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15/07/2010 | LUXEMBOURG | N°26104

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 juillet 2010, 26104


Tribunal administratif Numéro 26104 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 septembre 2009 2e chambre Audience publique du 15 juillet 2010 Recours formé par la société à responsabilité limitée … s.à r.l., … contre un bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en matière de cotisations professionnelles

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 26104 du rôle et déposée le 18 septembre 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre Winandy, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Or

dre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … s.à r.l...

Tribunal administratif Numéro 26104 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 18 septembre 2009 2e chambre Audience publique du 15 juillet 2010 Recours formé par la société à responsabilité limitée … s.à r.l., … contre un bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en matière de cotisations professionnelles

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 26104 du rôle et déposée le 18 septembre 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre Winandy, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L- …, représentée par son gérant en fonction, tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’un bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce en date du 3 juillet 2009 portant sur la cotisation à payer pour l’année 2009 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy Engel, demeurant à Luxembourg, du 29 septembre 2009, portant signification de ce recours à la Chambre de Commerce du Grand-

Duché de Luxembourg, établie à L-1615 Luxembourg, 7, rue Alcide de Gasperi ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 22 décembre 2009 par Maître Patrick Kinsch, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ledit mémoire en réponse ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 janvier 2010 par Maître Jean-Pierre Winandy pour compte de la société à responsabilité limitée … s.à r.l., ledit mémoire en réplique ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la Chambre de Commerce ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif le 8 février 2010 par Maître Patrick Kinsch pour compte de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ledit mémoire en duplique ayant été notifié le même jour par acte d’avocat à avocat au mandataire de la partie demanderesse ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le bulletin critiqué ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Jean-Pierre Winandy, ainsi que Maître Patrick Kinsch en leurs plaidoiries respectives.

En date du 3 juillet 2009, la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ci-après dénommée la « Chambre de Commerce », émit à l’égard de la société à responsabilité limitée … s.à r.l., ci-après dénommée la « société … », un bulletin de cotisation portant sur l’année 2009.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 18 septembre 2009, la société … a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation du bulletin de cotisation émis en date du 3 juillet 2009 portant sur l’année 2009.

A défaut de l’existence d’un recours au fond en matière de décisions prises par une chambre professionnelle et portant sur les cotisations qui lui sont dues de la part de ses membres, c’est à bon droit que la partie défenderesse conclut à l’incompétence du tribunal administratif pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre le bulletin litigieux du 3 juillet 2009. Partant, seul un recours en annulation a pu être introduit contre ledit bulletin.

Le recours en annulation est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi, étant entendu que le simple fait d’avoir procédé au paiement de la cotisation fixée pour l’année 2009 n’est pas de nature à enlever à la partie demanderesse le droit de faire vérifier la légalité dudit bulletin par les juridictions administratives.

Il appartient au tribunal, au vu de l’ensemble des actes de procédure et des pièces versées au dossier, de déterminer la suite de traitement des moyens et arguments des parties compte tenu de la logique juridique dans laquelle ils s’insèrent1.

S’il est vrai qu’une partie demanderesse est censée reproduire les moyens dont elle entend faire état dans le cadre de sa requête introductive d’instance, même si ce n’est que de manière sommaire, conformément à l’article 1er, alinéa 2 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il n’en demeure pas moins qu’au cas où elle fait état d’un moyen nouveau dans le cadre de son mémoire en réplique et s’il s’agit d’un moyen que le tribunal aurait pu soulever d’office pour avoir trait à l’ordre public, alors ce moyen doit également faire l’objet d’un examen par le tribunal.

Les moyens d’ordre public sont ceux qui ont trait au respect de règles qui touchent aux intérêts essentiels de l’Etat ou de la collectivité, au bon fonctionnement des pouvoirs publics et à la sauvegarde des droits fondamentaux des administrés.

