Tribunal administratif N° 42594 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 avril 2019 1re chambre Audience publique extraordinaire du 2 mai 2019 Recours formé par Monsieur …, …, contre des décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)
___________________________________________________________________________
JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 42594 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 2 avril 2019 par Maître Ibtihal El Bouyousfi, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né … (Maroc) et être de nationalité marocaine, demeurant à L-…, tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 13 mars 2019 de recourir à la procédure accélérée, de celle portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire ;
Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 19 avril 2019 ;
Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions critiquées ;
Le juge, en remplacement du président de la première chambre du tribunal administratif, entendu en son rapport, ainsi que Maître Nathalie Gomes, en remplacement de Maître Ibtihal El Bouyousfi, et Madame le délégué du gouvernement Hélène Massard en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 24 avril 2019.
Le 9 novembre 2018, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, désigné ci-après par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 18 décembre 2015 à relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».
Les déclarations de Monsieur… sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, section criminalité organisée – police des étrangers, dans un rapport du même jour.
En date des 16 et 17 janvier 2019, Monsieur… fut entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.
Par décision du 13 mars 2019, notifiée au litismandataire de l’intéressé par courrier recommandé expédié le 15 mars 2019, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », résuma les déclarations de Monsieur… comme suit :
« […] En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 9 novembre 2018, le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes des 16 et 17 1janvier 2019 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale, ainsi que le document versé à l'appui de votre demande de protection internationale.
Il ressort de vos dires que vous auriez quitté le Maroc parce que vous craindriez d'être appelé pour effectuer le service militaire. Vous pensez que l'armée marocaine aurait l'intention de vous envoyer dans votre région d'origine. En tant que saharien vous seriez particulièrement visé par l'armée marocaine parce que « les …(sic) connaissent le territoire et peuvent mieux s'opposer au Polisario » (page 5 du rapport d'entretien). Vous déclarez avoir été convoqué oralement plusieurs fois quand vous auriez eu 18 ans, c'est-à-dire en 1994.
Il ressort également de vos dires que vous auriez introduit une demande de protection internationale parce que vous n'auriez pas de papiers d'identité en tant que Sahraoui.
Selon vos dires, vous auriez vécu jusqu'à l'âge de 18 ans à … au Maroc et vous vous seriez installé à … au Maroc où vous auriez travaillé en tant que pêcheur pendant 10 ans. En 2017, votre mère vous aurait dit que vous auriez été convoqué de nouveau oralement.
Vous auriez visité votre famille à … en 2018 avant de partir en Europe. Pour quitter le Maroc, vous auriez payé un chauffeur de camion qui vous aurait amené jusqu'au nord de la France en passant par l'Espagne.
A l'appui de votre demande de protection internationale, vous présentez une copie d'un reçu d'un enregistrement de la MINURSO (Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental). […] ».
Le ministre informa ensuite Monsieur… qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 27, paragraphe (1), sous a), de la loi du 18 décembre 2015 et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire.
Le ministre retint que le fait de ne pas vouloir faire le service militaire ne saurait justifier l’octroi du statut de réfugié, étant donné que le service militaire constituerait une obligation légale et ne saurait être perçu comme une persécution au sens de la Convention de Genève. En se référant à une publication du 31 octobre 2007 intitulée « Canada : Immigration and Refugee Board of Canada », il insista sur le fait que le service militaire obligatoire au Maroc aurait été supprimé le 31 août 2006.
Le ministre souleva ensuite, en se référant à un article de l’« European Asylum Support Office (EASO) », que le demandeur aurait pu solliciter une carte d’identité marocaine en tant que Sahraoui.
Il estima, par ailleurs, qu’il ne serait pas exclu que des raisons matérielles sous-
tendraient sa demande de protection internationale, tout en soulignant que des raisons économiques ne sauraient davantage justifier une demande de protection internationale.
Le ministre ajouta que le fait d’avoir séjourné illégalement sur le territoire français sans introduire une demande de protection internationale conforterait le doute pesant sur la déclaration de Monsieur… qu’il aurait été victime de persécutions dans son pays d’origine en précisant qu’une personne réellement persécutée aurait cherché de l’aide dans le premier pays sûr rencontré.
2 Le ministre constata encore que les faits mis en avant par Monsieur… ne justifieraient pas non plus l’octroi du statut conféré par la protection subsidiaire puisqu’il n’établirait pas qu’il courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015.
Enfin, le ministre souleva la possibilité d’une fuite interne dans le chef de Monsieur….
