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03/07/2020 | LUXEMBOURG | N°44594

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 03 juillet 2020, 44594


Tribunal administratif Numéro 44594 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juin 2020 Le 3 juillet 2020, Marc Sünnen, président du tribunal administratif, assisté de Xavier Drebenstedt, greffier en chef, a rendu le

JUGEMENT

sur la régularité d’une décision de prolongation de rétention administrative qui suit, au vu du dossier lui soumis :

Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative, récep

tionnée par le greffe du tribunal administratif le 29 juin 2020, enrôlée sous le n° 44594 ;
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Tribunal administratif Numéro 44594 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juin 2020 Le 3 juillet 2020, Marc Sünnen, président du tribunal administratif, assisté de Xavier Drebenstedt, greffier en chef, a rendu le

JUGEMENT

sur la régularité d’une décision de prolongation de rétention administrative qui suit, au vu du dossier lui soumis :

Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention administrative, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 29 juin 2020, enrôlée sous le n° 44594 ;

Monsieur …, déclarant être né le … à … (Algérie) et être de nationalité algérienne, alias …, né le …, alias …, né le …, avisé par télécopie ;

Monsieur le délégué du gouvernement Felipe LORENZO entendu en ses explications à l’audience publique de ce jour.

__________________________________________________________________________

Vu les articles 120 (3) et 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration ;

Vu la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 12 octobre 2016 refusant la protection internationale à Monsieur …, déclarant être né le … à … (Algérie) et être de nationalité algérienne et lui ordonnant de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 19 février 2020 ordonnant le placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 17 mars 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 3 avril 2020, inscrit sous le n° 44329 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle du 17 mars 2020, confirmé en appel par arrêt de la Cour administrative du 16 avril 2020, n° 44352C du rôle ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 14 avril 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;

1Vu le jugement du tribunal administratif du 6 mai 2020, inscrit sous le n° 44384 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle du 14 avril 2020 ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 14 mai 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision ;

Vu le jugement du tribunal administratif du 5 juin 2020, inscrit sous le n° 44470 du rôle, rejetant le recours contentieux introduit par Monsieur … contre la prédite décision ministérielle du 14 mai 2020 ;

Vu l’arrêté du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 15 juin 2020, ordonnant la prorogation du placement en rétention de Monsieur … au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision, notifiée à l’intéressé en mains propres le 19 juin 2020 ;

Vu la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité du prédit arrêté du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation du placement en rétention, réceptionnée par le greffe du tribunal administratif le 29 juin 2020, enrôlée sous le n° 44594 ;

Vu le dossier administratif ;

Vu la convocation du 29 juin 2020 convoquant les parties à l’audience publique du 3 juillet 2020, notifiée en mains propres à Monsieur … en date du 29 juin 2020.

___________________________________________________________________________

Quant à la recevabilité de la requête :

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 29 juin 2020 et enrôlée sous le n° 44594, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après « le ministre », a saisi le président du tribunal administratif d’une demande tendant à la vérification de la régularité d’un arrêté ordonnant la 4ème prorogation du placement en rétention de Monsieur …, prétendument ressortissant algérien, au Centre de rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision.

Conformément à l’article 123 (6) de la loi modifiée du 29 août 2008 portant sur la libre circulation des personnes et l’immigration, ci-après « la loi du 29 août 2008 », « Lorsque le ministre décide de prolonger la durée de rétention en vertu de l’article 120, paragraphe (3), alinéa 2, il doit saisir d’office, par requête introduite dans les cinq jours ouvrables de la notification de la décision, le président du Tribunal administratif qui statue d’urgence comme juge du fond et en tout cas dans les dix jours du dépôt de la requête, la personne retenue dûment convoquée par les soins du greffe ».

Il résulte du dossier administratif et des pièces versées en cause que Monsieur … s’est vu notifier en date du 19 juin 2020 un arrêté du ministre daté du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation de son placement en rétention pour une durée supplémentaire d’un mois à partir de la notification de la décision.

2La requête, introduite le 29 juin 2020, est partant à déclarer recevable pour avoir été introduite endéans cinq jours ouvrables conformément aux dispositions de l’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008.

