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11/08/2015 | LUXEMBOURG | N°36757

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 août 2015, 36757


Tribunal administratif N° 36757 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 août 2015 Audience publique du 11 août 2015 Requête en institution d’une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur …et consort, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de refus de sursis à l’éloignement

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 36757 du rôle et déposée le 10 août 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au table

au de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Albanie) agissant en so...

Tribunal administratif N° 36757 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 août 2015 Audience publique du 11 août 2015 Requête en institution d’une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur …et consort, …, contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de refus de sursis à l’éloignement

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 36757 du rôle et déposée le 10 août 2015 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Albanie) agissant en son nom personnel, ainsi qu’au nom et pour le compte de son enfant mineur …, né le … à …, tous deux de nationalité albanaise, actuellement retenus ensemble au Centre de rétention au Findel, tendant à voir ordonner une mesure de sauvegarde à l’encontre de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 4 février 2015 refusant de lui octroyer un sursis à l’éloignement, un recours en annulation dirigé contre la même décision, inscrit sous le numéro 35843 du rôle, introduit le 12 février 2015, étant pendant devant le tribunal administratif ;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Maître Shirley FREYERMUTH, en remplacement de Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, et Madame le délégué du gouvernement Jacqueline JACQUES entendues en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 11 août 2015.

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Par décision du 4 février 2015, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé le « ministre », rejeta une demande en obtention d’un sursis à l’éloignement introduite par courriers du 22 janvier 2015 par Monsieur …, agissant en son nom personnel, ainsi qu’au nom et pour le compte de son enfant mineur …, ci-après « les consorts … ».

L’arrêté ministériel en question est motivé comme suit :

« (…) J'ai l'honneur de me référer à votre courrier du 22 janvier 2015 dans lequel vous sollicitez un sursis à l'éloignement pour le compte de vos mandants conformément aux articles 130 et suivants de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration en raison de l'état de santé de l'enfant….

Il y a lieu de rappeler que vos mandants ont été définitivement déboutés de leurs demandes de protection internationale en date du 15 octobre 2014 et qu'ils sont dans l'obligation de quitter le territoire luxembourgeois jusqu'au 4 juillet 2015.

Le médecin délégué du Service Médical de l’Immigration de la Direction de la Santé a été saisi en date du 26 janvier 2015 concernant l'état de santé de l'enfant . … et suivant son avis du 27 janvier 2015,reçu le 2 février 2015 un sursis à l'éloignement est refusé à vos mandants conformément aux articles 130 et 132 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l'immigration en raison de l'état de santé de l’enfant . ….

En effet, il ressort du prédit avis, dont vous trouverez une copie en annexe, que « (…) Vu l’attestation médicale de M. .., psychologue, établi en date du 18.01.2015 ; Vu l’examen du dossier médical réalisé le 27.01.2015 par le médecin délégué ; Le patient souffre d’une phobie sociale avec troubles de l’intégration ; Considérant que la prise en charge de … . peut être réalisée dans le pays d’origine (…) l’état de santé de … . ne nécessite pas une prise en charge médicale dispensée au Luxembourg dont le défaut entraînerait pour elle/lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, par conséquent … . ne remplit pas les conditions médicales pour bénéficier d’un sursis à l’éloignement ».

Comme déjà soulevé plus haut, vos mandants sont dans l’obligation de quitter le territoire. A défaut, l’ordre de quitter sera exécuté d’office et ils seront éloignés par la contrainte.

La présente décision est susceptible d'un recours en annulation devant le Tribunal administratif. Ce recours doit être introduit par requête signée d'un avocat à la Cour dans un délai de trois mois à partir de la notification de la présente. Le recours n'est pas suspensif. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 12 février 2015, inscrite sous le numéro 35843 du rôle, les consorts … firent introduire un recours en annulation contre cette décision ministérielle du 4 février 2015.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 10 août 2015 sur base des articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », ils sollicitent l’instauration d’une mesure de sauvegarde.

