de suppléer à la carence des parties et de faire des suppositions sur les moyens qu’ils ont voulu soulever au risque d’une violation des droits de la défense.3 Dès lors que la partie demanderesse est restée en défaut de préciser dans quelle mesure la forme du mémoire en réponse porterait à critique, le moyen d’irrecevabilité afférent encourt le rejet, étant relevé que le tribunal n’entrevoit pas non plus de cause d’irrecevabilité d’ordre public qui serait à soulever d’office par rapport audit mémoire.

Il s’ensuit que la contestation de la recevabilité du mémoire en réponse en sa pure forme est à écarter.

A l’appui de son recours et en fait, la demanderesse rappelle les faits et rétroactes à la base du présent litige.

En droit, après avoir cité l’article 28-3, alinéa 4 de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat, ci-après « le statut général », la partie demanderesse explique s’être vu délivrer, en date du 26 juillet 2019, par son médecin traitant, un certificat médical couvrant la période du 1er août au 13 septembre 2019 et avoir posté ce certificat le même jour. Elle insiste sur le fait que son compagnon, Monsieur … confirmerait ce fait dans son attestation testimoniale du 14 octobre 2019. Il ressortirait, par ailleurs, d’un courrier de la Caisse nationale de santé, ci-après dénommée « la CNS », qu’elle aurait obtenu le remboursement des honoraires de la visite médicale du 26 juillet 2019, visite lors de laquelle le certificat d’incapacité de travail aurait été établi.

2 Par analogie : trib. adm. 22 janvier 2007, n° 21493 du rôle, conf. par Cour adm., 28 juin 2007, n° 22638C du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n°707 et les autres références y citées.

3 trib. adm., 23 janvier 2013, n° 30455 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n° 842 (2e volet) et les autres références y citées.Or, si ce certificat n’était jamais parvenu à destination, ce ne serait qu’en date du 24 septembre 2019, presque deux mois après le début de la prétendue absence injustifiée, qu’on lui aurait reproché le défaut d’information quant à la prolongation de son congé pour raisons de santé et le défaut de production du certificat d’incapacité de travail afférent et qu’on aurait lancé la procédure en vue de résilier son contrat de travail. La partie demanderesse fait valoir que cette réaction de son ministère d’affectation serait d’ailleurs intervenue deux semaines après la notification de la décision de la Commission mixte et donc à une époque où elle n’aurait plus été tenue de justifier de son absence pour cause de maladie du fait de son reclassement décidé. Elle relève qu’à la découverte du problème, à savoir le 27 septembre 2019, elle se serait adressée à son médecin traitant pour obtenir un certificat médical de remplacement qu’elle aurait obtenu le 30 septembre 2019 couvrant la période du 1er août au 13 septembre 2019. Par courrier recommandé du 3 octobre 2019, la demanderesse affirme avoir envoyé le certificat médical remplaçant le certificat égaré à son ministère d’affectation en y ajoutant un courrier d’explication. Elle estime avoir fait dans l’immédiat toutes les diligences nécessaires pour se justifier auprès de son ministère.

S’agissant de l’article 7, paragraphe (1) de la loi du 25 mars 2015, la demanderesse indique que s’il permettait de mettre fin au contrat de travail de l’employé de l’Etat « pour des raisons dûment motivées », ces raisons devraient se fonder sur un comportement contraire aux obligations imposées aux agents par le statut général, autrement dit sur un comportement fautif.

Or, la résiliation de son contrat de travail serait dénuée de tout fondement, du fait que les suites données par le ministère … à sa prétendue absence injustifiée seraient manifestement tardives, intempestives au regard de la procédure de reclassement en cours, inopportunes au regard de la décision de reclassement prise le 21 août 2019 et notifiée aux parties le 10 septembre 2019, de sorte que la résiliation serait disproportionnée par rapport aux faits reprochés.

Concernant le caractère disproportionné de la résiliation du contrat de travail, la demanderesse fait remarquer que dans une affaire du tribunal administratif du 7 juillet 2015, inscrit sous le numéro 34723 du rôle, dans le cadre d’une mesure disciplinaire prise à l’encontre d’un fonctionnaire auquel il aurait été reproché d’avoir eu des absences injustifiées à la suite de la remise de certificats médicaux avec effet rétroactif, le tribunal aurait réformé la sanction disciplinaire prononcée pour la faire passer d’un avertissement à une amende, considérée comme la sanction la plus appropriée à la situation.

