Tribunal administratif N° 32003 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2013 Audience publique du 1er mars 2013 Requête en institution d’une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur XXX XXX, XXX, contre une décision du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration en matière de permis de séjour
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ORDONNANCE
Vu la requête, inscrite sous le numéro 32003 du rôle et déposée le 30 janvier 2013 au greffe du tribunal administratif par Maître Ardavan FATHOLAHZADEH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur XXX XXX, né le X XXX XXXX à XXX (XXX), de nationalité XXX, demeurant à XXX XXX, XXX, route de XXX, tendant à voir instituer une mesure de sauvegarde par rapport à une décision implicite de refus du ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration suite à une demande de régularisation introduite le XX XXX XXXX, respectivement par rapport à la « décision sous-jacente d’expulsion, confirmée par l’achat d’un billet d’avion par les autorités ministérielles, dont le vol est prévu le XX XXX XXXX », lesquelles sont critiquées au fond par une requête en annulation introduite le même jour et portant le numéro 32002 du rôle ;
Vu la lettre du délégué de gouvernement déposée au greffe du tribunal administratif le XX XXX XXXX par laquelle il sollicite la fixation de l’affaire pour plaidoiries au mois, le gouvernement étant d’accord à ne pas éloigner le demandeur jusqu’au XX XXX XXXX ;
Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Madame le délégué du gouvernement Jacqueline GUILLOU-JACQUES entendue en sa plaidoirie à l’audience publique de ce jour.
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Le X XXX XXXX, Monsieur XXX XXX arriva sur le territoire luxembourgeois et s’installa auprès de Madame XXX XXX, de nationalité XX, avec laquelle il s'était uni maritalement le XX XXX XXXX au XXX.
Le XX XXX XXXX, il reçut délivrance d’une carte de séjour valable jusqu'au X XXX XXXX.
Les époux XXX-XXX divorcèrent le XX XXX XXXX.
Par courrier du XX XXX XXXX, Monsieur XXX fut informé par le ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Immigration, ci-après le « ministre », de ce qu’il envisageait de révoquer son titre de séjour en qualité de membre de la famille d'un citoyen de l'Union. Le XX XXX XXXX, le ministre informa Monsieur XXX que le susdit droit de séjour était révoqué. Suite à un recours gracieux introduit le XX XXX XXXX, le ministre confirma, le XX XXX XXXX, sa décision du XX XXX XXXX. Un recours contentieux introduit le XX XXX XXXX devant le tribunal administratif (n° XXXX du rôle) contre les deux décisions des XX XXX et XX XXX XXXX est actuellement en cours d’instruction.
Le XX XXX XXXX, Monsieur XXX saisit le ministre d’une demande de régularisation sur base de « la note ministérielle du XX XXX XXXX ».
Par requête déposée le 30 janvier 2013 au greffe du tribunal administratif, inscrite sous le numéro 32002 du rôle, Monsieur XXX a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la « décision implicite de rejet (…) [du ministre] consécutive à une demande de régularisation introduite le XX XXX XXXX (…), respectivement à l’encontre de la décision sous-jacente d’expulsion, confirmée par l’achat d’un billet d’avion par les autorités ministérielles, dont le vol est prévu le XX XXX XXXX » et, par requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 32003 du rôle, il sollicite l’institution d’une mesure de sauvegarde par rapport à ces mêmes décisions ministérielles.
Le demandeur fait soutenir que les conditions légales, telles que prévues par l’article 11 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après dénommée la « loi du 21 juin 1999 », seraient remplies en cause et il demande en substance à se voir autoriser provisoirement à séjourner sur le territoire luxembourgeois en attendant l’issue de son recours au fond.
Le délégué du gouvernement estime que les conditions légales justifiant le prononcé d’une mesure provisoire ne seraient pas remplies en cause principalement en raison du fait que le recours au fond serait irrecevable pour viser une décision non encore prise.
Le demandeur, dûment convoqué, n’ayant pas été représenté à l’audience des plaidoiries, n’a pas pris position relativement au moyen d’irrecevabilité de son recours au fond.
En vertu de l’article 11 (2) de la loi du 21 juin 1999, un sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au demandeur un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l’affaire est en état d’être plaidée et décidée à brève échéance.
