Tribunal administratif N° 40181 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 15 septembre 2017 Audience publique du 19 septembre 2017 Requête en institution d’une mesure provisoire introduite par Monsieur …et consorts, Findel, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de police des étrangers
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ORDONNANCE
Vu la requête inscrite sous le numéro 40181 du rôle et déposée le 15 septembre 2017 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Kosovo), et son épouse Madame …, née le … à … (Macédoine), agissant tant en leur nom personnel qu'en leur qualité d'administrateurs légaux de leurs enfants mineurs, …, né le … à …, et …, née le … à …, tous les quatre de nationalité kosovare, actuellement retenus au Centre de rétention au Findel, tendant à voir ordonner une mesure de sauvegarde par rapport à une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 16 août 2017 rejetant la demande de sursis à l’éloignement dans le chef de Madame …, un recours en annulation dirigé contre la même décision ayant été introduit au fond le 30 août 2017 et inscrit sous le numéro 40120 du rôle ;
Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée au fond ;
Maître Marlène AYBEK, en remplacement de Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, et Madame le délégué du gouvernement Linda MANIEWSKI entendues en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique de ce jour.
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Le 8 septembre 2015, Monsieur …et son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom personnel qu’au nom et pour le compte de leurs enfants mineurs … et …, ci-après dénommés les « consorts … », introduisirent auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères, direction de l’Immigration, une demande de protection internationale au sens de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, entretemps abrogée par la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après désignée par la « loi du 18 décembre 2015 ».
Par décision du 11 mars 2016, notifiée aux intéressés par lettre recommandée envoyée le 14 mars 2016, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, désigné ci-après par le « ministre », rejeta les demandes de protection internationale des consorts … comme étant non fondées, tout en leur enjoignant de quitter le territoire dans un délai de 30 jours.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 30 mars 2016, les consorts … firent déposer un recours tendant à la réformation de la décision du ministre du 11 mars 2016 portant refus de faire droit à leurs demandes en obtention d’une protection internationale et leur ordonnant de quitter le territoire.
Par jugement du 29 novembre 2016, n° 37734 du rôle, le tribunal administratif donna acte aux demandeurs qu’ils renoncent à leurs demandes en obtention d’un statut de réfugié, reçut ce recours en la forme pour le surplus, mais le rejeta comme étant non fondé en ses deux volets.
Les consorts … ayant fait relever appel de ce jugement du 29 novembre 2016, ils furent encore déboutés de cet appel par arrêt du 6 juin 2017, n° 38863C du rôle.
Par courrier du 11 juillet 2017 de son litismandataire, Madame … sollicita l’octroi d’un sursis à l’éloignement sur base des dispositions des articles 130 à 132 de la loi du 29 août 2008 en raison de son propre état de santé, demande qui fut rejetée par décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 16 août 2017 sur avis afférents du médecin-délégué du Service Médical de l’Immigration de la Direction de la Santé, et ce pour les motifs suivants :
«(…) J'ai l'honneur de me référer à votre courrier du 11 juillet 2017 par lequel vous m'informez que l'état de santé de Madame … nécessite une prise en charge médicale et sollicitez « (…) la délivrance d'une attestation de sursis à l'éloignement en vertu de l'article 130 de la loi modifiée du 29 août 2008 relative à la libre circulation des personnes et l'immigration, voire la soumission du dossier de votre mandante à la procédure de l'article 131 (3) de la susdite loi ».
Il y a lieu de rappeler que vos mandants ont été définitivement déboutés de leurs demandes de protection internationale en date du 6 juin 2017 et qu'ils sont par conséquent dans l'obligation de quitter le territoire luxembourgeois.
Le médecin délégué de la Direction de la Santé a été saisi en date du 13 juillet 2017 concernant l'état de santé de Madame … et suivant son avis du 9 août 2017, reçu le 14 août 2017, un sursis à l'éloignement est refusé à vos mandants conformément aux articles 130 et 132 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration en raison de l'état de santé de Madame ….
En effet, il ressort du prédit avis, dont vous trouvez une copie en annexe, que « (…) Vu le certificat du Dr …, neuropsychiatrie, du 10.07.2017 ; Vu l'examen du sujet au Centre médico-social (CMS) Luxembourg par le médecin délégué en date du 14.10.2015; Vu l'examen du dossier médical réalisé le 09.08.2017 par le médecin délégué; Le/les certificat/s fait/font état de PTSD avec caractère craintif, émotivité, attaques de panique, troubles digestifs. Traitement actuel : Psychothérapie et médicaments antidépresseurs et sédatifs; Il résulte de ce qui précède que le sujet ne présente pas de pathologie grave et imminente justifiant une prise en charge impérieuse au GDL ; Considérant que la prise en charge …-… peut être réalisée dans le pays d'origine (…) l'état de santé de …-… ne nécessite pas de prise en charge médicale dispensée au Luxembourg dont le défaut entraînerait pour elle/lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, par conséquent, …-…, ne remplit pas les conditions médicales pour bénéficier d'un sursis à l'éloignement ».
