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02/06/2021 | LUXEMBOURG | N°43580

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 juin 2021, 43580


Tribunal administratif N° 43580 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 septembre 2019 1re chambre Audience publique du 2 juin 2021 Recours formé par Madame …, …, contre des décisions du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable en matière de protection de la nature

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43580 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 septembre 2019 par Maître Trixi Lanners, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats de Diekirch, au nom de Madame …, de

meurant à L-…, tendant à l’annulation 1) d’une décision du ministre de l’Environnem...

Tribunal administratif N° 43580 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 septembre 2019 1re chambre Audience publique du 2 juin 2021 Recours formé par Madame …, …, contre des décisions du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable en matière de protection de la nature

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 43580 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 septembre 2019 par Maître Trixi Lanners, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats de Diekirch, au nom de Madame …, demeurant à L-…, tendant à l’annulation 1) d’une décision du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable du 19 juin 2019 « […] intervenue suite à un recours gracieux du 31.10.2019 et portant refus d[e lui] accorder les autorisations relevant de sa compétence en vue de l’aménagement […] d’un râtelier sur les parcelles cadastrales …, …, … et … à …, Commune de …, section … de … et par la même retrait rétroactif à l’autorisation préalablement émise le 22.3.2019 », 2) « pour autant que de besoin » de la décision du même ministre du 31 octobre 2018 « portant refus d[e lui] accorder […] les autorisations relevant de sa compétence en vue de l’aménagement […] d’un râtelier sur les parcelles cadastrales …, …, … et … à …, Commune de Manternach, section … de … », et 3) d’une « décision » orale, ainsi qualifiée, du 1er avril 2019 « portant retrait d’une autorisation elle aussi orale du 22.3.2019 » ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 décembre 2019 ;

Vu le mémoire en réplique de Maître Maître Trixi Lanners déposé au greffe du tribunal administratif le 17 janvier 2020, pour compte de Madame …, préqualifiée ;

Vu le mémoire en duplique du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 14 février 2020 ;

Vu les pièces versées au dossier et notamment les décisions ministérielles déférées ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 27 janvier 2021, et vu les remarques écrites de Maître Trixi Lanners et de Madame le délégué du gouvernement Tara Désorbay des 18 et 27 janvier 2021, produites, conformément à la circulaire du président du tribunal administratif du 22 mai 2020, avant l’audience.

Par un formulaire du 3 mars 2018, réceptionné le 13 mars 2018, Madame … introduisit auprès du ministère du Développement durable et des Infrastructures, département de l’Environnement, une demande tendant à se voir accorder dans le cadre de la loi modifiée du 119 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, ci-après désignée par « la loi du 19 janvier 2004 », entretemps abrogée par la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles modifiant 1° la loi modifiée du 31 mai 1999 portant institution d’un fonds pour la protection de l’environnement ; 2° la loi modifiée du 5 juin 2009 portant création de l’administration de la nature et des forêts ; 3° la loi modifiée du 3 août 2005 concernant le partenariat entre syndicats de communes et l’Etat et la restructuration de la démarche scientifique en matière de protection de la nature et des ressources naturelles, en abrégé « la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles », ci-après désignée par « la loi du 18 juillet 2018 », entrée en vigueur le 9 septembre 2018, l’autorisation d’installer une « transportable Futterraufe für Heu zum [A]ufstellen an verschiedene[n] Stellen auf der Weide, dort wo die Pferde eingezäunt sind.

Legen von Rasengitter 4m auf 4m 16m2 ‘‘Sagustu’’ auf Wiese, (wasserdurchlässig ohne Unterbau) » sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de Manternach, section … de …, au lieu-dit « … », sous les numéros …, …, … et ….

Par une décision du 31 octobre 2018, le ministre de l’Environnement rejeta ladite demande dans les termes suivants :

« […] Je me réfère à votre requête du 9 mars 2018 par laquelle vous sollicitez l'autorisation pour la construction d'un râtelier et d'une grille de pelouse sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de MANTERNACH: section … de … sous les numéros …, …, …, …, …, …, … et ….

Selon l'article 6, paragraphe 1er de la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles sont conformes à l'affectation de la zone verte, des constructions ayant un lien certain et durable avec des activités d'exploitation qui sont agricoles, horticoles, maraîchères, sylvicoles, viticoles, piscicoles, apicoles, cynégétiques, ou qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel.

Selon l'alinéa 4 de ce même paragraphe, les activités d'exploitation agricole, horticole, maraîchère et viticole doivent être opérées à titre principal au sens de la loi modifiée du 27 juin 2016 concernant le soutien au développement durable des zones rurales.

Or, vos activités sur les lieux ne peuvent être qualifiées d'activité d'exploitation agricole opérées à titre principal tel que prédéfini.

De plus, les constructions projetées, à savoir le râtelier et la grille de pelouse, n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6, paragraphe 1er, point 6 de la prédite loi du 18 juillet 2018 concernant les constructions ayant un lien certain et durable avec les activités qui comportent la gestion des surfaces proche à leur état naturel, vu que, dans le cadre de ces activités, seules sont autorisables des petites constructions pour abriter les animaux.

Dès lors, je suis au regret de vous informer qu'en vertu de la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, je ne saurais réserver une suite favorable au dossier.

Par ailleurs, il est à noter que la construction se situe à proximité d'une zone Natura 2000, à savoir la zone « LU0002016 - Région de Mompach, Manternach, Bech et Osweiler » et risque d'affecter, individuellement ou en conjugaison avec d'autres plans et projets, cette zone de manière susceptible.

2 Il faut également remarquer que le site choisi pour l'emplacement se trouve dans un corridor pour la faune sauvage dont un accroissement d'activités en ces lieux risque de constituer un danger pour la quiétude de la faune sauvage et est de ce fait contraire aux objectifs énumérés à l'article 1er de la loi du 18 juillet précitée.

De plus, un verger à haute-tige considéré comme biotope au sens de l'article 17 de la prédite loi du 18 juillet 2018 et de son règlement d'exécution du 1er août 2018 se trouve le long du site. […] ».

Par un courrier de son litismandataire du 30 janvier 2019, Madame … fit introduire un recours gracieux contre la décision ministérielle précitée. Ledit recours gracieux a la teneur suivante :

« […] Par requête du 9.3.2018, ma mandante a sollicité une autorisation de pouvoir établir un râtelier et une grille de pelouse de 16m2 sur ces parcelles n° …, …, … et … à Manternach, section … de … […].

Elle se doit cependant de contester que le râtelier et la grille de pelouse affectent la proche zone Nature 2000.

Un verger classé comme biotope se situerait le long du site.

Abstraction faite que ma mandante n'est pas à même de comprendre quels arbres plantés dans les environs constitueraient un verger de haute tige (il est visiblement peu entretenu), on n'explique cependant pas à Madame … en quoi le râtelier et la grille de pelouse affecterait l'exploitation du verger.

Il s'agit d'un argument qui ne saurait fonder le refus du 31.10.2018.

Madame … est d'avis, contrairement à l'argumentation développée dans votre refus, que la mise en place d'un râtelier mobile a un lien durable avec l'activité autorisée sur le site, qui est celle d'y garder des chevaux dans un abri ouvert, sans boxes.

Tel qu'expliqué, le dépôt du foin dans le râtelier doit permettre de maintenir plus longtemps la qualité et la propreté du foin. Un des autres objectifs est d'éviter que le foin continue à être éparpillé partout par les chevaux.

Aux termes de l'article 6(1) 6, « (p)ar activités d'exploitation qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel, on entend la détention en plein air d'animaux de pâturage. Seules sont autorisées de petites constructions pour abriter ces animaux ».

Les chevaux de Madame … pâturent dans ses prés et disposent d'ores et déjà d'un abri.