Une mesure de sauvegarde, prévue à l’article 12 de la loi du 21 juin 1999, requiert, sous peine de vider de sa substance l’article 11 de la même loi, les mêmes conditions tenant au sérieux des moyens et au risque d’un préjudice grave et définitif.
La compétence du président du tribunal est restreinte à des mesures essentiellement provisoires et ne saurait en aucun cas porter préjudice au principal. Il doit s’abstenir de préjuger les éléments soumis à l’appréciation ultérieure du tribunal statuant au fond, ce qui implique qu’il doit s’abstenir de prendre position de manière péremptoire, non seulement par rapport aux moyens invoqués au fond, mais même concernant les questions de recevabilité du recours au fond, étant donné que ces questions pourraient être appréciées différemment par le tribunal statuant au fond. Il doit donc se borner à apprécier si les chances de voir déclarer recevable le recours au fond paraissent sérieuses, au vu des éléments produits devant lui. Il ne saurait se prononcer définitivement sur des questions de recevabilité que pour autant que celles-ci touchent exclusivement à la demande de sursis à exécution.
En l’espèce, le moyen tiré de l’irrecevabilité du recours pour être prématuré ne vise pas, de manière spécifique, la mesure de sursis à exécution, mais le recours introduit au fond contre les décisions que le demandeur entend attaquer.
Ce moyen touche partant le fond du droit ; il relève plus précisément du caractère sérieux des moyens invoqués à l’appui du recours au fond et il est à examiner sous ce rapport.
Il convient encore de relever que l’exigence tirée du caractère sérieux des moyens invoqués appelle le juge des référés à examiner et à apprécier, au vu des pièces du dossier et compte tenu du stade de l'instruction, les chances de succès du recours au fond. Pour que la condition soit respectée, le juge doit arriver à la conclusion que le recours au fond présente de sérieuses chances de succès.
En ce qui concerne le moyen d’irrecevabilité tiré du caractère prématuré de l’introduction du recours contentieux, il semble, au stade actuel de l’instruction du litige, et sur base d’une analyse nécessairement sommaire, que ce moyen présente des chances de succès sérieuses et que les juges du fond seront amenés à conclure à l’irrecevabilité du recours au fond du demandeur.
En effet, le recours au fond vise en premier lieu une prétendue décision implicite de rejet de sa demande de régularisation Or, il semble que les juges du fond seront amenés à conclure que la présomption de décision instaurée par l’article 4 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif pour agir contre l’inaction prolongée de l’autorité compétente ne naisse qu’à l’expiration d’un délai de trois mois après l’introduction de la demande et que de la sorte, au jour de la saisine de la juridiction administrative, date à laquelle les juges du fond devraient se placer pour apprécier la recevabilité d’un recours, le recours du demandeur, introduit huit jours après l’introduction de la demande administrative, risque effectivement d’être déclaré prématuré pour ne viser qu’une décision en voie d’être prise.
Pour le surplus, il semble que le demandeur n’ait que peu de chances à se voir suivre par les premiers juges en ce qu’il entend voir dégager du fait de l’achat d’un billet d’avion la matérialisation d’une prétendue décision de rejet de sa demande de régularisation ou d’une prétendue décision d’expulsion, voire même d’une quelconque décision administrative attaquable. En effet, ledit achat d’un billet d’avion appert tout au plus être un acte d’exécution des deux décisions ministérielles exécutoires des XX XXX et XX XXX XXXX portant révocation du droit de séjour de l’intéressé.
Au vu de ces considérations qui précèdent, il semble que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement oppose au demandeur le caractère prématuré de son recours au fond et il est probable que les juges du fond déclareront le recours irrecevable, de sorte qu’il y a lieu de rejeter la demande en institution d’une mesure de sauvegarde au motif qu'en l'état actuel de l'instruction du dossier, les chances de succès de la demande au fond apparaissent comme trop aléatoires pour justifier une telle mesure.
Par ces motifs, le soussigné, président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique ;
reçoit la requête en institution d’une mesure provisoire en la forme ;
au fond, la déclare non justifiée et en déboute ;
condamne le demandeur aux frais.
Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 1er mars 2013 par M. CAMPILL, président du tribunal administratif, en présence de M. RASSEL, greffier.
s. RASSEL s. CAMPILL 4