En l’espèce, il échet de constater que l’un des moyens nouveaux dont a fait état la partie demanderesse dans son mémoire en réplique concerne la légalité du règlement grand-

ducal du 21 décembre 2007 relatif aux modalités d’affiliation à la Chambre de Commerce, au mode et à la procédure d’établissement du rôle des cotisations de la Chambre de Commerce et fixant la procédure de perception des cotisations de la Chambre de Commerce, ci-après dénommé le « règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 », la demanderesse soutenant que celui-ci se baserait à tort sur l’urgence y invoquée pour justifier la dispense de la prise d’un 1 trib. adm. 4 décembre 2002, n° 14923 du rôle, Pas. adm. 2009, V° Procédure contentieuse, n° 667 et autres références y citées avis du Conseil d’Etat dans le cadre de son élaboration, de sorte à ce que sur base de l’article 95 de la Constitution, il y aurait lieu de ne pas en faire application au cas d’espèce au vu de son caractère illégal, avec l’incidence corrélative sur la légalité du bulletin de cotisation litigieux.

Le moyen ainsi soulevé par la partie demanderesse est à qualifier de moyen d’ordre public, étant donné qu’il a trait à l’ordre légal de l’Etat et à la légalité des réglementations prises en application des lois.

Il y a partant lieu de rejeter comme n’étant pas fondées les conclusions de la Chambre de Commerce tendant à voir écarter ce moyen qu’elle qualifie de « nouveau » du fait de ne pas figurer dans la requête introductive d’instance.

En réponse à ce moyen qualifié comme étant d’ordre public, le mandataire de la Chambre de Commerce fait valoir qu’il existerait des éléments de motivation soumis au Grand-Duc à l’appui de l’urgence invoquée qui démontreraient utilement le cas d’urgence et qui justifieraient valablement le défaut de saisine du Conseil d’Etat quant au projet de règlement grand-ducal allant devenir le règlement grand-ducal du 21 décembre 2007.

Ainsi, d’une part, il se dégagerait de la note motivant l'urgence du ministre de l'Economie et du Commerce extérieur, que le recours à la procédure d'urgence se trouverait motivé par la nécessité de « créer une base règlementaire permettant à la Chambre de Commerce de percevoir ses cotisations pour l'année en cours ». Selon le même texte, « il y a lieu d'adopter et de publier le règlement grand-ducal avant la fin d'année ».

D’autre part, cette urgence serait confirmée par l'extrait du procès-verbal N°41/07 du conseil du gouvernement du 21 décembre 2007, selon lequel « la démarche du Ministère de l'Economie et du Commerce extérieur vise à mettre un terme à une certaine insécurité juridique qui pourrait planer sur l'émission des bulletins de cotisation de la Chambre de Commerce pour l'année 2008 et sur la perception des cotisations relatives à l'exercice 2007 restées impayées.

Ayant entendu Monsieur le Ministre de l'Economie et du Commerce extérieur en ses explications, le Conseil marque son accord avec le texte de l'avant-projet du règlement grand-ducal, texte qui par ailleurs pourra bénéficier de la procédure d'urgence au regard du fait qu'il échet de mettre un terme le plus rapidement possible à l'insécurité juridique qui pourrait planer sur l'émission des bulletins de cotisation de la Chambre de Commerce pour l'année 2008 ».

De troisième part, le texte de l'exposé des motifs du règlement grand-ducal préciserait ce qui suit :

« Tout en laissant ainsi aux chambres professionnelles la liberté nécessaire qu'il leur faut pour pouvoir fixer elles-mêmes en toute sérénité les cotisations afin de pouvoir faire face à leurs dépenses, le législateur a néanmoins entendu endiguer cette liberté endéans certaines limites. Le législateur a ainsi chargé le pouvoir réglementaire de prendre des règlements grand-ducaux quant à la procédure d'établissement du rôle des chambres professionnelles et quant à la procédure de perception des cotisations. Toutefois, ces règlements grand-ducaux n'ont jamais été pris en ce qui concerne la Chambre de Commerce.

