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25/03/2022 | LUXEMBOURG | N°47109

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 mars 2022, 47109


Tribunal administratif N° 47109 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er mars 2022 Audience publique du 25 mars 2022 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Monsieur A, …, et par Madame B, …, contre des décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal, en présence de Madame D, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 47109 du rôle et déposée le 1er mars 2022 au greffe du tribunal administratif

par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats...

Tribunal administratif N° 47109 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er mars 2022 Audience publique du 25 mars 2022 Requête en institution d’un sursis à exécution introduite par Monsieur A, …, et par Madame B, …, contre des décisions du bourgmestre de la commune de Kopstal, en présence de Madame D, …, en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 47109 du rôle et déposée le 1er mars 2022 au greffe du tribunal administratif par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur A, demeurant à …, et de Madame B, demeurant à …, tendant à voir ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de l’autorisation de bâtir n° 2021/0058 délivrée par le bourgmestre de la commune de Kopstal en date du 29 avril 2021, telle que confirmée suite à un recours gracieux par décision du même bourgmestre en date du 30 novembre 2021, et autorisant Madame D, demeurant à …, à procéder à la construction d’une maison unifamiliale sur un terrain sis à L-8154 Bridel, 7, rue de Steinsel, inscrit au cadastre de la commune de Kopstal, section B de Bridel, sous les n°s 57/1746 et 57/1006, cette autorisation étant encore attaquée au fond par une requête en annulation introduite le même jour, portant le numéro 47104 du rôle ;

Vu l’avis urgent adressé le 11 mars 2022 par le greffe du tribunal administratif à Maître Anne-Laure JABIN, l’invitant à communiquer les exploits de signification des requêtes au fond et en référé ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Nadine TAPELLA, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 4 mars 2022, portant signification de ladite requête en institution d’un sursis à exécution à l’administration communale de Kopstal ainsi qu’à Madame D ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Steve HELMINGER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, pour la commune de Kopstal, du 8 mars 2022 ;

Vu la constitution d’avocat à la Cour de Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats de Luxembourg, pour Madame D, du 9 mars 2022 ;

Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Maître Anne-Laure JABIN, ainsi que Maître Steve HELMINGER et Maître Nicky STOFFEL entendus en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 16 et 21 mars 2022.

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Monsieur A expose être propriétaire de la maison sise à L-8154 Bridel, 1, rue de Steinsel, érigée sur la parcelle cadastrale inscrite au cadastre de la commune de Kopstal, section B de Bridel, sous le n° 57/1007, maison où il habite actuellement, tandis que Madame B est propriétaire de la maison sise à L-8151 Bridel, 28, rue de Schoenfels, érigée sur la parcelle inscrit au cadastre de la commune de Kopstal, section B de Bridel, sous le n° 55/2561, Madame B étant encore propriétaire des parcelles n°s 55/2562, 55/2563, 55/2564, 55/2565 et 55/2566 sises en enfilade derrière la parcelle n° 55/2561 abritant une maison d’habitation.

Les propriétés respectives de Monsieur A et de Madame B bordent immédiatement respectivement du côté gauche et du côté droit une série de parcelles numérotées à partir de la rue de Schoenfels 56/2525, 56/2526, 56/2527, 56/2528, 56/2530, 56/2529 et 56/2531, ces parcelles étant issues d’une opération de morcellement.

En date du 24 juillet 2020, le bourgmestre de la commune de Kopstal, ci-après « le bourgmestre », délivra des autorisations de bâtir, sur quatre des parcelles issues de ce morcellement.

Monsieur A et Madame B, ci-après « les consorts AB », firent introduire en date du 23 octobre 2020 un recours gracieux contre chacune de ces quatre autorisations de bâtir, lesquelles firent finalement l’objet, après que les bénéficiaires de ces autorisations aient pu faire valoir leurs observations, d’une décision de retrait en date du 28 janvier 2021 de la part du bourgmestre.

Les consorts AB prirent connaissance début mai 2021 de nouveaux certificats point rouge pour des autorisations de bâtir délivrées le 29 avril 2021 sur les mêmes parcelles par le bourgmestre ; une demande en communication des autorisations de bâtir resta toutefois sans réponse de la part de l’administration communale de Kopstal.

Les consorts AB, après prise de connaissance des autorisations et plans afférents à la maison communale, introduisirent par courrier du 28 juillet 2021 un recours gracieux contre les autorisations de bâtir délivrées, avec la précision que du fait des seules photographiques prises l’intégralité des moyens ne pouvait pas être présentée.

Par courrier du 30 novembre 2021, le bourgmestre décida toutefois de maintenir les autorisations de bâtir litigieuses pour les motifs suivants :

« Par la présente, je me permets de faire suite à mes courriers du 30 septembre 2021 vous informant de ma volonté de retirer les autorisations sous rubrique suite à un recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021 par Maître Anne-Laure JABIN, avocat à la Cour, au nom et pour compte de Monsieur A et Madame B.

En date du 15 octobre 2021, Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, a introduit deux courriers en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059.

En date du 18 octobre 2021, Maître Hervé HANSEN, avocat à la Cour, a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.

2 Par un courrier du 28 octobre 2021, l’Administration communale de Kopstal a donné quelques précisions quant aux propositions de révocation en question.

En date du 22 novembre 2021, Maître Hervé HANSEN a introduit un courrier en réponse pour compte des bénéficiaires des autorisations de construire numéros 2021/0055 et 2021/0056.

Après avoir analysé tous les moyens et arguments présentés, soit dans le recours gracieux du 29 juillet 2021, soit pour donner suite à la proposition de révocation des autorisations, je suis arrivé à la conclusion suivante :

Les cinq autorisations de construire en question se basent sur des autorisations de morcellement délivrées en 2018/2019 qui reprenaient exactement l’implantation des futures constructions.

Bénéficiaire d’une telle autorisation de morcellement était entre autres Madame B qui, à l’époque, ne s’opposait ni à sa propre autorisation de morcellement, ni à celles délivrées pour les parcelles adjacentes.

On peut donc retenir qu’il n’y avait aucun recours contre le projet urbanistique planifié sur l’ensemble des différentes parcelles de terrain, bien au contraire.

Or aujourd’hui, la même Madame B demande la révocation des autorisations de construire délivrées sur base des mêmes considérations que les autorisations de morcellement précitées.

Ensuite Monsieur A, autre signataire du recours gracieux du 29 juillet 2021, a bénéficié lors de la construction d’un immeuble sur la parcelle inscrite au cadastre sous le numéro 57/1007 d’une dérogation similaire quant aux reculs à celles demandées par les bénéficiaires des autorisations de construire litigieuses.

Afin d’éviter toute rupture d’égalité de traitement et notamment afin de se conformer au principe général de confiance légitime qui a été consacré tant par la jurisprudence communautaire en tant que principe du droit communautaire que par la jurisprudence nationale en tant que principe général du droit, il n’y a pas lieu de faire droit au recours gracieux introduit en date du 29 juillet 2021. Les autorisations n° 2021/0055, 2021/0056, 2021/0057, 2021/0058 et 2021/0059 du 8 juillet 2021 ne sont dès lors pas révoquées.