Comme déjà soulevé plus haut vos mandants sont dans l'obligation de quitter le territoire. A défaut, ordre de quitter sera exécuté d'office et ils seront éloignés par la contrainte.
La présente décision est susceptible d'un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d'un avocat à la Cour dans un délai de trois mois à partir de la notification de la présente. Le recours n'est pas suspensif ».
Par requête déposée le 30 août 2017 et enrôlée sous le n° 40120 du rôle, au greffe du tribunal administratif, les consorts … ont fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 16 août 2017, tandis que par requête déposée postérieurement le 15 septembre 2017, inscrite sous le numéro 40181 du rôle, ils ont encore introduit une demande en institution d’une mesure provisoire tendant en substance à se voir autoriser à séjourner sur le territoire jusqu’au jour où le tribunal administratif aura statué sur le mérite de leur recours.
Les parties demanderesses estiment en effet que les moyens invoqués en soutien de leur recours au fond apparaîtraient comme sérieux et seraient susceptibles d’aboutir à l’annulation de la décision déférée, Madame … se prévalant à cet effet de son état de santé sur base d’un certificat médical dont il résulterait qu’elle souffrirait de problèmes psychologiques en raison de son vécu traumatisant dans son pays d’origine, tout en soutenant qu’elle serait dans l’impossibilité de bénéficier de soins adéquats dans ce même pays d’origine.
Le délégué du gouvernement conclut au rejet de la requête sous analyse.
En vertu de l’article 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le président du tribunal administratif ou le magistrat le remplaçant peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution de l’affaire, à l’exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.
Sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d’admettre que l’institution d’une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l’appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d’une décision administrative alors même que les conditions posées par l’article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l’article 12 n’excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.
Or, en vertu de l’article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.
L’affaire au fond ayant été introduite le 30 août 2017 et compte tenu des délais légaux d’instruction fixés par la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, l’affaire au fond ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance.
L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge administratif à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.
Ainsi, le juge du référé est appelé, d’une part, à procéder à une appréciation de l’instant au vu des éléments qui lui ont été soumis par les parties à l’instance, cette appréciation étant susceptible de changer par la suite en fonction de l’instruction de l’affaire et, d’autre part, non pas à se prononcer sur le bien-fondé des moyens, mais à vérifier, après une analyse nécessairement sommaire des moyens et des arguments présentés, si un des moyens soulevés par le demandeur apparaît comme étant de nature à justifier avec une probabilité suffisante l’annulation de la décision attaquée.
Aussi, afin de satisfaire à cette condition de sérieux, des faits et des éléments doivent être invoqués ou ressortir de la requête ou du dossier administratif, démontrant directement que, pour avoir un effet utile, la mesure demandée doit être immédiatement ordonnée : dès lors, il faut mais il suffit qu’à première vue et eu égard aux circonstances de la cause, le recours puisse être déclaré recevable et fondé et, dès lors, donner lieu à la suspension de l’exécution de la décision attaquée, respectivement à l’instauration de la mesure de sauvegarde sollicitée.
Plus précisément, il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite des moyens présentés, notamment au vu des solutions jurisprudentielles dégagées par le juge du fond, et accorder le sursis, respectivement la mesure de sauvegarde lorsqu’il paraît, en l’état de l’instruction, de nature à pouvoir entraîner l’annulation ou la réformation de la décision critiquée - les moyens devant offrir une apparence de droit suffisante ou un degré de vraisemblance tel que l’on peut nourrir des doutes importants quant à la légalité de l’acte1 -, étant rappelé que comme le sursis d’exécution, respectivement l’institution d’une mesure de sauvegarde, doit rester une procédure exceptionnelle, puisque qu’ils constituent une dérogation apportée aux privilèges du préalable et de l’exécution d’office des décisions administratives, les conditions permettant d’y accéder doivent être appliquées de manière sévère.
Il s’ensuit que, face à une situation où le caractère sérieux des moyens soulevés au fond n’apparaît pas comme étant évident à première lecture, le juge du référé ne peut pas admettre que les moyens en question sont suffisamment sérieux pour justifier une mesure provisoire.
En ce qui concerne l’analyse du sérieux du moyen présenté au fond, relatif à l’application par le ministre de l’article 130 de la loi du 29 août 2008, celui-ci dispose que « sous réserve qu’il ne constitue pas une menace pour l’ordre public ou la sécurité publique, 1 Jean-Paul Lagasse, Le référé administratif, 1992, p.48.
l’étranger ne peut être éloigné du territoire s’il établit au moyen de certificats médicaux que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, et s’il rapporte la preuve qu’il ne peut effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné ».
