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08/04/2022 | LUXEMBOURG | N°47162

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 avril 2022, 47162


Tribunal administratif N° 47162 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 mars 2022 3e chambre Audience publique extraordinaire du 8 avril 2022 Recours formé par Monsieur …, …, alias …, alias …, alias …, contre des décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47162 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 mars 2022 pa

r Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg...

Tribunal administratif N° 47162 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 9 mars 2022 3e chambre Audience publique extraordinaire du 8 avril 2022 Recours formé par Monsieur …, …, alias …, alias …, alias …, contre des décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 47162 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 9 mars 2022 par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Guinée) et être de nationalité guinéenne, alias …, né le …, alias …, né le …, alias …, né le …, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 22 février 2022 de recourir à la procédure accélérée, de celle portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 24 mars 2022 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;

Le juge, en remplacement du président de la troisième chambre du tribunal administratif, entendu en son rapport, ainsi que Madame le délégué du gouvernement Sarah ERNST en sa plaidoirie à l’audience publique du 29 mars 2022.

Le 28 janvier 2020, Monsieur …, alias …, alias …, alias …, ci-après désigné par « Monsieur … », introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, désigné ci-après par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 à relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Les déclarations de Monsieur … sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, section criminalité organisée - police des étrangers, dans un rapport du même jour. Il s’avéra à cette occasion, suite à la comparaison des empreintes digitales de l’intéressé dans la base de données EURODAC, que celui-ci avait déposé des demandes de protection internationale en Italie le 16 mars 2017, en Belgique le 27 juin 2018 et aux Pays-Bas le 20 juillet 2018.

En date du 5 février 2020, les autorités luxembourgeoises contactèrent leurs homologues italiens, belges et néerlandais aux fins d’obtenir des informations concernant les demandes de protection internationale introduites par Monsieur … dans ces pays sur base de 1l’article 34 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après désigné par « le règlement Dublin III » En date du 29 septembre 2021, Monsieur … fut entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Un entretien complémentaire eut lieu le 27 décembre 2021.

Par décision du 22 février 2022, notifiée à l’intéressé par courrier recommandé expédié le lendemain, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », informa Monsieur … qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 27, paragraphe (1), sous a), de la loi du 18 décembre 2015 et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire.

La décision est libellée comme suit : « […] J'ai l'honneur de me référer à votre demande en obtention d'une protection internationale que vous avez introduite le 28 janvier 2020 sur base de la loi modifiée du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée « la Loi de 2015 »).

Je suis malheureusement dans l'obligation de porter à votre connaissance que je ne suis pas en mesure de réserver une suite favorable à votre demande pour les raisons énoncées ci-après.

1. Quant à vos déclarations En mains, la fiche de données personnelles du 28 janvier 2020, le rapport du Service de Police Judiciaire du 28 janvier 2020, les demandes de renseignements introduites auprès des autorités belges, néerlandaises et italiennes conformément aux dispositions de l'article 34 du règlement « Dublin III » des 5 février 2020 le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes du 29 septembre 2021 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale, le rapport d'entretien complémentaire de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes du 27 décembre 2021 sur les motifs sous-

tendant votre demande de protection internationale ainsi que les documents versés à l'appui de votre demande de protection internationale.

Monsieur, lors de l'introduction de votre demande de protection internationale vous avez indiqué être né le … à …, être de nationalité guinéenne, d'ethnie Peule, de confession musulmane et avoir vécu dans un petit village de la commune rurale de … aux alentours de la ville de ….

Vous évoquez comme raison principale de fuite de votre pays d'origine le fait que votre père aurait déjà à plusieurs reprises eu des problèmes avec une autre famille de votre village, qui serait d'une ethnie différente, parce que cette dernière ne posséderait pas de vaches mais qu'elle serait « simplement cultivateurs de maïs et riz » (p.5 du rapport d'entretien). Un jour, votre père vous aurait demandé de sortir ses vaches, mais par peur de vous faire agresser par 2des animaux sauvages dans la nature vous les auriez laissées sans surveillance et celles-ci auraient détruit les champs de maïs et de riz de cette autre famille.

Un membre de cette famille serait alors venu chez vous pour se plaindre des dégâts causés par les vaches de votre père. Une bagarre aurait éclaté entre votre père et cette personne. Durant cette bagarre, votre père aurait « poignardé » (p.5 du rapport d'entretien) cette personne qui aurait succombé à ses blessures à l'hôpital suite à quoi votre père aurait été incarcéré (p.5 du rapport d'entretien). Selon vos dires, depuis cet incident, la famille en aurait après vous et aurait d'ailleurs incendié votre maison familiale par pure vengeance (p.5 et 6 du rapport d'entretien). Vous précisez encore que lors de l'incendie, votre mère aurait déjà été partie rejoindre sa petite sœur dans un autre village et qu'elle vous aurait conseillé de quitter définitivement la Guinée (p.6 du rapport d'entretien).

Désormais, vous craindriez en cas de retour dans votre pays d'origine que, par vengeance, ces personnes s'en prennent à vous. Vous indiquez que vous avez « peur de retourner en Guinée (…) si je rentre au village, peut-être ils vont me faire mal » (p.6 et 7 du rapport d'entretien).

Vous évoquez encore que vous seriez venu au Luxembourg car vous vouliez « trouver une association pour aller à l'école » (p.4 du rapport d'entretien) et que vous désiriez « continuer l'école » car cela aurait été « très important » pour vous (p. 7 du rapport d'entretien).

Vous auriez alors quitté votre pays aux alentours de 2017-2018 avec un ami de votre village. Vous auriez, ensemble, traversé le Mali, le Niger et la Libye, où vous seriez resté pendant quelques mois en attendant de prendre un bateau pour rejoindre l'Europe. Vous auriez ensuite atteint la Sicile, où vous seriez resté pendant deux mois avant de rejoindre l'Italie, où vous seriez à nouveau resté un certain temps avant de rejoindre la France. En France, vous auriez été hébergé pendant cinq mois par une personne que vous auriez rencontrée avant de quitter ledit pays pour rejoindre la Belgique, où vous auriez séjourner pendant un mois. Vous auriez alors décidé de quitter la Belgique pour rejoindre votre ami aux Pays-Bas, ami avec lequel vous auriez entamé le voyage. Vous seriez resté aux Pays-Bas également pour une durée d'un mois avant de retourner quelques jours en France et de venir au Luxembourg.

A l'appui de votre demande de protection internationale, vous présentez les documents suivants :

- un extrait du registre de l'état civil ;

- un jugement supplétif tenant lieu d'acte de naissance rendu par la cour d'appel de Conakry.

Ces documents ont été soumis pour authentification à l'Unité de Police de l'Aéroport le 23 novembre 2019. En date du 22 janvier 2020, l'expertise des documents n'a mené à aucun résultat concluant en raison d'un manque de matériel de comparaison.

2. Quant à l'application de la procédure accélérée Je tiens tout d'abord à vous informer que conformément à l'article 27 de la Loi de 2015, il est statué sur le bien-fondé de votre demande de protection internationale dans le cadre d'une procédure accélérée alors qu'il apparaît que vous tombez sous un des cas prévus au paragraphe (1), à savoir :

3 « a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n'a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l'examen visant à déterminer s'il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ; » Tel qu'il ressort de l'analyse de votre demande de protection internationale ci-dessous développée, il s'avère que le point a) de l'article 27 se trouve être d'application pour les raisons étayées ci-après.

3. Quant à la motivation du refus de votre demande de protection internationale  Quant à la crédibilité de votre récit Monsieur, avant tout autre développement, il y a lieu de remettre en cause la crédibilité de votre récit.

En effet, il ressort des informations contenues dans la base de données « Eurodac » que vous avez introduit trois demandes de protection internationale antérieures, respectivement en Italie, en Belgique et aux Pays-Bas. A cet égard, il y a lieu de noter qu'il ressort des informations obtenues par les différents pays qu'en Italie vous êtes connu sous l'alias …, né le … de nationalité guinéenne, qu'en Belgique vous êtes connu sous l'alias …, né le … de nationalité guinéenne et qu'aux Pays-Bas vous êtes connu sous l'alias …, né le … de nationalité guinéenne. Dès lors, il est d'ores et déjà permis d'en conclure que vous ne jouez définitivement pas franc jeu avec les autorités des pays dans lesquels vous avez séjourné, en changeant d'identité comme bon vous semble.