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 avril 2019, Monsieur… a fait introduire un recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 13 mars 2019 d’opter pour la procédure accélérée, de celle du même jour ayant refusé de faire droit à sa demande de protection internationale, et de l’ordre de quitter le territoire prononcé à son encontre.
Etant donné que l’article 35, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre les décisions de refus d’une demande de protection internationale prises dans ce cadre et contre l’ordre de quitter le territoire prononcé dans ce contexte, et attribue compétence au président de chambre ou au juge qui le remplace pour connaître de ce recours, la soussignée est compétente pour connaître du recours en réformation dirigé contre les décisions du ministre du 13 mars 2019, telles que déférées, recours qui est encore à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.
A l’appui de son recours et au-delà des faits et rétroactes relatés ci-dessus, le demandeur déclare être un Sahraoui issu de la tribu des … installée sur le territoire du Sahara occidental qui serait annexé militairement par le Maroc, mais revendiqué simultanément par le Front Polisario qui l’aurait proclamé en 1976 comme République arabe sahraouie démocratique (RASD). Il explique qu’il serait né en … dans la ville de … considérée au Maroc comme la porte du Sahara, mais qu’il aurait vécu avec sa famille jusqu’à l’âge de 18 ans dans la ville de … qui serait sous le contrôle et sous l’administration du Maroc depuis 1975, mais revendiquée comme capitale pour la RASD par le Front Polisario. Il se serait ensuite installé seul à …, une ville située sur la côte atlantique du territoire du Sahara occidental également sous l’administration du Maroc, où il aurait travaillé illégalement en tant que pêcheur avant qu’il n’ait été contraint de quitter définitivement le Sahara occidental du fait des circonstances se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.
En se référant à son rapport d’entretien des 16 et 17 janvier 2019, il estime avoir exposé les pratiques de persécutions à caractère politique dont il aurait fait personnellement l’objet de la part des autorités marocaines du fait de son origine sahraouie et avoir soulevé de manière substantielle les atteintes graves, notamment aux droits sociaux et économiques, visant le peuple sahraoui dans les territoires sous l’autorité du Maroc.
Il déclare avoir été personnellement visé par le responsable de la circonscription la ville de …, dans laquelle il aurait résidé, en vue de son enrôlement dans l’armée marocaine, alors que ce dernier serait venu à de maintes reprises à son domicile pour déposer une convocation l’invitant à se présenter à l’administration marocaine compétente pour entamer la procédure d’enrôlement. Face à cette menace, il aurait décidé de quitter son domicile pour s’installer à … où il aurait toutefois vécu dans la crainte de faire l’objet d’un contrôle d’identité de la part de 3l’armée marocaine et d’être arrêté, emprisonné et enrôlé de force, alors qu’il ne posséderait aucune pièce d’identité.
Il insiste sur le fait que la discrimination contre les Sahraoui de la part des autorités marocaines serait partout pareille au Sahara occidental, de sorte qu’il lui aurait été impossible de s’installer dans une autre région ou une autre ville du Sahara occidental.
Il déclare qu’il craint retourner au Maroc où il risquerait d’être arrêté, emprisonné et condamné du fait d’avoir quitté clandestinement son pays d’origine et où il serait soupçonné d’être en relation avec le Front Polisario.
En droit, le demandeur sollicite en premier lieu qu’il soit pris acte qu’il est un Sahraoui ayant toujours vécu au Sahara occidental sous l’autorité marocaine et plus particulièrement dans la ville de …, puis dans celle de ….
Quant à la décision ministérielle de statuer dans le cadre d’une procédure accélérée, il reproche au ministre une motivation succincte et superficielle des faits en ce que celui-ci aurait écarté les éléments les plus pertinents de son récit de façon beaucoup trop expéditive, de sorte que les seuls faits retenus dans son chef seraient des faits accessoires à qualifier de non pertinents.
Tout d’abord, il relève que la publication de 2007 intitulée « Immigration and Refugee Board of Canada » à laquelle le ministre se réfère pour affirmer que le Maroc aurait éliminé le service militaire obligatoire n’établirait pas que l’élimination du service militaire en question s’appliquerait également aux populations sahraouies vivant dans les territoires du Sahara occidental, de sorte à ne pas être pertinente en l’espèce.
En se référant à un extrait du « Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut de réfugié » de l’UNHCR, il soutient qu’il ressortirait à suffisance de ses déclarations faites lors de ses entretiens que son refus d’accomplir le service militaire serait principalement fondé sur des raisons ethniques ou raciales et plus particulièrement sur le caractère discriminatoire de l’enrôlement des Sahraouis au sein de l’armée marocaine.
