GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 23872C Inscrit le 21 décembre 2007
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Audience publique du 10 juin 2008 Appel formé par la société anonyme …, … contre un jugement du tribunal administratif du 12 novembre 2007 (n° 22546 du rôle) ayant statué sur un recours par elle introduit contre une décision du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire
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Vu la requête d’appel inscrite sous le numéro 23872C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 21 décembre 2007 par Maître Georges Krieger, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … S.A. établie et ayant son siège social à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg le 12 novembre 2007 (n° 22546 du rôle) ayant déclaré recevable mais non fondé son recours en annulation dirigé contre la décision du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire du 22 novembre 2006 portant refus d’approbation de la délibération du conseil communal de la commune d’… portant adoption définitive du plan d’aménagement particulier, parties écrite et graphique, concernant des fonds sis à …, au lieu-dit « … », tout en rejetant sa demande en allocation d’une indemnité de procédure et en la condamnant aux frais ;
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 18 janvier 2008 par Monsieur le délégué du gouvernement Guy Schleder ;
Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 18 février 2008 par Maître Georges Krieger au nom de la société appelante ;
Vu les pièces versées au dossier et notamment le jugement entrepris ;
Le rapporteur entendu en son rapport ainsi que Maître Nadia Janakovic, en remplacement de Maître Georges Krieger, et Madame le délégué du gouvernement Marie-Anne Ketter en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 mars 2008.
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La société anonyme … acquit un ensemble immobilier, vieille ferme, comprenant maison d’habitation, attenances et granges d’une contenance de 39,4 ares situé ., rue … dans la zone d’habitation, secteur du … du village de … et soumit un premier projet d’aménagement particulier (PAP) couvrant cet ensemble immobilier pour avis au ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire ci-après « le ministre » conformément aux dispositions de l’article 30 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain.
En date du 17 novembre 2005, le ministre avisa négativement le projet initial en question en le déclarant notamment non conforme aux objectifs énoncés à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, précitée. C’est par rapport à un nouveau projet remanié, établi par la société … et comprenant la restauration de la maison unifamiliale existante avec construction d’un immeuble à douze appartements et de trois maisons unifamiliales jumelées que le ministre émit un nouvel avis du 6 avril 2006 retenant en substance que le PAP serait conforme aux dispositions réglementaires du PAG de la commune d’… en vigueur, mais qu’il serait à mettre en conformité avec le règlement grand-ducal du 25 octobre 2004 concernant le contenu du PAP avant le vote provisoire notamment au niveau des courbes de niveau et de l’organisation du dossier qui serait à présenter en trois volets distincts, à savoir la partie graphique réglementaire, la partie écrite et le rapport justificatif pour permettre aux autorités d’identifier clairement les dispositions ayant un effet légal direct. Enfin, le PAP ne serait pas conforme aux objectifs définis à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, précitée, pris notamment au niveau de ses positions a), b), c) et d).
Par délibération du 20 juin 2006, le conseil communal d’… adopta provisoirement, à l’unanimité des voix, le second PAP présenté. Aucune objection ne fut émise à l’encontre de cette délibération, de sorte que celle-ci fut transmise au ministre en vue de son approbation. Si le ministre de la Culture, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche avait, par courrier du 16 février 2006 informé la société … S.A. de son intention de proposer le classement comme monument national des immeubles lui appartenant rue … à …, le service des sites et monuments nationaux, auquel le nouveau PAP avait été communiqué, informa, par courrier du 10 août 2006, la propriétaire en question de ce qu’il n’y avait plus d’objections majeures de sa part à émettre quant au projet, sauf quelques remarques ponctuelles formulées.
Par décision du 22 novembre 2006, le ministre refusa d’approuver la délibération du conseil communal d’… du 20 juin 2006 au motif que « les objectifs définis à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 sus-mentionnée, notamment les points a, b, c, et d, ne sont pas respectés, ce que j’avais d’ailleurs déjà précisé en détail dans l’avis émis en date du 6 avril 2006 au sujet du projet en marge ».
Par requête du 13 février 2007, la société anonyme … fit introduire auprès du tribunal administratif un recours tendant à l’annulation de la décision ministérielle précitée du 22 novembre 2006.