Vous admettez d'ailleurs vous-même avoir menti aux autorités italiennes concernant votre identité et vous justifiez votre façon d'agir par le fait que « votre ami … » (p.2 du rapport d'entretien complémentaire) avec lequel vous auriez quitté la Guinée vous aurait conseillé de mentir sur votre identité pour ne pas devoir « rester en Italie » (p.2 du rapport d'entretien complémentaire). Or, Monsieur, force est de constater que ces déclarations sont de nature à remettre catégoriquement en cause votre réel besoin d'une protection internationale et par extension les raisons qui vous ont poussées à quitter votre pays d'origine. En effet, vous avouez que malgré le fait que vous auriez eu une chance d'obtenir une protection internationale en Italie, où vous aviez d'ailleurs obtenu un permis de séjour provisoire valable jusqu'en octobre 2018, vous auriez dès le début eu d'autres intentions. Pareille conclusion s'impose au regard de vos multiples demandes de protection internationale introduites dans d'autres Etats membres de l'Union européenne et de votre désintérêt total quant à leurs issues.

A cet égard, je constate également que lorsque l'agent du Ministère vous confronte à des informations concernant vos demandes de protection internationale antérieures en vous posant certaines questions, vous ne faites aucun effort d'y répondre et restez très vague et évasif en vous limitant uniquement, de manière non-constructive, à indiquer ne pas vous souvenir ou ne pas savoir. Cette mauvaise volonté de votre part est encore confirmée par vos dires selon lesquels vous auriez « compris la signification » (p.4 du rapport d'entretien) d'une demande de protection internationale qu'une fois que vous seriez arrivé au Luxembourg. Or, Monsieur il est évident que vous mentez encore une fois, alors qu'on peut raisonnablement conclure qu'il est impossible que les trois pays européens dans lesquels vous avez introduit une demande de protection internationale auraient failli à leur obligation de vous fournir des explications relatives à la procédure de demande de protection internationale.

4 En outre, je relève encore concernant vos demandes de protection internationales antérieures, que selon le rapport du Service de la Police Judiciaire vos affirmations ne coïncident pas avec les dates inscrites dans la base de données « Eurodac ». En effet, vous avez expliqué aux agents de la Police Judiciaire que vous auriez résidé pendant plusieurs mois en France, puis pendant un mois en Belgique, encore un mois aux Pays-Bas, avant de retourner pendant cinq jours en France. Vous seriez finalement arrivé au Luxembourg et auriez introduit votre demande le 28 janvier 2020. Ainsi, selon la chronologie que vous avez décrite vous auriez dû vous trouver aux Pays-Bas aux alentours du mois de novembre-décembre 2021. Or, selon le rapport mentionné ci-dessus votre demande de protection internationale aux Pays-Bas a été introduite une année et demie avant l'introduction de votre demande de protection internationale au Luxembourg, à savoir en juillet 2018. Je constate donc que cela ne correspond aucunement avec la chronologie du récit que vous avez décrit et le fait que vous y seriez resté uniquement pendant un mois. Les agents de police vous ont d'ailleurs confronté à cette incohérence et au fait que les données ne coïncident pas avec vos explications. Or, vous n'avez pas su formuler une explication convaincante (p.2 du rapport du Service de Police Judiciaire), de sorte qu'il est donc évident que vous mentez à nouveau et essayez de cacher la vérité aux autorités luxembourgeoises.

Ajoutons encore que votre récit est entaché de nombreuses incohérences manifestes, soutenant à nouveau le fait que vous avez inventé votre histoire de toutes pièces dans le but de tromper les autorités luxembourgeoises et d'augmenter vos chances d'y obtenir une protection internationale.

En effet, tout d'abord, lors de l'introduction de votre demande de protection internationale vous avez indiqué auprès du Service de Police Judiciaire que lorsque vous vous trouviez en France un dénommé … vous aurait recueilli et hébergé chez lui (p. 2 du rapport du Service de Police Judiciaire). Or, lors de votre entretien individuel auprès de l'agent du Ministère vous avez expliqué que cette personne qui vous aurait recueilli aurait été un dénommé … (p. 2 du rapport d'entretien) et que … aurait été la personne qui aurait travaillé pour votre père (p.3 du rapport d'entretien) et avec laquelle vous auriez fait le voyage pour venir en Europe (p.3 du rapport d'entretien). Or, Monsieur, il ne peut ici pas s'agir d'une confusion de votre part, de sorte qu'une incohérence aussi flagrante démontre clairement que vous ne jouez pas franc jeu.

Ensuite, toujours dans cette même lignée, il ressort de votre dossier administratif que vous avez indiqué une toute autre version des faits au Luxembourg que celle que vous avez racontée en Belgique. Il s'avère que, d'une part, vous avez menti sur l'identité de vos parents, puisqu'en Belgique ces derniers s'appelleraient … et …, alors qu'au Luxembourg, ils s'appelleraient… et …. D'autre part, les motifs de persécution exposés en Belgique ne sont pas les mêmes que ceux exposés au Luxembourg, puisque selon les informations obtenues par les autorités belges vous auriez introduit votre demande de protection internationale parce que votre père ne serait en réalité pas votre père biologique et qu'il vous aurait mis à la porte. Or, il s'agit en l'occurrence de motifs complètement différents de ceux que vous avez décrits au Luxembourg. Finalement, le parcours que vous avez décrit avoir emprunté depuis la Guinée est également différent en Belgique et au Luxembourg. Dès lors, il n'y a aucun doute sur votre malhonnêteté, de sorte que je m'interroge sérieusement pourquoi les autorités luxembourgeoises devrait croire à votre énième version, qui ne saurait être qu'un mensonge de plus dans le but d'augmenter vos chances d'obtenir une protection internationale.

5En outre, je constate encore d'autres incohérences qui figurent manifestement dans votre entretien individuel et qui rendent votre récit totalement invraisemblable et pas croyable.

En effet, en ce qui concerne votre lieu de naissance, vous avez expliqué à l'agent du Ministère que vous seriez né à « … » (p.2 du rapport d'entretien) un petit village aux alentours de …, mais toutefois, l'acte de naissance que vous avez remis mentionne que vous êtes né à « … » (p.2 du rapport d'entretien complémentaire). Lors de votre entretien individuel complémentaire, l'agent du Ministère vous a confronté à cette contradiction et vous avez uniquement vaguement expliqué que vous ne sauriez pas écrire correctement (p.2 du rapport d'entretien complémentaire), tentative de justification peu convaincante, étant donné que la prononciation entre « … » et « … » est totalement différente et que le fait de connaître son village d'origine n'est aucunement lié au fait de ne pas savoir écrire correctement. Votre explication est d'autant plus dérisoire, alors que selon vos affirmations vous étiez même en possession de votre acte de naissance avant l'introduction de votre demande au Luxembourg, puisque votre mère vous avait envoyé ce document lorsque vous étiez encore en France (p.2 du rapport d'entretien complémentaire). Ainsi vous connaissiez l'orthographe de « … », puisque votre acte de naissance mentionne explicitement ledit village. Ainsi, vous ne sauriez vous retrancher derrière une explication aussi vague et insensée, alors que force est de constater que ces affirmations sont également en contradiction avec celles que vous avez renseignées et écrites à la main sur votre fiche des données personnelles, puisque vous y avez indiqué être né à ….

Or, Monsieur, il est indiscutable qu'une personne doit pouvoir faire la différence entre un petit village et la ville de ….

Finalement, je remarque que lors de votre entretien individuel et entretien complémentaire vous semblez très incertain. En effet, vous affirmez à plusieurs reprises ne plus vous rappeler de rien ou encore tout avoir oublié. Or, Monsieur, il s'agit ici d'une énième tentative de votre part de manipuler les autorités luxembourgeoises, puisqu'il ressort clairement de vos entretiens que vous êtes de mauvaises foi et que vous refusez de coopérer avec ces mêmes autorités.

Ainsi, au vu de tous ces éléments qui précèdent, votre mauvaise foi est indiscutable et incontestable. En effet, votre récit est changeant et entaché de mensonges répétitifs depuis votre arrivée au Luxembourg, de sorte que votre comportement ne reflète aucunement celui d'une personne persécutée dans son pays d'origine et à la recherche d'une protection internationale. Force est de constater que depuis votre arrivée en Europe, vous cherchez par n'importe quel moyen de vous y installer et abusez sciemment et répétitivement des procédures relatives aux demandes de protection internationale afin de régulariser votre situation administrative.

Partant, votre récit n'étant pas crédible, aucune protection internationale ne vous est accordée.