Quant à la procédure :

Conformément à l’article 121 (1) de la loi du 29 août 2008, « La notification des décisions visées à l’article 120 est effectuée par un membre de la Police grand-ducale qui a la qualité d’officier de police judiciaire. La notification est faite par écrit et contre récépissé, dans la langue dont il est raisonnable de supposer que l’étranger la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés », ladite notification devant faire l’objet, conformément au paragraphe 2 de cette même disposition, d’un procès-verbal dressé par l’officier de police judiciaire qui y a procédé, mentionnant la date de la notification de la décision, la déclaration de la personne retenue qu’elle a été informée de ses droits mentionnés, ainsi que toute autre déclaration qu’elle désire faire acter, la langue dans laquelle la personne retenue fait ses déclarations, ledit procès-verbal devant soit être signé par la personne retenue, soit, en cas de refus de signature, devant mentionner le refus et les motifs du refus.

Conformément à l’article 122 (2) et (3) de la loi du 29 août 2008, « (2) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de prévenir sa famille ou toute personne de son choix. Un téléphone est mis à sa disposition à titre gratuit à cet effet. (3) La personne retenue est immédiatement informée, par écrit et contre récépissé, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu’elle la comprend, sauf les cas d’impossibilité matérielle dûment constatés, de son droit de se faire examiner dans les vingt-quatre heures de son placement en rétention, par un médecin et de choisir un avocat à la Cour d’un des barreaux établis au Grand-Duché de Luxembourg ou de se faire désigner un avocat par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Luxembourg. Le mineur non accompagné d’un représentant légal se voit désigner, dans les meilleurs délais, un administrateur ad hoc ».

Il résulte du dossier administratif et des pièces versées en cause que la notification opérée en date du 19 juin 2020 l’a été conformément aux prescriptions légales ; il résulte encore du dossier administratif que la personne retenue s’est régulièrement vue rappeler les droits qui lui sont reconnus pendant la période de rétention.

L’article 123 (6) de la loi du 29 août 2008 prévoit que le président s’assure que la personne retenue a été touchée par la convocation.

Il résulte à cet égard des pièces versées en cause que Monsieur … s’est bien vu notifier en mains propres la convocation du 29 juin 2020 pour l’audience du 3 juillet 2020. Nonobstant cette convocation, il ne s’est pas fait valablement représenter. Malgré ce fait, le soussigné statue à l’égard de toutes les parties, en vertu de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Quant au fond :

Quant au fond, l’article 120, paragraphe (1) de la loi du 29 août 2008 prévoit ce qui suit : « Afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement en application des articles 111, 116 à 118 […], l’étranger peut, sur décision du ministre, être placé en rétention dans une 3structure fermée, à moins que d’autres mesures moins coercitives telles que prévues à l’article 125, paragraphe (1), ne puissent être efficacement appliquées. Une décision de placement en rétention est prise contre l’étranger en particulier s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

[…] ».

Par ailleurs, en vertu de l’article 120, paragraphe (3) de la même loi : « La durée de la rétention est fixée à un mois. La rétention ne peut être maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. Elle peut être reconduite par le ministre à trois reprises, chaque fois pour la durée d’un mois si les conditions énoncées au paragraphe (1) qui précède sont réunies et qu’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien. Si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de rétention peut être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire. ».

L’article 120, paragraphe (1), de la loi du 29 août 2008 permet ainsi au ministre, afin de préparer l’exécution d’une mesure d’éloignement, de placer l’étranger concerné en rétention dans une structure fermée pour une durée maximale d’un mois, ceci plus particulièrement s’il existe un risque de fuite ou si la personne concernée évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement. En effet, la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement nécessite notamment la mise à disposition de documents de voyage valables, lorsque l’intéressé ne dispose pas des documents requis pour permettre son éloignement et que des démarches doivent être entamées auprès d’autorités étrangères notamment en vue de l’obtention d’un accord de reprise en charge ou de réadmission de l’intéressé. Elle nécessite encore l’organisation matérielle du retour, en ce sens qu’un moyen de transport doit être choisi et que, le cas échéant, une escorte doit être organisée. C’est précisément afin de permettre à l’autorité compétente d’accomplir ces formalités que le législateur a prévu la possibilité de placer un étranger en situation irrégulière en rétention pour une durée maximale d’un mois, mesure qui peut être prorogée par la suite.

En vertu de l’article 120, paragraphe (3), de la même loi, le maintien de la rétention est cependant conditionné par le fait que le dispositif d’éloignement soit en cours et soit exécuté avec toute la diligence requise, impliquant plus particulièrement que le ministre est dans l’obligation d’entreprendre toutes les démarches requises pour exécuter l’éloignement dans les meilleurs délais.

