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24/10/2018 | LUXEMBOURG | N°41780

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 octobre 2018, 41780


Tribunal administratif Numéro 41780 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 octobre 2018 Audience publique du 24 octobre 2018 Requête en obtention d’un sursis à exécution sinon d’une mesure de sauvegarde introduite par Madame …, …, contre une décision du directeur général de l’établissement public POST GROUP Luxembourg en matière de résiliation du contrat de travail

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ORDONNANCE

Vu la requête, inscrite sous le numéro 41780 du rôle et déposée le 8 octobre 2

018 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc FEYEREISEN, avocat à la Cour, inscrit a...

Tribunal administratif Numéro 41780 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 octobre 2018 Audience publique du 24 octobre 2018 Requête en obtention d’un sursis à exécution sinon d’une mesure de sauvegarde introduite par Madame …, …, contre une décision du directeur général de l’établissement public POST GROUP Luxembourg en matière de résiliation du contrat de travail

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ORDONNANCE

Vu la requête, inscrite sous le numéro 41780 du rôle et déposée le 8 octobre 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc FEYEREISEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, employée de l’Etat, demeurant à …, tendant à voir ordonner un sursis à exécution sinon une mesure de sauvegarde par rapport à la décision du Directeur général de l’établissement public POST GROUP Luxembourg du 12 septembre 2018 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 15 septembre 2018 jusqu’à ce qu’une décision au fond soit intervenue concernant le recours en réformation, sinon en annulation, déposé le 18 septembre 2018, inscrit sous le numéro 41719 du rôle ;

Vu les exploits de l’huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à Luxembourg, des 21 septembre respectivement 9 octobre 2018, portant signification du recours en réformation, sinon en annulation ainsi que de la présente requête à l’établissement public POST GROUP Luxembourg, établi et ayant son siège social à L-2417 Luxembourg, 20, rue de Reims, représentée par son comité de direction actuellement en fonctions ;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Maître Marc FEYEREISEN, pour la requérante et Maître Marc THEWES pour l’établissement public POST GROUP, entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 octobre 2018.

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Madame … a été engagée par l’établissement public Entreprise des Postes et Télécommunications, actuellement POST GROUP Luxembourg, ci-après « POST GROUP », dans le cadre d’un contrat à durée déterminée en date du …, ledit contrat ayant été transformé en contrat à durée indéterminée avec effet au ….

Suite à divers problèmes de santé, Madame … se vit accorder sur avis et accord du Contrôle médical de la sécurité sociale un congé thérapeutique à mi-temps pour la période du … 2017 au … 2017.

Suite à une chute en date du … 2017, Madame … bénéficia d’un congé de maladie 1jusqu’à la date du … 2018.

Le 21 mars 2018, POST GROUP saisit la Caisse nationale d’Assurance Pension pour qu’elle se prononce sur l’invalidité professionnelle de Madame ….

Par décision du 4 juillet 2018, la Caisse nationale d’Assurance Pension a retenu que Madame … ne serait pas à considérer comme invalide au sens de l’article 187 du Code de la sécurité sociale.

Par courrier du 18 juillet 2018, POST GROUP informa Madame … de son intention de résilier son contrat de travail pour cause d’absences fréquentes pour raisons de santé conformément à l’article 7.3. de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat.

Suite à une entrevue contradictoire en date du 28 août 2018, Madame … se vit notifier une décision datée du 12 septembre 2018, portant la signature du directeur général de POST GROUP, et libellée comme suit :

« Vu la loi modifiée du 10 août 1992 portant création de l’entreprise des postes et télécommunications ;

Vu la loi modifiée du 16 avril 1979 fixant le statut général des fonctionnaires de l’Etat ;

Vu la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat, notamment ses articles 7, 10 et 11 ;

Considérant que par courrier daté du 18 juillet 2018, POST Luxembourg a notifié son intention de résilier le contrat de travail de Madame …, employée de l’Etat, en qualité de … au sein du département … ;

Considérant que Madame … ne bénéficie pas encore du régime de pension des fonctionnaires de l’Etat et qu’elle a été absente pour raisons de santé pendant six mois, consécutifs ou non, pendant une période de douze mois ;

Que conformément à l’article 7(3) de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat et suite aux absences prolongées et répétées pour raison de santé de Madame …, la procédure de résiliation a été déclenchée en date du 21 mars 2018 avec la saisie de la Caisse nationale d’Assurance Pension pour qu’elle se prononce sur l’invalidité professionnelle de l’employée de l’Etat au sens des dispositions du Code de la sécurité sociale ;