S’agissant de l’affirmation du ministre selon laquelle les Sahraouis, résidant dans les zones sous le contrôle du Maroc, seraient considérés comme des nationaux marocains susceptibles de faire établir un passeport marocain, de sorte qu’il lui aurait été possible de solliciter une carte d’identité marocaine, le demandeur soutient que l’établissement d’une carte d’identité marocaine pour les Sahraouis semblerait permettre aux autorités marocaines de les identifier en tant que Sahraoui pour des motifs militaires et géostratégiques, et de les enrôler de force à l’armée marocaine.
En ce qui concerne ensuite l’affirmation du ministre selon laquelle des raisons matérielles seraient susceptibles de sous-tendre sa demande de protection internationale, il fait valoir, en se référant au « Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut de réfugié » de l’UNHCR, précité, qu’il aurait été contraint de travailler au noir dans son propre pays d’origine du fait de son origine sahraouie. Il estime que le ministre aurait commis une erreur grave d’appréciation en ignorant que derrière les mobiles économiques soulevés par lui 4dans son récit se cacheraient en réalité des manœuvres d’inspiration raciale de la part des autorités marocaines à l’encontre du peuple sahraoui tout entier.
En s’appuyant sur un article publié sur le « site web de l’Humanité », il considère qu’il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir déposé une demande de protection internationale en France dans la mesure où celle-ci soutiendrait manifestement la politique marocaine exercée dans les territoires du Sahara occidental.
Quant à la décision du ministre de lui refuser le statut de réfugié, le demandeur réitère en substance ses moyens exposés ci-dessus en insistant tout particulièrement sur la discrimination des Sahraouis par les autorités marocaines.
Il soutient que les agissements dont il craindrait d’être victime devraient s’analyser en une atteinte à son droit fondamental à la protection de la vie et à l’intégrité physique et morale ainsi qu’à ses droits économiques et sociaux, de sorte à être d’une gravité suffisante pour être considérées comme des actes de persécution au sens de la Convention de Genève et de la loi du 18 décembre 2015.
En se référant au « Guide de l’UNHCR » précité, il met en exergue qu’il ne saurait être attendu d’un demandeur de protection internationale qu’il prouve « avec certitude » toutes ses craintes, tout en insistant sur le fait qu’en matière de protection internationale, le principe général de droit selon lequel la charge de la preuve incombe au demandeur serait nuancé. En effet, compte tenu de la difficulté pour les personnes qui ont fui une persécution à fournir des papiers personnels et des preuves documentaires et de leur impossibilité d’administrer la preuve de certaines déclarations, le demandeur donne à considérer que la charge de la preuve serait partagée entre le demandeur et l’Etat compétent pour examiner une demande de protection internationale, tel que cela aurait été décidé tant par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans un arrêt du 22 novembre 20121 que par la Cour européenne des droits de l’Homme (CourEDH) dans un arrêt du 17 juillet 20082. Il considère que les discriminations dont il fait état devraient être comprises par le ministre dans un contexte de persécutions à caractère politique et discriminatoire de la part des autorités marocaines à l’encontre des Sahraouis.
Quant au refus du ministre de lui accorder la protection subsidiaire, le demandeur avance que les faits relatés lors de son entretien seraient suffisamment graves au sens de l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015, de sorte qu’il devrait être considéré comme encourant un risque réel et avéré de subir des atteintes graves en cas de retour au Sahara occidental. Il soutient que le fait de devoir vivre constamment dans une crainte que ces atteintes graves à sa personne se reproduiront serait à assimiler à un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention de sauvegarde de droits de l’Homme et des libertés fondamentales (CEDH) et de l’article 4 de la Charte fondamentale des droits de l’Union européenne (la Charte).
A cela s’ajouterait que la situation sécuritaire générale dans les territoires du Sahara occidental serait alarmante en raison de tensions armées régulières entre le Front Polisario et 1 CJUE, 22 novembre 2012, affaire C-277/11, M.M. contre Minister of Justice, Equlity and Law Reform, Irelande, §§ 65 et 66.
2 CourEDH, 4e section, 17 juillet 2008, N.A. contre Royaume-Uni, Req. N° 25904/07, § 111, - ADL du 2 août 2008 ; R.J. contre France, § 60.
5les autorités marocaines et algériennes qui auraient nécessité le maintien de la MINURSO en raison d’une violation régulière des accords militaires.
