Tribunal administratif N° 40940 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 mars 2018 Audience publique du 28 mars 2018 Requête en institution d’une mesure provisoire introduite par Madame …, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (3), L. 18.12.2015)
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ORDONNANCE
Vu la requête inscrite sous le numéro 40940 du rôle et déposée le 23 mars 2018 au greffe du tribunal administratif par Maître Sébastien LANOUE, avocat à la Cour, assisté de Maître Marcel MARIGO, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame …, née le … à … (Somalie), alias …, née le …, alias …, née le …, agissant en son nom personnel ainsi qu’en sa qualité d’administratrice légale de son enfant mineur …, né le … à …, les deux de nationalité somalienne, demeurant ensemble à …, tendant à voir ordonner une mesure provisoire, consistant en l’institution d’un sursis à exécution, sinon d’une mesure de sauvegarde par rapport à une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 28 février 2018 par laquelle les autorités luxembourgeoises ont déclaré irrecevable sa demande de protection internationale et lui ont enjoint de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours, un recours en annulation dirigé contre la prédite décision ministérielle du 28 février 2018, inscrit sous le numéro 40916, introduit le 16 mars 2018, étant pendant devant le tribunal administratif ;
Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée au fond ;
Maître Marcel MARIGO et Monsieur le délégué du gouvernement Yannick GENOT entendus en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.
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Le 8 janvier 2018, Madame …, de nationalité somalienne, introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.
Il s’avéra à cette occasion que Madame … avait précédemment déposé des demandes de protection internationale en Italie et en France.
Le même jour, Madame … passa un entretien auprès du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, en vue de déterminer l’Etat responsable de l’examen de sa demande de protection internationale en vertu du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ci-après « le règlement Dublin III ».
Les recherches effectuées par les services ministériels auprès des autorités italiennes révélèrent toutefois que l’intéressée bénéficierait du statut de la protection internationale en Italie où elle serait encore connue sous les alias de …, née le …, et …, née le ….
Le 13 février 2018, Madame … fut encore entendue par un agent du ministère des Affaires étrangères et européennes, Direction de l’Immigration, sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale et ce ne vue de déterminer la recevabilité de cette demande.
Par décision du 28 février 2018, expédiée le 1er mars 2018 par envoi recommandée, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé le « ministre », déclara irrecevable la demande de protection internationale de Madame … en les termes suivants :
« J’ai l’honneur de me référer à votre demande en obtention d’une protection internationale que vous avez introduite auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et européennes en date du 8 janvier 2018.
En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 8 janvier 2018, le rapport d’entretien Dublin III du 8 janvier 2018 et le rapport d’entretien sur la recevabilité de votre demande de protection internationale du 13 février 2018.
Il ressort du rapport de Police Judiciaire que vous avez introduit des demandes de protection internationale en Italie les 21 mars et 7 avril 2017 et en France le 26 décembre 2017.
Vous signalez avoir quitté la Somalie en mars 2017 à cause de problèmes familiaux.
Après avoir vécu pendant à peu près six mois dans un camp en Italie, vous seriez partie vivre peu de temps en France avant d’arriver au Luxembourg le 7 janvier 2018.
Il ressort du rapport d’entretien Dublin III que vous auriez bénéficié d’un « siggiorno » en Italie valable pendant six mois, qui n’aurait toutefois pas été prolongé. Vous précisez que « ce n’était pas une reconnaissance de statut mais seulement un document pour qu’on puisse passer la frontière ». Vous déclarez avoir quitté l’Italie en direction de la France parce qu’« en Italie, on ne peut pas vivre. (…) Comme je n’ai pas eu de réponse je suis allé en France ».
En outre, il en ressort que le prétendu père de votre nouveau-né, un certain …, se trouverait au Luxembourg depuis septembre 2017; vous précisez que ce dernier ne vous aurait pas fait venir au Luxembourg et ne voudrait rien savoir de son prétendu enfant. Vous expliquez votre arrivée au Luxembourg par le fait que vous auriez dormi dans la rue en France et que vous auriez craint pour votre grossesse. Vous ajoutez que vous seriez divorcée et que vous auriez encore quatre autres enfants qui vivraient actuellement auprès de leur père en Somalie.