La présente décision est susceptible d’un recours devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de 3 mois à partir de la notification de la présente ».

Les consorts AB ont dès lors, par requête déposée le 1er mars 2022 et inscrite sous le numéro 47104, introduit un recours en annulation contre l’autorisation de construire délivrée à Madame D, telle que confirmée par la prédite décision du 30 novembre 2021. Par requête séparée déposée le même jour, inscrite sous le numéro 47109 du rôle, ils ont demandé à voir prononcer un sursis à exécution de l’autorisation de construire déférée en attendant la solution de leur recours au fond.

3 Les consorts AB font soutenir que l’exécution de ce permis de construire risquerait de leur causer un préjudice grave et définitif.

Il s’agirait d’un préjudice définitif, dans la mesure où les juridictions judiciaires refuseraient d’ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d’une autorisation administrative annulée par la suite.

Le préjudice serait encore grave, alors que l’autorisation porterait sur la construction d’une maison unifamiliale sur une parcelle non viabilisée et pour laquelle une voirie privée serait prévue, voirie de 140 mètres de longueur longeant toute la propriété de Monsieur A, de sorte que ce dernier se retrouverait « totalement encerclé », ladite voirie se retrouvant aussi, du moins en partie, aux bords de la propriété de Madame B. Or, par le fait de la création de cette voirie privée et de la construction litigieuse, ainsi que d’autres constructions, les consorts AB se retrouveraient confrontés au fait qu’à côté de leurs jardins respectifs, il existerait une voirie privée d’à peine 3,10 mètres de large, destinée à la circulation des véhicules se rendant notamment à la construction litigieuse, de sorte que leur tranquillité serait à jamais compromise.

Par ailleurs, il ne serait pas renseigné quelles seraient exactement les canalisations et autres infrastructures enfouies dans une telle voirie privée, qui resterait à titre de servitude de passage privée.

En termes de plaidoiries, les consorts AB exposent avoir été certes à l’époque favorable au morcellement initial, mais que les projets actuellement litigieux leur imposeraient indirectement, voire directement en ce qui concerne Madame B, propriétaire d’une parcelle morcelée, la construction de maisons jumelées en lieu et place des maisons isolées espérées, ces constructions ayant par ailleurs initialement dû être desservies par la prolongation de la rue des Genêts, et non par une voirie privée. Monsieur A explique pour sa part être encore inquiété par l’éventuelle pose d’une conduite de gaz directement le long de sa propriété.

Les consorts AB enfin se prévalent, toujours au titre de préjudice, du fait que la maison projetée accueillerait au moins un niveau en trop, ce qui créerait un préjudice supplémentaire.

Les consorts AB estiment encore que leur recours au fond aurait de sérieuses chances de succès de voir annuler le permis querellé et ils se prévalent en substance des moyens d’annulation suivants :

Ils soulèvent ainsi devant les juges du fond une violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après dénommé le « règlement grand-ducal du 8 juin 1979 », au motif que le bourgmestre aurait omis de les informer de ce projet de construction, alors pourtant qu’il ne pouvait pas ignorer leur opposition à celui-ci, ne serait-ce que du fait de de leur premier recours gracieux du 26 octobre 2020, aboutissant à un retrait des précédentes autorisations litigieuses le 28 janvier 2021, ainsi que du fait d’une réunion en présence de toutes les parties en date du 10 mars 2021.

Les requérants critiquent ensuite les moyens sur lesquels le bourgmestre s’est basé pour refuser de retirer l’autorisation de bâtir concernée, les consorts AB estimant que ces moyens seraient inopérants.

4 Dans ce contexte, ils font plaider que la construction litigieuse s’inscrirait dans une opération de création de 9 lots à bâtir et d’un lot de voirie, opération qui aurait dû faire l’objet d’un plan d’aménagement particulier selon l’article 108bis, paragraphe 2, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.

Or, conformément à l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004, aucun plan d’aménagement particulier ne pourrait être mis en procédure tant qu’une procédure de refonte générale du plan d’aménagement général de la commune de Kopstal n’aurait pas été initiée.

Ils excipent ensuite d’une violation de l’article 2.1.2.4. du PAG, lequel exigerait un recul postérieur d’au moins une fois et demie la hauteur à la corniche et au minimum de 8 mètres.

Comme la construction projetée devrait en principe être desservie par la rue de Steinsel, le recul postérieur devrait se trouver soit contre la parcelle n° 56/2531, soit contre la parcelle n° 57/1007, cette dernière hypothèse étant plus particulièrement étayée par le plan du niveau comprenant le garage et par le plan d’implantation ; or, dans ces deux hypothèses, le recul postérieur ne serait manifestement pas au moins supérieur à 8 mètres, mais plutôt de l’ordre de 4 à 5 mètres au maximum.

Les requérants relèvent encore qu’en l’espèce, les indications figurant sur les plans seraient inexistantes ou illisibles quant à la question de savoir quelle est la hauteur à la corniche, de sorte qu’ils contestent que la hauteur à la corniche renseignée soit correcte.

Ils affirment encore que le niveau du rez-de-chaussée serait erroné. Ils estiment à cet égard que l’architecte aurait renseigné un point de référence pour le niveau de la rue de Steinsel, niveau toutefois qui ne serait pas documenté par un quelconque relevé topographique, de sorte qu’il serait « contesté que le niveau renseigné soit le bon niveau ».

Les requérants contestent encore que le niveau renseigné pour correspondre à celui de la rue de Steinsel serait correct, alors que le plan de coupe indiquerait un prétendu niveau du sous-sol non complètement enterré, ce qui permettrait la réalisation d’un garage pour les deux emplacements de stationnement dans le sous-sol, de sorte que cela signifierait que le niveau du garage serait en réalité le niveau du rez-de-chaussée. Par ailleurs, il ressortirait encore du plan de coupe que le niveau accueillant le garage aurait la même hauteur sous plafond que les autres niveaux destinés à l’habitation, de sorte qu’il s’agirait d’un niveau plein, alors pourtant que l’article 2.2.2.1. du PAG imposerait un maximum de 2 niveaux pleins et un niveau sous combles, les requérants soutenant toutefois qu’en l’espèce il y aurait 3 niveaux pleins et un niveau sous combles.

Les consorts AB relèvent ensuite qu’il ressortirait des plans de coupe que manifestement la construction projetée aurait une toiture plate, alors que le PAG ne semblerait autoriser sur base de l’article 2.2.2.1. qu’un niveau sous combles et non un étage en retrait, de sorte qu’il y aurait violation de l’article 2.2.2.1..

De toute façon, même à considérer qu’il serait possible d’avoir un étage en retrait, il ressortirait toutefois des plans de coupe qu’il y aurait un mélange entre un étage à toiture plate et un étage sous combles à double pente.