L'absence de ces règlements grand-ducaux est à la base de critiques de la part de ressortissants de la Chambre de Commerce qui ont introduit des recours contre des bulletins de cotisation de la Chambre de Commerce. Ces affaires ont été tranchées en première instance par un jugement en date du 24 octobre 2007 rendu par le tribunal administratif qui, tout en statuant que les modalités de fixation des cotisations n'ont pas besoin d'être arrêtées dans un règlement grand-ducal, a considéré que les deux règlements grand-ducaux, prévus par l'article 3 de la loi modifiée du 4 avril 1924 et ayant comme objet de déterminer la procédure d'établissement du rôle respectivement la procédure de perception des cotisations, sont nécessaires aux fins d'exécution de la disposition légale en cause.

Cette interprétation jurisprudentielle s'est dès lors basée sur l'aspect formel de l'absence des règlements grand-ducaux dont question. Une autre analyse juridique du cadre normatif de l'établissement des bulletins de cotisation aurait pu consister à dire que cette absence de règlements grand-ducaux n'empêche pas la liquidation des cotisations de la Chambre de Commerce, celle-ci étant une opération purement mécanique. En effet, l'article 3 de la loi modifiée du 4 avril 1924 portant création de chambres professionnelles à base élective donne à la Chambre de Commerce le pouvoir de déterminer elle-même les modalités de la fixation de ses cotisations et l'article 37bis de cette même loi se réfère au bénéfice commercial afin de fixer une limite maximale à ces cotisations. En application de ces articles, le règlement d'affiliation et de cotisation de la Chambre de Commerce, document accessible aux ressortissants de la Chambre de Commerce, fixe les cotisations de la Chambre de Commerce à 2 ‰ du bénéfice commercial réalisé par ses ressortissants. Dans ces circonstances, il était légitime d'argumenter que tous les éléments nécessaires à la liquidation des cotisations existaient et que la loi serait immédiatement exécutoire.

Telle n'a pas été l'interprétation du tribunal administratif. Alors même qu'il ne s'agit en l'occurrence que d'une décision de première instance contre laquelle un appel peut toujours être interjeté, l'issue de ce débat reste incertaine. Cette incertitude pendant la phase d'instruction de la procédure d'appel sera préjudiciable au bon fonctionnement de la Chambre de Commerce. En effet, le prononcé d'un arrêt au cours de l'année 2008 risquera de remettre en question l'émission des bulletins de cotisation de la Chambre de Commerce pour l'année 2008. En plus, la perception des cotisations relatives à l'exercice 2007 restées impayées sera gravement compromise ».

Selon la Chambre de Commerce, cette motivation serait logique et cohérente et il n'appartiendrait pas au juge de procéder à un examen de l'opportunité des motifs politiques invoqués. Pour le surplus, même si pareil contrôle était fait, il conviendrait de confirmer l'appréciation du gouvernement qu’objectivement, l'adoption du règlement grand-ducal était urgente.

Elle soutient encore que le fait d'attendre l'avis du Conseil d'Etat aurait risqué de rendre impossible tant les prélèvements des cotisations pour 2008 que les rappels des cotisations pour 2007. Il est encore précisé que si la situation réglementaire n'avait pas été régularisée au début de l'année 2008, le financement de la Chambre de commerce aurait été compromis.

Elle estime en outre qu’il n'était nullement certain que le gouvernement parvienne à obtenir l'avis du Conseil d'Etat avant la fin de l'année 2007.

Par ailleurs, s’il arrivait occasionnellement que le Conseil d'Etat rende très rapidement ses avis, il n’en resterait pas moins qu’il ne serait ni subordonné au gouvernement, ni obligé de partager l'opinion du gouvernement sur le degré d'urgence d'un projet donné. Concernant le fait que le Conseil d'Etat a avisé très rapidement un amendement au projet de loi n° 5801, de manière à ce que cette loi, avec l'amendement en question, a pu être promulguée le 21 décembre 2007, ceci s'expliquerait par l'objet de la loi en question (cette loi modifiant toute une série de lois en matière d'impôts directs et indirects et en matière de boni pour enfant) imposant que l'entrée en vigueur de cette loi aurait été perçue comme particulièrement importante, afin d'éviter toute discussion sur la possibilité d'appliquer la réforme fiscale, qui touchait directement à la vie de la population, dès le début de l'année 2008.