Or, s’il se dégage de la jurisprudence en la matière que cet article ouvre la possibilité de faire bénéficier un étranger d’un sursis à l’éloignement, à condition de ne pas présenter une menace pour l’ordre ou la sécurité publics et d’établir, en premier lieu, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et, ensuite, qu’il ne peut pas effectivement bénéficier d’un traitement approprié et suffisamment accessible dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné, il s’en dégage aussi que la maladie susceptible d’être prise en compte doit être « celle qui, sans traitement ou soins médicaux, entraîne des conséquences d’une exceptionnelle gravité pour la personne concernée, notamment celle qui peut causer la mort de la personne, réduire son espérance de vie ou entraîner un handicap grave »2.
Il résulte encore de la jurisprudence constante que l’article 130 impose explicitement la charge de la preuve à l’étranger, les conditions devant être remplies cumulativement, de sorte qu’il suffit que l’une d’elles ne soit pas remplie pour que le ministre puisse refuser le bénéfice de l’article 130 de la loi du 29 août 2008.
Il résulte plus particulièrement de la jurisprudence qu’à côté de la condition vérifiée que l’état de santé de l’intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, une deuxième condition est prévue par le texte de loi en question en ce que l’intéressé ne peut obtenir un sursis à l’éloignement que « s’il rapporte la preuve qu’il ne peut effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné ». Or, la Cour administrative a retenu à cet égard que « les termes de la loi sont univoques et ne permettent pas la conclusion suivant laquelle une charge de la preuve afférente incomberait directement à l’Etat. C’est bien au demandeur du sursis à l’éloignement qu’incombe la charge de rapporter la preuve indiquée audit article 130 au niveau de la deuxième condition posée, à savoir celle qu’il ne peut effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné »3.
Force est à cet égard au soussigné de constater de prime abord que Madame … ne fait pas plaider, en substance et à première vue, une impossibilité momentanée d’être éloigné du fait de la nécessité de suivre un traitement déterminé au Luxembourg, de sorte à justifier un sursis, par définition provisoire, mais d’une impossibilité générale de retourner dans son pays tirée de son vécu au Kosovo, des traumatismes y subis et de la nécessité de rester dans l’environnement stable que représenterait pour elle le Luxembourg, le certificat médical semblant de même conclure à une impossibilité générale pour le patient de retourner dans son pays d’origine pour des raisons psychologiques. Or, ce faisant la demanderesse ne se situe a priori pas dans le cadre de l’article 130 de la loi du 29 août 2008 et d’un sursis à l’éloignement, mais plutôt dans le cadre d’une autorisation de séjour pour des motifs humanitaires d’une exceptionnelle gravité telle que prévue à l’article 78 (3) de la même loi.
2 Voir notamment trib. adm. 11 juillet 2012, n° 29407 du rôle.
3 Cour adm. 3 mars 2016, n° 37349C du rôle.
En ce qui concerne le fait que le patient ne peut effectivement pas bénéficier d’un traitement approprié dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné, il ne semble pas se dégager du dossier et des pièces produites par Madame … que celle-ci ne peut pas bénéficier des soins nécessaires au Kosovo, et ce alors pourtant qu’il résulte de la jurisprudence citée ci-dessus, relative à l’article 130 de la loi du 29 août 2008, que la charge de la preuve afférente appartient d’abord au demandeur.
En effet, si le certificat médical versé à l’appui de la demande initiale rejetée étaye certes que Madame … souffrirait des suites traumatiques d’incidents vécus tant personnellement que par des proches au Kosovo, souffrance qui se concrétiserait par des troubles du sommeil, des angoisses et des cauchemars, la demanderesse faisant encore montre d’anxiété, d’états de panique et de problèmes d’adaptation ainsi que de problèmes de digestion et de poids, tandis qu’elle serait traitée par le biais d’entretiens épisodiques avec un psychiatre (le prochain étant prévu pour le 21 septembre 2017) et la prise de médicaments, le médecin certifiant ayant encore retenu que « Fachärztliche Behandlungen sind weiter erforderlich. Durch eine Rückkehr in die Heimat, den Ort der Traumatisierung, ist eine erhebliche Verschlechterung des psychischen Zustandbildes zu erwarten », le soussigné constate d’abord que la nécessité de suivre le traitement au Luxembourg ne résulte pas d’une indisponibilité objective de tels soins au Kosovo, mais de l’appréciation subjective du médecin-traitant : or, le caractère vague et imprécis de telles affirmations entraînent qu’elles ne sauraient être considérées comme sérieuses, mais au contraire comme insuffisantes au regard des exigences de l’article 130 sus-mentionné.