La partie demanderesse donne encore à considérer que la procédure entamée à son encontre dénoterait une certaine mauvaise foi dans le chef du ministère …, en relevant que ce dernier l’aurait laissé dans l’ignorance concernant l’irrégularité alléguée de son absence depuis le 1er août 2019, irrégularité qu’il aurait pu sanctionner par l’émission d’un ordre de justification, alors qu’elle croyait avoir satisfait à ses obligations prescrites par l’article 28-3 du statut général. Elle souligne que son ministère d’affectation aurait laissé cette absence se prolonger dans le temps et l’aurait ainsi exposée à la sanction du remboursement des rémunérations perçues pendant cette absence, respectivement au risque de voir résilier son contrat de travail. La demanderesse relève cependant qu’elle aurait respecté ses obligations en transmettant un certificat médical attestant de sa situation, laquelle aurait, par ailleurs, été tout à fait connue du ministère … dès l’ouverture de la procédure de reclassement.

La demanderesse entend encore souligner que le ministre ne lui reprocherait pas une absence injustifiée mais uniquement un défaut d’information. Dans ce contexte, elle relève que le tribunal du travail retiendrait en principe le caractère abusif d’un licenciement fondé sur un tel reproche dès que l’employeur aurait été avisé de la maladie de son salarié. Le but de cetteobligation d’information serait que l’employeur soit informé de l’absence et puisse prendre les mesures propres à y pallier. Ainsi, le ministère … aurait non seulement su qu’elle ne pourrait pas retourner au travail, mais aussi qu’elle aurait été dans une incapacité complète de reprendre une telle activité. A cet égard, elle rappelle la décision de la Commission mixte ayant prononcé son reclassement interne et réduit son temps de travail de 50% pour préciser que son ministère d’affectation ne l’aurait pas informée des changements qui seraient opérés sur son emploi pour satisfaire aux conditions du reclassement interne. Par ailleurs, le ministère … n’aurait pas du tout préparé son retour, de sorte que la résiliation de son contrat de travail serait dénuée de tout fondement juridique, voire violerait la loi.

Elle conclut ainsi à un excès de pouvoir en ce que la décision litigieuse violerait le principe de proportionnalité, alors qu’il y aurait une disproportion manifeste entre les reproches faits et la sanction appliquée.

La demanderesse souligne enfin qu’il n’y aurait pas lieu à récupérer la rémunération à raison d’un trentième par journée d’absence entière à partir du 1er août 2019.

Finalement, la demanderesse réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000 euros sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, désignée ci-après par « la loi du 21 juin 1999 ».

Dans son mémoire en réplique, la partie demanderesse relève encore en fait qu’il résulterait de la chronologie des évènements qui se seraient déroulés jusqu’à la résiliation de son contrat de travail que le ministre aurait eu une parfaite connaissance de son état de santé et de son incapacité de pouvoir travailler entre le 1er août et le 13 septembre 2019, de sorte qu’aucune absence injustifiée ne pourrait lui être reprochée, le seul reproche qui subsisterait serait bien l’absence d’information de son chef d’administration suite à la prolongation de son congé pour raisons de santé le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent.

Or, elle insiste sur le fait que son ministère d’affectation aurait été au courant de son état de santé défaillant et que la résiliation de son contrat de travail constituerait une réaction inopportune et intempestive, alors qu’on lui reprocherait le défaut de communication d’une information connue.

La demanderesse invoque encore une violation du délai raisonnable pour invoquer des faits et fautes à la base de la résiliation de son contrat de travail, alors qu’un délai de huit semaines serait totalement disproportionné et ne pourrait que s’expliquer par le fait que le ministre aurait eu connaissance de son incapacité de travail.

Enfin, elle reproche encore à la partie étatique de ne pas avoir pris position quant à l’existence d’un reclassement interne décidé avant la résiliation de son contrat de travail, ainsi que quant au fait qu’aucune information ne lui aurait été communiquée quant à son futur poste.