5 Ils s’emparent également de l’article 2.2.2. du PAG quant au recul avant, ladite disposition imposant que « les constructions servant à l’habitation seront implantées dans une bande de 15m de profondeur, parallèle à l’alignement des rues et distante de 6 m de ce dernier ». Or, en l’espèce, il y aurait lieu de prendre en compte la rue de Steinsel, comme l’autorisation de bâtir le mentionnerait, de sorte qu’il n’y aurait pas de recul avant de 6 mètres.

Les requérants s’emparent de l’article 15.2. du PAG, disposant que « les marges de reculement postérieures et latérales seront à aménager en jardin ou en places de stationnement pour les besoins des habitants de la construction », pour soutenir que comme il ressortirait des plans que la marge de recul postérieure serait aménagée intégralement en servitude de passage afin de créer un accès pour la voirie privée et afin d’accueillir des canalisations pour l’évacuation des eaux usées, l’autorisation devrait encourir l’annulation.

Sur base de l’article 17.1. du PAG, lequel interdirait des superstructures se trouvant en toiture, les requérants, après avoir relevé qu’il ressortirait du plan de toiture « que manifestement des superstructures non expliquées se retrouvent en toiture », estiment que l’autorisation devrait encourir de ce fait l’annulation.

L’administration communale de Kopstal ainsi que Madame D concluent au rejet du recours au motif qu’aucune des conditions légales ne serait remplie en cause.

Ils contestent tant l’existence d’un intérêt à agir que celui d’un risque de préjudice grave et définitif dans le chef des requérants, en se référant aux antécédents du présent litige, et en particulier au morcellement effectué, lequel aurait jeté les bases des constructions actuellement litigieuses, et en particulier de leurs implantations, morcellement auquel Madame B aurait participé et qui aurait été accepté par Monsieur A, ce dernier étant apparemment intervenu pour imposer certaines modifications aux futures implantations des constructions actuellement litigieuses.

Madame D conteste en particulier tout intérêt à agir, respectivement tout préjudice dans le chef des deux requérants, dont les propriétés ne toucheraient même pas les parcelles n° 57/1006 et n° 57/1746 faisant l’objet de l’autorisation actuellement litigieuse et dont l’accès pourrait être directement assuré à partir de la rue de Steinsel.

En vertu de l’article 11 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

L’affaire au fond ayant été introduite le 1er mars 2022 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi du 21 juin 1999, l’affaire ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.

En ce qui concerne les moyens invoqués à l’appui du recours au fond, il convient de rappeler que le juge appelé à en apprécier le caractère sérieux ne saurait analyser et discuter les moyens invoqués à l’appui du recours au fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite des moyens présentés, et accorder le sursis, respectivement la mesure de 6 sauvegarde lorsqu’il paraît, en l’état de l’instruction, de nature à pouvoir entraîner l’annulation ou la réformation de la décision critiquée, étant rappelé que comme le sursis d’exécution, respectivement l’institution d’une mesure de sauvegarde doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’ils constituent une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.

Ainsi, le juge des référés est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le demandeur apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation ou la réformation de la décision critiquée, étant rappelé que comme le sursis d’exécution doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’il constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès. Il s’ensuit que, face à une situation où le caractère sérieux des moyens soulevés au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, le juge du référé ne peut pas admettre que les moyens en question sont suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire : en d’autres termes, les moyens doivent offrir une apparence de droit suffisante ou un degré de vraisemblance tel que l’on peut nourrir des doutes importants quant à la légalité de l’acte1.

Si une certaine doctrine estime certes qu’il ne saurait être admis que lorsque l’évaluation du caractère fondé des moyens proposés à l’appui d’une demande de suspension ou d’institution d’une mesure de sauvegarde nécessite un examen poussé non différent de celui auquel il devra être procédé dans le cadre de la procédure au fond, le juge du référé ne pourrait pas admettre que lesdits moyens sont sérieux, puisqu’un tel raisonnement aboutirait à exclure d’office du champ des référés tout recours qui susciterait des questions juridiques complexes, ce qui viderait la protection juridictionnelle d’une partie de sa substance, cette position méconnaît toutefois que la procédure de référé, fondée sur un examen prima facie, n’est pas conçue pour établir la réalité de faits complexes et hautement controversés : en effet, le juge des référés ne dispose pas des moyens nécessaires pour procéder à de tels examens, ne bénéficiant d’ailleurs pas de l’éclairage dont bénéficie le juge du fond à travers les mémoires en réponse, en réplique et en duplique et, dans de nombreux cas, il ne serait que difficilement à même d’y parvenir en temps utile. Ainsi, l’office même du juge des référés l’empêche d’exercer un contrôle semblable à celui du juge du fond qui aura un pouvoir d’investigation plus important : le juge des référés ne doit ainsi pas se fonder sur des appréciations réservées au juge du fond.

1 Trib. adm (prés.) 14 avril 2016, n° 37733, Pas. adm. 2021, V° Procédure contentieuse, n° 611, et les autres références y citées.

7 Partant, si une matière technique ou juridique complexe n’échappe évidemment pas automatiquement et par définition à la compétence d’un juge du provisoire, alors que même une question complexe peut susciter une réponse évidente ou directe - par exemple lorsqu’il existe un précédent jurisprudentiel aisément transposable ou une illégalité ou irrégularité manifeste, dont le caractère manifeste résulte soit de la décision déférée per se, soit des explications convaincantes du requérant, de sorte que le caractère sérieux dépend dès lors également fondamentalement de la qualité de la démonstration des droits menacés2, une matière technique ou juridique complexe se heurte toutefois à davantage d’obstacles pour justifier l’intervention du juge du provisoire, appelé seulement retenir comme sérieux les moyens s’imposant prima facie et ne requérant pas une analyse poussée.

Le soussigné tient encore à rappeler que, l’institution d’une mesure provisoire devant rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

Ainsi, le Conseil d’Etat français a rappelé3 que le caractère exécutoire des actes administratifs est « la règle fondamentale du droit public et que le sursis à exécution n’est pour le juge qu’une simple faculté, alors même qu’existent des moyens sérieux d’annulation et un préjudice difficilement réparable ». Pour cette raison, le sursis reste pour la Haute juridiction française « anormal, puisqu’il entrave le pouvoir de création juridique des autorités administratives et jette la suspicion sur un acte qui bénéficie d’une présomption de légalité »4.

Le juge du référé appréciera partant si un moyen est propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision litigieuse, et ce eu égard à son office.

Il prendra donc en compte la situation juridique en s’en tenant à l’évidence et sans trancher des questions de droit qui ne l’ont pas encore été. L’évidence se définit communément comme la « qualité de ce qui emporte l’assentiment immédiat de l’esprit en s’imposant à lui de façon claire et distincte »5. Elle est caractérisée par son immédiateté, parce qu’elle ne nécessite aucune démonstration ni aucun raisonnement préalable pour être regardée comme vraie6 : l’évidence est partant une qualité dont est paré le fait ou le raisonnement qui, portant en lui révélation de son existence ou de son bien-fondé, vaut preuve de lui-même et dispense d’autre preuve ou d’autre démonstration7.