Quand bien même votre récit serait crédible, il s'avère que vous ne remplissez également pas les conditions pour l'octroi du statut de réfugié, respectivement pour l'octroi du statut conféré par la protection subsidiaire.

 Quant au refus du statut de réfugié 6Les conditions d'octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée « la Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l'article 2 point f de la Loi de 2015, qui reprend l'article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifié de réfugié : « tout ressortissant d'un pays tiers ou apatride qui, parce qu'il craint avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n'entre pas dans le champ d'application de l'article 45 ».

L'octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l'article 2 point f de la Loi de 2015, que ces actes soient d'une gravité suffisante au sens de l'article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu'ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l'article 39 de la loi susmentionnée. Or, en l'espèce, force est de constater que ces conditions ne sont pas remplies cumulativement.

Monsieur, il découle de manière claire et non-équivoque qu'un conflit de voisinage entre votre père et une autre famille cultivatrice de votre village est à l'origine de votre demande de protection internationale. En effet, vous affirmez que les vaches de votre père auraient détruit les champs de maïs et de riz de cette famille dont vous précisez qu'elle appartiendrait à l'ethnie Malinké. A la suite de cet incident, une bagarre aurait éclaté entre votre père et une personne de cette famille. Durant cette bagarre votre père aurait « poignardé » cette personne qui aurait succombé à ses blessures à l'hôpital. La police aurait été interpellée et votre père aurait été incarcéré. Vous évoquez que depuis, vous auriez peur que cette famille en aurait après vous, étant donné qu'elle aurait incendié votre maison familiale par pure vengeance.

Tout d'abord, il convient de noter que les problèmes, respectivement les craintes que vous éprouvez n'ont aucun lien avec l'un des motifs de fond définis par la Convention de Genève et la Loi de 2015, à savoir votre race, votre nationalité, votre religion, vos opinions politiques ou votre appartenance à un groupe social, étant donné qu'il s'agit d'un simple conflit de voisinage entre deux familles, qui n'est aucunement lié à un des cinq motifs de fond mentionnés ci-dessus. Ajoutons à cet égard que malgré le fait que vos familles respectives soient d'ethnies différentes, la famille d'ethnie Malinké ne vous a certainement pas persécutée en raison de votre ethnie Peule, au contraire, en incendiant votre maison, elle s'est vengée de la mort d'un membre de leur famille qui aurait été tué par votre père des suites d'une bagarre qui aurait éclatée entre eux en raison de la destruction des cultures de maïs et de riz par les vaches de votre père. Force est donc de constater, qu'en l'espèce, il ne s'agit pas d'un conflit d'ordre ethnique, mais d'un conflit purement foncier, voire d'une vengeance personnelle entre deux familles.

Quand bien même, les problèmes, respectivement les faits que vous décrivez seraient en lien avec un des cinq motifs de fond de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, il convient de constater que ceux-ci ne peuvent être considérés comme un acte de persécution ou une crainte fondée de persécution d'une gravité suffisante.

7 En effet, les problèmes et craintes respectifs dans votre cas reposent essentiellement sur une crainte hypothétique, ce qui ressort d'ailleurs clairement dans votre récit puisque vous déclarez à plusieurs reprises que : « peut-être la famille de la personne qui est décédée se serait vengée sur moi » (p. 6 du rapport d'entretien) et que « peut-être ils vont me faire mal » (p. 7 du rapport d'entretien).

Vous avez d'ailleurs vous-même estimé que votre situation dans votre pays d'origine ne serait pas d'une telle gravité à y rendre votre vie intolérable, alors que vous avez manifesté votre intention de vouloir retourner dans votre pays d'origine le 11 novembre 20203, que vous vous êtes présenté au rendez-vous organisé à cet égard le 26 novembre 2020, mais que vous avez, subitement et sans aucune explication convaincante, décidé ne plus vouloir retourner en Guinée. Ainsi, une personne qui aurait réellement été persécutée ou qui craint réellement d'être persécutée dans son pays d'origine n'aurait en aucun cas manifesté son intention de retourner dans ledit pays.

Dans cette même lignée, votre désintérêt total quant à l'issu de vos trois demandes de protection internationale antérieures accentuent encore le fait que vos problèmes respectivement vos craintes dans votre pays d'origine ne sont pas d'une gravité suffisante pour être qualifiés d'actes de persécution. En effet et tout en renvoyant aux arguments développés dans la partie relative à la crédibilité, une personne qui aurait réellement été dans le besoin d'une protection se serait contentée d'obtenir cette protection dans le premier pays sûr dans lequel elle aurait introduit sa demande, contrairement à vous, Monsieur, qui avait continué à voyager à travers l'Europe et à y introduire d'autres demandes, sans jamais vous intéressé quant à leurs issues.

Toujours à cet égard, même à supposer que les problèmes avec la famille voisine seraient à qualifier d'actes de persécution motivés par un des cinq motifs de fond de la Convention de Genève et de la Loi de 2015, il convient de constater que s'agissant d'actes émanant d'une personne privée, ceux-ci peuvent être considérés comme fondant une crainte légitime uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités guinéennes.

Or, vous déclarez que, ni vous, ni votre père, ni votre mère n'auraient porté plainte contre les agissements de cette famille. Le défaut de plainte de votre part est d'autant plus incompréhensible étant donné que la police guinéenne est intervenue lors de l'altercation entre votre père et l'autre personne. Ainsi, la police guinéenne a bel et bien été en mesure de faire son travail et aurait pu intervenir une deuxième fois pour sanctionner les agissements de la famille, à savoir l'incendie de votre maison. Dès lors, vous ne sauriez reprocher une quelconque absence respectivement volonté d'action aux autorités guinéennes compétentes.

Ajoutons encore que suite à l'intervention de la police, votre père aurait été emprisonné pour les faits qui lui sont reprochés. Considérant que cette famille aurait obtenu justice, il semble très improbable qu'ils en auraient encore eu après vous alors que vous n'auriez été qu'un enfant âgé de 14 ans à l'époque.

A toutes fins utiles, il convient encore de souligner qu'il découle de vos dires et ce de manière claire et non équivoque que vous avez choisi de venir au Luxembourg dans le but de continuer votre scolarité. En effet, vous avez affirmé à deux reprises que vous vouliez « trouver une association pour aller à l'école » (p.4 du rapport d'entretien) et qu'à la gare de Luxembourg des personnes vous auraient dit « qu'au Luxembourg on pouvait m'aider » (p.6 8du rapport d'entretien). Vous voudriez désormais « continuer l'école car c'est très important pour moi » (p.7 du rapport d'entretien).

Or, en l'espèce, je soulève qu'il s'agit ici d'une raison de pure convenance personnelle respectivement d'une raison purement économique, raison qui de facto n'entre pas dans le champ de l'application de la Convention de Genève et de la Loi de 2015 et qui est dénuée de tout lien avec l'un des cinq motifs de fond, à savoir votre race, votre religion, votre nationalité, vos opinions politiques ou votre appartenance à un certain groupe social. De plus, on ne saurait retenir l'existence dans votre chef d'un acte de persécution, respectivement d'une crainte fondée de persécution, puisque des motifs économiques respectivement des motifs de pure convenance personnelle ne sauraient justifier l'octroi du statut de réfugié.

Partant, le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

 Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire Aux termes de l'article 2 point g de la Loi de 2015 « tout ressortissant d'un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d'origine ou, dans le cas d'un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 48, l'article 50, paragraphes 1 et 2, n'étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n'étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L'article 48 définit en tant qu'atteinte grave « la peine de mort ou l'exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d'origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d'un civil en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

L'octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d'atteintes graves au sens de l'article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l'article 39 de cette même loi. Or, en l'espèce, force est de constater que ces conditions ne sont pas remplies cumulativement.

En l'espèce, il ressort de votre dossier administratif que vous fondez votre demande de protection subsidiaire sur les mêmes motifs que ceux exposés à la base de votre demande de reconnaissance du statut de réfugié. Or, et tout en renvoyant aux arguments développés précédemment, il échet de relever que vous n'apportez aucun élément de nature à établir qu'il existerait de sérieuses raisons de croire que vous encouriez, en cas de retour dans votre pays d'origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l'article 48 précité, respectivement que les autorités guinéennes seraient dans l'impossibilité de vous offrir une protection.

Partant, le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé. […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 9 mars 2022, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 22 février 2022 d’opter pour la procédure accélérée, de celle du même jour ayant refusé de faire droit à sa 9demande de protection internationale, et de l’ordre de quitter le territoire prononcé à son encontre.