Il n'est pas contesté que le râtelier et la grille de pelouse ne servent pas à arbitrer les chevaux, or il semble évident que si des abris peuvent être autorisés, il faut aussi prévoir des dispositifs pour nourrir les bêtes entreposées dans ces abris.

En outre, aux termes de l'article 6(7), « (l)es installations directement liées à l'utilisation des chevaux telles que les selleries ou les vestiaires sont autorisées ».

3 Les termes « telles que » indiquent que le législateur n'ait voulu limiter les constructions autorisables en zone verte aux seuls vestiaires et selleries à l'exclusion de toute autre construction. Ces termes indiquent que d'autres constructions « liées à l'utilisation des chevaux » peuvent être autorisées.

Il est manifeste qu'un râtelier, donc un dispositif pour nourrir les chevaux, doit être qualifié de « construction liée à l'utilisation des chevaux » encore qu'il ne s'agit même pas d'une construction, le râtelier étant parfaitement amovible.

Madame … est d'avis que le râtelier doit être autorisé en tant que « dispositif » (et non pas construction) lié à l'activité en cause sinon en tant que dispositif connexe à l'abri qui existe d'ores et déjà et qui a été dument autorisé.

Tel qu'expliqué, le système de déposer le foin par terre n'a pas fait ses preuves et il y va pour la requérante d'améliorer la situation actuelle.

Sur base des développements et arguments qui précèdent, je vous prie dès lors, au nom et pour le compte de ma mandante, de bien vouloir revenir gracieusement sur votre refus du 31.10.20[18] et de faire droit à la demande de Madame … en autorisant la mise en place de la grille à pelouse et du râtelier sur ses parcelles …, …, … et … à Manternach, section … de … .

Subsidiairement, ma mandante propose de modifier sa demande en ce sens qu'elle renonce à la mise en place d'une grille à pelouse et qu'elle demande à pouvoir déposer le râtelier sur la parcelle …, c'est-à-dire non pas dans les prés, mais directement devant l'abri pour chevaux (photo de cet endroit : cf. annexe 4). […] ».

Par courrier recommandé du 3 avril 2019, le litismandataire de Madame … s’adressa encore au ministre dans les termes suivants :

« […] Je reviens à mon recours gracieux du 30 janvier 2019 introduit au nom de Madame …, demeurant à L-….

Ma mandante m'informe que sa partenaire, Madame X a été contacté par téléphone le 22 mars 2019, sans préjudice quant à la date exacte, par vos services et plus particulièrement par la dénommée Madame Y qui l'a informée qu'il aurait été décidé que ma mandante puisse laisser en place le râtelier qu'elle a érigé sur sa parcelle, mais que toutefois elle devait enlever la grille de pelouse. A l'occasion du même entretien téléphonique, Madame X a cependant été informée qu'aucune décision écrite ne parviendra à Madame ….

Suite à cet entretien téléphonique, ma partie, qui jusque-là avait recouvert d'une bâche en plastique son râtelier […] a de la suite téléphoné à son couvreur afin qu'il installe la toiture qui avait été prévue. En effet, au moment où le garde forestier avait indiqué à [ma] mandante d'arrêter tous les travaux de mise en place du râtelier, elle y avait immédiatement obtempéré et arrêté. Suite à l'entretien téléphonique entre Madame X et Madame Y, elle a cependant repris les travaux et fait recouvrir de planches en bois […] l'installation qui jusqu'à présent avait été recouverte d'une bâche en plastique.

Le 1er avril 2019, Madame X a de nouveau été contactée par Madame Y, ce en cours de matinée et à deux reprises. Lors du 2e entretien téléphonique Madame X a été informée que 4Madame … devrait malgré tout enlever le râtelier étant donné que les dimensions de celui-ci seraient trop grandes.

Ma mandante doit décaisser plus de 5.000,- € pour couvrir le râtelier. Si elle n'avait pas eu l'information de la part de votre Ministère que le râtelier puisse rester en place et que seule la grille de pelouse devrait être enlevée, elle n'aurait pas engagé cette dépense.

Ma mandante a du mal à cerner pourquoi endéans une semaine le Ministère change d'avis, avec comme conséquence pour elle, d'avoir effectué une dépense très importante.

Elle voudra être fixée une fois pour toute quant au sort du râtelier. Il va sans dire qu'elle enlèvera la grille de pelouse. […] ».

Par une décision du 19 juin 2019, le ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable, entretemps en charge du dossier, ci-après désigné par « le ministre », confirma sa décision initiale dans les termes suivants : « […] En réponse à votre recours gracieux du 30 janvier 2019 et votre courrier du 3 avril 2019 concernant l'installation d'un râtelier mobile et la pose d'une grille de pelouse sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de MANTERNACH: section … de … , sous les numéros …, 1304, …, … et …, je tiens à vous informer que je maintiens ma décision antérieure du 31 octobre 2018.

S'il est vrai qu'un abri pour chevaux a été autorisé, cela n'a pas été fait au nom de l'exercice d'une quelconque activité agricole au sens, à l'époque, de la loi modifiée du 19 janvier 2004 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, mais au nom du seul entretien de la parcelle. Aucune reconnaissance d'une activité agricole au sens de la prédite loi, ni d'ailleurs de celle du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles ne saura en résulter.

Seule une gestion des surfaces proches de leur état naturel a lieu en l'espèce. Cela a pour corollaire que l'article 6, paragraphe 7 de la loi du 18 juillet 2018 que vous invoquez ne saura s'appliquer, vu que les constructions y visées ne sont autorisées que dans les exploitations agricoles, c'est-à-dire là où cette activité est exercée à titre principal au sens de la loi du 27 juin 2016. Or votre mandante n'exerce pas cette activité à titre principal.

Une construction est définie comme « tout aménagement, bâtiment, ouvrage et installation comprenant un assemblage de matériaux reliés ensemble artificiellement de façon durable, incorporé ou non au sol, à la surface ou sous terre » par la prédite loi en son article 3, alinéa 26.

Un râtelier est, quant à lui, défini comme un « assemblage à claire-voie de barres ou de tubes, destiné à recevoir le fourrage sec des animaux ».

Un râtelier est dès lors indéniablement à considérer comme construction au sens de la loi du 18 juillet 2018 concernant la protection de la nature et des ressources naturelles et ce qu'il soit amovible ou non.

Or, comme vous l'avez correctement relevé, la gestion des surfaces proches de leur état naturel ne permet que la mise en place de « petites constructions pour abriter ces animaux ».

Si je ne m'oppose pas, en principe, à la mise en place d'un râtelier, en tant qu'équipement accessoire, force est de constater que les dimensions de la construction 5litigieuse dépassent de loin celles d'un râtelier normal. En effet, son toit dépasse largement le foin des quatre côtés et sert comme abri aux chevaux. Or, votre mandante dispose d'ores et déjà d'une étable pour les chevaux autorisée en date du 29 novembre 2013.

Les propositions de votre mandante de renoncer à la grille de pelouse et à déplacer le râtelier directement devant l'abri de chevaux ne sauront changer le fait que ces constructions ne sont point autorisables.

Dès lors, je maintiens ma décision de refus et vous invite à enlever les constructions illégales sur le site pour le 31 juillet 2019 au plus tard, faute de quoi l'Administration de la nature et des forêts dressera procès-verbal. […] ».

Par courrier recommandé du 10 septembre 2019, le litismandataire de Madame … s’adressa au ministre pour lui proposer de réduire les dimensions du râtelier à 2,80x2,84x2,84 mètres et afin de lui demander d’autoriser la mise en place du râtelier conformément aux nouveaux plans.