Le juge du référé ne peut ainsi en aucun cas tirer d’enseignements et encore moins de conclusions définitives lorsqu’il analyse la condition du caractère sérieux car il ne devra procéder uniquement qu’à un « premier examen » sans anticiper sur l’appréciation, sur le contrôle qu’effectuera le juge du fond. Cet examen se veut sommaire et basé sur les seuls éléments en possession de ce juge ou qui peuvent lui être apportés lors de l’audience. Il doit, en quelque sorte, seulement s’en référer à son intuition provenant de la lecture du dossier, tout en 2 Trib. adm. (prés.) 22 mars 2019, n° 42434 ; trib. adm. (prés.) 5 avril 2019, n° 42557 ; trib. adm. (prés.) 14 juin 2019, n° 43039.

3 CE fr., 2 juillet 1982, Huglo, Rec. p. 257.

4 Morand-Deviller Jacqueline, « Le contrôle de l’administration : la spécificité des méthodes du juge administratif et du juge judiciaire », in Dupuis Georges (Dir.), Le contrôle juridictionnel de l’administration - Bilan critique, Paris : Économica, 1991, p. 190 5 Trésor de la langue française.

6 Le Littré la définit ainsi comme « notion si parfaite d’une vérité qu’elle n’a pas besoin d’autre preuve ».

7 G. Cornu, Vocabulaire juridique, PUF, 8e éd., 2000.

8 gardant à l’esprit que le juge du fond pourra toujours revenir sur la mesure prononcée en effectuant un contrôle approfondi du dossier.

Ainsi, un moyen est sérieux lorsqu’il laisse présager, aux termes d’une analyse sommaire, une probable réformation ou annulation, sans pour autant exiger du juge du provisoire qu’il ait une certitude sur le bien-fondé des moyens invoqués : un moyen sérieux fait pressentir une annulation ou réformation, tandis que l’examen du caractère sérieux d’un tel moyen se caractérise par son caractère prima facie. Le juge du référé procède ainsi à une première analyse des moyens et retient celui qui éveille chez lui un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

Ce caractère de sérieux peut résulter d’une situation de fait ou de droit manifeste (un élément matériel important a été ignoré, une disposition légale n’a été manifestement pas appliquée) ou encore d’une jurisprudence à tout le moins solidement établie ; le caractère sérieux dépend dès lors également fondamentalement de la qualité de la démonstration des droits menacés : le simple fait de transcrire l’argumentation développée devant les juges du fond, respectivement de s’y référer peut, face à des matières ou questions complexes, s’avérer de ce point de vue insuffisant.

C’est pourquoi le juge du provisoire doit prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l’issue du litige - que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec - n’est plus affectée d’un aléa.

Ne présente en revanche pas un caractère sérieux suffisant, un moyen soulevant un simple doute quant à l’issue du recours, un moyen basé sur une jurisprudence fluctuante ou minoritaire ou lorsqu’il n’existe pas de jurisprudence qui permettrait de répondre aisément aux questions devant être tranchées en l’espèce par le jugement à rendre ultérieurement sur le fond, surtout lorsqu’il s’agit de questions de principe inédites qui ne sauraient être tranchées, pour la première fois, par le juge des référés, mais requièrent un examen approfondi dans le cadre de la procédure principale : le juge du référé est réellement le juge de l’évidence car il est cantonné à une position, sur ce problème, d’archiviste se contentant de reprendre à son compte une position adoptée par une autre juridiction8, tout comme il est réduit à un office de simple spectateur réduit au constat de l’existence d’un moyen propre à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision9.

L’office du juge des référés s’avère limité dans sa recherche du doute sérieux et ne se détermine qu’en l’état de la jurisprudence10 ; il ne lui appartient pas de dégager de nouveaux principes généraux du droit11, ni même de se prononcer dans un sens contraire à la jurisprudence établie12.

8 J. Piasecki, L’office du juge administratif des référés : Entre mutations et continuité jurisprudentielle. Droit, Université du Sud Toulon Var, 2008, n° 337, p.197.

9 Idem, n°312, p.181.

10 CE fr., 19 février 2003, Cave coopérative Les remparts, n°251495.

11 CE fr., ord. réf., 21 octobre 2005, Association Aides et autres, n°285577 12 Pour une solution implicite : CE fr., 9 décembre 2005, Ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer c/ Vidot, Rec. p. 704 et 941 9 Si la solution du problème conduit le juge des référés à une appréciation juridique motivée qui fait la part entre la thèse de l’un et celle de l’autre, il excède ses pouvoirs dans la mesure où il est obligé de discuter juridiquement pour écarter l’une de ces thèses qui est donc forcément sérieuse. Lorsque le juge des référés, pour repousser une contestation, est obligé de bâtir un raisonnement juridique que ne dénierait pas un juge du fond, il va au-delà de ses pouvoirs13.

Il prendra donc en compte la situation juridique en s’en tenant à l’évidence et sans trancher des questions de droit qui ne l’ont pas encore été.

En l’espèce, en ce qui concerne l’invocation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, aux termes duquel, « lorsqu’une décision administrative est susceptible d’affecter les droits et intérêts de tierces personnes, l´autorité administrative doit lui donner une publicité adéquate mettant les tiers en mesure de faire valoir leurs moyens. Dans la mesure du possible, l´autorité administrative doit rendre publique l´ouverture de la procédure aboutissant à une telle décision. Les personnes intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs observations. La décision définitive doit être portée par tous moyens appropriés à la connaissance des personnes qui ont présenté des observations », dans la mesure où le moyen des parties requérantes tend à se prévaloir d’un défaut d’information préalable à la prise de l’autorisation de bâtir déférée, il convient de relever que selon la jurisprudence des juges du fond14 l’article 5 du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 n’impose à cet égard pas une obligation générale et stricte aux autorités administratives, mais il leur impose seulement d’informer les tiers intéressés « dans la mesure du possible ». Or, il résulte à cet égard des travaux parlementaires ayant abouti à la loi du 19 juillet 2004, tels que cités par les juges du fond, que le législateur a explicitement exclu l’obligation de procéder antérieurement à une information de toutes les personnes intéressées, au motif qu’« une notification individuelle des personnes intéressées n’étant pas possible pour des raisons pratiques, liées notamment à l’impossibilité d’identifier ex ante toutes les personnes susceptibles d’être intéressées »15, de sorte à ne retenir a priori en matière d’urbanisme que l’obligation d’une information ex post par la voie de l’affichage16, ce principe n’étant battu en brèche que lorsque des personnes effectivement intéressées ont manifesté préalablement et valablement leur intérêt à être informées d’un projet, respectivement lorsque l’administration concernée ne pouvait pas raisonnablement ignorer l’intérêt de ces tiers à être informés du sort réservé à un projet donné17.