Etant donné que l’article 35, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre les décisions de refus d’une demande de protection internationale prises dans ce cadre et contre l’ordre de quitter le territoire prononcé dans ce contexte, et attribue compétence au président de chambre ou au juge qui le remplace pour connaître de ce recours, la soussignée est compétente pour connaître du recours en réformation dirigé contre les décisions du ministre du 22 février 2022, telles que déférées, recours qui est encore à déclarer recevable pour avoir, par ailleurs, été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de son recours et en fait, le demandeur reprend, en substance, son récit tel qu’il l’a exposé lors de son entretien avec un agent du ministère sur les motifs à la base de sa demande de protection internationale.

En droit et quant à la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en application de l’article 27, paragraphe (1), point a), de la loi du 18 décembre 2015, le demandeur reproche tout d’abord au ministre d’avoir statué sur sa demande de protection internationale plus de deux ans après l’introduction de celle-ci, tout en donnant à cet égard à considérer qu’il aurait été convoqué à un entretien avec un agent ministériel en date du 29 septembre 2021, soit plus de 20 mois après l’introduction de sa demande de protection internationale, ainsi qu’à un entretien complémentaire en date du 27 septembre 2021, soit plus de 23 mois plus tard. Il estime qu’en ayant décidé d’appliquer la procédure accélérée, le ministre aurait violé le « point (2) de l’article 27 » de la loi du 18 décembre 2015, le privant ainsi de ses droits de la défense et de son droit à une procédure ordinaire comportant des voies de recours ordinaires. Il conclut que l’application de la procédure accélérée ne serait pas justifiée en l’espèce, tout en soulignant que les faits invoqués seraient par ailleurs d’une gravité telle qu’ils ne pourraient entrer dans le champ d’application de l’article 27, paragraphe (1), point a) de la loi du 18 décembre 2015.

Le demandeur reproche ensuite au ministre de remettre en cause la crédibilité de son récit.

A cet égard et en ce qui concerne la critique du ministre d’avoir utilisé différentes identités, Monsieur … explique qu’il aurait quitté la Guinée en 2017, alors qu’il n’aurait été qu’un enfant de 13 ans, et qu’il aurait été accompagné de …, un adulte en qui il aurait eu confiance et qui lui aurait conseillé de ne pas donner sa réelle identité aux autorités italiennes afin de ne pas rester en Italie. Il explique qu’il serait tombé malade en Lybie, de sorte que lors de son entrée en Italie, il aurait dû être hospitalisé. Il ajoute que lorsque ses empreintes auraient été prises en Italie, son état de santé et de stress ne lui aurait pas permis de raisonner de manière censée, tout en insistant sur le fait que vu son jeune âge et n’étant pas apte à réfléchir par lui-même, il aurait écouté les conseils de la seule personne de confiance qu’il aurait connue, à savoir le dénommé …. Il donne à considérer que les noms donnés lors de ses différentes demandes de protection internationale seraient les mêmes, à quelques lettres près, ce qui serait dû à un manque d’éducation et à des problèmes de langue. Il ajoute qu’il aurait indiqué lors de son entretien avec l’agent ministériel qu’il souhaiterait simplement rejoindre son ami … en Belgique et aux Pays-Bas et qu’il ne désirerait pas s’installer dans l’un de ces pays, ce qui serait encore confirmé par le fait qu’il ne serait resté que très peu de temps dans chaque pays dans 10lequel il a introduit une demande de protection internationale. Il souligne que ce n’aurait été que plus tard, lorsqu’il aurait obtenu l’extrait du registre d’état civil et le jugement supplétif tenant lieu d’acte de naissance par sa mère, qu’il aurait décidé de s’installer au Luxembourg afin d’obtenir une réelle protection et stabilité. Il estime que dans ces circonstances, ses premières déclarations ne pourraient remettre en cause la crédibilité de l’ensemble de son récit, de sorte que l’affirmation du ministre suivant laquelle « dès le début [il aurait] eu d’autres intentions » serait non fondée.

Quant au reproche du ministre qu’il aurait donné des réponses vagues et évasives lors de son entretien, il soutient qu’il serait parfaitement compréhensible qu’à son âge et en se retrouvant dans un pays inconnu avec des personnes inconnues après avoir dû affronter des faits graves, il ne se souviendrait pas de certains évènements.

S’agissant ensuite de la chronologie des événements exposés par lui lors de son entretien avec un agent de la police grand-ducale, il critique le ministre pour ne pas avoir pris en compte ni son état de stress ni son jeune âge de 16 ans, circonstances qui permettraient par ailleurs d’expliquer qu’il se soit trompé dans l’indication du nom de son ami.

Quant au fait qu’il n’aurait pas indiqué les mêmes noms pour ses parents, ni les mêmes motifs que ceux exposés lors de sa demande de protection internationale introduite en Belgique, il estime que comme il aurait lui-même avoué d’avoir donné des fausses informations lors de ses précédentes demandes, aucun reproche ne pourrait être formulé à son encontre.

En ce qui concerne sa déclaration qu’il serait né à « … » et non à « … », tel que cela figurerait sur son acte de naissance, il renvoie à son entretien complémentaire lors duquel il aurait indiqué qu’il ne saurait pas écrire correctement et qu’il n’aurait appris à écrire qu’une fois arrivé à Luxembourg, tout en expliquant qu’il n’aurait étudié en Guinée que le Coran avec ses parents, de sorte qu’il ne pourrait lui être reproché de mal orthographier une langue qu’il viendrait tout juste d’apprendre. Il en serait de même en ce qui concerne le nom de sa mère, le demandeur ajoutant que le manque d’éducation et la prononciation avec l’accent guinéen ne lui permettraient pas d’orthographier ou d’épeler correctement un nom ou une ville.

En ce qui concerne l’indication dans sa fiche de données personnelles qu’il serait né à … et non pas à …, il met en avant que le village de … serait rattaché à la ville de …, de sorte que sa déclaration ne serait pas en contradiction avec les faits. Il donne, par ailleurs, à considérer qu’il ne serait pas parvenu à remplir par lui-même la fiche de données et qu’une personne du ministère l’aurait aidé à la remplir à sa place, ce qui serait encore confirmé par les deux écritures différentes figurant sur ladite fiche. Ainsi, les reproches du ministre quant à l’orthographe des noms ou villes ne seraient pas fondés.

Il soutient encore que le fait d’avoir oublié certaines choses, dates ou autres ne serait pas une preuve de sa mauvaise foi, mais serait, au contraire, dû à son jeune âge et à son état d’angoisse et de stress dans lequel il se serait trouvé lors de ses audition, tout en se prévalant à cet égard de la position du Conseil de l’Europe du 4 mars 1996 au sujet de la preuve des faits, ainsi que du chapitre II, article 4, point 5 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire et au contenu de cette protection, ci-après désignée par « la directive 2011/95/UE », lesquels confirmeraient l’application du bénéfice du doute en la matière.

11 Il conclut que ses réponses aux questions posées lors de son entretien seraient cohérentes et non contredites par les informations générales, de sorte que la crédibilité générale de son récit devrait être retenue.

En ce qui concerne ensuite le refus de lui octroyer le statut de réfugié, il reproche au ministre une erreur d’appréciation.

Après avoir cité les dispositions des articles 1A, paragraphe (2) de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et le Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par le règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après désigné par « la Convention de Genève », 2, point f), et 39 de la loi du 18 décembre 2015 et 9, paragraphe (2) de la directive 2011/95/UE, il invoque tout d’abord une violation par le ministre de son l’obligation de tenir compte « du statut individuel et (de) la situation personnelle du demandeur, y compris des facteurs comme son passé, son sexe et son âge (…) », conformément à l’article « 73 », paragraphe (3), point c) de la loi du 18 décembre 2015, tout en reprochant à celui-ci de détourner et de minimiser ses propos. Le ministre ne tiendrait par ailleurs pas compte ni de la situation de stress dans laquelle il se serait trouvé lors de ses auditions, ni de son statut de mineur non accompagné.

Il fait valoir que son récit serait crédible et précis et qu’il aurait pu relater avec cohérence les événements à l’origine de sa fuite vers le Mali. Il aurait ainsi expliqué que sa famille aurait subi des persécutions en raison de leur appartenance à l’ethnie Peule, le demandeur estimant encore que le fait que l’agent ministériel n’aurait pas posé de questions quant à ses déclarations et ses problèmes vécus en Guinée du fait de son ethnie Peule ne signifierait pas qu’il n’en aurait pas fait état.