Par courrier du 18 septembre 2019 adressé au ministre, Madame … réitéra sa proposition de réduire les dimensions du prédit râtelier.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 septembre 2019, Madame … a fait introduire un recours tendant à l’annulation 1) de la décision ministérielle du 19 juin 2019 lui refusant l’autorisation pour l’aménagement d’un râtelier sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de Manternach, section … de … , sous les numéros …, …, … et … et « portant retrait rétroactif à l’autorisation préalablement émise le 22.3.2019 », 2) « pour autant que de besoin » de la décision du même ministre du 31 octobre 2018, et 3) d’une « décision » orale, ainsi qualifiée, du 1er avril 2019 « portant retrait d’une autorisation elle aussi orale du 22.2.2019 ».

A titre liminaire, force est au tribunal de relever que si dans les courriers des 31 octobre 2018 et 19 juin 2019 le ministre s’est prononcé sur la demande d’autorisation d’installer un râtelier ainsi qu’une grille de pelouse sur des fonds inscrits au cadastre de la commune de Manternach, section … de … , sous les numéros …, …, … et …, la partie demanderesse déclare expressément limiter son recours au seul refus visant l’installation du râtelier, de sorte qu’il y a lieu de lui en donner acte.

Toujours à titre liminaire, et en ce qui concerne la décision du 21 octobre 2018, encore que la demanderesse a indiqué introduire son recours contre celle-ci uniquement « pour autant que de besoin », sans autrement préciser ses intentions, force est au tribunal de constater que la décision sur recours gracieux du 19 juin 2019 est purement confirmative de la décision initiale du 31 octobre 2018, de sorte que les deux doivent être considérées comme formant un tout indivisible.

Ainsi, la demanderesse entend attaquer, de l’entendement du tribunal, outre la décision de confirmation sur recours gracieux précitée du 19 juin 2019, la décision initiale du 31 octobre 2018.

En vertu de l’article 68 de la loi du 18 juillet 2018, sur base de laquelle les décisions déférées ont été prises : « Contre les décisions prises en vertu de la présente loi un recours en annulation est ouvert devant le Tribunal administratif. ».

6 Un recours en annulation a ainsi valablement pu être introduit.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours pour autant qu’il est dirigé contre une décision orale, ainsi qualifiée, du 1er avril 2019 qui porterait, selon la demanderesse, retrait d’une autorisation orale du 22 mars 2019.

Dans ce contexte, le délégué du gouvernement conteste qu’une employée de l'Etat aurait émis une autorisation ministérielle par voie orale, respectivement qu’elle aurait par la suite oralement retirée celle-ci.

Le délégué du gouvernement se réfère ensuite à l’article 60 de la loi du 18 juillet 2018 et à un jugement du tribunal administratif du 13 juillet 2014, inscrit sous le numéro 34586 du rôle, pour soutenir qu’en tout état de cause le ministre serait seul compétent pour prendre des décisions en matière de protection de la nature et des ressources naturelles.

Ainsi, les seules décisions intervenues en l’espèce seraient écrites, à savoir la décision de refus du 31 octobre 2018 et la décision confirmative sur recours gracieux du 19 juin 2019, décision que la demanderesse qualifierait erronément de « retrait écrit ».

Dans sa réplique, la demanderesse conclut au rejet de ce moyen d’irrecevabilité en renvoyant, tout d’abord, en substance, à ses explications fournies dans sa requête introductive d’instance, selon lesquelles le ministère aurait tenté de la contacter par téléphone en date du 22 mars 2019. En son absence, sa partenaire Madame X, aurait été informée par Madame Z, agent du ministère, que le ministre avait décidé de lui accorder l'autorisation de mettre en place le râtelier, mais n'avait pas autorisé la grille de pelouse qui devrait donc être enlevée. Elle aurait encore expliqué à Madame X qu'aucune décision écrite n’allait lui parvenir.

Le 1er avril 2019, Madame Z aurait informé Madame X, en son absence, que le ministre serait revenu sur sa décision et qu’elle devrait enlever le râtelier.

La demanderesse ajoute dans son mémoire en réplique que, contrairement aux allégations du délégué du gouvernement, elle n’aurait jamais fait valoir qu’une employée de l’Etat aurait elle-même émis une décision ministérielle. Toute l’argumentation de l’Etat au sujet de l’incompétence d’une employée de l’Etat pour prendre une décision ne serait, dès lors, pas pertinente.

La demanderesse met ensuite en avant que le caractère oral de la décision ministérielle du 22 mars 2019 n’enlèverait rien à sa réalité.

Elle se réfère, à cet égard, à un arrêt de la Cour administrative du 14 janvier 2010, inscrit sous le numéro 25846C du rôle, ainsi qu’à un jugement du tribunal administratif du 15 janvier 2015, inscrit sous le numéro 31625 du rôle, pour soutenir qu’il suffirait à l’administré de rapporter la preuve de l’existence de la décision, ce qui serait le cas en l’espèce.

Pour appuyer ses dires, la demanderesse offre de prouver par l’audition de Madame X qu’« [e]n date du 22 mars 2019, une dénommée Y du Ministère de l’Environnement, du Climat et du Développement durable a téléphoné à Madame …. En l’absence de cette dernière, madame X a décroché le téléphone et a parlé à Madame Y : Cette dernière a informé Madame X que la Ministre a décidé d’autoriser l[e] râtelier, mais non pas la grille de pelouse. Celle-ci 7devrait être enlevée. Elle a encore informé[…] Madame X que le garde forestier serait informé à son tour de l’autorisation.

Le cadre en bois qui avait déjà été mis en place a alors été équipée d’une toiture. [L]es travaux furent effectués les 27 et 28 mars 2019 et le 1.4.2019.

Le 1er avril 2019, Madame X a de nouveau déroché le téléphone lorsque Madame Y tentait de joindre Madame …. Madame Y a informé Madame X que depuis l’aménagement de la toiture, les dimensions du râtelier seraient trop importantes, de sorte que la Ministre […] serait revenue sur sa décision et Madame … devrait enlever non seulement la grille de pelouse, mais aussi le râtelier ».

A cela s’ajouterait que nonobstant le courrier adressé au ministre le 3 avril 2019 « suite au retrait oral de l’autorisation orale », aucune contestation n’aurait été émise par celui-ci quant l'existence ni de l’autorisation orale du 22 mars 2019, ni du retrait oral du 1er avril 2019.

Cet état de fait constituerait, dès lors, une preuve supplémentaire de l’existence de l’autorisation orale du 22 mars 2019. En outre, en l’ayant contacté une deuxième fois pour l’informer cette fois-ci du retrait de l’autorisation, la partie étatique aurait nécessairement reconnu l’existence préalable d’une autorisation orale.

La demanderesse donne finalement à considérer, en se référant à un jugement du tribunal administratif du 8 mai 2013, inscrit sous le numéro 30187 du rôle, qu’une autorisation orale pourrait même se déduire d’un comportement explicite d’une autorité.

Dans sa duplique, le délégué du gouvernement donne à considérer que dans sa requête introductive d’instance, la demanderesse aurait indiqué qu’une employée de l’Etat aurait émis, puis retiré une autorisation ministérielle, pour ensuite déclarer dans son mémoire en réplique que ladite employée de l’Etat l’aurait informé de l’émission, puis du retrait de l’autorisation de construire qui aurait été prise par le ministre lui-même.

Il ajoute que même à supposer qu’une employée de l’Etat aurait prétendu émettre elle-

même une autorisation, ce que ladite employée contesterait, celle-ci ne pourrait en tout état de cause lier le ministre qui serait seul compétent pour émettre des autorisations.

Quant à la jurisprudence invoquée par la demanderesse, le délégué du gouvernement donne à considérer que s’il se dégageait de celle-ci qu’il n’existe aucune condition de forme à remplir par un acte, elle se référerait toutefois soit directement, soit indirectement à un arrêt dit « Kayser » du Conseil d’Etat du 19 janvier 1966 intervenu avant le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, ci-après désigné par « le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ». Or, l’article 14 du prédit règlement disposerait que la décision administrative devrait « indiquer » les voies de recours ouvertes contre les décisions administratives refusant de faire droit, de sorte qu’il présupposerait la forme écrite de ladite décision.