Par ailleurs, toujours selon la même jurisprudence, il n’y aurait pas lieu de prononcer automatiquement l’annulation d’une décision prise sans l’audition de l’administré intéressé mais en vertu d’une compétence liée, comme notamment et a priori en matière d’urbanisme, une telle annulation étant purement platonique en ses effets, l’administration ne pouvant en effet, compte tenu de sa compétence liée, que prendre la même décision à l’issue de l’audition de l’intéressé18. En effet, d’après la jurisprudence et tel que constaté ci-dessus, la finalité 13 Y. Strickler, Le juge des référés, juge du provisoire, thèse Strasbourg, 1993, p. 96 et 97.

14 Voir notamment trib. adm. 18 mai 2015, n° 34724, confirmé par arrêt du 17 décembre 2015, n° 36487C, ainsi que trib. adm. 18 mai 2015, n° 34275, confirmé par arrêt du 17 décembre 2015, n° 36488C 15 Voir Projet de loi concernant le développement urbain et l’aménagement communal, doc. parl. 4486-3, p. 65 et 66.

16 Trib. adm. 7 juillet 2008, n° 23654, confirmé par arrêt du 29 janvier 2009, n° 24748C, Pas. adm. 2021, V° Urbanisme, n° 810 et autres références.

17 Trib. adm. prés. 9 novembre 2015, n° 37082 ; trib. adm. 14 juillet 2020, n° 43070, Pas. adm. 2021, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 166.

18 Voir Cour adm. 6 mars 2008, n° 23073C, Pas. adm. 2021, V° Procédure administrative non contentieuse, n° 125.

10 première d’une autorisation de construire consiste à certifier qu’un projet est conforme aux règles d’urbanisme applicables et par principe le propriétaire peut faire tout ce qui ne lui est pas formellement interdit par une disposition légale ou réglementaire. Ainsi, la conformité de la demande d’autorisation par rapport aux dispositions légales ou réglementaires existantes entraîne en principe dans le chef de l’administration l’obligation de délivrer le permis sollicité, sous peine de commettre un abus respectivement un excès de pouvoir19.

Plus précisément, la sanction de l’annulation de l’inobservation des exigences de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ne saurait être prononcée que si, du fait de cette inobservation, les tiers ont subi un préjudice.

Une absence de préjudice est donnée si ceux-ci ont pu exposer l’ensemble de leurs doléances et démontrer à suffisance le contenu des propositions concrètes tendant à voir prendre une décision différente de celle critiquée.

Or, en l’espèce, force est de constater que les décisions actuellement critiquées ont été précédées de nombreuses discussions entre les actuels requérants, l’administration communale et les différents actuels bénéficiaires d’autorisations de bâtir.

Il convient en particulier de relever que les requérants avaient introduit en date du 23 octobre 2020 un recours gracieux contre les autorisations de bâtir initiales, recours gracieux qui fut fructueux dans la mesure où le bourgmestre retira ces autorisations par décision du 28 janvier 2021. Suite à une réunion entre toutes les parties en date du 10 mars 2021, le bourgmestre délivra le 29 avril 2021 de nouvelles autorisations de construire, lesquelles firent à nouveau en date du 28 juillet 2021 l’objet d’un recours gracieux de la part des requérants, recours gracieux auquel le bourgmestre répondit en date du 30 novembre 2021.

Il appert dès lors que les requérants ont été largement, même si infructueusement, associés à l’élaboration des autorisations de bâtir actuellement litigieuses et ont pu faire valoir leurs observations : le soussigné ne saurait dès lors au provisoire et au terme d’une analyse nécessairement sommaire constater de violation de la substance de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, de sorte que ce moyen est à rejeter à ce stade pour ne pas être suffisamment sérieux.

En ce qui concerne ensuite la critique des requérants relative aux moyens leurs opposés par le bourgmestre afin de justifier son refus de retrait des différentes autorisations de bâtir litigieuses et en particulier de celle déférée par le présent recours, il convient à titre liminaire de retenir que la participation, active ou passive, des actuels requérants à l’opération de morcellement initiale, ne semble à première vue pas être de nature à légitimer les permis de bâtir actuellement litigieux, l’opération de morcellement - à supposer celle-ci légale - n’étant pas de nature à imposer juridiquement l’implantation de bâtiments, voire le gabarit de constructions, mais s’analyse selon la jurisprudence en la division foncière d’une ou de plusieurs parcelles en plusieurs nouvelles parcelles en vue de créer des places à bâtir20.

En ce qui concerne la légalité de cette opération, même si cette question n’est actuellement soumise ni au soussigné, nu aux juges du fond, il convient toutefois d’attirer l’attention de l’administration communale sur l’arrêt de la Cour administrative, concernant 19 Voir en ce sens : Ph. VANDEN BORRE, « Les permis de bâtir, de lotir, les certificats d’urbanisme et les sanctions », in : Le droit de la construction et de l’urbanisme, Ed. du jeune Barreau, Bruxelles, 1976, p.219.

20 Trib. adm. 13 octobre 2014, n° 32991, Pas. adm. 2021, V° Urbanisme, n° 612, et les autres références y citées.

11 précisément la commune de Kopstal, du 30 avril 2013, n° 31809C, dont il résulte explicitement que l’article 53.2 de la partie écrite du plan d’aménagement général de la commune de Kopstal, ci-après « le PAG », qui dispose que lorsqu’un terrain aménagé constructible, bâti ou non, est morcelé ou remorcelé, le propriétaire devra solliciter une autorisation de morcellement, pose effectivement comme condition qu’il s’agisse d’un terrain aménagé et constructible21 pour qu’une autorisation de morcellement puisse être utilement sollicitée par son propriétaire : or, il appert que l’opération de morcellement dont les adversaires des consorts BA entendent actuellement se prévaloir visait essentiellement des terrains ni aménagés, ni directement constructibles.

Il résulte par ailleurs du même arrêt, que l’administration communale ne saurait ignorer, que « le fait pour un propriétaire de terrains d’introduire une demande de morcellement suivie de plusieurs demandes d’autorisation de construire ne saurait dispenser celui-ci de procéder à l’élaboration préalable d’un PAP, si les conditions réglementaires et/ou légales requises pour l’élaboration obligatoire d’un tel PAP sont remplies dans son chef, les conditions d’établissement de pareil PAP impliquant pour des projets de constructions d’une certaine envergure qu’une autorisation de morcellement a été précédée de l’établissement requis d’un PAP ».

Cette dernière citation rejoint directement le moyen sous analyse des requérants, lesquels, en substance, relèvent que la construction litigieuse s’inscrirait dans une opération de création totale de 9 lots à bâtir, dont 5 font actuellement l’objet d’un recours, et d’un lot de voirie, opération qui aurait dû faire l’objet d’un plan d’aménagement particulier selon l’article 108bis, paragraphe 2, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, mais que conformément à l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004, aucun plan d’aménagement particulier ne pouvait être mis en procédure tant qu’une procédure de refonte générale du plan d’aménagement général de la commune de Kopstal n’aurait pas été initiée, le litismandataire des requérants ayant encore souligné lors de l’audience des plaidoiries que l’impossibilité momentanée de procéder à un plan d’aménagement particulier sur le territoire de la commune de Kopstal constituerait une sanction pour la non-

mise en procédure de la refonte globale du plan d’aménagement général de ladite commune, sanction que le bourgmestre aurait ainsi contournée, pour éviter une perte de temps, en émettant les différentes autorisations de bâtir actuellement litigieuses.