Il ressort du rapport d’entretien sur la recevabilité de votre demande de protection internationale que les autorités italiennes ne vous auraient pas remis de « living permit » et qu’elles ne vous auraient pas non plus accordé de protection internationale. Vous signalez ne pas pouvoir vivre en Italie parce que personne ne vous y supporterait financièrement. En plus, vous seriez d’avis que les autorités italiennes vous interrogeraient sur la provenance de votre nouveau-né ce qui vous ferait penser que « Maybe I will be brought to the court ».
Madame, je suis au regret de vous informer qu’en vertu des dispositions de l’article 28 (2) a) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, votre demande de protection internationale est irrecevable au motif qu’une protection internationale vous a été accordée par un autre Etat membre de l’Union.
En effet, il résulte de la télécopie reçue de la part des autorités italiennes le 25 janvier 2018, que contrairement à vos dires, vous bénéficiez bel et bien du statut lié à la protection subsidiaire en Italie.
Bien que vous signalez ne pas pouvoir vivre en Italie parce que personne ne vous y prendrait en charge et que vous craindriez d’être traduite en justice à cause de votre nouveau-né, il ne ressort pas des éléments en notre possession que vous auriez à craindre en Italie pour votre vie ou pour votre liberté en raison de votre race, de votre religion, de votre nationalité, de votre appartenance à un groupe social particulier ou de vos opinions politiques et qu’il n’y existe aucun risque d’atteintes graves dans votre chef. En outre, l’Italie respecte le principe de non refoulement conformément à la Convention de Genève et l’interdiction de prendre des mesures d’éloignement contraires à l’interdiction de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
A cela s’ajoute que les motifs matériels ou médicaux qui vous auraient fait quitter d’abord l’Italie, puis la France pour finalement vous installer au Luxembourg, ne sauraient non seulement pas être pris en compte dans le cadre de l’examen d’une demande de protection internationale, mais constituent en plus un recours abusif à la procédure d’asile.
Le Grand-Duché de Luxembourg ne peut par conséquent pas donner suite à votre demande déclarée irrecevable.
Conformément à l’article 34 (2) votre séjour étant illégal, vous êtes dans ;’obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à destination de l’Italie, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisée à séjourner.
Conformément aux articles 35 (3) et 36 (2), la présente décision est susceptible d’un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d’un avocat à la Cour dans un délai de quinze jours à partir de la notification de la présente. Le recours contre la présente décision d’irrecevabilité n’a pas d’effet suspensif.
Je vous informe par ailleurs que le recours gracieux n’interrompt pas les délais de la procédure et que la décision du Tribunal administratif n’est pas susceptible d’appel. (…) » Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 16 mars 2018, inscrite sous le numéro 40916 du rôle, Madame … a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 28 février 2018. Par requête séparée déposée en date du 23 mars 2018, inscrite sous le numéro 40940 du rôle, elle a encore introduit un recours tendant à voir ordonner le sursis à exécution, sinon à avoir instaurer une mesure de sauvegarde par rapport à la décision en question jusqu’au jour où le tribunal administratif aura statué sur le mérite de son recours au fond.
La requérante soutient qu’elle subira du fait de la décision attaquée par le recours au fond un dommage grave et définitif.
Dans ce contexte, elle relève qu’elle se serait vue accorder en date du 8 mars 2018 un courrier intitulé « organisation de votre retour dans votre pays d’origine » en vue de préparer son retour vers la Somalie, l’Italie s’étant prétendument déclarée incompétente pour examiner sa demande de protection internationale. Aussi, l’exécution de la décision ministérielle litigieuse aboutirait inéluctablement à son éloignement ainsi qu’à celui de son enfant mineur vers la Somalie alors que le ministre resterait en défaut de prouver l’existence dans son chef d’un statut de protection subsidiaire.
Elle affirme encore avoir quitté la Somalie contre son gré, en laissant derrière elle quatre enfants mineurs, pour se rendre en Europe, précisément au Grand-Duché de Luxembourg pour y demander une protection internationale alors qu’elle subissait en Somalie des actes de persécution. Son retour en Somalie mettrait dès lors incontestablement son intégrité physique et sa vie et celle de son enfant en danger qui serait d’office considéré comme un bâtard aux yeux de la société somalienne et serait constamment exposé à des actes de persécution. Par ailleurs, son éloignement ainsi que celui de son enfant vers son pays d’origine constituerait une atteinte à la vie privée et familiale de son enfant … au sens de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), puisque celui-ci n’aurait plus la possibilité de connaître son père biologique.