Par conséquent, l'invocation de l'urgence dans le cas en l'espèce ne devrait pas être considérée comme entachant le règlement d'illégalité.

Admettant que le pouvoir réglementaire aurait théoriquement pu adopter, dès 1924, le règlement d'exécution de la loi du 4 avril 1924, il conviendrait, d’après la Chambre de Commerce, de constater qu’il ne l'a pas fait et il y aurait d'ailleurs eu des arguments, non dépourvus de pertinence, à l'appui de la thèse que l'adoption de ces règlements grand-ducaux n'était pas absolument indispensable. Ainsi, la solution retenue par le tribunal administratif dans le jugement du 24 octobre 2007, dans l’affaire inscrite sous le numéro 22636 du rôle, retenant que les cotisations de la Chambre de commerce étaient illégales en raison du fait que le règlement grand-ducal prévoyant la procédure d'établissement des rôles de cotisation et la procédure de perception des cotisations n’avait pas encore été pris, n'aurait pas été évidente dès le départ et aurait représenté une surprise pour la Chambre de Commerce d'abord, pour le gouvernement ensuite. Ce serait donc au plus tôt à partir du 24 octobre 2007, voire à partir de la confirmation de ce jugement par l'arrêt du 17 avril 2008, que la nécessité de prendre un règlement grand-ducal se serait imposée avec évidence.

Aux termes de l’article 95 de la Constitution, « les cours et tribunaux n’appliquent les arrêtés et règlements généraux et locaux qu’autant qu’ils sont conformes aux lois. » L’article 2 (1) de la loi modifiée du 12 juillet 1996 portant réforme du Conseil d’Etat dispose qu’« aucun projet ni aucune proposition de loi ne sont présentés à la Chambre des députés et, sauf le cas d’urgence à apprécier par le Grand-Duc, aucun projet de règlement pris pour l’exécution des lois et des traités ne sont soumis au Grand-Duc qu’après que le Conseil d’Etat a été entendu en son avis ».

Il se dégage de cette disposition légale qu’un règlement grand-ducal ne peut être pris qu’après que le Conseil d’Etat a été entendu en son avis, sauf si, en raison de l’urgence, il n’y a pas lieu de recourir à cet avis.

Il s’y ajoute qu’il appartient au juge administratif de vérifier si, dans le cadre de la procédure d’élaboration du règlement grand-ducal, le cas d’urgence inscrit à l’article 2 (1) de la loi précitée du 12 juillet 1996 a pu être invoqué2.

Ce contrôle de légalité exercé par le juge administratif est appelé à avoir lieu tant par la voie d’action que par voie d’exception.

2 Cour adm. 12 octobre 2001, n° 13340C du rôle, Pas. adm. 2009, V° Lois et règlements, n° 53, page 494 et autres décisions y citées En l’espèce, il est constant que le règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 n’a pas été soumis à l’avis du Conseil d’Etat.

D’après les éléments de motivation invoqués comme sous-tendant le cas d’exception de l’urgence, le pouvoir règlementaire entendait réagir avant la fin de l’année 2007 à une décision de première instance prononcée par le tribunal administratif le 24 octobre 2007 afin de « mettre un terme à une certaine insécurité juridique qui pourrait planer sur l'émission des bulletins de cotisation de la Chambre de Commerce pour l'année 2008 et sur la perception des cotisations relatives à l'exercice 2007 restées impayées ».

S’il y a effectivement lieu de constater l’existence d’une insécurité juridique en matière de perception des cotisations des chambres professionnelles, elle ne date ni de 2007 ni n’est-elle à mettre en rapport avec un revirement jurisprudentiel, mais elle découle du fait patent qu’un règlement d’administration publique expressément prévu par l’article 3, alinéa 2 de la loi modifiée du 4 avril 1924, précitée, n’a pas été pris depuis l’entrée en vigueur de cette loi.