Le délégué du gouvernement soutient finalement qu’il existerait en l’espèce deux décisions sous forme écrite contre lesquelles la demanderesse aurait introduit un recours, à savoir la décision ministérielle du 31 octobre 2018 et celle confirmative du 19 juin 2019, de sorte qu’il serait superfétatoire de s’attarder sur la question de savoir « qui a dit qui et à qui par téléphone en mars/avril 2019 et de vouloir qualifier cela de décision administrative ».

8Au regard des contestations formelles de la partie étatique, il convient de prime abord de vérifier l’existence d’une décision orale de retrait de la part du ministre, examen qui soulève de façon incidente la question de la prise préalable d’une décision orale d’octroi d’une autorisation.

Aux termes de l’article 2, paragraphe (1) de la loi du 7 novembre 1996, un recours est ouvert « contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible ».

Cette disposition limite l’ouverture d’un recours devant les juridictions administratives notamment aux conditions cumulatives que l’acte litigieux doit constituer une décision administrative, c’est-à-dire émaner d’une autorité administrative légalement habilitée à prendre des décisions unilatérales obligatoires pour les administrés et qu’il doit s’agir d’une véritable décision, affectant les droits et intérêts de la personne qui la conteste.

L’acte émanant d'une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit dès lors constituer, dans l'intention de l’autorité qui l'émet, une véritable décision, à qualifier d'acte de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte de nature à produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame.

Si le caractère décisoire de l'acte attaqué est une condition nécessaire à la recevabilité du recours contentieux, il n'est pas pour autant une condition suffisante. En effet, pour être susceptible de faire l'objet d'un recours, la décision critiquée doit encore être de nature à faire grief.

Plus particulièrement, n'ont pas cette qualité de décision faisant grief, comme n'étant pas destinées à produire, par elles-mêmes, des effets juridiques, les informations données par l’administration, tout comme les déclarations d'intention ou encore les actes préparatoires d’une décision.

S'il est vrai qu'une décision administrative susceptible de recours peut prendre la forme orale, il n'en reste toutefois pas moins qu'il appartient à la partie qui l’invoque de rapporter la preuve de son existence.

En l’espèce, la partie étatique conteste que le ministre aurait émis une décision orale de d’octroi d’une autorisation, et a fortiori un retrait oral d’une autorisation orale, contestations qui sont concordantes avec la décision initiale de refus prise par le ministre en date du 31 octobre 2018, ainsi qu’avec la décision confirmative de refus sur recours gracieux du 19 juin 2019.

Force est de constater qu’il ne se dégage d’aucune pièce du dossier que le ministre ait accordé puis retiré l’autorisation pour les aménagements litigieux. Pour appuyer sa thèse, la demanderesse se base exclusivement sur l’allégation qu’un agent du ministère aurait affirmé oralement qu’une autorisation lui serait accordée qui par la suite aurait été retirée également oralement par ce même agent, la demanderesse se prévalant uniquement d’une offre de preuve par sa partenaire.

Or, il ne suffit pas que la demanderesse rapporte la preuve qu’elle aurait obtenu un accord oral de la part d’un agent quelconque du ministère, mais il lui appartient de rapporter la preuve que le ministre compétent a lui-même pris la décision de lui accorder l’autorisation de 9construire le râtelier litigieux, respectivement qu’il a, par la suite, retiré oralement ladite autorisation, preuve qui n’a toutefois pas été rapportée en l’espèce.

Dans ce contexte, l’offre de preuve formulée par la demanderesse tendant à relater les déclarations d’un agent du ministère, dont il n’est pas établi que celui-ci était compétent pour prendre la décision litigieuse, doit être écartée pour ne pas être pertinente, alors qu’elle n’établit pas que le ministre compétent ait pris la décision de retrait que la demanderesse entend attaquer.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il n’est pas établi que le ministre a pris une décision orale de délivrer une autorisation ni par la force des choses qu’il a pris une décision orale de retrait d’une décision orale.

Il s’ensuit que le recours en ce qu’il est dirigé contre une « décision » orale, ainsi qualifiée, du 1er avril 2019 « portant retrait d’une autorisation elle aussi orale du 22.3.2019 » est rejeté pour défaut d’objet.

S’agissant ensuite du recours dirigé contre la décision du 19 juin 2019, il convient encore de vérifier si cette décision contient, au-delà de la confirmation sur recours gracieux du refus initial, un retrait rétroactif explicite, voire implicite d’une décision orale d’octroi d’une autorisation préalablement émise.

C’est à juste titre que le délégué du gouvernement fait valoir que la demanderesse qualifie à tort ledit courrier de « retrait écrit », dans la mesure où aucun élément de ce courrier ne permet de retenir que le ministre aurait procédé au retrait d’une autorisation orale, qui tel que retenu-ci-avant, n’existe pas.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en ce qu’il est dirigé contre la décision du 31 octobre 2018 en ce qu’elle porte refus d’autoriser un râtelier sur le fonds litigieux et contre la décision confirmative de refus prise sur recours gracieux du 19 juin 2019 est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi et que le recours est irrecevable pour le surplus.

Quant au fond Arguments des parties A l’appui de son recours et au-delà des faits et rétroactes tels que repris ci-avant, la demanderesse affirme qu’elle se serait vue accorder fin 2013 une autorisation d’ériger sur sa parcelle numéro … sise à Manternach une construction, sans boxes, d’une emprise au sol de 36 m2, afin d’y stocker des machines agricoles et pour servir d’abri à ses chevaux en cas d’intempéries ou de forte chaleur, autorisation qui aurait été respectée en tous ses points.

Elle donne à considérer qu’au courant de l’année 2018, elle aurait entamé les travaux en vue mettre en place un râtelier en bois pour entreposer le foin des chevaux, tout en soutenant qu’elle aurait été d’avis qu’en raison du caractère amovible du râtelier aucune autorisation ne serait nécessaire.

Elle explique qu’elle aurait suspendu les travaux après qu’elle aurait été informée par le garde forestier qu’elle devrait disposer d’une autorisation de construire et que le 9 mars 2018, elle aurait sollicité une autorisation de pouvoir établir un râtelier mobile et amovible pour le 10foin des chevaux ainsi qu’une grille de pelouse de 16 m2 sur ses parcelles numéros …, …, … et … à Manternach, section … de … , tout en insistant sur le fait qu’elle ne maintiendrait actuellement plus sa demande pour autant qu’elle vise l’autorisation d’établir une grille de pelouse.

Quant à la finalité du râtelier, elle met en avant qu’elle aurait constaté que la solution de déposer le foin directement sur l’herbe ne constituerait pas une solution satisfaisante, alors que par temps de pluie, le foin deviendrait humide ou mouillé et moisirait rapidement avec comme corolaire une diminution rapide de sa qualité. Elle ajoute que lorsqu’il neige, le foin ne serait protégé d’aucune façon et que les chevaux - qui séjourneraient à l’extérieur toute l’année - devraient chercher sous la neige pour trouver le foin. En outre, lorsque le foin est déposé par terre, les chevaux marcheraient dessus avec comme effet d’en entraver la qualité et de l’éparpiller partout. Elle fait ensuite valoir que le râtelier serait couvert d’un petit toit afin de protéger le foin contre la pluie et la neige, tout en insistant sur le fait qu’elle ne produirait pas son propre foin, de sorte qu’elle n’en disposerait pas en abondance.

