Tribunal administratif N° 37335 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 23 décembre 2015 Audience publique du 30 décembre 2015 Requête en institution d’un sursis à exécution, sinon d’une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur …, … par rapport à une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 20 L.5.05.2006)
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ORDONNANCE
Vu la requête inscrite sous le numéro 37335 du rôle et déposée le 23 décembre 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles Kaufhold, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, déclarant être né le … à … (Algérie), et être de nationalité algérienne, demeurant à L-…, tendant à l’obtention d’un sursis à exécution de l’ordre de quitter le territoire dont est assorti la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 9 décembre 2015 ayant décidé de statuer sur sa demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée et ayant refusé de faire droit à sa demande de protection internationale, sinon à l’institution d’une mesure de sauvegarde lui permettant de séjourner sur le territoire luxembourgeois en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le mérite du recours au fond introduit contre la décision du ministre du 9 décembre 2015, précitée, introduit le 23 décembre 2015 et inscrit sous le numéro 37334 du rôle ;
Vu l’article 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;
Maître Christine Louis-Haberer, en remplacement de Maître Charles Kaufhold, pour le demandeur, et Madame le délégué du gouvernement Linda Maniewski entendues en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 30 décembre 2015.
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Par décision du 9 décembre 2015, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après désigné par « le ministre », décida de statuer sur la demande de protection internationale introduite le 19 août 2015 par Monsieur … dans le cadre de la procédure accélérée prévue à l’article 20 de la loi modifiée du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection, ci-après désignée par « la loi du 5 mai 2006 », refusa de faire droit à cette demande de protection internationale et ordonna à Monsieur … de quitter le territoire luxembourgeois dans les 30 jours à compter du jour où la décision sera devenue définitive.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 23 décembre 2015, inscrite sous le numéro 37334 du rôle, Monsieur … a saisi le tribunal administratif d’un recours en réformation, sinon en annulation contre ces trois décisions du 9 décembre 2015.
Par requête déposée le 23 décembre 2015, inscrite sous le numéro 37335 du rôle, il a encore introduit une demande tendant à l’obtention d’un sursis à exécution de l’ordre de quitter le territoire, sinon subsidiairement à l’institution d’une mesure de sauvegarde par rapport à ladite décision ministérielle du 9 décembre 2015 lui permettant de séjourner sur le territoire luxembourgeois en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le mérite du recours au fond introduit contre ladite décision.
A l’appui de sa requête, le requérant soutient que l’affaire au fond ne serait pas en l’état d’être plaidée et décidée à brève échéance, que l’exécution de l’ordre de quitter le territoire risquerait de lui causer un préjudice grave et définitif et que les moyens invoqués à l’appui de son recours au fond seraient sérieux, de manière à remplir les conditions d’octroi d’un sursis à exécution au sens de l’article 11 de la loi du 21 juin 1999.
Subsidiairement, il estime que les conditions particulières de l’affaire justifieraient l’octroi d’une mesure de sauvegarde lui permettant de séjourner sur le territoire luxembourgeois en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le mérite du recours au fond introduit par lui.
Le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité de la requête au motif que l’ordre de quitter le territoire ne serait pas exécuté vu l’effet suspensif du recours au fond.
Subsidiairement, il conclut au rejet de la requête au motif que les conditions d’un sursis à exécution, respectivement d’une mesure de sauvegarde ne seraient pas remplies.
Le mandataire du requérant s’est rapporté à prudence de justice quant à la recevabilité de la requête.
En vertu de l’article 11, paragraphe (2) de la loi du 21 juin 1999, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.
Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.
Une mesure de sauvegarde, prévue à l’article 12 de la loi du 21 juin 1999, requiert, sous peine de vider de sa substance l’article 11 de ladite loi du 21 juin 1999, les mêmes conditions.
S’il est vrai qu’en principe, en vertu de l’article 11, paragraphe (1) de la loi du 21 juin 1999, le recours devant le tribunal administratif n’est pas suspensif, sauf si le président du tribunal ou le magistrat qui le remplace en ordonne autrement, force est de constater qu’en la présente matière l’effet suspensif du recours au fond est expressément prévu par la loi. En effet, tel que cela a été relevé à juste titre par le délégué du gouvernement, l’article 20, paragraphe (4) de la loi du 5 mai 2006, sur le fondement duquel la décision litigieuse en l’espèce a été prise et qui prévoit les voies de recours contre les décisions du ministre de statuer sur le bien-fondé d’une demande de protection internationale dans le cadre d’une procédure accélérée, contre celles de refus d’octroi d’une protection internationale et contre l’ordre de quitter le territoire consécutif pris dans ce contexte, dispose que « Le délai de recours et le recours introduit dans le délai ont un effet suspensif », étant relevé d’ailleurs que la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, abrogeant la loi du 5 mai 2006 à partir du 1er janvier 2016, et indépendamment de la question de l’effet de cette loi sur les procédures en cours, prévoit également l’effet suspensif du recours en la présente matière. Il s’ensuit qu’en raison de l’introduction d’un recours au fond contre la décision litigieuse du 9 décembre 2015, le sursis à exécution que Monsieur … réclame à travers la présente requête lui est d’ores et déjà conféré par l’effet de la loi, étant relevé par ailleurs que la décision litigieuse du 9 décembre 2015 mentionne expressément que le délai de 30 jours, endéans lesquels le requérant a l’obligation de quitter le territoire, commence à courir seulement à partir du jour où la décision est devenue définitive, celle-ci ne devenant définitive en l’espèce qu’une fois que le recours au fond est vidé. Il en est de même de la demande subsidiaire en institution d’une mesure de sauvegarde lui permettant de séjourner sur le territoire luxembourgeois en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le mérite du recours au fond, étant donné que, par l’effet de la loi, le requérant ne pourra pas être éloigné du territoire luxembourgeois et pourra y séjourner en tant que demandeur d’une protection internationale dont la procédure est en cours jusqu’au moment où le tribunal administratif aura statué sur le mérite du recours au fond introduit par lui.
Il suit de ce qui précède, dans la mesure où le requérant bénéficie d’ores et déjà des mesures dont il réclame l’institution, il est à débouter de ses demandes principale et subsidiaire, sans qu’il n’y ait lieu d’examiner plus en avant les différents moyens présentés de part et d’autre.
Par ces motifs, la soussignée, premier juge au tribunal administratif, en remplacement du président du tribunal administratif et des magistrats plus anciens en rang, tous légitiment empêchés, statuant à l’égard de toutes les parties et en audience publique ;
déclare la demande principale en sursis à exécution et celle subsidiaire en institution d'une mesure de sauvegarde non justifiées et en déboute ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 30 décembre 2015 par Annick Braun, premier juge au tribunal administratif, en présence du greffier Michèle Hoffmann.
s. Hoffmann s. Braun Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 30/12/2015 Le Greffier du Tribunal administratif 4