Le délégué du gouvernement conclut au rejet du recours en tous ses moyens pour ne pas être fondés. Tout en se référant à l’article 28-3, alinéas 4 et 5 du statut général, il rappelle qu’un agent serait tenu d’informer son chef d’administration de la prolongation de son congé pour raisons de santé et de fournir un nouveau certificat médical au plus tard le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent, obligations que Madame … aurait omis de respecter, alors qu’elle n’a pas envoyé son certificat médical dans le délai prescrit. Quant à l’obligation de fournir un nouveau certificat médical, le délégué du gouvernement insiste surle fait que la preuve de la réception du certificat médical par le ministère … incomberait à la demanderesse qui aurait eu la possibilité de se préconstituer une preuve de la prétendue expédition de son certificat médical. Il conclut encore au rejet de l’attestation testimoniale présentée par la partie demanderesse, alors qu’elle ne prouverait pas la délivrance d’un certificat médical couvrant la période litigieuse par le médecin traitant. En outre, le remboursement des frais médicaux de la visite médicale du 26 juillet 2019 par la CNS ne démontrerait ni l’obtention d’un certificat médical le même jour, ni son expédition, le cas échéant, à son supérieur hiérarchique.

Le délégué du gouvernement souligne ensuite que la résiliation du contrat de travail ne serait pas dénuée de tout fondement juridique.

Il considère, à cet égard, que l’absence non autorisée en vertu de l’article 28-3 du statut général justifierait une résiliation du contrat de travail sur base de l’article 7, paragraphe (1) de la loi du 25 mars 2015, de sorte que ce serait à tort que la demanderesse prétendrait que les suites données par le ministre à son absence injustifiée seraient intempestives et inopportunes en raison de la procédure de reclassement et de la décision de reclassement interne du 10 septembre 2019. Le délégué du gouvernement précise encore que l’avis établi le 30 juillet 2019 par le médecin du travail relatif à un reclassement de Madame … aurait été notifié au ministère … en date du 6 août 2019, à un moment où celle-ci aurait déjà été absente depuis le 1er août 2019, sans certificat médical et sans en avoir informé son ministère d’affectation. La partie étatique explique que si la procédure de reclassement interne avait certes déjà été en cours, il n’en demeurerait pas moins que Madame … aurait eu l’obligation de respecter les dispositions de l’article 28-3 du statut général, ce qu’elle n’aurait pas fait, de sorte que l’avis du reclassement interne de celle-ci n’aurait pas eu d’incidence sur la résiliation de son contrat de travail pour absences non autorisées.

D’autre part, le délégué du gouvernement fait valoir que l’article 7, paragraphe (1) de la loi du 25 mars 2015 ne prévoirait pas de délai endéans lequel l’agent devrait être informé des reproches faits à son encontre. En se référant à une jurisprudence du tribunal administratif du 27 juin 2018, inscrits sous le numéro 34952a et 34953a du rôle, la partie gouvernementale estime que le caractère raisonnable du délai dans lequel les faits ou fautes justifiant la résiliation du contrat de travail devraient être invoqués s’apprécierait dans chaque cas et aux divers stades de la procédure, en fonction des circonstances de la cause, de la nature de l’affaire, du comportement de l’agent et de celui de l’autorité. En l’espèce, le délégué du gouvernement insiste sur l’absence de Madame … sans certificat médical depuis le 1er août 2019, sans en avoir informé son chef d’administration, état ayant perduré jusqu’au 3 octobre 2019, date à laquelle la demanderesse aurait remis un certificat de remplacement couvrant la période litigieuse. Or, l’intention de résilier le contrat de travail de la demanderesse aurait déjà été manifestée le 24 septembre 2019, le ministère n’ayant dès lors pas perdu le droit de sanctionner le manquement de celle-ci par une résiliation de son contrat.

Le délégué du gouvernement entend encore souligner que la résiliation intervenue ne serait ni disproportionnée, ni inappropriée par rapport aux faits reprochés. Il précise que la jurisprudence invoquée par la demanderesse ayant trait à une mesure disciplinaire prise à l’encontre d’un fonctionnaire ne serait pas transposable au présent cas d’espèce, les circonstances ayant entouré cette jurisprudence étant différentes, alors que les retards de remise du certificat médical n’auraient été que d’un ou de plusieurs jours seulement. Le délégué du gouvernement relève ensuite que la demanderesse prétendrait à tort que le ministre lui reprocherait seulement un défaut d’information et non pas une absence non autorisée, alors quele contraire ressortirait clairement de son courrier du 24 septembre 2019 et de la résiliation de son contrat de travail du 25 octobre 2019. Ce serait encore à tort que Madame … aurait estimé que le ministère … aurait été au courant de ce qu’elle ne pourrait pas retourner au travail et qu’elle aurait été en incapacité complète de reprendre son activité, alors que son ministère d’affectation n’aurait pas été informé de ce que Madame … ne pourrait pas retourner au travail, du fait qu’elle n’aurait ni envoyé de certificat médical pour la période à partir du 1er août, ni informé son chef d’administration de la prolongation de son congé de maladie.