Si les consorts …, en appui de leur requête, font encore plaider que l’accessibilité aux soins médicaux nécessaires ne serait pas établie, alors que Madame … serait dans l’impossibilité de guérir de son traumatisme sur les lieux mêmes où elle aurait subi ce traumatisme vécu, et qu’ils affirment craindre que Madame … n’aurait pas accès aux soins et médicaments nécessaires à son état de santé, le soussigné constate toutefois qu’il résulte manifestement du rapport d’entretien rédigé dans le cadre de la demande de protection internationale des demandeurs que Madame … avait, avant se rendre au Luxembourg en 2015, bien eu accès aux soins nécessaires au Kosovo même, la demanderesse ayant expliqué avoir été suivie par un neuropsychiatre et par un gastro-entérologue au Kosovo, constat qui est de nature à très fortement relativiser l’affirmation qu’elle ne saurait bénéficier d’un traitement approprié dans son pays d’origine.
Ensuite, indépendamment de la question de l’accès effectif à des consultations épisodiques avec un psychiatrique respectivement de la prescription de quelques antidépresseurs d’usage courant, il ne résulte pas du seul certificat médical figurant au dossier que la pathologie dont souffre Madame …, se résumant en des troubles du sommeil, des craintes, des attaques de panique et des troubles digestifs, serait telle que le défaut des soins actuellement prodigués, entraînerait dans son chef des conséquences d’une exceptionnelle gravité, à savoir susceptibles de « causer la mort de la personne, réduire son espérance de vie ou entraîner un handicap grave ».
Force est de constater que les demandeurs tentent d’ailleurs de pallier à cette absence par la formulation d’une offre de preuve devant le juge du fond tendant à rapporter la preuve que l’état de santé de la personne concernée, non autrement précisé, nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité.
Or, tant le libellé même de cette offre de preuve, fondamentalement vague et imprécise - la partie requérante ne précisant même pas quel serait l’état de santé visé et les traitements visés - que sa formulation-même établissent qu’en l’état actuel du dossier le demandeur est dans l’impossibilité de fournir concrètement les preuves requises par l’article 130 susvisé.
Enfin, le moyen libellé comme suit « L'inobservation du principe du débat contradictoire, respectivement le respect de l'égalité des armes et le principe du droit de la défense, dans la mesure où la partie requérante a sollicité face à deux avis médicaux différents en application de l'article 14 de la loi du 21 juin 1999 portant le règlement de la procédure devant les juridictions administratives, l'instauration d'une mesure d'instruction complémentaire contradictoire pour la nomination d'un expert médical pour connaître de l'existence d'un danger ou non dans le chef de la partie requérante, et cela au regard de la prise en charge médicale effective de Madame … par les autorités kosovares et du bien-fondé d'être soignée dans son pays d'origine.» est, outre de ne figurer que dans la requête tendant à l’obtention d’une mesure provisoire, de sorte à être irrecevable, en l’état actuel du dossier et à défaut de toute précision, inintelligible, les consorts … bénéficiant tant devant le soussigné qu’ultérieurement devant les juges siégeant en composition collégiale de la possibilité d’un tel débat contradictoire, notion par ailleurs étrangère à celle d’une mesure d’instruction. Par ailleurs, l’affirmation d’une violation de l’égalité des armes ne semble guère sérieuse, alors que la question en l’espèce ne semble pas être une question d’égalité des armes, mais plutôt celle du respect, par les demandeurs, de la charge de la preuve leur incombant, telle que se dégageant tant des textes légaux que de la jurisprudence constante des juges du fond.
Finalement, en ce qui concerne le dernier moyen tiré d’une violation par le ministre de son obligation de motivation en ce qui concerne l’accès aux soins de Madame … dans son pays d’origine, ce moyen, outre de ne pas non plus figurer dans le recours au fond, méconnaît là encore, manifestement, la charge de la preuve pesant sur l’intéressée.
Il suit de ce qui précède que les moyens invoqués à l’appui du recours au fond ne présentent pas, au stade actuel de l’instruction de l’affaire et au vu des éléments actuellement produits par les demandeurs, le caractère sérieux nécessaire pour justifier le bénéfice du sursis à exécution, sinon de la mesure de sauvegarde sollicitée.
Les demandeurs sont partant à débouter de leur demande en institution d’une mesure de sauvegarde, sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question du risque d’un préjudice grave et définitif dans leur chef, respectivement dans celui de Madame …, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.
Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, rejette la demande en obtention d’une mesure provisoire, condamne les parties demanderesses aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 19 septembre 2017 par Marc Sünnen, président du tribunal administratif, en présence du greffier Xavier Drebenstedt.
s. Xavier Drebenstedt s. Marc Sünnen Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 19 septembre 2017 Le greffier du tribunal administratif 8