Que la Caisse nationale d’Assurance Pension a, dans sa décision du 4 juillet 2018, déclarée l’intéressée comme non invalide au sens de l’alinéa 1 de l’article 187 du Code de sécurité sociale ;

Considérant que Madame … a, dans le cadre de l’article 9 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure administrative non contentieuse et à travers son conseil juridique, Maître Marc Feyereisen, demandé une entrevue afin de formuler ses observations par rapport à l’intention de POST Luxembourg concernant la résiliation de son contrat de 2travail ;

Que l’entrevue demandée a eu lieu en présence des parties concernées en date du 28 août 2018 ;

Considérant que pour la prise en compte des journées d’absences pour cause de maladie, une journée entière est prise en considération, conformément aux dispositions légales, même si un temps partiel a été exécuté avec le mi-temps thérapeutique accordé du 1er mars 2017 jusqu’au 30 juin 2017 ;

Considérant que Madame …, n’a pas présenté d’éléments supplémentaires susceptibles de surseoir à une décision de résiliation qui n’est pas énervée par le fait que les absences ont été justifiées par des problèmes de santé ; que néanmoins il n’a pas pu être compté sur sa présence au travail de manière régulière depuis l’automne 2015 ; que suite à un entretien de sensibilisation, une amélioration a été constatée en 2016, pour se dégrader à nouveau en 2017 ;

Faisant application des articles, 7(3) et 10 de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat et 24 (2) de la loi modifiée du 10 août 1992 portant création de l’entreprise des postes et télécommunications ;

DECIDE:

Art. 1. Le contrat de travail de Madame …, employée de l’Etat, suivant contrat de travail signé en date du …, auprès de POST Luxembourg, est résilié avec effet au 15 septembre 2018 ;

Art. 2. Une expédition de la présente décision est transmise pour information et suites utiles:

- à la Direction Ressources Humaines ;

- à l’employée de l’Etat préqualifiée.

La présente décision est susceptible d’un recours en réformation à introduire par ministère d’avocat, auprès du Tribunal administratif dans les trois mois de sa notification.

(…) » Par requête déposée le 18 septembre 2018 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 41719 du rôle, Madame … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision précitée du directeur général de POST GROUP Luxembourg du 12 septembre 2018 portant résiliation de son contrat de travail avec effet au 15 septembre 2018 et, par requête du 8 octobre 2018, inscrite sous le numéro 41780 du rôle, elle a introduit une demande tendant au sursis à exécution, sinon à une mesure de sauvegarde de cette décision jusqu’à la décision définitive à intervenir sur le fond.

La requérante fait d’abord valoir avoir un intérêt manifeste à agir à l’encontre de la décision du 12 septembre 2018.

Ensuite, elle estime justifier de l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif.

3Elle fait valoir à cet égard qu’en tant qu’employée de l’Etat ayant exercé son activité pendant … ans auprès d’un établissement public, le fait de perdre du jour au lendemain son emploi serait de nature à entamer son équilibre psychique et à lui causer un préjudice moral grave et définitif, et ce quelle que soit l’issue du litige au fond. La résiliation immédiate telle qu’intervenue l’aurait encore mise du jour au lendemain devant le néant sans lui accorder la moindre possibilité d’organiser sa vie matériellement et moralement.

Elle relève avoir su maîtriser son problème … grâce à son congé à mi-temps thérapeutique ; or, la décision critiquée ainsi que le risque de devoir s’engager dans un procès risquant de se prolonger dans le temps, l’exposerait à un risque de préjudice psychique grave et définitif supplémentaire.

Madame … souligne ensuite se trouver depuis le 1er octobre 2018 sans le moindre revenu, ce qui l’affecterait dans ses conditions d’existence, alors qu’elle serait obligée de modifier l’organisation de sa vie et son train de vie et de réorienter ses projets d’avenir, étant par ailleurs très incertain qu’elle puisse profiter dans l’intervalle jusqu’au prononcé d’une décision coulée en force de chose jugée de revenus lui permettant le maintien d’un certain niveau de vie, la requérante soulignant à cet égard qu’il serait incertain que l’Agence pour le Développement de l’Emploi (ADEM) consente à lui verser des indemnités de chômage compte tenu de la résiliation avec effet immédiat de son contrat de travail, tandis que son conjoint, après avoir épuisé les 24 mois de chômage de longue durée légalement prévus, viendrait de se voir refuser l’octroi de l’indemnité professionnelle d’attente.

Madame … estime en outre que ses moyens de réformation respectivement d’annulation seraient suffisamment sérieux.