La requérante estime encore que ses moyens produits à l’appui de son recours au fond seraient sérieux ; dans ce contexte elle conteste formellement avoir bénéficié d’une protection internationale de la part des autorités italiennes et elle estime que cette affirmation resterait au stade actuel du dossier non prouvée au vu du défaut des autorités ministérielles de fournir une copie du document afférent. Partant, elle conclut devant les juges du fond à l’annulation de la décision ministérielle du 28 février 2018 pour avoir été être prise sur base d’une application erronée sinon fausse de l’article 28, paragraphe (1) point a) de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.
La requérante fait ensuite plaider que son éloignement ainsi que celui de son enfant mineur âgé d’un mois et demi emporterait une violation des articles 3 et 8 CEDH.
Elle relate à nouveau dans ce contexte avoir été convoquée par le ministère de l’Immigration et de l’Asile pour organiser son retour dans son pays d’origine, la Somalie, dans le cadre des accords de coopération policière entre l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg et l’Etat italien, alors pourtant que ce dernier indiquerait clairement être incompétent pour reprendre et examiner sa demande de protection internationale. Aussi, les autorités italiennes proposeraient que le transfert se fasse dans le cadre des accords de coopération policière et auraient invité leurs homologues luxembourgeois à faire une demande en ce sens mais sans précision aucune quant au sort qui serait réservé à la requérante et à son enfant mineur dès leur arrivée sur le territoire italien.
La requérante estime qu’il aurait appartenu au ministre de se déclarer compétent pour connaître de sa demande de protection internationale sur le fondement de l’article 17, paragraphe 1er du règlement Dublin III dans la mesure où il aurait dû rechercher si des raisons humanitaires justifiaient la recevabilité de sa demande de protection internationale.
Elle invoque encore le principe de non-refoulement tel que figurant notamment à l’article 54 (1) de la loi du 18 décembre 2015 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, à l’article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ainsi qu’à l’article 19 (2) de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne et l’article 3 CEDH, pour soutenir qu’il aurait appartenu au ministre de respecter ce principe de non-refoulement et de rechercher si l’Italie a pris toutes les garanties nécessaires afin qu’elle et son enfant ne soient pas soumis à un traitement contraire à l’article 3 CEDH, la requérant mettant en exergue l’obligation pesant sur l’Etat luxembourgeois de s’assurer que le rapatriement d’une personne vers un autre Etat ne serait pas contraire au principe de non refoulement, et ce y compris dans le cadre d’un refoulement indirect.
Finalement, elle affirme que le père de son enfant résiderait au Grand-Duché de Luxembourg, de sorte que son éloignement vers le pays d’origine de sa mère constituerait une violation manifeste de l’article 8 CEDH, puisque ce faisant son enfant n’aurait pas l’occasion de connaître ses deux parents alors que, éloigné avec sa mère en Somalie, son enfant serait privé de connaître son père de nationalité érythréenne : elle estime que la protection des intérêts supérieurs de l’enfant nécessiterait son maintien sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg.
Le délégué du gouvernement pour sa part conclut au rejet du recours au motif qu’aucune des conditions légales ne serait remplie en cause.
En vertu de l’article 12 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le président du tribunal administratif ou le magistrat le remplaçant peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l’affaire, à l’exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.
Sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d’admettre que l’institution d’une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l’appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d’une décision administrative alors même que les conditions posées par l’article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l’article 12 n’excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.
Or, en vertu de l’article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.
Or, à cet égard, la requérante reste en défaut de prouver en quoi la décision d’irrecevabilité risquerait de lui causer un préjudice grave et définitif.
Le soussigné constate à cet égard que la décision déférée du 28 février 2018 a été prise sur base de l’article 28, paragraphe (2), de la loi du 18 décembre 2015, lequel prévoit que « […] le ministre peut prendre une décision d’irrecevabilité, sans vérifier si les conditions d’octroi de la protection internationale sont réunies, dans les cas suivants: […] a) Une protection internationale a été accordée par un autre Etat membre de l’Union européenne. […] », disposition dont les juges du fond retiennent que le ministre peut déclarer irrecevable une demande de protection internationale, sans vérifier si les conditions d’octroi en sont réunies, dans le cas où le demandeur s’est vu accorder une protection internationale dans un autre pays membre de l’Union européenne1.