S’agissant de l’alternative d’une fuite interne qui lui est opposée, le demandeur reproche au ministre de ne pas avoir pris en considération sa situation personnelle ainsi que les conditions prévues dans la « Directive Qualification » qui seraient reprises en substance à l’article 8 des Recommandations de Michigan sur l’alternative d’une protection interne. Ainsi, le ministre ne démontrerait pas l’existence d’une alternative raisonnable de fuite interne dans son chef eu égard à sa situation personnelle, le demandeur insistant sur le fait qu’il aurait clairement indiqué lors de son entretien qu’il craignait de faire l’objet d’un contrôle à … par les autorités marocaines qui le contraindraient indubitablement à se faire enrôler dans l’armée sous peine d’emprisonnement.
Il met en exergue que le ministre ne démontrerait pas comment il pourrait se réinstaller en tant que Sahraoui dans une autre grande ville portuaire au Maroc telle que Casablanca, Essaouira ou Tanger, sans être confronté à des risques de persécutions conformément aux exigences de l’article 8 de la directive « Qualification », sachant qu’il aurait toujours vécu et grandi au Sahara occidental.
Quant à l’ordre de quitter le territoire, le demandeur invoque les articles 33, paragraphe (1), de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et le Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par le règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après désigné par « la Convention de Genève », et 19 de la Charte, une note sur la protection internationale de l’UNHCR ainsi qu’un arrêt de la CourEDH du 15 novembre 20113 pour soutenir qu’il incomberait aux Etats de veiller à ce que des expulsions n’exposeraient pas les personnes concernées à des risques de torture ou d’autres formes de mauvais traitements dans le pays de renvoi, de sorte que la mise à exécution effective de l’ordre de quitter le territoire déféré emporterait irrémédiablement une violation des articles 3 de la CEDH et 4 de la Charte dans son chef.
Il relève, enfin, qu’aux termes de l’article 20, alinéa 3, de la directive « Qualification », ainsi que suivant un avis du Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés relatif à l’évaluation des demandes d’asile de personnes ayant des besoins particuliers de mai 2012, il serait à considérer comme une personne vulnérable spécifique du fait de son vécu au Sahara occidental et de son parcours migratoire engendrant chez lui des symptômes traumatiques susceptibles d’induire des troubles psychologiques.
Le délégué du gouvernement conclut, quant à lui, au rejet du recours, pris en son triple volet.
Aux termes de l’article 35, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 : « Contre la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et de la décision de refus de la demande de protection internationale prise dans ce cadre, de même que contre l’ordre de quitter le territoire, un recours en réformation est ouvert devant le tribunal administratif. Le recours contre ces trois décisions doit faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé. Il doit être introduit dans un délai de quinze jours à partir de la notification.
3 CourEDH, 15 novembre 2011, requête n° 48205/09, affaire … contre Boznie-Herzégovine, n° 241/11.
6Le président de chambre ou le juge qui le remplace statue dans le mois de l’introduction de la requête. Ce délai est suspendu entre le 16 juillet et le 15 septembre, sans préjudice de la faculté du juge de statuer dans un délai plus rapproché. Il ne peut y avoir plus d’un mémoire de la part de chaque partie, y compris la requête introductive. La décision du président de chambre ou du juge qui le remplace n’est pas susceptible d’appel.
Si le président de chambre ou le juge qui le remplace estime que le recours est manifestement infondé, il déboute le demandeur de sa demande de protection internationale.
Si, par contre, il estime que le recours n’est pas manifestement infondé, il renvoie l’affaire devant le tribunal administratif pour y statuer ».
Il résulte de cette disposition qu’il appartient au magistrat, siégeant en tant que juge unique, d’apprécier si le recours est manifestement infondé, dans la négative, le recours étant renvoyé devant le tribunal administratif siégeant en composition collégiale pour y statuer.
A défaut de définition contenue dans la loi du 18 décembre 2015 de ce qu’il convient d’entendre par un recours « manifestement infondé », il appartient à la soussignée de définir cette notion et de déterminer, en conséquence, la portée de sa propre analyse.
A cet égard, il convient de prime abord de relever que l’article 35, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015 dispose que l’affaire est renvoyée ou non devant le tribunal administratif selon que le recours est ou n’est pas manifestement infondé, de sorte que la notion de « manifestement infondé » est à apprécier par rapport aux moyens présentés à l’appui du recours contentieux, englobant toutefois nécessairement le récit du demandeur tel qu’il a été présenté à l’appui de sa demande et consigné dans le cadre de son rapport d’audition.