Concernant l’avis du médecin du travail, notifié le 6 août 2019, et la décision de la Commission mixte du 10 septembre 2019, le délégué du gouvernement fait valoir que l’absence non autorisée aurait débuté le 1er août 2019 et que la décision de reclassement interne serait donc sans incidence sur la résiliation de son contrat de travail pour absences non autorisées.

Dans le cadre du mémoire en duplique, le délégué du gouvernement se réfère aux dispositions combinées de l’article 28-3, alinéa 5 et l’article 12 du statut général pour retenir qu’il serait inexact d’affirmer que la loi interdirait au ministre de prononcer la sanction disciplinaire du licenciement à l’égard de Madame ….

Il considère ensuite que l’état de santé de Madame … ne serait pas vraiment pertinent, le reproche à son encontre consisterait dans le fait de ne pas avoir informé son chef d’administration de la prolongation de son congé pour raisons de santé et de ne pas avoir fourni un nouveau certificat médical dans les délais prescrits. Ce serait donc un manquement à cette obligation essentielle dans un service de l’Etat qui serait en cause. Il se réfère encore à une décision du tribunal administratif du 12 mars 2008, inscrit sous le numéro 21852a du rôle, selon lequel l’état de santé psychique ou physique d’un fonctionnaire ne saurait exonérer celui-ci de son obligation d’informer son supérieur hiérarchique. Ce serait donc à tort de prétendre que la réaction de l’Etat de résilier le contrat de travail de Madame … pour un défaut d’information en connaissance de cause de son état de santé serait une réaction intempestive et inopportune.

Le délégué du gouvernement en conclut que la méconnaissance des dispositions légales en matière de prolongation de l’incapacité de travail serait de nature à justifier la résiliation du contrat de travail de Madame …, ainsi que la récupération de sa rémunération à raison d’un trentième par journée d’absence entière à partir du 1er août 2019.

A titre liminaire, le tribunal relève que la décision déférée du 25 octobre 2019 comporte deux volets, à savoir, d’un côté, la résiliation du contrat de travail de Madame … et, de l’autre côté, la décision de récupérer la rémunération perçue par cette dernière depuis le 1er août 2019.

En présence de plusieurs moyens invoqués, le tribunal n’est pas lié par l’ordre dans lequel ils lui ont été soumis et détient la faculté de les toiser suivant une bonne administration de la justice et l’effet utile s’en dégageant.

Quant à la résiliation du contrat de travail de Madame …, concernant le reproche selon lequel la décision déférée serait dénuée de tout fondement, non justifiée et disproportionnée, il y a tout d’abord lieu de rappeler que le tribunal est en l’espèce saisi d’un recours en réformation, de sorte qu’il est amené à apprécier la décision déférée quant à son bien-fondé et à son opportunité, avec le pouvoir d’y substituer sa propre décision impliquant que cette analyse s’opère au moment où il est appelé à statuer.

Il échet dans un premier temps de rappeler que selon l’article 5 de la loi du 25 mars 2015, « [l]a résiliation du contrat de travail est prononcée par une décision motivée du ministre, sur demande du ministre du ressort (…) ».

Aux termes de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015, « (1) Le contrat de travail à durée indéterminée de l’employé ne peut plus être résilié, lorsqu’il est en vigueur depuis dix ans au moins, sauf à titre de mesure disciplinaire ainsi que pour l’application de la procédure d’amélioration des prestations professionnelles et de la procédure d’insuffisance professionnelle. Pendant la période précédant cette échéance, il peut être résilié par le ministre ou par le ministre du ressort soit pour des raisons dûment motivées, soit lorsque l’employé s’est vu attribuer un niveau de performance 1 par application de l’article 4bis de la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat.