A cet égard, après avoir rappelé les faits et rétroactes de l’affaire, Madame … fait en substance plaider que la décision du directeur général du 12 septembre 2018 serait intervenue en dehors du cas d’application tracé par l’article 7 de la loi du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat, lequel exigerait une absence d’un employé pour raisons de santé pendant six mois, consécutifs ou non, au cours d’une période de douze mois, alors qu’elle, en partant une année en arrière, soit le 21 mars 2017, n’accusait pas des journées d’absences pour raisons de santé pendant six mois consécutifs ou non. Elle rappelle dans ce contexte avoir bénéficié, avec l’accord de son employeur, d’un congé à mi-temps thérapeutique, créé dans le but de permettre à un salarié, au bout de cette période, de regagner sa pleine capacité de travail, ce qui aurait effectivement été son cas jusqu’à la date de sa grave chute en date du … 2017.

Elle estime que ce serait dès lors à tort que POST GROUP a pris en compte les journées d’absences pendant le mi-temps thérapeutique accordé du … 2017 jusqu’au … 2017 à titre de journées d’absences entières, la requérante considérant, sur base de l’article 169 des statuts de la Caisse nationale de santé, que le dernier alinéa de l’article 7 de la loi du 25 mars 2015, tel qu’invoqué dans la décision critiquée, ne saurait justifier la permutation de « quatre mois entiers travaillés à mi-temps » en « quatre mois de journées d’absences entières pour cause de maladie ».

En ordre subsidiaire, Madame … fait plaider devant les juges du fond que la décision du 12 septembre 2018 serait à réformer, sinon à annuler pour non-respect du principe de proportionnalité en présence d’un texte légal prévoyant une simple faculté de résiliation face à une employée, ayant débuté sa carrière professionnelle auprès de POST GROUP, ayant 4une ancienneté de … ans et qui se voit résilier son contrat du jour au lendemain à une époque où, depuis plusieurs mois, elle aurait regagné ses pleines capacités de travail après avoir maîtrisé un problème de santé avec l’accord de l’employeur et pour avoir eu la malchance d’avoir fait une grave chute.

POST GROUP sollicite le rejet de la demande au motif que les conditions légales pour l’obtention d’un sursis à exécution, à savoir des moyens sérieux et un risque de préjudice grave et définitif, ne seraient pas remplies en l’espèce.

En vertu de l’article 12 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le président du tribunal administratif ou le magistrat le remplaçant peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l’affaire, à l’exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d’admettre que l’institution d’une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l’appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d’une décision administrative alors même que les conditions posées par l’article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l’article 12 n’excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.

Or, en vertu de l’article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

L’affaire au fond ayant été introduite le 18 septembre 2018 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, elle ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.

En ce qui concerne ensuite la condition tenant à l’existence d’un risque de préjudice grave et définitif, telle que visée par l’article 11 de la loi précitée du 21 juin 1999, il convient de rappeler que le risque du préjudice s’apprécie in concreto et qu’il appartient au demandeur d’apporter des éléments à cette fin.

Un préjudice est grave au sens de l’article 11 de la loi précitée du 21 juin 1999 lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’impose la vie en société et doit dès lors être considéré comme une violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques. Il est définitif lorsque le succès de la demande présentée au fond ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal, la seule réparation par équivalent du dommage qui se manifeste postérieurement à son annulation ou sa réformation ne pouvant être considérée à cet égard comme empêchant la réalisation d’un préjudice définitif.

5 Pour l’appréciation du caractère définitif du dommage, il n’y a pas lieu de prendre en considération le dommage subi pendant l’application de l’acte illégal et avant son annulation ou sa réformation. Admettre le contraire reviendrait à remettre en question le principe du caractère immédiatement exécutoire des actes administratifs, car avant l’intervention du juge administratif, tout acte administratif illégal cause en principe un préjudice qui, en règle, peut être réparé ex post par l’allocation de dommages et intérêts. Ce n’est que si l’illégalité présumée cause un dommage irréversible dans le sens qu’une réparation en nature, pour l’avenir, qu’un rétablissement de la situation antérieure, ne seront pas possibles, que le préjudice revêt le caractère définitif tel que prévu par l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999.

Par ailleurs, l’exposé du préjudice grave et définitif ne saurait se limiter à un exposé théorique, se cantonner à la seule évocation de précédents ou encore consister en des considérations générales. Le juge du provisoire ne peut de surcroît avoir égard qu’aux arguments contenus dans la requête et doit écarter les éléments développés par le conseil du requérant, pour la première fois, à l’audience.