Le recours est à qualifier comme manifestement infondé si le rejet des différents moyens invoqués à son appui s’impose de manière évidente, en d’autres termes, le magistrat siégeant en tant que juge unique ne doit pas ressentir le moindre doute que les critiques soulevées par le demandeur à l’encontre des décisions déférées sont visiblement dénuées de tout fondement. Dans cet ordre d’idées, force est encore de relever que dans l’hypothèse où un recours s’avère ne pas être manifestement infondé, cette conclusion n’implique pas pour autant que le recours soit nécessairement fondé, la seule conséquence de cette conclusion est le renvoi du recours par le président de chambre ou le juge qui le remplace devant une composition collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.
1) Quant au recours tendant à la réformation de la décision du ministre de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée La décision ministérielle est, en l’espèce, fondée sur les dispositions du point a) de l’article 27, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015, aux termes desquelles « Sous réserve des articles 19 et 21, le ministre peut statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée dans les cas suivants :
a) le demandeur, en déposant sa demande et en exposant les faits, n’a soulevé que des questions sans pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale ; […] ».
Il s’ensuit qu’aux termes de l’article 27, paragraphe (1), sous a), de la loi du 18 décembre 2015, le ministre peut statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection 7internationale par voie de procédure accélérée s’il apparaît que les faits soulevés lors du dépôt de la demande sont sans pertinence au regard de l’examen de cette demande.
La soussignée est dès lors amenée à analyser si les moyens avancés par le demandeur à l’encontre de la décision du ministre de recourir à la procédure accélérée sont manifestement dénués de tout fondement, de sorte que leur rejet s’impose de manière évidente ou si les critiques avancées par lui ne permettent pas d’affirmer en l’absence de tout doute que le ministre a valablement pu se baser sur l’article 27, paragraphe (1), point a), de la loi du 18 décembre 2015 pour analyser la demande dans le cadre d’une procédure accélérée, de sorte que le recours devra être renvoyé devant une composition collégiale du tribunal administratif pour statuer sur ledit recours.
Force est de constater que la notion de « réfugié » est définie par l’article 2 f) de la loi du 18 décembre 2015 comme étant « tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner, et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 45 ».
L’octroi du statut de réfugié est notamment soumis à la triple condition que les actes invoqués sont motivés par un des critères de fond définis à l’article 2 f) de la loi du 18 décembre 2015, que ces actes sont d’une gravité suffisante au sens de l’article 42, paragraphe (1), de la loi du 18 décembre 2015, et qu’ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes des articles 39 et 40 de la loi du 18 décembre 2015, étant entendu qu’au cas où les auteurs des actes sont des personnes privées, elles ne sont à qualifier comme acteurs que dans le cas où les acteurs visés aux points a) et b) de l’article 40 de la loi du 18 décembre 2015 ne peuvent ou ne veulent pas accorder une protection contre les persécutions et que le demandeur ne peut ou ne veut pas se réclamer de la protection de son pays d’origine.
S’agissant du statut conféré par la protection subsidiaire, aux termes de l’article 2 g) de la loi du 18 décembre 2015, est une « personne pouvant bénéficier de la protection subsidiaire», «tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d’origine ou, dans le cas d’un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l’article 48, l’article 50, paragraphes (1) et (2), n’étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n’étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays », l’article 48 de la même loi énumérant, en tant qu’atteintes graves, sous ses points a), b) et c), « la peine de mort ou l’exécution ; la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine ; des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».
Il suit de ces dispositions, ensemble celles des articles 39 et 40 de la même loi cités ci-
avant, que l’octroi de la protection subsidiaire est notamment soumis à la double condition que les actes invoqués par le demandeur, de par leur nature, entrent dans le champ d’application de l’article 48 précité de la loi du 18 décembre 2015, à savoir qu’ils répondent aux hypothèses envisagées aux points a), b) et c), précitées, de l’article 48, et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens des articles 39 et 40 de cette même loi.
8 Il échet à la soussignée de constater que les motifs à la base de la protection internationale de Monsieur… se résument en substance au fait, d’une part, qu’il craint un enrôlement forcé au sein de l’armée marocaine en cas de retour dans son pays d’origine en donnant à considérer que celle-ci l’enverrait dans le Sahara occidental qui serait un territoire parsemé de mines4 et en mettant en exergue le caractère discriminatoire que les autorités marocaines adopteraient à l’encontre de Sahraouis, et, d’autre part, qu’il se trouverait dans l’impossibilité de faire établir une carte d’identité marocaine et, par conséquent, de trouver un emploi officiel5 dans son pays d’origine, tout en soulignant là également sa crainte d’un enrôlement forcé au sein de l’armée marocaine ainsi que la politique raciale des autorités marocaines à l’encontre des Sahraouis.