Elle explique que les dimensions du râtelier au sol seraient de 2,40 x 2,40 mètres et que les bottes rondes qui seraient entreposées dans le râtelier auraient un diamètre de 2 mètres.

Etant donné qu’il faudrait prévoir un espace entre la botte et les planches du râtelier permettant la circulation d’air, les dimensions au sol du râtelier ne pourraient être inférieures à 2,40 x 2,40 mètres, la demanderesse insistant sur le fait que les râteliers en métal auraient des dimensions comparables.

En droit, la demanderesse soutient que les décisions des 19 juin 2019 et 31 octobre 2018 devraient encourir l’annulation pour violation de la loi, erreur de fait, erreur de droit et erreur d’appréciation manifeste.

En ce qui concerne tout d’abord le reproche du ministre suivant lequel le râtelier risquerait d’affecter, individuellement ou en conjugaison avec d’autres plans et projets, de manière susceptible la zone Natura 2000 située à proximité, la demanderesse souligne qu’elle ne serait pas en mesure de savoir quels sont les « autres plans ou projets », ni de quelle façon son râtelier serait de nature à affecter une zone Natura 2000 située à proximité. Elle ne serait pas non plus à même de comprendre en quoi le râtelier affecterait l’exploitation du verger situé à proximité.

Elle conclut de l’ensemble de ces éléments que le ministre aurait commis une erreur de fait, sinon une erreur manifeste d’appréciation des faits devant conduire à l’annulation de la décision.

Elle soutient ensuite que, contrairement à l’argumentation développée par le ministre dans ses décisions des 31 octobre 2018 et 19 juin 2019, le râtelier mobile présenterait bel et bien un lien durable avec l’activité autorisée sur le site, qui serait celle d’y garder des chevaux dans un abri ouvert, sans boxes, tout en réitérant que le dépôt du foin dans le râtelier permettrait, d’un côté, d’en maintenir plus longtemps sa qualité et sa propreté et, de l’autre côté, d’éviter que le foin serait éparpillé par les chevaux.

Elle estime que ce serait à tort que le ministre a qualifié le râtelier d’abri, voire de « grand » abri pour refuser sa mise en place sur base de l’article 6, paragraphe (1), alinéa 6 de la loi du 18 juillet 2018, alors que ses chevaux disposeraient d’ores et déjà d’un abri. La finalité du râtelier ne serait donc nullement de constituer un abri, mais il s’agirait de protéger la 11nourriture des animaux contre les intempéries. En outre, le râtelier ne permettait pas aux chevaux d’y entrer ou de se protéger contre la chaleur ou contre le froid, de sorte qu’il ne constituerait manifestement pas un abri pour animaux.

La demanderesse fait ensuite valoir que le râtelier serait un « dispositif pour nourrir les chevaux » et devrait être qualifié de « construction liée à l’utilisation des chevaux » conformément à l’article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018, encore que, d’après la demanderesse, il ne s’agirait même pas d’une construction, dans la mesure où le râtelier serait amovible.

A cet égard, elle estime que le râtelier constituerait un « dispositif » - et non pas une construction - lié à l’activité en cause, sinon un « dispositif connexe » à l’abri qui existerait d’ores et déjà et qui aurait été dument autorisé.

Elle relève, en outre, qu’il semblerait découler de la décision du 19 juin 2019 que le ministre partagerait son avis selon lequel le râtelier serait un « équipement accessoire » à l’activité et à la construction autorisée, et qu’il serait, en principe, autorisable sur les parcelles en cause.

La demanderesse ajoute que l’article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018 ne poserait pas de conditions quant aux dimensions des équipements accessoires, de sorte que l’installation du râtelier ne pourrait pas être refusée au motif qu’il serait trop grand, la demanderesse réitérant que le râtelier litigieux devrait permettre d’y rentrer des balles rondes dont le diamètre serait de 2 mètres, de sorte que ses dimensions (à l’intérieur) devraient dépasser 2x2x2 mètres. A cela s’ajouterait que les chevaux seraient des animaux d’une certaine taille et que pour éviter des blessures ou le maintien des chevaux dans une position non adéquate, il faudrait adapter les dimensions non seulement aux bottes, mais aussi à la taille des chevaux, la demanderesse en déduisant qu’il serait matériellement impossible de prévoir un râtelier plus petit que celui en cause en l’espèce.

Elle donne finalement à considérer que les dimensions du râtelier litigieux ne dépasseraient pas sensiblement celles des râteliers « ordinaires » en métal.

Dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement précise que la demanderesse se serait vue autoriser sous l’égide de la loi du 19 janvier 2004 deux abris sur la parcelle numéro …, soit un abri pour chevaux et un abri pour machines, ceci au nom de l’entretien de la parcelle, et non, comme la demanderesse le suggèrerait, par reconnaissance d’une quelconque activité agricole, tout en soulignant que, contrairement à ce qui serait soutenu par la demanderesse, ces autorisations n’auraient pas été respectées, le délégué du gouvernement insistant sur le fait que d’importants travaux auraient été réalisés de manière illégale par la demanderesse.

Il explique, dans ce contexte, que l’autorisation du 21 octobre 2013 indiquerait que « l’abri ne dépassera pas 6m x 3m comme base, ni 2,6m comme hauteur de plafond au point bas » et que « la construction servira uniquement comme abri contre les intempéries pour les chevaux qui entretiennent la parcelle. Tout changement d’affectation est interdit. » et que celle du 29 novembre 2013 indiquerait que « l’abri ne dépassera pas une emprise au sol totale de 36m2, ni une profondeur de 3,2m […] ».

Or, selon le délégué du gouvernement, ces dimensions auraient été dépassées de 12manière flagrante, alors que l’abri pour chevaux aurait en réalité 3,5 x 7 mètres au lieu des 3 x 6 mètres autorisés et que celui pour machines, qui aurait initialement été construit avec une surface approximative de 84 m2 au lieu des 36 m2 autorisés, aurait encore été élargi de manière illégale au cours de l’année 2017.

Il ajoute que la demanderesse aurait, par ailleurs, mis en place du sable sur une surface importante, soit sur l’intégralité du pré accueillant les deux abris ainsi que sur une surface rectangulaire d’une longueur totale d’environ 75 mètres qui servirait de piste d’équitation - le tout sans autorisation ministérielle et en zone verte, ainsi qu’à l’intérieur du corridor écologique.

Le délégué du gouvernement donne ensuite à considérer qu’une enquête pénale serait en cours à cause de ces faits.

En ce qui concerne le râtelier litigieux, le délégué du gouvernement soutient que celui-

ci consisterait non seulement en un cadre en bois d’environ 2,40x2,40 mètres destiné à accueillir une botte de foin, mais également en un toit à quatre pentes avec des dimensions de 5,24x5,24 mètres, qui dépasseraient donc largement la botte de foin.

Il réfute les affirmations de la demanderesse selon lesquelles son râtelier ne serait pourvu que d’un « petit toit » et que « les laids râteliers en métal ont des dimensions comparables », au motif que la construction litigieuse ne pourrait être assimilée à un râtelier normal tel que les râteliers métalliques communément connus, qui auraient généralement des dimensions qui ne dépasseraient pas 2x2x3 mètres, le délégué du gouvernement renvoyant, à cet égard, à des photocopies d’un catalogue de vente versé par la demanderesse, tout en précisant que même à prendre en considération le courrier du 10 septembre 2019, dans lequel la demanderesse propose de réduire un des côtés du râtelier de 5,24 à 2,80 mètres, la construction dépasserait toujours largement la taille d’un râtelier normal avec ses 2,80x5,24x3,55 mètres.