Il met dans ce contexte en exergue que les problèmes ethniques en Guinée seraient récurrents et indéniablement liés à la politique dans ce pays, de sorte à entrer dans les critères de la Convention de Genève et de la loi du 18 décembre 2015 pour pouvoir bénéficier du statut de réfugié.

Il avance que les faits à la base de sa demande de protection internationale ne concerneraient pas un simple conflit de voisinage, tel que retenu par le ministre, mais constitueraient au contraire un conflit entre deux ethnies, tout en insistant sur le fait que les Malinkés de son village s’en prenaient constamment à sa famille en les persécutant. Il précise à cet égard que même si son père avait été emprisonné, la famille du défunt aurait continué à s’en prendre à sa famille en brûlant sa maison.

En se référant à ses déclarations faites lors de son entretien, il donne encore à considérer que la famille Malinké aurait voulu se venger sur lui, de sorte qu’il ne s’agirait pas d’un risque hypothétique, tel que soutenu par le ministre, mais d’un risque réel qui l’aurait poussé à fuir son pays à seulement 13 ans.

Il soutient ensuite que sa déclaration de vouloir retourner volontairement dans son pays d’origine s’expliquerait par le fait qu’il n’aurait été âgé que de 17 ans, qu’il aurait été seul dans un pays inconnu et qu’il n’aurait plus vu sa mère depuis plus de 3 ans. Il explique qu’après réflexion, il aurait toutefois compris que la situation en Guinée serait trop dangereuse pour lui, suite à quoi il aurait renoncé à y retourner volontairement.

12 En ce qui concerne le reproche du ministre qu’il se désintéresserait des suites de ses demandes de protection internationale introduites dans les trois autres Etats membres, il réitère que cela serait le fruit de mauvais conseils de la part de son ami … ainsi que de son jeune âge, ne lui ayant pas permis de comprendre réellement le sens d’une protection internationale.

S’agissant du reproche du ministre de ne pas avoir porté plainte contre les acteurs des persécutions, il soutient que comme sa famille aurait toujours subi des persécutions de la part des Malinkés dans leur village et que ce conflit entre ethnies existerait depuis toujours, cela « n’aurait servi à rien de porter plainte ». Il précise à cet égard que la police serait venue sur les lieux seulement lors de la bagarre entre son père et le villageois d’ethnie Malinké, et que la destruction de la maison ainsi que les menaces envers lui se seraient déroulées après la mort dudit villageois. Il insiste dans ce contexte encore sur le fait que la famille du défunt ne se serait pas calmée suite à l’emprisonnement de son père, mais qu’elle se serait, au contraire, rendue à son domicile pour brûler et détruire leur maison.

Au vu de ces considérations, il n’aurait pas eu d’autres choix que de fuir son pays d’origine.

Il reproche enfin au ministre d’avoir retenu que sa demande de protection internationale serait de pure convenance, tout en soulignant à cet égard qu’il n’aurait pas fui la Guinée pour pouvoir aller à l’école, mais pour rester en vie.

Quant à la décision du ministre de lui refuser une protection subsidiaire, il soutient qu’il aurait fait état non seulement des conflits permanents que sa famille aurait vécu depuis toujours avec les Malinkés, mais également des atteintes graves au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015 dont celle-ci et lui-même auraient été victimes à cause de leur appartenance ethnique.

Il estime que rien ne permettrait d’écarter le risque pour lui d’être retrouvé par la famille du défunt en cas retour dans son pays d’origine.

Il fait par ailleurs état de la situation actuelle en Guinée laquelle serait très tendue, notamment d’un point de vue politique, tout en se référant à cet égard à un article de presse, intitulé « Guinée Conakry : une situation politique extrêmement préoccupante ! », publié sur le site internet blogs.mediapart.fr en date du 18 février 2020.

En se prévalant encore d’un article de presse, intitulé « Prévenir un génocide peul en Guinée », publié le 28 janvier 2020 sur le site www.seneplus.com, il soutient que contrairement aux affirmations du ministre, il ne pourrait pas trouver de l’aide auprès des autorités de son pays d’origine qui n’appliqueraient pas le code pénal et qui laisseraient seuls les Peuls face aux Malinkés.

Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il estime que les conditions pour pouvoir bénéficier du statut de réfugié, respectivement de celui conféré par la protection subsidiaire seraient remplies dans son chef, de sorte que la décision déférée encourrait la réformation.

Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours, pris en son triple volet.

13 Aux termes de l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 : « Contre la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et de la décision de refus de la demande de protection internationale prise dans ce cadre, de même que contre l’ordre de quitter le territoire, un recours en réformation est ouvert devant le tribunal administratif. Le recours contre ces trois décisions doit faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé. Il doit être introduit dans un délai de quinze jours à partir de la notification.

Le président de chambre ou le juge qui le remplace statue dans le mois de l’introduction de la requête. Ce délai est suspendu entre le 16 juillet et le 15 septembre, sans préjudice de la faculté du juge de statuer dans un délai plus rapproché. Il ne peut y avoir plus d’un mémoire de la part de chaque partie, y compris la requête introductive. La décision du président de chambre ou du juge qui le remplace n’est pas susceptible d’appel.

Si le président de chambre ou le juge qui le remplace estime que le recours est manifestement infondé, il déboute le demandeur de sa demande de protection internationale.

Si, par contre, il estime que le recours n’est pas manifestement infondé, il renvoie l’affaire devant le tribunal administratif pour y statuer ».

Il résulte de cette disposition qu’il appartient au magistrat, siégeant en tant que juge unique, d’apprécier si le recours est manifestement infondé, dans la négative, le recours étant renvoyé devant le tribunal administratif siégeant en composition collégiale pour y statuer.

A défaut de définition contenue dans la loi du 18 décembre 2015 de ce qu’il convient d’entendre par un recours « manifestement infondé », il appartient à la soussignée de définir cette notion et de déterminer, en conséquence, la portée de sa propre analyse.

A cet égard, il convient de prime abord de relever que l’article 35, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 dispose que l’affaire est renvoyée ou non devant le tribunal administratif selon que le recours est ou n’est pas manifestement infondé, de sorte que la notion de « manifestement infondé » est à apprécier par rapport aux moyens présentés à l’appui du recours contentieux, englobant toutefois nécessairement le récit du demandeur tel qu’il a été présenté à l’appui de sa demande et consigné dans le cadre de son rapport d’audition.

Le recours est à qualifier comme manifestement infondé si le rejet des différents moyens invoqués à son appui s’impose de manière évidente, en d’autres termes, le magistrat siégeant en tant que juge unique ne doit pas ressentir le moindre doute que les critiques soulevées par le demandeur à l’encontre des décisions déférées sont visiblement dénuées de tout fondement. Dans cet ordre d’idées, force est encore de relever que dans l’hypothèse où un recours s’avère ne pas être manifestement infondé, cette conclusion n’implique pas pour autant que le recours soit nécessairement fondé, la seule conséquence de cette conclusion est le renvoi du recours par le président de chambre ou le juge qui le remplace devant une composition collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.

1) Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée La décision ministérielle est, en l’espèce, fondée sur les dispositions du point a) de l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015, aux termes desquelles « Sous réserve 14des articles 19 et 21, le ministre peut statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée dans les cas suivants :

a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n’a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ; ».

Il s’ensuit qu’aux termes de l’article 27, paragraphe (1), sous a), de la loi du 18 décembre 2015, le ministre peut statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale par voie de procédure accélérée s’il apparaît que les faits soulevés lors du dépôt de la demande sont sans pertinence au regard de l’examen de cette demande.

Les conditions pour pouvoir statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée étant énumérées à l’article 27, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015 de manière alternative et non point cumulative, une seule condition valablement remplie peut justifier la décision ministérielle à suffisance.

La soussignée est dès lors amenée à analyser si les moyens avancés par le demandeur à l’encontre de la décision du ministre de recourir à la procédure accélérée sont manifestement dénués de tout fondement, de sorte que leur rejet s’impose de manière évidente ou si les critiques avancées par lui ne permettent pas d’affirmer en l’absence de tout doute que le ministre a valablement pu se baser sur l’article 27, paragraphe (1), point a), de la loi du 18 décembre 2015 pour analyser la demande dans le cadre d’une procédure accélérée, de sorte que le recours devra être renvoyé devant une composition collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.