Le soussigné relève à ce propos qu’il résulte de l’article 108bis, paragraphe 2, de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, ci-après « la loi du 19 juillet 2004 », que « Dans le cadre de la mise en œuvre du présent article, l’établissement d’un plan d’aménagement particulier dont le contenu des parties graphique et écrite correspond à celui du plan d’aménagement particulier „nouveau quartier“ est obligatoire dans les zones définies au plan d’aménagement général comme zones soumises à l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier et en cas de développement de lotissements de terrains ou de création de logements sur un ou plusieurs terrains non viabilisés22, conformément à l’article 23, alinéa 2 », la notion de « terrain viabilisé » s’entendant selon l’article 23, alinéa 2 de la même loi comme « la réalisation des voies publiques, l’installation des réseaux de télécommunication, ainsi que des réseaux d’approvisionnement en eau potable et en énergie, des réseaux d’évacuation des eaux résiduaires et pluviales, de l’éclairage, de l’aménagement des espaces collectifs, des aires de jeux et de verdure ainsi que des plantations.

».

21 Souligné par le tribunal.

22 Souligné par le tribunal.

12 Toutefois, au-delà de ces considérations théoriques affectant potentiellement l’opération de morcellement et, en aval de celle-ci, les différentes autorisations de bâtir, il appert toutefois en l’espèce de l’examen du dossier que les parcelles n° 57/1006 et 57/1746 devant accueillir la construction litigieuse constituaient à première vue, et ce contrairement aux autres parcelles issues de l’opération de morcellement, un « terrain viabilisé », lesdites parcelles, devant accueillir la construction autorisée par l’autorisation de bâtir n° 2021/0058, n’étant à première vue pas issues de l’opération de morcellement - ce qui énerve l’argumentaire du bourgmestre -

tout en étant directement accessibles et desservies par la rue de Steinsel.

Les considérations des parties requérantes relatives au non-respect des articles 108 et 108bis, paragraphe 2, de la loi du 19 juillet 2004 ne sont dès lors, compte tenu de la situation particulière des parcelles visées, non pertinentes, ces parcelles pouvant à première vue faire isolément l’objet d’une construction sans viabilisation supplémentaire et sans recours préalable à un plan d’aménagement particulier, encore que se pose la question de leur constructibilité dans le cadre du projet immobilier faisant actuellement l’objet de plusieurs recours, prévoyant concrètement, suite au prédit morcellement, la réalisation de cinq maisons différentes desservies par une, voire deux voiries privées, projet qui a priori aurait requis l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier conformément à l’article 108bis, paragraphe 2, de la loi du 19 juillet 2004, cité ci-avant, plan d’aménagement particulier toutefois actuellement non réalisable sur le territoire de la commune de Kopstal en vertu de l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004 : de ce point de vue, une interrogation subsiste quant à la légalité de l’autorisation déférée prise dans le contexte du projet immobilier global, sans toutefois que cette interrogation ne présente, à ce stade, un caractère suffisamment sérieux justifiant à elle seule le sursis à exécution sollicité.

Les requérants excipent ensuite d’une violation de l’article 2.1.2.4. (sic) du PAG, lequel exigerait un recul postérieur d’au moins une fois et demie la hauteur à la corniche et au minimum de 8 mètres.

Comme la construction litigieuse serait desservie par la rue de Steinsel, le recul postérieur se retrouverait soit contre la parcelle n° 56/2531, soit contre la parcelle n° 57/1007, cette dernière hypothèse étant plus particulièrement étayée par le plan du niveau comprenant le garage et par le plan d’implantation ; or, dans ces deux hypothèses, le recul postérieur ne serait manifestement pas au moins supérieur à 8 mètres, mais plutôt de l’ordre de 4 à 5 mètres au maximum.

Les requérants relèvent encore qu’en l’espèce les indications figurant sur les plans seraient inexistantes/illisibles quant à la question de savoir quelle est la hauteur à la corniche, de sorte qu’ils contestent que la hauteur à la corniche renseignée soit correcte.

Conformément à l’article 2.2.2.4. du PAG (et non comme erronément indiqué 2.1.2.4, disposition visant la zone commerciale), le recul des constructions sur la limite postérieure de la parcelle sera égal ou supérieur à une fois et demie la hauteur à la corniche, mais au moins de 8 mètres.

Force est à cet égard de constater, au terme d’une analyse sommaire des plans faisant partie de l’autorisation de construire, que si l’auteur de ces plans s’est gardé d’indiquer le recul postérieur, c’est-à-dire le recul à l’arrière de la construction projetée, desservie par la rue de Steinsel, il a en revanche indiqué une distance de 8 mètres par rapport à la construction projetée 13 à son arrière en seconde position, cette distance de 8 mètres étant divisée par la limite de la parcelle : il en résulte que nécessairement, la distance entre la construction telle qu’autorisée et la limite postérieure de la parcelle est sensiblement inférieure aux 8 mètres requis et plutôt, tel que plaidé par les requérants, de l’ordre de quelques 4 mètres, de sorte qu’il y aurait à première vue violation de l’article 2.2.2.4. du PAG.

Dans le même ordre d’idée, les requérants s’emparent encore de l’article 15.2 du PAG, disposant que « les marges de reculement postérieures et latérales seront à aménager en jardin ou en places de stationnement pour les besoins des habitants de la construction », pour soutenir que comme il ressortirait des plans que la marge de recul « postérieure » (en fait la marge de recul latérale) serait aménagée intégralement en servitude de passage afin de créer un accès manifestement pour la voirie privée desservant la construction projetée en seconde position, et afin d’accueillir des canalisations pour l’évacuation des eaux usées, l’autorisation devrait encourir l’annulation.

Il résulte à cet égard du plan d’implantation faisant partie de l’autorisation de bâtir querellée que la construction projetée accusera un recul latéral gauche oscillant entre 4,81 et 4,74 mètres, recul destiné à être couvert par une servitude de passage et une voie privée censées desservir la construction projetée en seconde position à l’arrière de la maison faisant l’objet de l’autorisation sous analyse, voie à première vue intégralement scellée, tandis que le recul latéral droit semble être réduit à environ 1 mètre, alors que conformément à l’article 2.2.2.4. du PAG il devrait être au minimum de 4 mètres.

La réalisation d’une voirie au profit d’un autre immeuble dans le recul latéral ne saurait a priori être considérée comme un jardin ou des places de stationnement aménagées « pour les besoins des habitants de la construction », de sorte que le moyen des requérants tiré d’une violation de l’article 15.2 du PAG paraît également sérieux.