Il fait valoir que selon la loi du 18 juillet 2018, aucune construction ne serait autorisable dans le cadre de la détention de chevaux au seul titre de loisir tel que l’exercerait la demanderesse. A cet égard, le délégué du gouvernement se réfère à l’article 6, paragraphe (1), point 1. de la loi du 18 juillet 2018 et à l’article 2, paragraphes (2) et (3) de la loi modifiée du 27 juin 2016 concernant le soutien au développement durable des zones rurales, ci-après désignée par « la loi du 27 juin 2016 », dont il se dégagerait que la demanderesse n’exercerait pas une exploitation agricole à titre principal et ce même si les constructions illégales donnaient l’impression d’une exploitation professionnelle, alors qu’elle ne détiendrait que quelques chevaux à pur titre de loisir. Elle resterait d’ailleurs en défaut d’apporter la moindre preuve de l’exercice d’une activité agricole à titre principal.

Le délégué du gouvernement soutient ensuite que l’article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018 ne serait pas applicable au cas de Madame …, étant donné que, d’une part, elle ne disposerait pas de base fourragère et que, d’autre part, elle n’exercerait pas une exploitation agricole à titre principal conformément aux dispositions combinées de l’article 6, paragraphes (7) et (1), points 1. et 2. de la loi du 18 juillet 2018.

Il estime que la qualification correcte pour l’activité exercée par la demanderesse serait celle de la gestion de surfaces proches de leur état naturel, conformément à l’article 6, paragraphe (1), point 6. de la loi du 18 juillet 2018.

13Le délégué du gouvernement avance que dans la mesure où, d’une part, le râtelier ne servirait pas à abriter les chevaux et où, d’autre part, la demanderesse disposerait déjà d’un abri pour chevaux, ce serait à bon droit que le ministre a refusé la demande d’autorisation litigieuse et ce nonobstant toute proposition de réduire la taille de cette construction.

A cela s’ajouterait que rien n’empêcherait la demanderesse de placer le foin à l’intérieur d’un de ses abris afin qu’il ne soit pas exposé au mauvais temps.

Le délégué du gouvernement met ensuite en avant que si le ministre avait indiqué en principe ne pas s’opposer à la mise en place d’un râtelier en tant qu’accessoire, force serait de constater que cela aurait été à titre de pure tolérance et que cet accessoire devrait respecter un certain « seuil de bagatelle » et se limiter au stricte minimum nécessaire. Or, le râtelier litigieux, même avec des dimensions réduites à 2,80x5,24x3,55 mètres, dépasserait largement la botte de foin d’un diamètre de 2 mètres au maximum, qui ne serait, en outre, en raison de ses dimensions et en l’absence de tout dispositif d’attelage prévu, pas amovible. Le râtelier litigieux ne saurait dès lors être considéré comme constituant « le strict minimum », de sorte qu’il ne serait pas autorisable dans les dimensions actuelles.

Dans sa réplique et en fait, la demanderesse conteste qu’elle n’aurait pas respecté les autorisations délivrées en 2013, tout en insistant sur le fait que celles-ci n’apporteraient rien au présent litige qui concernerait un râtelier et non pas les abris pour chevaux et machines qui auraient été autorisés en 2013.

Elle explique, dans ce contexte, qu’elle aurait respecté tant les dimensions que la finalité des abris, tout en admettant qu’elle aurait aménagé un chemin d’accès, ainsi qu’un paddock « des années plus tard » et qu’elle aurait recouvert l’espace entre les deux abris autorisés d’une « plaque », alors que l’eau de pluie y aurait provoqué de la boue. La demanderesse fait valoir que le fait qu’une enquête pénale serait en cours à propos de ces aménagements, ne changerait rien au présent dossier, ni ne signifierait qu’elle n’aurait pas respecté l’autorisation concernant l’abri pour chevaux et celle pour machines.

La demanderesse soutient ensuite que, contrairement aux affirmations de la partie étatique, le râtelier ne constituerait pas un abri pour chevaux, tout en insistant sur le fait que la toiture devrait permettre l’écoulement des eaux pluviales, ce qui expliquerait l’aménagement d’un toit en pente qui aurait dès lors des dimensions plus grandes que celles du cadre en bois posé sur le sol.

En droit et en ce qui concerne le reproche suivant lequel elle n’exercerait pas une exploitation agricole à titre principal, la demanderesse rétorque que la question tenant à la qualification de l’activité exercée ne serait pas pertinente, dans la mesure où il ne s’agirait en l’espèce pas d’une demande d’autorisation de construire un abri, mais de la mise en place d’un râtelier, donc d’un accessoire à un abri.

Ainsi, toute discussion au sujet, d’une part, de l’article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018 et, d’autre part, de la définition de l’activité agricole ou encore celle relative à l’activité qu’elle exerce seraient vaines, alors qu’elle ne solliciterait justement pas l’autorisation de construire un abri.

La demanderesse est d’avis que la véritable question qui se poserait en l’espèce serait celle de savoir si en présence d’un abri pour chevaux dûment autorisé sous une autre 14législation, le propriétaire est en droit au stade actuel du droit, d’aménager un râtelier pour nourrir les chevaux qu’il garde dans les abris autorisés et pour protéger la nourriture de ces chevaux.

Elle estime, par ailleurs, que la réponse à cette question serait clairement positive, étant donné que l’article 6, paragraphe (7), alinéa 3 de la loi du 18 juillet 2018 permettrait la mise en place d’« installations directement liées à l’utilisation des chevaux » et qu’un râtelier devant protéger la nourriture devrait être qualifié d’installation directement liée à l’utilisation de chevaux.

Dans sa duplique, le délégué du gouvernement met en avant que les images aériennes du site montreraient sans équivoque, d’une part, que les constructions ne respecteraient nullement les dimensions autorisées et, d’autre part, que d’importants travaux supplémentaires auraient été réalisés sans autorisation aucune dans cette zone verte qui se trouverait au surplus à l’intérieur d’un corridor écologique. La demanderesse resterait, par ailleurs, en défaut d’apporter la moindre preuve du contraire. Elle ne parviendrait ainsi à prouver ni en quoi elle aurait respecté les dimensions accordées, ni qu’elle aurait disposé des autorisations nécessaires pour le remblai et la mise en place de la piste d’équitation d’une taille de 12x20 mètres, ainsi que du toit supplémentaire.

Il donne ensuite à considérer que la demanderesse affirmerait tantôt que « toute discussion au sujet de l’article 6§7 de la loi du 18.07.2018 ou au sujet de l’activité agricole […] ou encore relatif à l’activité exercée par Madame … sont donc vaines » pour invoquer dans la suite immédiate justement le même article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018 en sa faveur, en soulevant que celui-ci permettrait la mise en place d’installations liées à l’utilisation des chevaux, de sorte qu’elle ferait, d’un côté, plaider l’indifférence de la qualification de son activité et, d’autre part, souhaiterait se voir appliquer les dispositions légales favorables qui seraient réservées aux activités agricoles exercées à titre principal.

Il réfute encore l’argumentation de la demanderesse selon laquelle la question tenant à son activité n’intéresserait pas le présent litige, alors que le râtelier serait à qualifier de construction et serait dès lors sujet à autorisation ministérielle.

Le délégué du gouvernement explique, dans ce contexte, que ce serait à bon droit que le ministre a analysé la question de l’envergure de l’activité exercée par la demanderesse et a conclu, d’une part, que cette activité ne serait pas exercée à titre principal au sens de la loi du 27 juin 2016, exploitation qui ouvrirait droit à la mise en place de constructions indispensables à l’activité, et, d’autre part, qu’il s’agirait d’une simple gestion des surfaces proches de leur état naturel pour laquelle l’article 6, paragraphe (1), point 6. de la loi du 18 juillet 2018 autoriserait seulement « de petites constructions pour abriter [d]es animaux », de sorte que le râtelier litigieux ne serait pas autorisable.