A cet égard et s’agissant tout d’abord de la violation alléguée par le ministre des dispositions du « point (2) de l’article 27 de la loi de 2015 » et du reproche afférent que la décision ministérielle déférée serait intervenue tardivement, il échet de relever qu’aux termes de l’article 27, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 : « (2) Le ministre prend sa décision au plus tard dans un délai de deux mois à partir du jour où il apparaît que le demandeur tombe sous un des cas prévus au paragraphe (1) qui précède. Sans préjudice des délais prévus à l’article 26, ce délai peut être dépassé lorsque cela est nécessaire pour assurer un examen approprié et exhaustif de la demande de protection internationale. ».

Il résulte de la disposition légale qui précède que le délai imparti au ministre pour prendre une décision dans le cadre d’une procédure accélérée est a priori de deux mois à compter du jour où il devient manifeste qu’un demandeur de protection internationale tombe dans un des cas prévus à l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015.

En l’espèce, il est constant en cause que le demandeur a déposé sa demande de protection internationale en date du 28 janvier 2020 et qu’une décision n’a été prise à son encontre qu’en date du 22 février 2022.

Il échet, à cet égard, de relever que le délai de deux mois tel que prévu à l’article 27, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 commence à courir à partir du moment où le ministre dispose de la globalité des motifs invoqués par un demandeur de protection internationale, c’est-à-dire à la fin de l’entretien, respectivement de la relecture de l’entretien de celui-ci, étant précisé que pour savoir si un demandeur de protection internationale tombe dans l’un de ces cas de figure prévus à l’article 27, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 152015, il est nécessaire d’avoir connaissance de l’ensemble des éléments à la base de la demande de celui-ci. Ce n’est que lors de l’entretien auprès de la direction de l’Immigration, tel que prévu à l’article 13 de la loi du 18 décembre 2015, que le demandeur de protection internationale a la possibilité et même l’obligation d’exposer l’ensemble des faits à la base de sa demande, étant rappelé que le service de police judiciaire se limite d’après l’article 6 de la même loi à procéder à toute vérification de l’identité et de l’itinéraire d’un demandeur de protection internationale1.

En l’espèce, il résulte du dossier administratif que le demandeur est connu sous différentes identités en Italie, en Belgique et aux Pays-Bas et que les autorités luxembourgeoises ont dans ce contexte dû contacter leurs homologues italiens, belges et néerlandais afin d’obtenir des renseignements sur l’identité du demandeur et les motifs à la base de ses différentes demandes de protection internationale déposées dans ces mêmes pays.

Il résulte ensuite du dossier administratif ainsi que des explications non contestées de la partie étatique qu’une procédure contentieuse relative à une demande de révocation de l’administrateur ad hoc de Monsieur … était en cours et que l’autorité ministérielle a dû attendre l’ordonnance rendue à cet égard par le tribunal d’arrondissement de et à Diekirch le 23 avril 2021 avant de pouvoir convoquer le demandeur à l’entretien auprès de la direction de l’Immigration au sens de l’article 13 de la loi du 18 décembre 2015. Si ce premier entretien a certes eu lieu le 29 septembre 2021, il se dégage toutefois du dossier administratif ainsi que des explications non contestées de la partie étatique qu’au vu des imprécisions quant au récit du demandeur tel qu’exposé lors de son premier entretien, un entretien complémentaire visant à recueillir des informations supplémentaires sur les motifs de fuite du demandeur a dû être organisé, cet entretien ayant eu lieu le 27 décembre 2021.

Dans ces circonstances et au vu des diverses étapes procédurales intervenues, force est dès lors de retenir que la date de l’entretien complémentaire est à considérer comme point de départ du délai de deux mois tel que prévu à l’article 27, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015, de sorte que le délai imparti au ministre pour prendre une décision dans le cadre de l’article 27 de la loi du 18 décembre 2015 a en l’espèce commencé à courir au plus tôt le 27 décembre 2021 à minuit, soit le 28 décembre 2021, pour expirer le 28 février 2022, c’est-à-dire postérieurement à la prise de la décision déférée.

Force est, par ailleurs, de constater qu’il ne se dégage ni des travaux parlementaires relatifs à la loi du 18 décembre 2015 ni de la loi elle-même que le législateur ait entendu conférer un caractère contraignant au délai de 2 mois fixé à l’article 27, paragraphe (2), précité, de la loi du 18 décembre 2015, de sorte que dans la mesure où ledit délai n’est, de surcroît, pas non plus assorti d’une sanction en cas de non-respect par le ministre, ce délai est à qualifier de délai d’ordre et non pas de délai de rigueur. La soussignée relève encore que le demandeur reste en défaut d’invoquer un quelconque grief concret en relation avec le dépassement du délai invoqué, la simple affirmation non autrement sous-tendue par un élément concret que ses droits de la défense auraient été violés étant insuffisante à cet égard.

Il s’ensuit que le moyen relatif à un dépassement du délai de 2 mois prévu à l’article 27, paragraphe (2) de la loi du 18 décembre 2015 est à rejeter pour être manifestement infondé.

Ensuite et afin d’analyser si le demandeur n’a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre 1 Trib. adm. 16 février 2017, n° 39006 du rôle, disponible sous www.jurad.etat.lu.

16au statut conféré par la protection internationale, il y a d’abord lieu de relever qu’en vertu de l’article 2, point h) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « protection internationale » se définit comme correspondant au statut de réfugié et au statut conféré par la protection subsidiaire.

La notion de « réfugié » est définie par l’article 2, point f), de la loi du 18 décembre 2015 comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner, et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 45 ».

Par ailleurs, l’article 42 de la loi du 18 décembre 2015 dispose que « (1) Les actes considérés comme une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève doivent:

a) être suffisamment graves du fait de leur nature ou de leur caractère répété pour constituer une violation grave des droits fondamentaux de l’homme, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible en vertu de l’article 15, paragraphe 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

ou b) être une accumulation de diverses mesures, y compris des violations des droits de l’homme, qui soit suffisamment grave pour affecter un individu d’une manière comparable à ce qui est indiqué au point a). […] ».

Aux termes de l’article 2, point g) de la loi 18 décembre 2015 est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire », « tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays ». L’article 48 de la même loi énumère en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution; ou la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine; ou des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. ».

En outre, aux termes de l’article 39 de la loi du 18 décembre 2015 « Les acteurs des persécutions ou des atteintes graves peuvent être:

a) l’Etat;

b) des partis ou organisations qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci;

c) des acteurs non étatiques, s’il peut être démontré que les acteurs visés aux points a) et b), y compris les organisations internationales, ne peuvent pas ou ne veulent pas accorder 17une protection contre les persécutions ou les atteintes graves. » et aux termes de l’article 40 de la même loi : « (1) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves ne peut être accordée que par :

a) l’Etat, ou b) des partis ou organisations, y compris des organisations internationales, qui contrôlent l’Etat ou une partie importante du territoire de celui-ci, pour autant qu’ils soient disposés à offrir une protection au sens du paragraphe (2) et en mesure de le faire.

(2) La protection contre les persécutions ou les atteintes graves doit être effective et non temporaire. Une telle protection est généralement accordée lorsque les acteurs visés au paragraphe (1) points a) et b) prennent des mesures raisonnables pour empêcher la persécution ou des atteintes graves, entre autres lorsqu’ils disposent d’un système judiciaire effectif permettant de déceler, de poursuivre et de sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave, et lorsque le demandeur a accès à cette protection. […] ».

Il se dégage de ces dispositions légales que tant l’octroi du statut de réfugié que celui du statut conféré par la protection subsidiaire supposent, entre autres, d’une part, que les faits invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande de protection internationale atteignent un certain degré de gravité - lequel est déterminé, s’agissant du statut de réfugié, par l’article 42, paragraphe (1) de la loi du 18 décembre 2015 relatif à la notion de « persécution » et, s’agissant de la protection subsidiaire, par l’article 48 de la même loi, qui précise la notion d’ « atteinte grave » - et, d’autre part, que l’intéressé ne puisse se prévaloir d’une protection étatique appropriée. Les conditions d’octroi du statut de réfugié, respectivement de celui conféré par la protection subsidiaire devant être réunies cumulativement, le fait que l’une d’elles ne soit pas valablement remplie est suffisant pour conclure que le demandeur ne saurait bénéficier du statut de réfugié, respectivement de la protection subsidiaire. Force est de constater que la condition commune au statut de réfugié et à celui conféré par la protection subsidiaire est la preuve, à rapporter par le demandeur, que les autorités de son pays d’origine ne sont pas capables ou ne sont pas disposées à lui fournir une protection.