A cet égard, il est indéniable que la décision de résiliation avec effet immédiat du contrat de travail à durée indéterminée d’un agent public risque de lui causer un préjudice grave et définitif, étant donné qu’il perd du jour au lendemain toutes ses ressources, perdant ainsi à la fois son emploi et son statut et étant le cas échéant exposé à l’opprobre public, le simple fait d’être écarté d’un jour à l’autre de ses fonctions entraînant nécessairement une publicité extrêmement préjudiciable1. Cette perte de revenus risquant de surcroît de placer l’agent dans une situation de besoin telle que son mode de vie sera gravement mis en péril, ledit préjudice doit être considéré comme grave et définitif2.

En l’espèce, la brusque résiliation du contrat de travail à durée indéterminée dont bénéficiait la requérante entraîne de manière incontestable une perte totale de revenus, perte qui, comme exposé et documenté crédiblement par la requérante, est actuellement insusceptible d’être compensée, voire seulement atténuée par l’intervention de l’ADEM ou par le soutien financier du conjoint de la requérante, lui-même chômeur en fin de droits.

Aussi, force est d’admettre que la privation de revenus jusqu’à ce que les juges du fond aient tranché le litige engendre des dommages graves et irrémédiables.

Quant au préjudice moral mis en avant, si un tel préjudice est certes susceptible d’être considéré comme réparable notamment par la réintégration ultérieure de la requérante en ses fonctions, l’absence forcée de la requérante de son travail suite à la décision critiquée doit encore, sur la toile de fond de problèmes psychiques apparemment résolus par le bénéfice du congé thérapeutique, être considérée en l’espèce comme de nature à provoquer une rechute de la requérante et partant comme constitutif d’un préjudice grave et définitif.

En ce qui concerne la seconde condition pour l’obtention d’un sursis à exécution, respectivement d’une mesure de sauvegarde, à savoir l’exigence que les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, des faits et des éléments doivent être invoqués ou ressortir de la requête ou du dossier administratif, démontrant directement que, pour avoir un effet utile, la mesure demandée doit être 1 Trib. adm. prés. 22 mars 2010, n° 26733, Pas. adm. 2017, V° Procédure contentieuse, n° 624 2 Trib. adm. prés. 28 avril 2014, n° 34369 ; trib. adm. prés. 3 août 2015, n° 36649, ibidem.

6immédiatement ordonnée afin de satisfaire à cette condition de sérieux : dès lors, il faut mais il suffit qu’à première vue et eu égard aux circonstances de la cause, le recours puisse être déclaré recevable et fondé et, partant, donner lieu à la suspension de l’exécution de la décision attaquée, respectivement à l’instauration de la mesure de sauvegarde sollicitée. En d’autres termes, les moyens avancés doivent offrir une apparence de droit suffisante ou un degré de vraisemblance tel que l’on peut nourrir des doutes importants quant à la légalité de l’acte3 -, étant rappelé que comme le sursis d’exécution, respectivement l’institution d’une mesure de sauvegarde, doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’ils constituent une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.

Il s’ensuit que, face à une situation où le caractère sérieux des moyens soulevés au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, le juge du référé ne peut pas admettre que les moyens en question sont suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire.

Ainsi, le juge du référé est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le demandeur apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation ou la réformation de la décision attaquée.

Il doit pour cela prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l’issue du litige - que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec - n’est plus affectée d’un aléa.

En l’espèce, tel que résumé par la requérante, les deux moyens soulevés en ordre de subsidiarité ne tournent en fait qu’autour d’une seule problématique, à savoir celle d’analyser sommairement si un congé thérapeutique pendant lequel la requérante a travaillé pendant quatre mois à mi-temps peut lui être imputé à titre d’absence à plein temps, la requérante tirant parti notamment du libellé de l’article 169 des statuts de la Caisse nationale de santé, aux termes duquel « (3) Si, en accord avec l’assuré et l’employeur, le Contrôle médical de la sécurité sociale estime indiquée une reprise du travail à mi-temps pendant l’incapacité de travail pour cause de maladie ou d’accident, la Caisse nationale de santé informe par écrit les deux parties de l’octroi d’un congé thérapeutique à mi-temps. La moitié seulement de la période en cause est mise en compte comme période d’incapacité de travail, la fraction de jour étant négligée », tandis que POST GROUP justifie sa décision par l’article 7 (3) de la loi modifiée du 25 mars 2015 déterminant le régime et les indemnités des employés de l’Etat prévoyant que « Sont mises en compte pour une journée entière toutes les journées d’absences pour cause de maladie, même si ces absences ne couvrent pas des journées entières ».