Il rappelle, enfin, que le ministre ne s’opposerait en principe pas à la mise en place d’un râtelier « normal », mais ce à « pur titre de tolérance » et sous condition qu’il respecte un certain « seuil de bagatelle » avec une taille normale.

Appréciation du tribunal Il y a lieu de relever qu’il est constant en cause que le fonds sur lequel a été mis en place le râtelier litigieux se trouve classé en zone verte au sens de l’article 6, paragraphe (1), de la loi 15du 18 juillet 2018, réservée aux seules constructions « ayant un lien certain et durable avec des activités d’exploitation qui sont agricoles, horticoles, maraîchères, sylvicoles, viticoles, piscicoles, apicoles, cynégétiques, ou qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel ».

Il y a ensuite lieu de relever que la loi du 18 juillet 2018 poursuit, tel qu’indiqué en son article 1er, les objectifs suivants : « 1° la sauvegarde du caractère, de la diversité et de l’intégrité de l’environnement naturel ; 2° la protection et la restauration des paysages et des espaces naturels, 3° la protection et la restauration des biotopes, des espèces et de leurs habitats, ainsi que des écosystèmes, 4° le maintien et l’amélioration des équilibres et de la diversité biologiques ; 5° la protection des ressources naturelles contre toutes dégradations, 6° le maintien et la restauration des services écosystémiques ; et 7° l’amélioration des structures de l’environnement naturel. ».

Pour assurer le respect de ces objectifs, le législateur, à travers l’article 6 de la loi du 18 juillet 2018, a limitativement énuméré les constructions pouvant être érigées dans la zone verte, ledit article étant, en effet, libellé comme suit :

« (1) Sont conformes à l’affectation de la zone verte, des constructions ayant un lien certain et durable avec des activités d’exploitation qui sont agricoles, horticoles, maraîchères, sylvicoles, viticoles, piscicoles, apicoles, cynégétiques, ou qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel.

Seules sont autorisables les constructions indispensables à ces activités d’exploitation, Il appartient au requérant d’une autorisation de démontrer le besoin réel de la nouvelle construction en zone verte.

Ne comptent pas comme activités d’exploitation au sens de la présente loi les activités économiques sans lien avec la production de matière première, notamment la location ou le prêt à usage de bâtiments, étables ou machines à des tiers.

Les activités d’exploitation visées à l’alinéa 1er et les constructions autorisables doivent répondre aux critères suivants :

1° Les activités d’exploitation agricole, horticole, maraîchère et viticole sont opérées à titre principal au sens de la loi modifiée du 27 juin 2016 concernant le soutien au développement durable des zones rurales.

Ne sont pas autorisables les installations et constructions en rapport avec la vente par les horticulteurs et pépiniéristes de produits accessoires de leur activité ou de produits végétaux qui ne sont pas issus de leur exploitation.

Ne constituent pas une activité d’exploitation agricole l’élevage ou la garde d’animaux domestiques de compagnie.

[…] 6° Par activités d’exploitation qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel, on entend la détention en plein air d’animaux de pâturage.

16Seules sont autorisées de petites constructions pour abriter ces animaux. Un règlement grand-ducal précise la surface maximale de ces abris en fonction de la surface de la prairie et du nombre des animaux.

[…] (7) Les constructions nécessaires à la détention de chevaux sont conformes à l’affectation de la zone verte et autorisées dans une exploitation agricole si cette dernière dispose de pâturages et d’une base fourragère provenant majoritairement de l’exploitation.

Des places à sol ferme peuvent être autorisées pour l’utilisation des chevaux détenus dans l’exploitation.

Les installations directement liées à l’utilisation des chevaux telles que les selleries ou les vestiaires sont autorisées.

Un règlement grand-ducal peut préciser les critères relatifs à l’implantation, aux matériaux, à l’emprise au sol, à la surface construite brute, aux teintes et aux dimensions maximales, ainsi que les types d’installations possibles pour la détention et l’utilisation de chevaux en zone verte. ».

L’article 6 de la loi du 18 juillet 2018 limite ainsi la possibilité d’ériger une construction en zone verte aux seules constructions « ayant un lien certain et durable avec des activités d’exploitation qui sont agricoles, horticoles, maraîchères, sylvicoles, viticoles, piscicoles, apicoles, cynégétiques, ou qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel » et étant « indispensables à ces activités d’exploitation », tout en imposant encore à travers son paragraphe (1), alinéa 4, point 1°, que les activités d’exploitation agricole, horticole, maraîchère et viticole soient exercées à titre principal au sens de la loi du 27 juin 2016, précitée.

L’applicabilité de ce principe présuppose toutefois que l’on soit en présence d’une construction au sens de la loi du 18 juillet 2018, question sur laquelle porte en l’occurrence le désaccord des parties en l’espèce, la demanderesse étant d’avis que le râtelier litigieux ne répondrait pas à cette qualification.

A cet égard, le tribunal relève que la construction est définie à l’article 3, point 26. de la loi du 18 juillet 2018 comme « tout aménagement, bâtiment, ouvrage et installation comprenant un assemblage de matériaux reliés ensemble artificiellement de façon durable, incorporé ou non au sol, à la surface ou sous terre. Au sens de la présente loi, la notion de construction ne comprend pas les clôtures agricoles entourant des pâtures, ni les clôtures protégeant les rajeunissements forestiers ».

Au vu de cette définition découlant, en substance, des jurisprudences antérieures des juridictions administratives sous l’ancienne loi du 19 janvier 2004, il convient de retenir que la notion de construction vise le résultat d’un assemblage de matériaux, reliés artificiellement ensemble de manière durable, le cas échéant incorporé au sol, les critères pour déterminer l’existence d’une telle construction résidant partant dans les matériaux employés et dans la manière dont ils sont reliés afin de garantir un certaine durabilité et permanence.

Au regard de cette définition, c’est à bon droit que le râtelier litigieux, à savoir, suivant la documentation et les photographies versées par la demanderesse, un assemblage de matériaux reliés ensemble artificiellement, constitué de poteaux et de planches en bois, reliés 17entre eux à l’aide de clous, le tout revêtu d’un toit à quatre pentes d’une dimension de 5,24 x 5,24 mètres qui dépassent le cadre en bois devant accueillir les bottes de foin, celui-ci mesurant 2,40 x 2,40 mètres, destiné à durer, a été considéré par le ministre comme une construction au sens de l’article 6 de la loi du 18 juillet 2018, étant encore relevé qu’au vu de l’envergure de l’installation en cause, celle-ci n’est pas comparable avec un râtelier normal tel qu’illustré sur la photo versée par la demanderesse, celui-ci se limitant à un simple support en métal d’une dimension de 2x2 mètres.

Cette conclusion n’est pas énervée par la simple affirmation non autrement établie de la demanderesse selon laquelle le râtelier litigieux serait « amovible », argumentation qui est, à défaut d’autres éléments et au regard de ses dimensions conséquentes, pas suffisante à cet égard.

Il s’ensuit que la mise en place du râtelier litigieux, devant être qualifié de construction au sens de la loi du 18 juillet 2018, n’est autorisable en zone verte que dans les limites de l’article 6, paragraphe (1), de la loi du 18 juillet 2018.

Il découle du libellé même de l’article 6, paragraphe (1), précité, que dans la mesure où seules les constructions y visées sont autorisables en zone verte, le texte légal consacre le principe de non-constructibilité pour ladite zone et rejoint ainsi les objectifs de la loi consistant notamment dans la sauvegarde du caractère, de la diversité et de l’intégrité de l’environnement naturel.