A la base de sa demande de protection internationale, Monsieur … fait, de manière générale, état de la situation sécuritaire et des discriminations que subiraient les Peules en Guinée à cause de leur appartenance ethnique. Personnellement, il se prévaut de sa crainte, en cas de retour dans son pays d’origine, de faire l’objet de représailles de la part d’une famille de son village, qui serait d’appartenance ethnique différente, à savoir l’ethnie Malinké, et qui se vengerait sur lui et sa famille à cause de la mort d’un membre de cette famille suite à une bagarre éclatée entre le père du demandeur et cette personne à cause de dégâts causés par les vaches du père de Monsieur … qui auraient détruits les champs de maïs et de riz de cette autre famille. Depuis cet incident, la famille du défunt s’en prendrait constamment à lui-même et à sa famille et aurait incendié leur maison par pure vengeance.

S’agissant tout d’abord du moyen fondé sur une violation de l’article 37 de la loi du 18 décembre 2015, erronément indiqué comme étant l’article « 73 » de cette même loi, celui-ci prévoit en son paragraphe (3), point c), invoqué par le demandeur, que « (3) Le ministre procède à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale en tenant compte des éléments suivants : […] c) le statut individuel et la situation personnelle du demandeur, y compris des facteurs comme son passé, son sexe et son âge, pour déterminer si, compte tenu de la situation personnelle du demandeur, les actes auxquels le demandeur a été 18ou risque d’être exposé pourraient être considérés comme une persécution ou une atteinte grave ; ».

Or, il ne ressort d’aucun élément du dossier que le ministre n’aurait pas procédé à une instruction complète et à une évaluation individuelle de la demande de protection internationale lui soumise en tenant compte de la situation personnelle de Monsieur …. En effet, il se dégage du rapport d’audition que le demandeur a été invité à exposer les raisons pour lesquelles il a sollicité une protection internationale au Luxembourg, ainsi que les raisons de son départ de son pays d’origine. L’agent chargé de son audition l’a plus particulièrement interrogé sur les problèmes qu’il aurait personnellement rencontrés en Guinée, ainsi que sur les menaces et persécutions ou atteintes graves qu’il y aurait, le cas échéant, subies. Etant donné qu’il se dégage de la décision déférée que c’est sur base de ces déclarations et des recherches effectuées par les services du ministère pour vérifier les dires du demandeur, notamment quant à son passé, que le ministre a, en l’espèce, considéré le récit du demandeur comme étant non crédible, respectivement que les faits invoqués par lui seraient dénoués de pertinence pour fonder une protection internationale dans son chef, le reproche suivant lequel le ministre n’aurait pas pris en considération la situation personnelle du demandeur, laisse d’être fondé, ce d’autant plus que l’autorité ministérielle a mené un entretien complémentaire avec le demandeur afin de clarifier certaines incohérences dans son récit et que le ministre a ensuite clairement expliqué les raisons l’ayant amené à retenir le défaut de crédibilité du récit du demandeur, respectivement à lui refuser un statut conféré par la protection internationale.

Il s’ensuit que les simples affirmations non autrement circonstanciées ni sous-tendues par un quelconque élément tangible suivant lesquelles le ministre ne tiendrait pas compte de son jeune âge ou de son état de santé et de stress sont largement insuffisantes pour convaincre la soussignée.

Le reproche afférent est dès lors rejeté.

En ce qui concerne ensuite les faits concrètement invoqués à l’appui de la demande de protection internationale de Monsieur …, la soussignée constate tout d’abord que les problèmes du demandeur reposent essentiellement sur une crainte hypothétique, celui-ci ayant en effet déclaré lors de son entretien que « […] Si je restais là-bas en Guinée, peut-être la famille de la personne qui est décédée se serait vengée sur moi »2 et « Si je rentre au village, peut-être ils vont me faire du mal »3. La soussignée constate ensuite que le demandeur a manifesté, à travers un courrier de son mandataire du 11 novembre 2020, son intention de vouloir retourner dans son pays d’origine au motif non pas, tel qu’il le soutient dans son recours, que sa mère lui manquerait, mais qu’il aurait « perdu tout espoir dans un aboutissement positif de sa procédure », laissant conclure que sa situation dans son pays d’origine n’est pas d’une telle gravité à y rendre sa vie intolérable. Le constat que ses problèmes respectivement ses craintes de faire l’objet de représailles dans son pays d’origine ne sont pas d’une gravité suffisante pour être qualifiés d’actes de persécutions ou d’atteintes graves est encore confirmé par le désintérêt qu’a montré le demandeur quant à l’issue de ses demandes de protection internationale déposées dans les trois autres Etats membres, le demandeur ayant en effet quitté le territoire de ces pays sans attendre le résultat de ses demandes, étant relevé qu’une personne se sentant réellement persécutée ou victime d’atteintes graves, respectivement craignant sérieusement de subir de tels actes en cas de retour dans son pays d’origine se serait contentée d’obtenir cette 2 Page 6/9 du rapport d’entretien.

3 Page 7/9 du rapport d’entretien.

19protection dans le premier pays sûr dans lequel elle aurait introduit sa demande, sans que l’explication non autrement circonstanciée du demandeur suivant laquelle il aurait suivi les conseils de son ami … et qu’il n’aurait compris l’intérêt d’une protection internationale que plus tard ne permettent de convaincre la soussignée et de retenir le contraire.

Ensuite et indépendamment de la crédibilité générale du récit du demandeur, de la qualification des faits invoqués à l’appui de sa demande de protection internationale sous analyse et de la question de savoir si les actes invoqués sont d’une gravité suffisante pour être qualifiés de persécutions ou d’atteintes graves au sens de la loi du 18 décembre 2015, force est à la soussignée de relever que les auteurs des agissements dont le demandeur craint être victime en cas de retour en Guinée, à savoir une autre famille de son village, sont des personnes privées, sans lien avec l’Etat.

Le demandeur ne peut dès lors faire valoir une crainte fondée d’être persécuté, respectivement un risque réel de subir des atteintes graves que si les autorités guinéennes ne veulent ou ne peuvent pas lui fournir une protection effective contre les agissements dont il fait état, en application de l’article 40 de la loi du 18 décembre 2015, ou s’il a de bonnes raisons de ne pas vouloir se réclamer de la protection des autorités de son pays d’origine.

En effet, chaque fois que la personne concernée est admise à bénéficier de la protection du pays dont elle a la nationalité, et qu’elle n’a aucune raison, fondée sur une crainte justifiée, de refuser cette protection, l’intéressé n’a pas besoin de la protection internationale. En toute hypothèse, il faut que l’intéressé ait tenté d’obtenir la protection des autorités de son pays pour autant qu’une telle tentative paraisse raisonnable en raison du contexte. Cette position extensive se justifie au regard de l’aspect protectionnel du droit international des réfugiés qui consiste à substituer une protection internationale là où celle de l’Etat fait défaut4.

L’essentiel est en effet d’examiner si la personne peut être protégée compte tenu de son profil dans le contexte qu’elle décrit. C’est l’absence de protection qui est décisive, quelle que soit la source de la persécution ou de l’atteinte grave infligée.

Il y a encore lieu de souligner que si une protection n’est considérée comme suffisante que si les autorités ont mis en place une structure policière et judiciaire capable et disposée à déceler, à poursuivre et à sanctionner les actes constituant une persécution ou une atteinte grave et lorsque le demandeur a accès à cette protection, la disponibilité d’une protection nationale exigeant par conséquent un examen de l’effectivité, de l’accessibilité et de l’adéquation d’une protection disponible dans le pays d’origine même si une plainte a pu être enregistrée, - ce qui inclut notamment la volonté et la capacité de la police, des tribunaux et des autres autorités du pays d’origine, à identifier, à poursuivre et à punir ceux qui sont à l’origine des persécutions ou des atteintes graves - cette exigence n’impose toutefois pour autant pas un taux de résolution et de sanction des infractions de l’ordre de 100 %, taux qui n’est pas non plus atteint dans les pays dotés de structures policière et judiciaire les plus efficaces, ni qu’elle n’impose nécessairement l’existence de structures et de moyens policiers et judiciaires identiques à ceux des pays occidentaux.

En effet, la notion de protection de la part du pays d’origine n’implique pas une sécurité physique absolue des habitants contre la commission de tout acte de violence, mais suppose des démarches de la part des autorités en place en vue de la poursuite et de la répression des 4 Jean-Yves Carlier, Qu’est-ce qu’un réfugié ?, Bruylant, 1998, p. 754.

20actes de violence commis, d’une efficacité suffisante pour maintenir un certain niveau de dissuasion.