Les demandeurs soutiennent que l’exécution de la décision attaquée risquerait de leur causer un préjudice grave et définitif et que les moyens invoqués à l’appui de leur recours au fond seraient sérieux.

Ils estiment plus particulièrement que le refoulement vers leur pays d’origine causerait un préjudice grave et irréparable à l’. … dans la mesure où sa vie serait sérieusement mise en jeu dès lors qu’il ne pourrait non seulement pas accéder à des soins de santé adéquats en Albanie, mais qu’il serait également contre-indiqué pour lui de retourner en Albanie alors que ses problèmes de santé proviendraient de son pays d’origine. Les demandeurs font encore valoir qu’il ressortirait du certificat médical du docteur F.K. émis le 18 janvier 2015 qu’ils versent à l’appui de leur recours en annulation contre la décision déférée que « l’expérience sociale négative et traumatisante dont a souffert l’enfant dans son pays d’origine en Albanie a été déclencheuse d’une PS (phobie sociale). Ledit traumatisme est associé chez l’enfant . … avec l’apparition ou l’aggravation des troubles de la décomposition émotionnelle. Par ailleurs le fait d’avoir eu des expériences directes ou indirectes en ayant pris connaissance d’expérience sociales désagréables chez d’autres et au sein de sa famille a rendu le développement de ce trouble plus fréquent chez . », le docteur F.K. estimant encore qu’il « est évident que . s’est senti souvent rejeté dans son milieu social d’origine et qu’il a souffert de difficultés d’intégration ainsi que d’un rejet permanent de la part de ses pairs. Depuis sa scolarisation à Vianden l’état mental et émotionnel de l’enfant . semble s’améliorer et se stabiliser sensiblement. De ce fait et d’un point de vue psychologique le retour de . et de son père …dans leur pays d’origine est à déconseille fermement ».

Les demandeurs concluent partant à une violation de l’article 130 de la loi modifiée du 29 août 2008 sur la libre circulation des personnes et l’immigration en ce que . … nécessiterait un traitement médical dont le défaut entrainerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, les demandeurs contestant qu’un tel traitement serait accessible dans leur pays d’origine en se basant plus particulièrement sur un rapport de l’OSAR du 13 février 2013 et sur un article de presse du 22 juillet 2012 faisant état de problèmes de corruption quant à l’accès à des soins médicaux. Ils demandent finalement, en application de l’article 14 de la loi du 21 juin 1999, l’instauration d’une mesure d’instruction complémentaire contradictoire par la nomination d’un expert médical.

Le délégué du gouvernement estime que les conditions légales pour justifier l’institution d’une mesure de sauvegarde ne seraient pas remplies en l’espèce.

En vertu de l’article 11, paragraphe (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.

Une mesure de sauvegarde, prévue à l’article 12 de la loi du 21 juin 1999 requiert, sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, les mêmes conditions tenant au sérieux des moyens et au risque d’un préjudice grave et définitif.

L’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge des référés à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l’instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.

En ce qui concerne les moyens des demandeurs par rapport au refus ministériel de l’octroi d’un sursis à l’éloignement, il y a lieu de rappeler qu’en vertu de l’article 130 de la loi du 29 août 2008 « sous réserve qu’il ne constitue pas une menace pour l’ordre public ou la sécurité publique, l’étranger ne peut être éloigné du territoire s’il établit au moyen de certificats médicaux que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, et s’il rapporte la preuve qu’il ne peut effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné ». L’article 131 (2) précise que si à l’expiration d’un délai de deux ans, l’étranger rapporte la preuve que son état persiste, il peut obtenir une autorisation pour raisons médicales pour la durée du traitement.