S’agissant de prime abord des conditions d’octroi du statut de réfugié, la soussignée relève que l’insoumission ne constitue pas à elle seule un motif valable de reconnaissance du statut de réfugié6.
Ainsi, la seule crainte avancée par le demandeur basée sur la considération qu’il serait enrôlé de force dans l’armée marocaine en cas de retour dans son pays d’origine n’est manifestement dictée par aucune des considérations ayant un lien avec l’un des critères de fond prévus par la Convention de Genève, à savoir, la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques ou encore l’appartenance à un certain groupe social.
A cela s’ajoute que si le demandeur déclare avoir reçu à plusieurs reprises des convocations pour effectuer son service militaire lorsqu’il avait 18 ans7, soit en 1994, alors que celui-ci était obligatoire à l’époque, la soussignée constate qu’il résulte des explications non contestées du ministre, sources internationales à l’appui, que le service militaire obligatoire au Maroc a été supprimé en 2006, de sorte que ses craintes invoquées dans ce contexte sont à l’évidence, à l’heure actuelle, dénouées de tout fondement.
S’agissant de l’argumentation du demandeur selon laquelle la partie étatique ne démontrerait pas que l’élimination du service militaire s’appliquerait également aux populations sahraouies, la soussignée relève qu’il ne ressort d’aucune pièce versée en cause que les Sahraouis continueraient à être enrôlés de force à l’armée marocaine malgré l’abolition du service militaire obligatoire en 2006, de sorte que le moyen afférent du demandeur est à rejeter pour rester manifestement à l’état de pure affirmation.
Il en est de même en ce qui concerne l’affirmation du demandeur selon laquelle « au Sahara occidental, il n’y a pas d’âge limite pour être enrôlé à l’armée. Même à l’âge de 50 ans, un …est mobilisable. »8, celle-ci n’étant, en effet, non seulement étayée par aucun élément probant versé en cause, mais étant, par ailleurs, contredite par les pièces produites par le délégué du gouvernement dont il se dégage que si le Maroc a effectivement réintroduit en 2019 le service militaire obligatoire pour la durée d’un an, cette obligation ne concerne que les jeunes marocains entre 19 et 25 ans, de sorte que le demandeur, âgé de 43 ans, n’encourt de ce point de vue, aucun risque de devoir effectuer le service militaire au Maroc en cas de retour.
4 Page 2 et 5 du rapport d’entretien 5 Pages 5 et 8 du rapport d’entretien.
6 Trib. adm. 17 février 1997, n° 9586 du rôle, Pas. adm. 2018, V° Etrangers, n° 161 et les autres références y citées.
7 Page 6 du rapport d’entretien.
8 Page 7 du rapport d’entretien.
9 Si le demandeur relate encore lors de son entretien qu’en 2017 « le responsable de la circonscription est venu demander [auprès de sa mère] où je me trouvais »9, la soussignée est amenée à retenir, mis à part le fait que le demandeur n’a versé aucun document qui permettrait d’étayer ses dires, qu’il résulte suffisamment des développements qui précèdent que la crainte du demandeur de devoir rejoindre l’armée marocaine est purement hypothétique, les sources internationales invoquées par le délégué du gouvernement permettant, en effet, d’établir à suffisance qu’au regard notamment de l’âge du demandeur, celui-ci n’encourt aucun risque de devoir rejoindre l’armée marocaine.
Au vu des considérations qui précèdent, l’allégation du demandeur selon laquelle il se trouverait dans l’impossibilité d’établir une carte d’identité au motif qu’il serait enrôlé de force dans l’armée marocaine, est également à rejeter pour manifestement ne pas être fondée, la soussignée venant de retenir que la crainte du demandeur de devoir adhérer au service militaire en cas de retour au Maroc est purement hypothétique.
Il convient encore de préciser, à cet égard, qu’il résulte des explications du ministre et du délégué du gouvernement, source internationale à l’appui, que le demandeur a pu et peut toujours solliciter une carte d’identité marocaine en tant que Saharoui, la loi marocaine prévoyant, en effet, que les Saharouis « living in the area under Moroccan control are Moroccan nationals » et qu’ils sont « eligible for passeports and other official Moroccan documents »10.