Tel que résultant de l’audience des plaidoiries, l’administration communale entend toutefois justifier les reculs autorisés au vu de l’article 2.2.5, intitulé « Dérogations spéciales », dont il résulte que le bourgmestre peut accorder des dérogations notamment aux reculs règlementaires pour des « motifs graves », à savoir notamment des problèmes découlant de la topographie particulière des lieux ou d’un alignement préexistant dans un quartier d’habitation, la nécessité de raccorder esthétiquement une nouvelle construction à des constructions mitoyennes récentes ou encore le fait que des constructions voisines récentes aient rendu impropre la construction sur une parcelle non construite devenue place à bâtir à la suite d’une autorisation de lotissement ou de morcellement antérieure au présent projet d’aménagement.

Or, il n’appert pas qu’en l’espèce un tel « motif grave » justifie la dérogation apparemment accordée, celle-ci ne se justifiant en l’état du dossier ni par un alignement préexistant, ni par un raccord esthétique avec une construction mitoyenne. Par ailleurs, il résulte de la jurisprudence que l’article 2.2.5. du PAG ne prévoit encore de possibilité de déroger aux reculs qu’en faveur d’une parcelle non construite qui a été rendue impropre par des constructions voisines suite à un plan de lotissement ou de morcellement adopté avant l’entrée en vigueur du plan d’aménagement général23, circonstance à première vue non donnée en l’espèce.

23 Trib. adm. 7 mai 2012, n° 27901.

14 Il s’ensuit qu’en l’état actuel d’instruction du dossier et aux termes d’un examen nécessairement sommaire du projet, ce dernier soulève bon nombre de doutes sérieux quant à sa légalité, de sorte qu’il est fort probable que les juges du fond procèderont à l’annulation de l’autorisation de bâtir leur déférée, sans qu’il ne soit nécessaire de procéder à un examen plus avant des autres moyens avancés par les requérants, étant toutefois souligné que comme la question du respect des reculs, imposant une autre implantation et une surface au sol plus réduite, a nécessairement une incidence directe sur le gabarit de la construction projetée et sur sa hauteur, la hauteur actuelle de la construction doit également être considérée comme sujette à caution, et ce indépendamment du moyen afférent précis des requérants.

Il convient ensuite de rappeler que la demande en obtention d’une mesure provisoire a pour objet d’empêcher, temporairement, la survenance d’un préjudice grave et définitif ; les effets de la suspension étant d’interdire à l’auteur de l’acte de poursuivre l’exécution de la décision suspendue. Par ailleurs, comme la procédure en obtention d’une mesure provisoire doit rester une procédure exceptionnelle, puisqu’elle constitue une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

Plus particulièrement, lorsque la mesure sollicitée, telle qu’en l’espèce l’arrêt des travaux du projet immobilier litigieux, constitue une mesure grave, susceptible d’avoir des conséquences financières et économiques importantes pour le bénéficiaire de l’autorisation querellée et d’engager, le cas échéant, la responsabilité du magistrat appelé à prendre une telle mesure, ce dernier est en droit d’attendre que le requérant prenne explicitement position par rapport aux deux conditions prévues par la loi et, en particulier, convainque le juge du provisoire de la nécessité d’ordonner la mesure sollicitée afin d’empêcher précisément la survenance d’un dommage grave et irréversible dans son chef.

Il suit partant de ce qui précède que le préjudice grave et définitif est à apprécier par rapport aux travaux envisagés, en ce que ceux-ci sont de nature à nuire au requérant. En effet, dans ce contexte, il importe de vérifier en quoi la situation de voisin se trouve aggravée par un quelconque élément de l’autorisation de construire critiquée de sorte à l’exposer à un risque de préjudice grave, c’est-à-dire dépassant par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société ni comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques, et plus particulièrement dans quelle mesure le projet litigieux porterait une atteinte grave et définitive, ou du moins difficilement réparable, aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de la propre propriété du requérant, étant toutefois souligné que la seule situation de voisin, même direct, n’implique dès lors pas, ipso facto, automatiquement, l’existence d’un préjudice grave et définitif24. En effet, si la reconnaissance d’un risque de préjudice grave et définitif dans le chef d’un requérant implique nécessairement l’existence dans son chef d’un intérêt à agir, l’inverse n’est pas vrai puisqu’un administré peut disposer d’un intérêt à agir à voir contrôler la légalité d’un acte administratif lui faisant grief, sans toutefois que ce grief ne soit grave et irréversible.

En l’espèce, s’il est certes vrai que la construction projetée n’est pas de nature à engendrer un quelconque préjudice dans le chef de Madame B, dont la propriété est suffisamment distante des parcelles n° 57/1006 et 57/1746 pour ne pas souffrir d’une quelconque façon notable de la construction projetée, laquelle étant encore desservie par une autre rue - la rue de Steinsel - que celle desservant la propriété de Madame B, un tel constat est 24 Voir trib. adm. prés. 18 mars 2019, n° 42408.

15 toutefois sans incidence sur l’issue du recours, alors qu’il est sans intérêt pour le juge saisi d’une requête collective à l’égard de la même décision administrative de rechercher si tous les requérants justifient d’un préjudice les habilitant à agir pour l’hypothèse ou plusieurs voire un demandeur rempli cette condition25.

Or, à cet égard, il est constant en cause que Monsieur A sera le voisin immédiat de la construction projetée sur les parcelles n° 57/1006 et 57/1746, tandis que sa propriété, aménagée en cet endroit en jardin privatif, sera longée par la voie privée projetée dans le recul latéral des parcelles n° 57/1006 et 57/1746, de sorte que la réalisation de la construction telle que projetée, sur base d’une implantation à première vue illégale, d’une hauteur sans doute erronée et comprenant une voie privée destinée à accueillir les voitures desservant une autre construction, projetée en seconde position par rapport à la rue de Steinsel, peut être considérée comme générant potentiellement des nuisances dépassant manifestement les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société.

Par ailleurs, au vu de la jurisprudence des juridictions judiciaires qui refusent d’ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d’une autorisation administrative annulée dans la suite26, le préjudice allégué serait encore définitif au cas où la construction serait achevée sous le couvert de l’autorisation attaquée, alors même qu’elle serait annulée, puisque le caractère définitif d’un préjudice est établi dès lors que le succès de la demande au fond, c’est-à-dire un jugement d’annulation ou de réformation, ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal : en d’autres termes, l’existence d’un préjudice définitif, dans le sens d’un préjudice pas ou difficilement réparable, est établie et retenue comme telle que si le risque allégué est réel et n’est pas seulement aléatoire et que s’il résulte des circonstances concrètes de fait exposées par le requérant que l’exécution de la décision attaquée risque de provoquer des effets irréversibles, qui ne pourraient être annihilés en cas d’annulation ultérieure.