Or, il appert que les autorités italiennes ont adressé le 25 janvier 2018 un courrier portant refus de rependre en charge la demande de protection internationale de la requérante et ce au motif qu’elle bénéficierait déjà en Italie de la protection internationale et se serait vue accorder en conséquence un permis de séjour valable jusqu’au 21 décembre 2017. Si la formulation même de ce courrier peut paraître à première vue sibylline (« He was granted the internationale protection in Italy and a residence permit for « subsidiary protection »/ « Asylum » expiring on 21.12.2017 issued by the police headquarters in 1 Trib. adm. 29 mars 2017, n° 39083.
ROME »), dans la mesure où il pourrait être soutenu que la protection internationale aurait expiré fin décembre 2017, la syntaxe même du dernier bout de phrase (« a residence permit for « subsidiary protection »/ « Asylum » expiring on 21.12.2017 issued by the police headquarters in ROME « révèle qu’il s’agit du seul permis qui aurait expiré, la partie gouvernementale ayant encore valablement expliqué qu’il s’agirait d’un titre de séjour renouvelable.
Il appert dès lors en l’état actuel du dossier que contrairement aux dénégations de la partie requérante, celle-ci bénéficie bien d’ores et déjà de la protection internationale en Italie.
Il résulte ensuite des explications de la partie gouvernementale que Madame … ne sera pas éloignée, au cas où elle refuserait d’obtempérer à l’ordre de quitter le territoire lui opposée, vers la Somalie, mais vers l’Italie, pays où elle bénéficie, comme retenu ci-avant prima facie, de la protection internationale, l’indication « organisation de votre retour vers votre pays d’origine » sur le courrier lui adressé étant erronée et résultant de l’utilisation d’une formule-type.
Le soussigné tient à ce égard à rappeler qu’en ce qui concerne la condition du préjudice grave et définitif, un sursis à exécution, respectivement une mesure de sauvegarde, ne saurait être ordonné que si le préjudice invoqué par le demandeur résulte de l’exécution immédiate de l’acte attaqué, la condition légale n’étant en effet pas remplie si le préjudice ne trouve pas sa cause dans l’exécution de l’acte attaqué2, le risque dénoncé devant en effet découler de la mise en œuvre de l’acte attaqué et non d’autres actes étrangers au recours3 : or, il appert en l’espèce que la situation de fait critiquée, à la base du présent litige, se situe notamment dans l’éloignement redouté de la requérante vers la Somalie, retour qui ne fait toutefois pas l’objet de la décision présentement déférée, et paraît en tout état de cause hautement improbable au vu de la protection internationale lui accordée par les autorités italiennes. Par ailleurs, l’Italie respecte a priori - la requérante ne fournissant aucun indice tangible permettant au soussigné d’en douter - en tant que membre de l’Union européenne et signataire de ces conventions les droits et libertés prévus par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, le Pacte international des droits civils et politiques ou la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ainsi que plus particulièrement le respect du principe de non-refoulement prévu par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 et dispose d’un système de recours efficace contre les violations de ces droits et libertés.
Quant au préjudice résultant de l’atteinte alléguée à la vie privée et familiale ainsi qu’à l’intérêt supérieur de l’enfant, force est d’abord de constater que la paternité même du père biologique allégué n’est en l’état actuel pas établie, la requérante ayant dû entamer une action en recherche de paternité devant les juridictions luxembourgeoises : le préjudice allégué ne saurait dès lors être retenu comme établi ou vraisemblable.
2 J.-P. Lagasse, Le référé administratif, 1992, n° 46, p.60.
3 Ph. Coenraets, Le contentieux de la suspension devant le Conseil d’Etat, synthèses de jurisprudence, 1998, n° 92, p.41.
Il résulte par ailleurs des explications de la partie gouvernementale que la requérante, bénéficiaire de la protection internationale en Italie, dispose en tout état de cause de possibilités de voir établir la paternité du père allégué à partir de l’Italie, ainsi que de la faculté, le cas échéant, de demander un titre de voyage pour se rendre au Luxembourg, voire de solliciter, au cas où la paternité alléguée devait être établie, un regroupement familial sur base de l’une ou l’autre disposition légale.
La requérante est partant à débouter de sa demande en institution d’une mesure provisoire, sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question de l’existence éventuelle de moyens sérieux avancés devant les juges du fond, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.
Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, rejette le recours en obtention d’une mesure provisoire, condamne la requérante aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 28 mars 2018 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence de Xavier Drebenstedt, greffier.
s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 28 mars 2018 Le greffier du tribunal administratif 8