Or, s’il se dégage de la jurisprudence en la matière que les articles 130 et 131 (2), le second n’étant qu’une précision au niveau d’une situation perdurant au-delà de deux ans, ouvrent la possibilité de faire bénéficier un étranger d’un sursis à l’éloignement, voire d’une autorisation de séjour, à condition de ne pas présenter une menace pour l’ordre ou la sécurité publics et d’établir, en premier lieu, que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et, ensuite, qu’il ne peut pas effectivement bénéficier d’un traitement approprié et suffisamment accessible dans le pays vers lequel il est susceptible d’être éloigné, il s’en dégage aussi que la maladie susceptible d’être prise en compte doit être « celle qui, sans traitement ou soins médicaux, entraîne des conséquences d’une exceptionnelle gravité pour la personne concernée, notamment celle qui peut causer la mort de la personne, réduire son espérance de vie ou entraîner un handicap grave »1.

A la lumière de cette jurisprudence et au regard de ce que des moyens d’annulation tirés en substance de la violation ou de la mauvaise application de l’article 130 de la loi du 29 août 2008 tablent essentiellement sur une question d’appréciation par rapport à laquelle le juge du provisoire doit faire usage de ses pouvoirs avec grande parcimonie, la soussignée doit constater, sur base d’un examen nécessairement sommaire, qu’il ne se dégage pas à suffisance de droit des éléments d’appréciation soumis en cause que l’état de santé de l’enfant . soit tel que son éloignement soit manifestement contre-indiqué pour emporter pour l’intéressé des conséquences d’une exceptionnelle gravité, au sens dégagé par la jurisprudence et que l’intéressée ne puisse manifestement pas poursuivre son traitement dans son pays d’origine, respectivement que le ministre ait commis une erreur manifeste d’appréciation y relative. Dans ce contexte, il y a plus particulièrement lieu de relever que s’il se dégage de l’unique certificat médical invoqué par les demandeurs que l’enfant . souffre d’une phobie sociale, ledit certificat ne fait pas état d’un quelconque traitement suivi par l’enfant ou devant être suivi par ce dernier et il ne met a fortiori pas non plus en évidence quelles seraient les conséquences exactes en cas de défaut de prise en charge médicale de l’enfant, respectivement si l’absence de prise en charge pouvait entraîner des conséquences exceptionnellement graves dans son chef. Au regard de ces considérations, la soussignée est amenée à retenir qu’il ne ressort pas des éléments lui soumis que l’état de santé de l’enfant . … nécessite un traitement dont le défaut entraînerait pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité au sens de l’article 130 de la loi du 29 août 2008, étant par ailleurs relevé que ni le certificat médical du docteur F.K. du 18 janvier 2015, ni le rapport et l’article de presse versés en cause ne semblent a priori remettre en cause l’avis du médecin de contrôle du 27 janvier 2015 selon lequel il existerait une possibilité de soins dans le pays d’origine de l’enfant .

…, ce d’autant plus à défaut de précision quant aux soins concrètement requis dans le chef de l’enfant.

1 v. not. trib. adm. 11 juillet 2012, n° 29407 du rôle.

Il s’ensuit que le recours au fond, au stade actuel de son instruction et sur base d’une analyse nécessairement sommaire, n’apparaît pas comme ayant des chances suffisamment sérieuses d’aboutir à l’annulation de la décision litigieuse au fond.

Les demandeurs sont partant à débouter de leur demande en institution d’une mesure de sauvegarde sans qu’il y ait lieu d’examiner davantage la question du risque d’un préjudice grave et définitif dans leur chef, les conditions afférentes devant être cumulativement remplies, de sorte que la défaillance de l’une de ces conditions entraîne à elle seule l’échec de la demande.

Par ces motifs, la soussignée, juge du tribunal administratif, siégeant en remplacement des président et magistrats plus anciens en rang, tous légitimement empêchés, statuant contradictoirement et en audience publique ;

reçoit la requête en institution d'une mesure de sauvegarde en la forme ;

au fond, la déclare non justifiée et en déboute ;

condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 11 août 2015 par Alexandra Castegnaro, juge, en présence du greffier Marc Warken.

s. Marc Warken s. Alexandra Castegnaro Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 11/08/2015 Le Greffier du Tribunal administratif 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 36757
Date de la décision : 11/08/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2015-08-11;36757 ?

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