(2) Le ministre ou le ministre du ressort prononce la résiliation du contrat, à titre de mesure disciplinaire, après décision conforme du conseil de discipline institué pour les fonctionnaires de l’Etat. Le conseil procède conformément aux dispositions légales qui déterminent son organisation et son fonctionnement.

(3) Sans préjudice des paragraphes 1 et 2, le ministre ou le ministre du ressort est en droit de résilier le contrat en cas d’absence prolongée ou d’absences répétées pour raisons de santé de l’employé qui ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat (…) ».

Il échet de rappeler qu’il n’est pas contesté que la demanderesse a été engagée depuis le 1er novembre 2016 en qualité d’employé de l’Etat auprès du ministère …, soit, au jour de la décision déférée du 25 octobre 2019, depuis moins de dix ans, de sorte que les conditions de l’article 7, paragraphe 1er de la loi du 25 mars 2015 disposant que « [l]e contrat de travail à durée indéterminée de l’employé ne peut plus être résilié, lorsqu’il est en vigueur depuis dix ans au moins, sauf à titre de mesure disciplinaire (…) », ne sont pas réunies dans son chef.

Il s’ensuit que la procédure disciplinaire et les sanctions disciplinaires prévues au statut général des fonctionnaires de l’Etat ne s’appliquent pas à la demanderesse, de sorte qu‘ il y a lieu de se référer à l’article 7, paragraphe 1er, in fine, de la loi du 25 mars 2015 qui dispose que « [p]endant la période précédant cette échéance, [contrat en vigueur depuis moins de dix ans], il peut être résilié par le ministre ou par le ministre du ressort (…) pour des raisons dûment motivées (…) ».

Il s’ensuit que la résiliation du contrat de travail d’un agent ayant le statut d’un employé de l’Etat doit se faire par une décision de la part de l’autorité compétente basée sur des raisons dûment motivées.

Dans ce contexte, il échet de relever que la résiliation d’un contrat de travail d’un employé de l’Etat ne s’apparente ni à un licenciement avec effet immédiat, ni à un licenciement avec préavis, la loi n’offrant aucun choix à l’autorité compétente qui ne peut pas respecter un préavis4 du fait que les règles y relatives du Code du travail ne sont pas applicables aux employés de l’Etat. Si, la loi du 25 mars 2015 fait, dans son article 4, une référence à des dispositions du Code du travail en ce qui concerne la formation du contrat de travail, il a été 4 trib. adm., 23 octobre 2013, n° 31455 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 650 et les autres références y citées.

jugé, par rapport à l’ancienne législation régissant le statut des employés de l’Etat, semblable sur ce point aux dispositions de la loi du 25 mars 2015, que le Code du travail n’a cependant pas vocation à s’appliquer in globo aux employés publics, mais ne fait que combler les lacunes des dispositions combinées sur les employés publics et le statut général des fonctionnaires dont certaines dispositions sont applicables aux employés publics5.

Il s’ensuit que les développements de la demanderesse relatifs à la notion de faute ainsi qu’au délai dans lequel une telle faute peut être invoquée pour justifier un licenciement en vertu du Code du travail, sont à rejeter pour être dénués de tout fondement dans le présent contexte.

En effet, il suffit de vérifier, au regard de ce qui a été retenu ci-avant au titre de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015, que la résiliation du contrat de travail se base sur des raisons dûment motivées, ces raisons devant nécessairement être réelles et sérieuses.

En l’espèce, le seul reproche adressé à la demanderesse est le fait de ne pas s’être tenue au respect des dispositions légales lui applicables à l’occasion de la prolongation de son incapacité de travail.

En vertu de l’article 28-3 du statut général, également applicable aux employés de l’Etat au vœux de l’article 1er, paragraphe (5) du même texte, qui prévoit actuellement, en ses alinéas 4 et 5, ce qui suit : « En cas de prolongation de l’incapacité de travail au-delà de la durée prévue par le certificat médical, le fonctionnaire est tenu d’informer son chef d’administration de la prolongation de son congé pour raisons de santé le premier jour ouvré de la prolongation et fournir un nouveau certificat médical au plus tard le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent.

Si le fonctionnaire en congé pour raisons de santé n’informe pas son chef d’administration conformément au présent article, son absence est considérée comme non autorisée et donne lieu à l’application des dispositions prévues à l’article 12. ».