En ce qui concerne, enfin, l’affirmation du demandeur selon laquelle « Au Maroc, je ne peux rien faire. D’abord, je n’ai pas de carte d’identité marocaine. Ainsi je ne peux exercer aucun travail. »11, la soussignée relève tout d’abord que des considérations économiques ne sauraient justifier une demande de protection internationale, alors qu’elles ne rentrent pas dans le champ d’application de la Convention de Genève respectivement de la loi du 18 décembre 2015.
Il échet, par ailleurs, de préciser que les allégations du litismandataire du demandeur dans son recours selon lesquelles il aurait été obligé de travailler au noir dans son propre pays du fait de son origine sahraouie et du fait qu’il n’aurait pas pu établir une carte d’identité marocaine, sont en tout état de cause à rejeter pour être manifestement infondées dans la mesure où la soussignée vient de retenir ci-avant que le demandeur aurait pu réclamer auprès des autorités marocaines une carte d’identité marocaine sans devoir craindre d’être enrôlé de force dans l’armée marocaine, de sorte que l’affirmation suivant laquelle il n’aurait pas pu trouver de travail légal du fait de l’impossibilité de se voir octroyer une carte d’identité reste également à l’état de pure allégation.
Il échet, finalement, à la soussignée de constater qu’il n’est manifestement pas établi que tout membre de la communauté sahraouie serait discriminé du seul fait de cette appartenance, de sorte que les affirmations du demandeur à cet égard sont également rejetées pour rester à l’état de pure allégation.
En l’absence d’autre motifs avancés par le demandeur, celui-ci ayant en effet affirmé lors de son entretien des 16 et 17 janvier 2019 ne jamais avoir rencontré de problèmes depuis 9 Idem 10 European Union: European Asylum Support Office (EASO), Sahrawi citizenship/nationality in Western Sahara, Morocco and Algeria, 16 novembre 2015, https://www.refworld.org/docid/577cc8684.html.
11 Page 5 du rapport d’entretien.
10qu’il a déménagé à … jusqu’à son arrivée au Luxembourg (« Mon seul problème c’est d’éviter l’armée et je n’ai pas de papiers d’identité »12), la soussignée est amenée à constater que le demandeur n'a manifestement soulevé que des faits sans pertinence au regard de l'examen visant à déterminer s'il remplit les conditions requises pour prétendre au statut de réfugié.
S’agissant de la protection subsidiaire, la soussignée relève que les faits relatés par le demandeur lors de son entretien et dans le cadre du recours sous examen sont manifestement insuffisants pour retenir qu’il fait état de motifs sérieux et avérés de croire qu'en cas de retour dans son pays d'origine, il courrait un risque réel de subir des atteintes graves, à savoir la peine de mort ou l'exécution, la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants ou encore des menaces graves et individuelles contre sa vie ou sa personne en raison de son refus de rejoindre l’armée marocaine ou en raison de la situation sécuritaire générale dans les territoires du Sahara occidental, qui, selon le demandeur, serait alarmante, alors que des tensions armées régulières existeraient entre le Front Polisario et les autorités marocaines et algériennes ayant rendu nécessaire le maintien de la MINURSO en raison d’une violation régulière des accords militaires.
En effet, mises à part les déclarations du demandeur selon lesquelles il aurait dû travailler au noir, alors qu’il lui aurait été impossible d’établir une de carte d’identité, faits qui découlent en substance de sa crainte d’être enrôlé de force dans l’armée marocaine, laquelle a été qualifiée ci-dessus comme étant purement hypothétique, force est à la soussignée de constater que le demandeur ne fait état d’aucun autre élément ou acte pertinent qui pourrait être assimilé à un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la CEDH et de l’article 4 de la Charte, de sorte que tous les développements du demandeur à cet égard sont à rejeter pour être manifestement non fondés.
Par ailleurs, il ne ressort d’aucun élément soumis à l’appréciation de la soussignée que la situation sécuritaire générale au Maroc dans les territoires du Sahara occidental, résultant de tensions existantes entre le Front Polisario et les autorités marocaines et algériennes, serait à tel point alarmante que la vie de tout habitant au Maroc et plus précisément au Sahara occidental serait en danger du seul fait de sa présence sur ce territoire.
En l’absence de tout autre fait invoqué qui serait de nature à entrer dans le champ d’application de l’article 48 précité de la loi du 18 décembre 2015, la soussignée conclut que le demandeur n’a présenté que des faits qui sont manifestement sans pertinence par rapport aux conditions d'octroi d'une protection subsidiaire.