Une mesure de placement peut être reconduite à trois reprises, chaque fois pour une durée d’un mois, si les conditions énoncées au paragraphe (1) de l’article 120, précité, sont réunies et s’il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

Une décision de prorogation d’un placement en rétention est partant en principe soumise à la réunion de trois conditions, à savoir que les conditions ayant justifié la décision de rétention initiale soient encore données, que le dispositif d’éloignement soit toujours en cours et que celui-ci soit toujours poursuivi avec la diligence requise.

4Conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme1, il faut que l’éloignement de la personne retenue soit une perspective réaliste.

Enfin, en vertu de l’article 120, paragraphe (3), in fine, de la même loi, si, malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, la durée de la rétention peut encore être prolongée à deux reprises, à chaque fois pour un mois supplémentaire.

En l’espèce, il résulte des éléments de la cause que la personne retenue se trouve toujours actuellement en séjour irrégulier sur le territoire luxembourgeois.

En effet, comme indiqué ci-avant, le ministre, par décision du 12 octobre 2016, refusa à l’intéressé la protection internationale et lui ordonna de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours.

Il est encore constant en cause que la personne retenue ne disposait, à la date de la prise de l’arrêté actuellement déféré, pas de documents d’identité et de voyage valables, de sorte qu’il ne remplit pas les conditions énoncées à l’article 34, paragraphe (2), point 1, de la loi du 29 août 2008 qui requiert précisément d’un étranger de disposer d’un passeport et, le cas échéant, d’un visa en cours de validité.

Il en résulte l’existence dans le chef de la personne retenue d’un risque de fuite, légalement présumé par l’article 111, paragraphe (3), point c), point 1. de la loi du 29 août 2008, si l’étranger ne remplit pas ou plus les conditions de l’article 34 de la même loi.

Il s’ensuit que les conditions initiales ayant justifié que le ministre ait placé l’intéressé en rétention afin d’organiser son éloignement perdurent actuellement.

En ce qui concerne ensuite les diligences effectuées en vue de l’éloignement de la personne retenue, le soussigné relève tout d’abord qu’il est uniquement saisi d’une requête tendant au contrôle d’office de la décision du ministre de proroger une 4ème fois la mesure de rétention de Monsieur …, de sorte qu’il lui appartient seulement d’examiner le bien-fondé de ladite décision en s’assurant qu’à l’heure actuelle le dispositif d’éloignement est toujours en cours et poursuivi avec la diligence nécessaire et que les conditions spécifiques à une telle 4ème prorogation, à savoir qu’il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires, sont données.

A cet égard, force est d’abord de constater que le tribunal administratif a retenu dans son jugement du 3 avril 2020, confirmé par la Cour administrative dans son arrêt du 16 avril 2020, que les démarches entreprises jusque lors par les autorités luxembourgeoises devaient être considérées comme suffisantes, dans la mesure le Bureau d’Interpol du Luxembourg avait par un télégramme du 10 février 2020 fait une demande d’identification de Monsieur … auprès du Bureau d’Interpol situé en Algérie, tandis que par retour de télégramme du 12 février 2020, ce dernier avait informé les autorités luxembourgeoises que Monsieur … avait été identifié comme étant un ressortissant algérien, le service de police judiciaire, section criminalité organisée - police des étrangers, ayant encore été chargé, à travers un courrier du 20 février 1 CourEDH, 25 juin 2019, Al Husin c. Bosnie-Herzégovine (n° 2), req. n° 10112/16.

52020, d’organiser le départ de l’intéressé et que par courrier du 26 février 2020, les services du ministre avaient saisi les autorités algériennes d’une demande en vue de l’identification de l’intéressé et de la délivrance d’un laissez-passer. En date du 17 mars 2020, les services du ministre avaient encore rappelé cette demande au consulat de la République Algérienne, et par courrier électronique du 31 mars 2020, les services du ministre avaient à nouveau relancé les autorités consulaires d’Algérie.