Il suit de ces dispositions qu’il appartient à l’agent, dont l’incapacité de travail se prolonge au-delà de la période couverte par le précédent certificat d’en aviser son chef d’administration le premier jour de la prolongation, cette obligation étant nécessairement à lire ensemble avec l’alinéa 1er de l’article 28-3 du statut général disposant que « [l]e fonctionnaire empêché d’exercer ses fonctions par suite de maladie ou d’accident doit en informer son chef d’administration avant le début de son temps de présence obligatoire (…) ».

En l’occurrence, il est constant en cause, pour ne pas être contesté, que la demanderesse est en aveu de ne pas avoir informé sa hiérarchie de la prolongation de son congé de maladie le premier jour ouvré de la prolongation avant le début de son temps de présence obligatoire, étant relevé que la règle en question a pour objectif l’information du chef d’administration sur la prolongation du congé de maladie avant le début du service, et ce, en vue d’éviter une désorganisation de ce dernier.

Il s’ensuit que le ministre a valablement pu reprocher à la demanderesse de ne pas avoir informé à temps sa hiérarchie de la prolongation de son congé de maladie.

5 trib. adm., 23 octobre 2013, n° 31455 du rôle, Pas. adm. 2021, V° Fonction publique, n° 619 et les autres références y citées.S’agissant de la remise d’un nouveau certificat médical au plus tard le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent, force est de constater que si la demanderesse soutient avoir envoyé un certificat médical d’incapacité de travail par voie postale le 26 juillet 2019, couvrant la période litigieuse du 1er août 2019 au 13 septembre 2019, au ministère …, elle reste cependant en défaut de prouver que ce dernier aurait reçu ledit certificat médical dans les délais légaux.

Il convient, à cet égard, de préciser qu’à défaut de texte spécifique, le seul fait de poster un courrier ne fait pas présumer sa réception, un courrier pouvant être égaré par la poste, perdu définitivement ou être remis à son destinataire bien longtemps après sa remise à la poste. Ainsi, pour se ménager une preuve à cet effet, l’expéditeur peut recourir aux services spécialisés de la lettre recommandée, voire de la lettre recommandée avec accusé de réception6, étant relevé que la charge de la preuve de la notification, tout comme celle de la date de la réception par le destinataire, effective ou du moins présumée par l’effet de la remise d’un avis de passage, qui elle est déterminante, incombe à l’expéditeur dont émane le courrier7 .

A défaut d’une telle preuve et au regard des contestations afférentes du ministre, il y a lieu de retenir que le ministre a encore valablement pu reprocher à la demanderesse de ne pas avoir fourni de certificat médical d’incapacité de travail endéans le délai prévu par l’article 28-

3 du statut général.

Ce constat n’est pas énervé par le fait qu’en date du 3 octobre 2019, suite au courrier d’intention du 25 octobre 2019 adressé à la demanderesse par le ministre, celle-ci a fourni un certificat médical « de remplacement », daté au 30 septembre 2019 et couvrant la période litigieuse du 1er août 2019 au 13 septembre 2019, alors que cette circonstance ne saurait invalider le constat que le certificat médical égaré n’a pas été remis au ministère d’affectation dans les délais légaux, à savoir le jour ouvré suivant l’expiration du certificat médical précédent. Ce constat n’est pas non plus remis en cause ni par l’attestation testimoniale du 14 octobre 2019 de Monsieur …, la remise à la poste d’un pli simple n’étant pas pertinente pour prouver la réception du certificat médical par le ministère d’affectation, ni par le remboursement des honoraires de la visite médicale du 26 juillet 2019, ce fait ne prouvant même pas l’existence d’un certificat médical couvrant la période litigieuse.

Force est dès lors au tribunal de retenir que le ministre a valablement pu reprocher à Madame … une absence non autorisée tel que prévu par l’article 28-3 du statut général.

