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26/10/2018 | LUXEMBOURG | N°41781

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 octobre 2018, 41781


Tribunal administratif N° 41781 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 octobre 2018 Audience publique du 26 octobre 2018 Recours formé par Monsieur …, … contre trois décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41781 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 octobre 2018 par Maître Katy Demarche, avocat à la Cour, inscr

it au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité b...

Tribunal administratif N° 41781 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 octobre 2018 Audience publique du 26 octobre 2018 Recours formé par Monsieur …, … contre trois décisions du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 27, L.18.12.2015)

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 41781 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 octobre 2018 par Maître Katy Demarche, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité béninoise et demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 17 septembre 2018 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, de la décision du même ministre du même jour portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 18 octobre 2018 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions déférées ;

Le juge rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Maître Katy Demarche et Madame le délégué du gouvernement Elisabeth Pesch entendues en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 octobre 2018.

Le 3 juillet 2017, Monsieur … introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à l’accueil des demandeurs de protection internationale et de protection temporaire, ci-

après désignée par « la loi du 18 décembre 2015 ».

Les déclarations de Monsieur … sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Grand-Duché de Luxembourg furent actées par un agent de la Police grand-ducale, section Police des étrangers et des jeux, dans un rapport du même jour.

Le 24 juillet 2018, Monsieur … fût entendu par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Il ressort de son entretien qu’il est ressortissant béninois, d’ethnie yoruba, de confession musulmane et qu’il a vécu à … au Bénin avec ses parents et ses frères et sœurs. Le demandeur indique qu’il aurait quitté son pays d’origine au motif qu’il craindrait être victime de pratiques voudoues en raison du fait qu’il aurait refusé de prendre la place du chef spirituel prédécédé. Il explique que plusieurs membres de sa famille auraient été victimes de ces pratiques pour s’être opposés au rite voudou : ainsi, son frère serait décédé de manière inexplicable, son père serait paralysé et sa sœur souffrirait de troubles mentaux. Il aurait ainsi décidé de quitter son pays d’origine pour échapper au sort réservé à sa famille.

Par décision du 17 septembre 2018, notifiée à l’intéressé par lettre recommandée envoyée le 19 septembre 2018, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par « le ministre », informa Monsieur … qu’il avait statué sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée en se basant sur les dispositions de l’article 27 (1) sous a) et b) de la loi du 18 décembre 2015 et que sa demande avait été refusée comme non fondée, tout en lui ordonnant de quitter le territoire dans un délai de trente jours à compter du jour où la décision deviendrait définitive.

Le ministre estime en substance que Monsieur … proviendrait d’un pays d’origine sûr au sens de l’article 30 de la loi du 18 décembre 2015 dès lors qu’il n’existerait pas au Bénin, généralement et de façon constante de persécution au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, ci-après désignée par la « Convention de Genève », à l’égard des demandeurs de sexe masculin. Il fait encore valoir que ce constat n’aurait pas été contredit par l’examen individuel de sa demande de protection internationale, de sorte que le point a) de l’article 27 de la loi du 18 décembre 2015 trouverait également être d’application .

Quant au récit de Monsieur …, le ministre considère qu’il manque de crédibilité en raison du fait qu’il ne disposerait pas de l’initiation nécessaire dans la pratique des rites voudous pour reprendre le poste de chef spirituel dans son village. Il est d’avis que, même à supposer le récit de Monsieur … crédible, il ne remplirait pas les conditions d’octroi du statut du réfugié telles que définies par la Convention de Genève ou par la loi du 18 décembre 2015, dès lors que la crainte qu’il aurait d’être tué pour avoir refusé le poste de chef spirituel ne saurait être considérée comme une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève étant donné que cette crainte serait étrangère à un des motifs énoncés dans ladite Convention, à savoir sa race, sa religion, sa nationalité et son appartenance à un groupe social ou à ses opinions politiques. Il s’y ajoute qu’une persécution commise par un tiers peut être considérée comme fondant une crainte légitime au sens de la Convention de Genève uniquement en cas de défaut de protection de la part des autorités politiques pour l’un des motifs énoncés par ladite Convention et dont l’existence doit être mise en évidence par le demandeur de protection internationale, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce. Enfin, il retient que le récit de Monsieur … ne contiendrait pas de motifs sérieux et avérés permettant de croire qu’il courrait un risque réel de subir des atteintes graves définies à l’article 48 de la loi du 18 décembre 2015.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 8 octobre 2018, Monsieur … a introduit un recours tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 17 septembre 2018 de statuer sur le bien-fondé de sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, de la décision du même ministre du même jour portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Etant donné que l’article 35 (2) de la loi du 18 décembre 2015 prévoit un recours en réformation contre la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre la décision de refus d’une demande de protection internationale prise dans ce cadre et contre l’ordre de quitter le territoire prononcé dans ce contexte, et attribue compétence au président de chambre ou au juge qui le remplace pour connaître de ce recours, la soussignée est compétente pour connaître du recours en réformation dirigé contre les décisions du ministre du 17 septembre 2018 telles que déférées.

Le délégué du gouvernement soulève un moyen d’irrecevabilité de la requête introductive d’instance pour tardiveté, le recours ayant été déposé au-delà du délai légal de 15 jours.

A l’audience des plaidoiries, le litismandataire de Monsieur … s’en est remis à prudence de justice sur cette question.

L’article 35 (2) de la loi du 18 décembre 2018 dispose ce qui suit: « Contre la décision du ministre de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et de la décision de refus de la demande de protection internationale prise dans ce cadre, de même que contre l’ordre de quitter le territoire, un recours en réformation est ouvert devant le tribunal administratif. Le recours contre ces trois décisions doit faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé. Il doit être introduit dans un délai de quinze jours à partir de la notification. » Il ressort des pièces et éléments versés en cause que la décision déférée du 17 septembre 2018 fut notifiée à Monsieur … en date du 20 septembre 2018 de sorte que le délai de 15 jours prévu à l’article 35 (2) précité est venu à expirer le 5 octobre 2018. Or, la requête a été déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 octobre 2018 soit manifestement après le délai légal. Il s’ensuit que le recours est à déclarer irrecevable, dans tous ses volets, pour cause de tardiveté.

Par ces motifs, le premier juge, siégeant en remplacement du président de la quatrième chambre du tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties ;

déclare irrecevable le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 17 septembre 2018 de statuer sur le bien-fondé de la demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, sur celle portant refus d’une protection internationale et sur celle portant ordre de quitter le territoire pour cause de tardiveté ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 26 octobre 2018 par la soussignée, Anne Gosset, premier juge, en présence du greffier Marc Warken.

s.Marc Warken s.Anne Gosset Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 26 octobre 2018 Le greffier du tribunal administratif 3


Synthèse
Numéro d'arrêt : 41781
Date de la décision : 26/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-10-26;41781 ?

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