Dans son jugement précité du 6 mai 2020, le tribunal a constaté que depuis le prononcé du jugement du 3 avril 2020, confirmé par arrêt de la Cour administrative du 16 avril 2020, les démarches suivantes avaient été effectuées, à savoir, par courriers électroniques des 14 avril et 5 mai 2020, les services du ministre ont à nouveau relancé les autorités consulaires d’Algérie concernant l’avancement du dossier du demandeur. Il ressort encore d’une note au dossier de l’agent en charge du dossier du demandeur du 28 avril 2020 que le service de police judiciaire, section criminalité organisée - police des étrangers, a été contacté afin de garder l’organisation de son retour en suspens en attendant son identification formelle par les autorités algériennes.

Dans son jugement du 5 juin 2020, le tribunal a encore constaté que depuis le prononcé du jugement du 6 mai 2020 et suite à l’information du 9 mai 2020 des autorités consulaires suivant laquelle l’identification du demandeur serait toujours en cours, l’agent en charge du dossier du demandeur a, à nouveau, interrogé les services du consulat d’Algérie par courrier électronique du 25 mai 2020 sur l’état d’avancement du dossier auquel il lui a été répondu par courrier électronique du 26 mai 2020 que le dossier était en cours d’identification auprès des autorités algériennes compétentes, de sorte que la réponse lui serait communiquée dès réception, ces démarches accomplies jusqu’au 5 juin 2020 ayant été jugées par le tribunal administratif comme suffisantes au vu des exigences légales.

Il résulte encore du dossier administratif que le 10 juin 2020 les autorités consulaires algériennes informèrent leurs homologues luxembourgeois que l’identification de la personne retenue était toujours en cours ; par courrier du 24 juin 2020, l’agent en charge du dossier de la personne retenue sollicita encore des nouvelles auprès de l’autorité consulaire algérienne, les autorités algériennes y ayant réagi en répondant le 25 juin 2020 que le dossier de Monsieur … était toujours en cours d’identification.

Au vu de l’ensemble des éléments ainsi relevés, le soussigné est amené à conclure que les diligences ainsi déployées par l’autorité ministérielle luxembourgeoise doivent être considérées, dans les circonstances de l’espèce, comme suffisantes, de manière que dans ces conditions la nécessité requise au sens de l’article 120, paragraphe (3), de la loi du 29 août 2008 pour la prolongation de la mesure de rétention est vérifiée en l’espèce.

Il convient encore de relever que la prorogation sous analyse s’inscrit plus particulièrement dans les hypothèses prévues à l’article 120, paragraphe (3), in fine, de la même loi, à savoir lorsque « malgré les efforts employés, il est probable que l’opération d’éloignement dure plus longtemps en raison du manque de coopération de l’étranger ou des retards subis pour obtenir de pays tiers les documents nécessaires », étant patent en cause que le retard actuel est causé par la nécessité pour les autorités luxembourgeoises de s’adresser aux autorités algériennes en vue de l’identification de l’intéressé, les services ministériels se retrouvant actuellement toujours dans l’attente d’une réponse des autorités consulaires algériennes.

6Il ne saurait en tout état de cause être reproché aux services ministériels de continuer leurs efforts - dans les limites des convenances et usages diplomatiques - en vue de l’identification de Monsieur … auprès des autorités consulaires algériennes, alors qu’il ne saurait être reproché au ministre d’épuiser toutes les voies possibles pour l’identification de l’intéressé en vue de permettre son éloignement. Par ailleurs, si l’intéressé devait critiquer les lenteurs ou l’inefficacité actuelle des démarches d’identification effectuées par les autorités luxembourgeoises auprès des services consulaires algériens, il lui appartiendrait, le cas échéant, de coopérer en vue de son identification en s’adressant directement aux autorités du pays dont il se réclame.

Dès lors, il convient, en l’état actuel du dossier, de retenir qu’à ce jour, l’éloignement du retenu demeure une perspective raisonnable, ni l’absence d’identification du requérant à l’heure actuelle, ni le défaut de réponse concrète du consulat algérien n’étant à ce jour définitifs.

S’il est certes vrai que du fait de la crise sanitaire de la COVID-19 les frontières internationales sont actuellement fermées, la situation actuelle, caractérisée essentiellement par la fermeture des frontières aériennes et la suspension des vols internationaux, ne signifie pas automatiquement qu’il n’existe aucune perspective que l’éloignement de l’intéressé vers l’Algérie puisse aboutir avant la fin de la durée maximale de la mesure de rétention.