En ce qui concerne le caractère suffisant des motifs invoqués par la partie étatique en vue de justifier le recours à la résiliation de l’engagement de Madame … en tant qu’employé de l’Etat, force est au tribunal de relever qu’il a été jugé que les faits reprochés à un employé d’Etat au titre du seul « non-respect des règles relatives au congé de maladie » ne sont pas suffisamment graves pour justifier, à eux seuls, son licenciement.8 Ainsi, si les faits relevés par le ministre ne font certes pas preuve d’un comportement diligent, voire raisonnable dans le chef de la demanderesse, ils ne sauraient toutefois, à eux seuls, justifier la résiliation de son contrat de travail, étant relevé en l’occurrence qu’il ressort en outre des circonstances de l’espèce que Madame … se trouvait en pleine procédure de reclassement pendant la période litigieuse, la 6 Par analogie : trib. adm., 25 septembre 2000, n° 11835 du rôle, Pas. adm. 2021, Procédure contentieuse, n° 228 (3e volet) et les autres références y citées 7 Par analogie : trib. adm., 25 septembre 2000, précité 8 trib. adm., 25 novembre 2015, n° 32915 du rôle, conf. Cour adm., 7 juin 2016, n° 37367C du rôle, disponibles sur www.jurad.etat.ludécision de reclassement interne ayant par ailleurs été prise avant même le courrier d’intention du ministre du 24 septembre 2019, de même que la partie étatique n’invoque pas de désorganisation du service à la suite des faits reprochés.

En se basant exclusivement sur les faits reprochés au titre du « non-respect des règles relatives au congé de maladie », la mesure prise à l’encontre de Madame … est à considérer comme étant disproportionnée par rapport aux faits lui reprochés, à savoir une seule absence non autorisée, s’étant certes prolongée dans le temps, mais uniquement en raison de l’absence de diligences du ministère …. Il échet de constater que les raisons fondant la résiliation du contrat de Madame … ne sont pas suffisantes.

Il s’ensuit qu’un simple avertissement aurait été plus appropriée en l’espèce, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de procéder à la résiliation du contrat de travail de Madame ….

Quant au volet de la décision déférée consistant à récupérer la rémunération touchée par Madame … depuis le 1er août 2019, il y a lieu de rappeler que l’article 12, paragraphe (3) du statut général dispose que :

« En cas d’absence sans autorisation, le fonctionnaire perd de plein droit la partie de sa rémunération correspondant au temps de son absence, sans préjudice de l’application éventuelle de sanctions disciplinaires. (…) Toutefois pour le fonctionnaire qui tombe sous l’application des dispositions du règlement grand-ducal modifié du 22 août 1985 fixant le régime des congés des fonctionnaires et employés de l’Etat, le chef d’administration décide si l’absence non autorisée est imputée sur le congé de récréation ou si elle est assortie de la perte de rémunération visée ci-dessus. » Force est de constater que la loi prévoit la perte de la rémunération correspondant au temps de l’absence non justifiée « de plein droit ».

Dans la mesure où la demanderesse ne formule aucun moyen à l’appui de ce volet du recours et en dehors d’une dérogation accordée par le ministre suivant l’alinéa 2 du paragraphe 3 de l’article 12 du statut général, précité, c’est à bon droit que le ministre a pu prendre la décision déférée, de sorte que ce volet du recours encourt le rejet pour manquer de fondement.

S’agissant, enfin, de la demande en obtention d’une indemnité de procédure de 3.000 euros, telle que formulée par la demanderesse sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, celle-ci est à rejeter, alors que l’intéressée n’établit pas en quoi il serait inéquitable de laisser à sa seule charge les frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Par ces motifs le tribunal administratif, quatrième chambre, statuant contradictoirement, reçoit en la forme le recours principal en réformation introduit contre la décision du ministre de la Fonction publique du 25 octobre 2019 ayant résilié le contrat de travail de Madame … ;

au fond, le déclare justifié ;

partant, par réformation, dit qu’il n’y avait pas lieu de résilier le contrat de travail de Madame … et renvoie le dossier devant le ministre pour exécution ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours subsidiaire en annulation ;

reçoit en la forme le recours en réformation contre la décision visant à récupérer la rémunération depuis le 1er août 2019 ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

dit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur le recours sur le recours subsidiaire en annulation y relatif ;

rejette la demande de Madame … en allocation d’une indemnité de procédure de 3.000 euros ;

fait masse des frais et dépens de l’instance et les impose pour moitié à la partie étatique et pour moitié à Madame ….

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 31 mai 2022 par :

Paul Nourissier, vice-président, Olivier Poos, premier juge, Emilie Da Cruz De Sousa, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Paul Nourissier Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 31 mai 2022 Le greffier du tribunal administratif 14


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44050
Date de la décision : 31/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-05-31;44050 ?

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