Si la Chambre de Commerce ou le gouvernement croyaient pouvoir espérer que les juridictions admettraient la validité de la perception des cotisations de la première moyennant une application de la législation afférente, malgré l’absence dudit règlement d’administration publique, pourtant requis en vertu de la loi du 4 avril 1924, le fait qu’ils n’ont pas été suivis sur cette voie par les juridictions administratives ne saurait justifier le passage par la procédure d’urgence pour suppléer à une carence ayant perduré pendant des décennies.

En effet, le caractère clair et non équivoque de la volonté du législateur de voir spécialement réglementer le mode et la procédure d’établissement et de perception des cotisations des chambres professionnelles a pour conséquence nécessaire que le gouvernement aurait dû être conscient de ce que la légalité des opérations de perception de ces cotisations n’était pas à l’abri de critiques et la précipitation pour la création d’une base réglementaire en la matière, en 2007, plus de 80 ans après le vote de la loi prévoyant expressément le recours à un règlement grand-ducal, lui est entièrement imputable3.

D’ailleurs, sans préjudice des considérations qui précèdent, même à admettre une mise en question du droit de perception des cotisations non réglées de 2007 par le fait de la non-

prise du règlement en question avant la fin de l’année 2007, voire à admettre la justification d’une nécessité de voir agir rapidement de ce fait, il n’en resterait pas moins qu’à l’époque, il subsistait encore un délai de deux mois avant la fin de l’année 2007, de sorte qu’il eût été possible de recourir à la procédure normale, en saisissant le Conseil d’Etat et en lui communiquant les motifs requérant célérité au niveau de son intervention.

Dans pareil cas de figure, un défaut du Conseil d’Etat d’agir dans un délai utile aurait le cas échéant pu justifier un passage par la procédure d’urgence, mais il ne saurait être question d’admettre que le pouvoir réglementaire n’a même pas essayé d’obtenir l’avis requis.

Il s’ensuit que les éléments invoqués ne sauraient être considérés comme éléments sous-tendant utilement le cas d’urgence invoqué à la base de la non-transmission au Conseil d’Etat du projet de règlement grand-ducal dont il est question en cause.

3 cf. notamment Cour adm. 15 juin 2010, n° 26723C du rôle Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’à défaut de justification du caractère de l’urgence invoquée à la base du règlement grand-ducal du 21 décembre 2007, celui-ci a été pris en violation de l’article 2 (1), alinéa 1er de la loi précitée du 12 juillet 1996.

L’illégalité dudit règlement grand-ducal ayant ainsi été constatée, en sorte que l’exception d’illégalité se trouve vérifiée et que, au prescrit de l’article 95 de la Constitution, le tribunal est amené à devoir refuser l’application du règlement grand-ducal du 21 décembre 2007.

Cet état des choses a comme conséquence qu’au moment de l’établissement du bulletin de cotisation litigieux de la Chambre de commerce en date du 3 juillet 2009, à défaut des règlements prévus par l’article 3, alinéas 2 et 3 de la loi modifiée du 4 avril 1924, précitée, cette loi restait sans vocation à s’appliquer et l’émission dudit bulletin ne disposait pas d’une base légale suffisante4, le bulletin querellé étant partant en tout état de cause à considérer comme illégal, de sorte à encourir son annulation, sans qu’il n’y ait lieu de prendre position par rapport aux autres moyens et arguments développés en cause.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare justifié, partant annule le bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce en date du 3 juillet 2009 au titre de l’année de cotisation 2009 ;

condamne la Chambre de Commerce aux frais.

Ainsi jugé par :

Carlo Schockweiler, premier vice-président, Catherine Thomé, premier juge, Annick Braun, juge, et lu à l’audience publique du 15 juillet 2010 par le premier vice-président, en présence du greffier assumé Patricia Rego.

s. Patricia Rego s. Carlo Schockweiler 4 cf. Cour adm. 17 avril 2008, n° 23755C du rôle 7


Synthèse
Numéro d'arrêt : 26104
Date de la décision : 15/07/2010

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2010-07-15;26104 ?

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