En effet, la mesure de rétention initiale peut être prolongée encore une fois pour un mois, tandis qu’il résulte des explications fournies à l’audience par le délégué du gouvernement que la partie étatique estime pouvoir raisonnablement compter sur une réouverture prochaine des frontières algériennes à titre de réciprocité avec l’ouverture des frontières internationales de l’Union européenne, notamment à l’égard des ressortissants algériens, décidée en date du 1er juillet 2020, la Tunisie ayant ainsi à titre d’exemple déjà ré-ouvert ses frontières, ainsi le fait que la possibilité de retenir l’intéressé dans le cadre d’une mesure de placement expirera définitivement le 19 août 2020.

Il s’ensuit que la perspective d’éloigner l’intéressé demeure à ce stade raisonnable, alors qu’il subsiste un délai suffisant en vue d’exécuter l’éloignement de celui-ci vers l’Algérie avant cette date.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’en l’état actuel du dossier et à ce stade, le soussigné ne saurait utilement mettre en cause ni la légalité, ni le bien-

fondé de la décision déférée.

Concernant finalement la possibilité d’application de mesures moins coercitives, les dispositions des articles 120 et 125 de la loi du 29 août 2008 sont à interpréter en ce sens qu’en vue de la préparation de l’exécution d’une mesure d’éloignement, les trois mesures moins coercitives énumérées à l’article 125, paragraphe 1er, à savoir l’obligation pour l’étranger de se présenter régulièrement auprès des services ministériels après remise de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, l’assignation à résidence pour une durée maximale de six mois dans les lieux fixés par le ministre ou encore l’obligation pour l’étranger de déposer une garantie financière d’un montant de cinq mille euros, sont à considérer comme mesures proportionnées bénéficiant d’une priorité par rapport à une rétention pour autant qu’il soit satisfait aux deux exigences posées par ledit article 125, paragraphe 1er, pour considérer ces autres mesures moins coercitives comme suffisantes et que la rétention ne répond à l’exigence de proportionnalité et de subsidiarité que si aucune des autres mesures moins coercitives n’entre en compte au vu des circonstances du cas particulier.

7L’article 125, paragraphe 1er, de la loi du 29 août 2008 prévoit plus particulièrement que le ministre peut prendre la décision d’appliquer, soit conjointement, soit séparément, les trois mesures moins coercitives y énumérées à l’égard d’un étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire, tout en demeurant une perspective raisonnable, est reportée pour des motifs techniques, à condition que l’intéressé présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de fuite tel que prévu à l’article 111, paragraphe (3), de la même loi, tout en relevant qu’il s’agit d’une simple prérogative pour le ministre et qu’au vu de la présomption légale d’un risque de fuite dans le chef du concerné, celui-ci doit la renverser en justifiant notamment des garanties de représentation suffisantes.

En l’espèce, il se dégage du dossier administratif que les raisons avancées par la partie étatique pour justifier le recours à la mesure de rétention plus particulièrement en raison d’un risque de fuite dans le chef de Monsieur … résident surtout dans son séjour irrégulier au Luxembourg et dans le défaut de celui-ci de pouvoir justifier d’une adresse légale au Luxembourg : à défaut de toute circonstance et élément énervant actuellement ce constat, étant rappelé que dans son jugement du 5 juin 2020, précité, le tribunal administratif a retenu que la seule possibilité d’être hébergé par un tiers en l’absence du moindre autre élément visant à établir l’existence d’attaches particulières au Luxembourg, est insuffisant pour établir dans le chef d’un étranger, par ailleurs démuni de documents d’identité et qui n’appert pas être en mesure de verser une garantie financière, l’existence de garanties de représentation effective, il y a lieu de retenir que l’intéressé ne présente toujours pas de garanties suffisantes de représentation, et ne remplit donc pas les conditions préalables afin de bénéficier d’une mesure moins coercitive.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’arrêté ministériel du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur … est à confirmer.

Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties et en audience publique ;

déclare recevable la requête du ministre de l’Immigration et de l’Asile tendant à la vérification de la régularité de la décision de prolongation de la rétention administrative ;

la dit encore justifiée au fond ;

partant confirme l’arrêté ministériel du 15 juin 2020 ordonnant la prorogation de la mesure de placement en rétention de Monsieur …;

Ainsi jugé et prononcé au tribunal administratif, date qu’en tête.

s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 3 juillet 2020 Le greffier du tribunal administratif 8 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44594
Date de la décision : 03/07/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2020-07-03;44594 ?

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