Il y a, tout d’abord, lieu de relever que les faits mis en avant par le demandeur à l’appui de sa demande de protection internationale s’inscrivent exclusivement dans un cadre familial, Monsieur … déclarant, en effet, craindre des actes de vengeance de la part d’une famille de son village en raison du décès d’un de leur membre suite à une bagarre qui serait éclatée entre cette personne et le père du demandeur à cause de dégâts causés par des vaches appartenant à celui-

ci.

Or, il ressort du rapport d’entretien du 29 septembre 2021 que ni sa mère, ni son père, ni lui-même n’ont jamais dénoncé les agissements de la part des membres de cette famille à la police et qu’ils n’ont pas non plus cherché à obtenir une aide auprès d’autres institutions de son pays d’origine5. La soussignée relève à cet égard que si le dépôt d’une plainte n’est certes pas une condition légale, un demandeur de protection internationale ne saurait cependant, in abstracto, conclure à l’absence de protection s’il n’a pas tenté lui-même formellement d’obtenir une telle protection. Or, une telle demande de protection adressée aux autorités policières et judiciaires prend, en présence de menaces et d’actes d’intimidation, communément la forme d’une plainte. Ainsi, à défaut d’avoir déposé une plainte, le demandeur ne saurait reprocher aux autorités guinéennes compétentes une absence de protection contre les agissements de cette famille.

Le défaut de plainte est d’autant plus incompréhensible en l’espèce alors qu’il se dégage des explications du demandeur que la police est intervenue dans le cadre de la dispute entre son père et l’autre villageois et que celui-ci a été emprisonné pour les actes qu’il a commis, de sorte qu’il doit être admis, à défaut de tout élément probant contraire, que la police a fait son travail et qu’elle aurait également pu intervenir pour sanctionner les actes de vengeance de la part de la famille du défunt, dont notamment l’incendie de la maison du demandeur. Par ailleurs et si le demandeur devait estimer que la police n’aurait rien entrepris afin de le protéger, il lui aurait appartenu de rechercher la protection des autorités de son pays d’origine auprès d’un autre commissariat, voire d’instances supérieures susceptibles, ou d’autres institutions afin d’intervenir en sa faveur.

La conclusion retenue ci-avant ne saurait être ébranlée par l’affirmation non autrement circonstanciée du demandeur dans son recours suivant laquelle sa famille aurait depuis toujours subi des persécutions de la part des Malinkés dans leur village et qu’il « n’aurait servi à rien de porter plainte ». En effet, au-delà du fait que l’affirmation suivant laquelle ils auraient depuis toujours subi des persécutions de la part des Malinkés reste à l’état de pure allégation pour n’être appuyé par aucun incident concret, il ne se dégage par ailleurs ni du vécu personnel du demandeur ni d’un quelconque élément objectif et tangible versé en cause que la police guinéenne aurait refusé d’intervenir ou qu’elle ne pourrait pas protéger le demandeur et sa famille contre de tels agissements à cause de leur appartenance ethnique, étant encore relevé que le simple renvoi à cet égard dans le recours à un seul article de presse sans mise en relation avec la situation personnelle du demandeur et l’affirmation afférente suivant laquelle le code pénal ne serait pas appliqué en Guinée et que les Peuls seraient « laissés pour compte face aux Malinkés » sont largement insuffisants à cet égard.

5 Page 6/9 du rapport d’entretien.

21Dès lors, la soussignée est amenée à conclure que le demandeur n’a manifestement pas établi un défaut de protection de la part des autorités étatiques guinéennes, de sorte qu’au moins l’une des conditions d’octroi du statut de réfugié et du statut conféré par la protection subsidiaire ne se trouve manifestement pas remplie dans son chef.

En ce qui concerne enfin la situation sécuritaire existant en Guinée, il échet de constater que les deux articles de presse dont se prévaut en l’espèce le demandeur de manière générale et sans mise en relation avec sa situation personnelle ne sont, au stade de l’instruction de la présente instance, pas de nature à retenir que le seul fait d’appartenir à l’ethnie peule en Guinée doit, à lui seul, entraîner la reconnaissance du statut de réfugié, respectivement du statut conféré par la protection subsidiaire. Au vu de ce constat et dans la mesure où il a par ailleurs encore été retenu ci-avant qu’il n’est pas établi en l’espèce que le demandeur n’aurait pas pu ou ne pourrait pas bénéficier d’une protection adéquate de la part des autorités de son pays d’origine, c’est à bon droit que le ministre a considéré les faits invoqués à la base de sa demande de protection internationale comme étant dépourvus de pertinence.

Il suit des considérations qui précèdent que le recours du demandeur dans la mesure où il tend à la réformation de la décision du ministre d’analyser sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée est manifestement infondé, en ce sens que les moyens qu’il a présentés pour établir que les faits soulevés à la base de sa demande de protection internationale ne seraient pas dépourvus de pertinence, sont visiblement dénués de tout fondement.

Il s’ensuit que le recours en réformation contre la décision du ministre de statuer dans le cadre d’une procédure accélérée est à rejeter comme étant manifestement non fondé.

2) Quant au recours visant la décision du ministre portant refus d’une protection internationale Force est de rappeler que la soussignée vient ci-avant de retenir, dans le cadre de l’analyse de la décision de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, que le demandeur est resté en défaut de présenter des faits suffisamment pertinents pour prétendre à l’un des statuts conférés par la protection internationale, que ce soit au statut de réfugié ou à celui conféré par la protection subsidiaire.

Or, la soussignée, au niveau de la décision au fond du ministre de refuser la protection internationale, ne saurait que réitérer son analyse précédente en ce sens que c’est pour les mêmes motifs qu’il y a lieu de conclure, au vu des faits et moyens invoqués par le demandeur à l’appui de sa demande en obtention d’une protection internationale, dans le cadre de son audition respective, ainsi qu’au cours de la procédure contentieuse et des pièces produites en cause, que le demandeur ne remplit manifestement pas les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale.

Au vu des considérations qui précèdent, le recours contre la décision de refus d’un statut de protection internationale est également à déclarer comme manifestement infondé et le demandeur est à débouter de sa demande de protection internationale.

3) Quant au recours tendant à la réformation de la décision ministérielle portant ordre de quitter le territoire 22A cet égard, le demandeur sollicite la réformation de l’ordre de quitter le territoire en conséquence de la réformation de la décision portant refus de lui accorder une protection internationale.

Il ajoute que l’ordre de quitter le territoire serait encore contraire à l’article 129 de la loi modifiée du 29 août 2008 concernant la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-

après désignée par « la loi du 29 août 2008 », dans la mesure où un retour en Guinée impliquerait que sa vie ou sa liberté y seraient gravement menacées pour toutes les raisons évoquées ci-avant.

Il convient de relever qu’aux termes de l’article 34, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015, « une décision du ministre vaut décision de retour. […] ». En vertu de l’article 2, point q) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire ». Si le législateur n’a pas expressément précisé que la décision du ministre visée à l’article 34, paragraphe (2), précité, est une décision négative, il y a lieu d’admettre, sous peine de vider la disposition légale afférente de tout sens, que sont visées les décisions négatives du ministre. Il suit dès lors des dispositions qui précèdent que l’ordre de quitter est la conséquence automatique du refus de protection internationale.

Dans la mesure où la soussignée vient de retenir que le recours dirigé contre le refus d’une protection internationale est manifestement infondé et que, partant, c’est à juste titre que le ministre a rejeté la demande de protection internationale du demandeur, impliquant qu’il a à bon droit pu retenir que le retour de celui-ci dans son pays d’origine ne l’expose pas à des conséquences graves, il a également valablement pu assortir cette décision d’un ordre de quitter le territoire, sans violer l’article 129 de la loi du 29 août 2008.

Il s’ensuit que le recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire est à son tour à rejeter comme étant manifestement infondé.

Par ces motifs, Le juge, en remplacement du président de la troisième chambre du tribunal administratif, statuant contradictoirement ;

reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 22 février 2022 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre le refus d’une protection internationale et contre l’ordre de quitter le territoire ;

au fond, déclare le recours dirigé contre les trois décisions déférées manifestement infondé et en déboute ;

déboute le demandeur de sa demande de protection internationale ;

condamne le demandeur aux frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 8 avril 2022, par la soussignée, juge, en remplacement du président de la troisième chambre du tribunal administratif, en présence du greffier Marc Warken.

23 s.Marc Warken s.Alexandra Bochet Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 8 avril 2022 Le greffier du tribunal administratif 24


Synthèse
Numéro d'arrêt : 47162
Date de la décision : 08/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-04-08;47162 ?

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