Il suit des considérations qui précèdent que le recours du demandeur, dans la mesure où il tend à la réformation de la décision du ministre d’analyser sa demande d’octroi d’une protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, est manifestement infondé, en ce sens que les moyens qu’il a présentés pour établir qu’il aurait présenté des faits ayant une quelconque pertinence au regard de l’examen visant à déterminer s’il remplit les conditions requises pour prétendre au statut conféré par la protection internationale sont visiblement dénués de tout fondement.
Il s’ensuit que le recours en réformation contre la décision du ministre de statuer dans le cadre d’une procédure accélérée est à rejeter comme étant manifestement non fondé.
12 Page 7 du rapport d’entretien.
112) Quant au recours en réformation de la décision du ministre portant refus d’une protection internationale S’agissant du recours dirigé contre le refus du ministre d’accorder au demandeur une protection internationale, force est de rappeler que la soussignée vient ci-avant de retenir, dans le cadre de l’analyse de la décision de statuer sur la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée que le demandeur est resté en défaut de présenter des faits d’une quelconque pertinence pour prétendre au statut conféré par la protection internationale, que ce soit au statut de réfugié ou à celui conféré par la protection subsidiaire. Ainsi la soussignée, au niveau de la décision au fond du ministre de refuser la protection internationale, ne saurait que réitérer son analyse précédente en ce sens que c’est pour les mêmes motifs qu’il y a lieu de conclure, au vu des faits et moyens invoqués par le demandeur, à l’appui de sa demande en obtention d’une protection internationale, dans le cadre de ses auditions, ainsi qu’au cours de la procédure contentieuse et des pièces produites en cause, qu’il ne remplit manifestement pas les conditions requises pour prétendre à l’un des statuts conférés par la protection internationale, de sorte que le recours contre la décision de refus d’un statut de protection internationale est également à déclarer comme manifestement infondé.
3) Quant au recours tendant à la réformation de la décision ministérielle portant ordre de quitter le territoire Il convient de relever qu’aux termes de l’article 34, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015, « une décision du ministre vaut décision de retour. […] ». En vertu de l’article 2 q) de la loi du 18 décembre 2015, la notion de « décision de retour » se définit comme « la décision négative du ministre déclarant illégal le séjour et imposant l’ordre de quitter le territoire ». Si le législateur n’a pas expressément précisé que la décision du ministre visée à l’article 34, paragraphe (2), précité, est une décision négative, il y a lieu d’admettre, sous peine de vider la disposition légale afférente de tout sens, que sont visées les décisions négatives du ministre. Il suit dès lors des dispositions qui précèdent que l’ordre de quitter est la conséquence automatique du refus de protection internationale.
Dans la mesure où la soussignée vient de retenir que le recours dirigé contre le refus d’une protection internationale est manifestement infondé et que c’est partant à juste titre que le ministre a rejeté la demande de protection internationale du demandeur, impliquant qu’il a à bon droit pu retenir que le retour du demandeur dans son pays d’origine ne l’expose pas à des conséquences graves, il a également valablement pu assortir cette décision d’un ordre de quitter le territoire, sans violer le principe d’un non-refoulement invoqué par le demandeur ou contrevenir aux articles 3 de la CEDH ou 4 de la Charte.
S’agissant de la prétendue violation de l’article 20, alinéa 3, de la directive 2011/95/UE du Parlement et du Conseil européen du 13 décembre 2011, dite Qualification » invoquée par le demandeur, la soussignée se doit de relever que le demandeur n’a à aucun moment fait état d’une vulnérabilité spécifique dans son chef qui n’est d’ailleurs étayée par aucun élément probant versé en cause, de sorte que le moyen afférent est à rejeter pour être manifestement infondé.
Il s’ensuit et à défaut d’autres moyens que le recours dirigé contre l’ordre de quitter le territoire est à son tour à rejeter comme étant manifestement infondé.
Par ces motifs, 12 Le juge, en remplacement du président de la première chambre du tribunal administratif, statuant contradictoirement ;
reçoit en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 13 mars 2019 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre le refus d’une protection internationale et contre l’ordre de quitter le territoire ;
au fond, déclare le recours dirigé contre ces trois décisions manifestement infondé et en déboute ;
déboute le demandeur de sa demande de protection internationale ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique extraordinaire du 2 mai 2019, par la soussignée, juge, en remplacement du président de la première chambre du tribunal administratif, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Michèle Hoffmann s. Alexandra Bochet Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 2 mai 2019 Le Greffier du Tribunal administratif 13