Or, le principe même de la non-constructibilité applicable pour la zone verte appelle comme corollaire une interprétation stricte des exceptions légalement prévues. Ainsi, une construction ne saurait être autorisée que dans la mesure où il est vérifié dans son chef qu’elle sert à suffisance à l’une des activités limitativement énumérées à l’article 6, paragraphe (1), précité de la loi du 18 juillet 2018, l’alinéa 4, point 1. du paragraphe (1) précité imposant, par ailleurs, que les activités d’exploitation agricole, horticole, maraîchère et viticole soient exercées à titre principal au sens de la loi du 27 juin 2016.

Aux termes de l’article 6, paragraphe (7) de la loi du 18 juillet 2018, les construction nécessaires à la détention de chevaux sont autorisables en zone verte, mais à condition de pouvoir être rattachées à une exploitation agricole, les documents parlementaires ayant à cet égard précisé que les constructions en zone verte pour les affecter à la détention de chevaux ne sont admissibles qu’à la double condition (i) que la détention s’exerce dans le cadre d’une exploitation agricole et (ii) que cette exploitation soit suffisamment autonome pour alimenter les chevaux1, c’est-à-dire qu’elle dispose de pâturages et d’une base fourragère provenant majoritairement de l’exploitation, les travaux parlementaires précisant encore que « sont toujours exclus les activités uniquement de loisirs »2.

S’agissant de la question de l’existence d’une affectation agricole, le tribunal relève qu’il est constant en cause que la demanderesse détient des chevaux à titre de pure loisir, ce constat n’ayant pas été remis en cause par la demanderesse, étant relevé que celle-ci est restée en défaut de fournir la moindre précision quant à son activité d’exploitation. Dès lors, il n’est pas établi que la demanderesse remplit la condition tenant à l’exercice d’une activité agricole à titre principal au sens de la loi du 27 juin 2016. La demanderesse n’allègue en outre pas que 1 Projet de loi concernant la protection de la nature et des ressources naturelles, numéro 7048/00, Commentaire des articles.

2 Idem.

18la condition tenant à l’existence de pâturages et d’une base fourragère provenant majoritairement d’une telle exploitation agricole serait remplie dans son chef, la demanderesse admettant, au contraire, elle-même dans sa requête introductive d’instance de ne pas produire son propre foin, mais de l’acheter auprès de tiers.

Il s’ensuit qu’aucun reproche ne saurait être fait au ministre pour avoir considéré qu’il n’était pas établi que l’activité exercée par la demanderesse est compatible avec l’activité d’exploitation agricole opérée à titre principal conformément à l’article 6 de la loi du 18 juillet 2018 et que partant le râtelier n’est pas en lien avec une telle activité.

C’est encore à bon droit, pour n’être d’ailleurs pas contesté par la demanderesse, que la partie étatique a relevé que l’article 6, paragraphe (1), point 6. de la loi du 18 juillet 2018, précité visant les activités d’exploitation qui comportent la gestion des surfaces proches de leur état naturel, ne trouve pas non plus à s’appliquer en l’espèce, alors qu’il autorise uniquement une petite construction pour abriter des animaux de pâturage, alors que le râtelier litigieux ne constitue, selon les propres déclarations de la demanderesse, pas un abri pour accueillir ses chevaux, la demanderesse précisant, à cet égard, qu’elle disposerait déjà d’un abri à cette fin qui aurait été autorisé en 2013.

La demanderesse affirme, en substance, que le râteler serait autorisable en tant qu’accessoire aux abris dont elle dispose d’ores et déjà et qui auraient été autorisés sous la législation antérieure, tout en fondant sa thèse sur l’article 6, paragraphe (7), alinéa 3 de la loi du 18 juillet 2018 qui permettrait la mise en place d’« installations directement liées à l’utilisation des chevaux ».

Or, contrairement à ce que la demanderesse semble entendre, l’article 6, paragraphe (7), alinéa 3 de la loi du 18 juillet 2018 ne peut pas être lu de façon isolée, mais doit être lu en combinaison avec le paragraphe (1) de l’article 6 précité qui énumère limitativement les constructions pouvant être érigées dans une zone verte, en l’occurrence celles destinées à une activité agricole, respectivement en combinaison avec l’alinéa 1er du paragraphe (7) de l’article 6 qui pose le cadre des constructions liées à la détention de chevaux dans une zone verte et qui exige, tel que retenu ci-avant, que la détention s’exerce dans le cadre d’une exploitation agricole et que l’exploitation agricole soit suffisamment autonome pour alimenter les chevaux.

Une construction en relation avec la détention de chevaux, même si elle ne constitue qu’un accessoire, ne peut dès lors être autorisée qu’à la condition que les chevaux sont détenus dans le respect des conditions de l’article 6, paragraphes (1) et (7) de la loi du 18 juillet 2018.

Or, indépendamment de la question de savoir si la demanderesse a respecté les autorisations antérieures délivrées sous la législation antérieure, la demanderesse est, tel que retenu ci-avant, restée en défaut d’établir qu’elle exerce une activité agricole à titre principal au sens de la loi du 18 juillet 2018, de sorte que c’est à bon droit que le ministre a retenu que l’article 6, paragraphe (7) n’est pas applicable en l’espèce.

Pour le surplus, la demanderesse reste en défaut d’expliquer sur quel fondement elle n’aurait pas à respecter les dispositions de l’article 6, paragraphes (1) et (7) de la loi du 18 juillet 2018 au seul motif qu’elle se serait vue accorder une autorisation sur le fondement de la législation antérieure d’installer des abris, le ministre contestant, par ailleurs, que ces autorisations auraient été délivrées au titre d’une activité agricole, la demanderesse n’alléguant d’ailleurs pas qu’elle aurait par le passé détenu les chevaux dans le cadre d’une exploitation agricole.

19 Au vu des considérations qui précèdent, le refus du ministre de faire droit à la demande d’autorisation en vue de la mise en place d’un râtelier sur les fonds litigieux au motif que celui ne se rattache pas à une des activités énumérées à l’article 6 de la loi du 18 juillet 2018 n’est pas sujet à critique, ce constat à lui étant suffisant pour justifier le refus indépendamment de la question de l’impact de l’ouvrage sur le paysage et l’environnement en général et sur la faune sauvage en particulier, l’examen de l’impact environnemental éventuel d’un projet, opéré sur base de l’article 62 de la loi du 18 juillet 2018, notamment par rapport aux objectifs inscrits à l’article 1er de la même loi, n’intervenant, en effet, qu’après la vérification de la conformité du projet à l’affectation autorisable en zone verte.

Il s’ensuit que le recours est à rejeter pour ne pas être fondé, sans qu’il n’y a lieu d’examiner les contestations de la demanderesse par rapport aux autres motifs de refus invoqués.

Eu égard à l’issue du litige, la demande en paiement d’une indemnité de procédure d’un montant de 3.000.- euros telle que formulée par la demanderesse sur le fondement de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives est à rejeter pour ne pas être fondée.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, contradictoirement ;

déclare irrecevable le recours en annulation pour autant qu’il est dirigé contre la décision du ministre de l’Environnement, du Climat et du Développement durable du 19 juin 2019 en ce qu’elle porterait « retrait rétroactif à l’autorisation préalablement émise le 22.3.2019 » et contre une « décision » orale, ainsi qualifiée, du même ministre du 1er avril 2019 « portant retrait d’une autorisation elle aussi orale du 22.3.2019 » ;

reçoit le recours en annulation en la forme pour le surplus ;

au fond le déclare non justifié, partant en déboute ;

rejette la demande en paiement d’une indemnité de procédure formulée par la demanderesse ;

condamne la demanderesse aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 2 juin 2021 par :

Annick Braun, vice-président, Alexandra Bochet, juge, Carine Reinesch, juge, en présence du greffier Luana Poiani.

s. Luana Poiani s. Annick Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 2 juin 2021 Le greffier du tribunal administratif 20


Synthèse
Numéro d'arrêt : 43580
Date de la décision : 02/06/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 06/06/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2021-06-02;43580 ?

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