Il n’appert de prime abord pas, au-delà d’une contradiction apparente entre les deux dispositions invoquées, que l’article 169 des statuts de la Caisse nationale de santé et l’article 7 (3) de la loi modifiée du 25 mars 2015 soient nécessairement inconciliables, alors qu’ayant à première vue des objets différents, l’article 169 des statuts de la Caisse nationale 3 Jean-Paul Lagasse, Le référé administratif, 1992, p.48.

7de santé ayant a priori pour objet de règlementer le calcul des indemnités pécuniaires due sen cas d’incapacité de travail et l’article 7 (3) de la loi modifiée du 25 mars 2015 visant la résiliation du seul employé de l’Etat pour absence prolongée ou absences répétées.

Il appert ensuite que les juges du fond4, confrontés à la même question, ont estimé qu’un employé, bien que travaillant à temps partiel dans le cadre d’un « mi-temps thérapeutique doit être considéré comme ayant été intégralement absent pour cause de maladie, « dans la mesure où l’article 7, paragraphe (3) de la loi du 25 mars 2015 assimile expressément les jours où l’employé concerné a dû s’absenter, en partie, pour des raisons de maladie, à des jours d’absence entiers ».

Le moyen principal de la requérante, basé sur l’argument que POST GROUP aurait à tort pris en compte ses journées d’absences pendant le mi-temps thérapeutique comme journées d’absences entières pour cause de maladie, ne présente dès lors, en l’état actuel d’instruction du dossier et de la jurisprudence évoquée ci-dessus, pas le sérieux nécessaire pour justifier la mesure provisoire sollicitée.

En ce qui concerne son moyen subsidiaire, tiré d’une disproportionnalité de la décision déférée au vu, d’une part, de l’existence d’une simple faculté de résiliation dans le chef du directeur de POST GROUP, et d’autre part, des longues années de service de la requérante et de ses efforts consentis en vue de regagner sa pleine capacité de travail, il est vrai que la résiliation d’un contrat pour absence prolongée ou absences répétées ne constitue pas un automatisme, mais demeure une possibilité laissée à l’appréciation du directeur.

Il est encore vrai que si une telle possibilité de résiliation repose en principe sur la prémisse qu’un absentéisme habituel pour raison de santé engendre une gêne considérable pour le fonctionnement de l’entreprise, il appert qu’en l’espèce POST GROUP avait donné son accord au congé à mi-temps thérapeutique de la requérante, constat susceptible de soulever des interrogations notamment au vu du principe général de la légitime confiance, tel que notamment circonscrit par la Cour administrative5.

Il s’agit toutefois là d’une question d’appréciation qui requiert une analyse plus poussée et une discussion au fond, à laquelle le juge du provisoire ne saurait pas procéder.

Il convient de surcroît de relever que dans le jugement des juges du fond cité ci-

avant, lesdits juges ont retenu qu’au vu du seul constat non énervé d’absences prolongées et répétées pour raisons de santé, l’employeur n’avait pas la charge de la preuve quant à une éventuelle perturbation du service occasionnée par l’absence de l’employé concerné, et qu’une violation du principe de proportionnalité était à rejeter, le seul constat de telles absences justifiant a priori légalement justifié la résiliation du contrat de travail sur base de l’article 7, paragraphe (3) de la loi du 25 mars 2015.

Il s’ensuit que, face à une situation où le caractère sérieux des moyens soulevés au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, au stade actuel de son instruction et sur base d’une analyse nécessairement sommaire, le juge du référé ne peut pas admettre que les moyens en question sont suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire, puisque lesdits moyens n’apparaissent pas comme ayant des chances 4 Trib. adm. 4 octobre 2017, n° 38365.

5 Cour adm. 2 avril 2015, n° 35541C.

8suffisamment sérieuses d’aboutir à l’annulation de la décision litigieuse au fond.

Ce second moyen ne présente dès lors pas non plus le sérieux requis pour justifier l’instauration d’une mesure provisoire.

La requérante est partant à débouter de sa demande en institution d’une mesure provisoire, les conditions afférentes devant en effet être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.

Il suit partant de toutes les considérations qui précèdent que la demande est à rejeter.

Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;

rejette le recours en obtention d’une mesure provisoire, condamne la requérante aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 24 octobre 2018 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence de Xavier Drebenstedt, greffier.

s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 24 octobre 2018 Le greffier du tribunal administratif 9


Synthèse
Numéro d'arrêt : 41780
Date de la décision : 24/10/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-10-24;41780 ?

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