Le soussigné relève encore que les requérants situent le risque de préjudice pressenti au niveau de l’ensemble du projet immobilier, comprenant, outre la réalisation de cinq maisons distinctes, la création d’une, voire de deux voiries privatives, dont la réalisation, outre de compromettre la future urbanisation du site - les requérants ayant notamment relevé que les implantations choisies par les bénéficiaires des différentes autorisations de bâtir imposeraient aux autres propriétaires, dont Madame B, en partie la réalisation de maisons jumelées, voire en bande, au lieu de maisons isolées, tout comme la création de la voirie privative autoriserait la construction des maison en deuxième, troisième voire quatrième position et entrainerait la circulation de voitures dans des marges de reculement et dans un secteur accueillant actuellement des jardins privatifs.

Comme il est constant en cause que le soussigné ne s’est procéduralement pas vu déférer le projet en sa globalité, mais à travers la requête sous analyse, la seule autorisation de bâtir n° 2021/0058, il devrait théoriquement se limiter à l’analyse effectuée ci-dessus de l’existence d’un préjudice grave et définitif à la seule aune de l’objet de cette autorisation de bâtir isolée.

Or, ce faisant, en limitant l’analyse au seul prisme de l’autorisation de bâtir déférée, le soussigné accorderait une prime à l’approche de l’administration communale ayant consisté, en lieu et place de l’élaboration d’un projet global tel qu’un plan d’aménagement particulier, à saucissonner ledit projet en plusieurs autorisations distinctes, de sorte à lui permettre de dénier 25 Voir en ce sens et par analogie Cour adm. 13 janvier 2009, n° 24501C, Pas. adm. 2021, Procédure contentieuse, n° 26.

26 Voir notamment Cour d’appel 30 juin 1993, n° 13662 du rôle ; 11 janvier 1995, n° 15963 du rôle.

16 aux intéressés toute discussion et recours relatifs au projet immobilier en sa globalité, alors que la réalisation d’un plan d’aménagement particulier aurait au contraire permis aux requérants tant de discuter ledit projet au niveau pré-contentieux - rendant superflue toute discussion quant au respect de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 - qu’au niveau contentieux en l’autorisant à introduire un recours à l’encontre du projet global.

Dès lors, compte tenu de ces circonstances particulières et sous peine d’accepter de réduire le droit à un recours effectif des requérants, le soussigné admet encore pour les besoins du présent recours la prise en compte des répercussions globales dudit projet, dont l’autorisation de construire litigieuse ne constitue qu’une émanation.

Or, à cet égard, le soussigné retient que le projet en sa globalité est de nature à impacter de manière importante sur la qualité de vie des requérants, propriétaires limitrophes, et ce tant de manière directe, à travers la réalisation des constructions et de la voirie, cette dernière générant directement des troubles, que de manière indirecte, la réalisation des différentes constructions étant de nature à impacter négativement, voire irrémédiablement, sur la réalisation d’un future plan d’aménagement particulier censé assurer une urbanisation de qualité du quartier en question, comprenant notamment les terrains des requérants.

Le soussigné relève à cet égard que dans le cadre de la refonte du plan d’aménagement général de la commune de Kopstal, laquelle vient d’être initiée, ledit quartier est classé notamment comme soumis à un plan d’aménagement particulier « nouveau quartier », tandis que le schéma directeur de l’étude préparatoire afférente prévoit une viabilisation complètement différente de celle actuellement autorisée par la commune, de sorte qu’il devrait également en résulter une implantation différente des futures constructions. Le soussigné relève encore qu’il résulte du projet d’aménagement général, tel que précisé par le schéma directeur de l’étude préparatoire, que les parcelles n° 57/1006 et 57/1746 semblent devoir être intégralement couvertes par une servitude « urbanisation » « écologie et paysage » destinée conformément à l’article 30 du règlement grand-ducal du 8 mars 2017 concernant le contenu du plan d’aménagement général d’une commune à assurer la sauvegarde de la qualité urbanistique, ainsi que de l’environnement naturel et du paysage d’une certaine partie du territoire communal.

L’attitude actuelle de l’administration communale doit dès lors être considérée comme incohérente, dans la mesure, où, d’un côté, elle lance des études visant à permettre une urbanisation réfléchie du site, en soumettant les parcelles en question d’une servitude destinée à sauvegarder la qualité urbanistique et l’environnement naturel du quartier, et, de l’autre côté, elle accorde des autorisations visant à créer une situation précise, manifestement dictée par quelques propriétaires, laquelle constituera ensuite un obstacle à toute urbanisation cohérente du quartier en son ensemble, urbanisation dont les requérants seraient pourtant en droit de profiter, que ce soit en qualité d’habitant ou en qualité de propriétaire.

Le soussigné peut dès lors admettre que la dégradation de la situation actuelle et la mise en péril future d’une urbanisation cohérente, auxquelles les requérants pourraient participer dans le cadre de l’élaboration du futur plan d’aménagement général et d’un futur plan d’aménagement particulier, puissent être considérées comme graves par les requérants, c’est-à-

dire comme dépassant par leur nature ou leur importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société.

17 Il suit de ce qui précède que le préjudice allégué par les requérants est grave et définitif au sens de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999, précitée, de sorte qu’il y a lieu, en attendant la solution du litige au fond, d’ordonner le sursis à exécution de l’autorisation de construire litigieuse.

Les requérants sollicitent la condamnation de l’administration communale à un montant de 2.000.- euros, soit 1.000.- euros pour chacun, sur base de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de la procédure devant les juridictions administratives.

Cette demande est toutefois à rejeter, les conditions légales afférentes n’étant pas remplies en cause.

Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;

reçoit en la forme le recours en sursis à exécution introduit par rapport à l’autorisation de construire du bourgmestre de la commune de Kopstal n° 2021/0058 du 29 avril 2021, telle que confirmée par décision du 30 novembre 2021, portant sur la construction d’une maison unifamiliale sur un terrain sis à L-8154 Bridel, 7, rue de Steinsel, inscrit au cadastre de la commune de Kopstal, section B de Bridel, sous les n°s 57/1746 et 57/1006 ;

partant ordonne qu’il sera sursis à l’exécution de l’autorisation de construire du bourgmestre de la commune de Kopstal n° 2021/0058 du 29 avril 2021, telle que confirmée par décision du 30 novembre 2021, portant sur la construction d’une maison unifamiliale sur un terrain sis à L-8154 Bridel, 7, rue de Steinsel, inscrit au cadastre de la commune de Kopstal, section B de Bridel, sous les n°s 57/1746 et 57/1006 en attendant la solution du litige au fond, actuellement pendant devant le tribunal administratif et portant le numéro 47104 du rôle ;

rejette en revanche la demande en allocation d’une indemnité de procédure telle que formulée par les requérants à l’encontre de l’administration communale de Kopstal ;

réserve les frais et dépens.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 25 mars 2022 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence du greffier en chef Xavier Drebenstedt.

s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 25 mars 2022 Le greffier du tribunal administratif 18


Synthèse
Numéro d'arrêt : 47109
Date de la décision : 25/03/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2022-03-25;47109 ?

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