Par jugement du 12 novembre 2007, le tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties, déclara recevable ce recours en annulation, tout en le déclarant non justifié au fond et en rejetant la demande en allocation d’une indemnité de procédure de la société … avec condamnation de cette dernière aux frais de l’instance.
Suivant le tribunal, la décision ministérielle de refus d’approbation déférée était justifiée à suffisance de droit par le motif tiré du non-respect des objectifs définis à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, de sorte à rendre le recours non fondé.
Par requête d’appel déposée au greffe de la Cour administrative le 21 décembre 2007, la société anonyme … a fait entreprendre le jugement précité du 12 novembre 2007 et sollicite, par réformation de celui-ci, l’annulation de la décision ministérielle déférée du 22 novembre 2006 avec condamnation de la partie intimée à tous les frais et dépens de l’instance.
L’appelante met d’abord en exergue que le ministre intervient à la fois en tant qu’autorité consultative et en tant qu’autorité de tutelle, de sorte à pouvoir ainsi sanctionner indirectement en tant qu’autorité de tutelle le fait que son avis antérieur n’ait pas été suivi. Les prérogatives dévolues au ministre dans chacun des deux cas s’avéreraient être fondamentalement inconciliables.
L’appelante soulève ensuite la question de savoir si en tant qu’autorité de tutelle, le ministre peut apprécier l’opportunité de la décision prise par l’autorité communale ou si au contraire il ne peut que refuser d’approuver ladite décision pour des seuls motifs de légalité ou de lésion de l’intérêt général. L’appelante conclut que le contrôle de tutelle n’existe que dans les cas prévus par un texte et dans les limites de ce texte. Le contrôle de tutelle ne serait qu’un pouvoir d’approuver ou d’empêcher, parce qu’il s’exercerait relativement à une initiative qui serait nécessairement celle de l’autorité sous contrôle.
Ainsi, l’autorité de tutelle ne disposerait ni d’un pouvoir de substitution, ni d’un pouvoir de réinstruction du dossier, ne pouvant de la sorte prendre une nouvelle décision en lieu et place de l’autorité communale. L’appelante en conclut qu’en imposant à l’administration communale des critères esthétiques pour la construction d’un immeuble, alors que l’administration avait accepté un projet à l’unanimité et dont les aspects architecturaux avaient été spécialement acceptés par le service des sites et monuments, le ministre aurait outrepassé ses compétences d’autorité de tutelle entraînant que sa décision déférée du 22 décembre 2006 serait entachée d’illégalité.
Suivant l’appelante la portée de l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, serait à entrevoir en ce sens que le texte légal ne ferait que fixer les objectifs auxquels sont tenues les autorités communales dans le cadre de l’aménagement communal et du développement urbain sans pouvoir toutefois servir de motif de refus d’approbation au ministre, faute d’être assez précis.
Ce n’est qu’à titre tout à fait subsidiaire, pour le cas où le ministre aurait pu se prévaloir des objectifs de la loi modifiée du 19 juillet 2004 inscrits à son article 2 pour justifier sa décision de refus d’approbation, que l’appelante passe en revue les considérations ayant trait respectivement à l’utilisation rationnelle du sol, aux types de logement, ainsi qu’aux exigences de mixité, de densité et de qualité de vie.
Concernant le dernier motif de refus tiré d’une prétendue violation du patrimoine culturel et national, l’appelante met en exergue l’incohérence entre cette position ministérielle et l’avis positif du service des sites et monuments.
En conclusion, l’appelante insiste pour dire que la commune devrait rester maître de ses désirs dans le cadre de la loi en matière d’aménagement communal et qu’il n’appartiendrait pas au ministre d’imposer à la commune ce que la commune doit vouloir.
L’Etat conclut à la confirmation du jugement entrepris.
Il prend position en ce sens que les deux prérogatives dont dispose le ministre de l’Intérieur face à l’adoption et à l’approbation d’un PAP seraient expressément prévues par la loi à travers l’article 30 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, précitée.
Si l’appelante soulevait la question du cumul des deux qualités d’autorité consultative et d’autorité de tutelle dans le chef du ministre, elle omettrait cependant d’en tirer une conclusion. Le premier moyen de l’appelante serait dès lors à écarter.
Le délégué du gouvernement souligne que ce serait à juste titre que les premiers juges ont retenu qu’en l’espèce le ministre serait resté dans le cadre de son rôle légal en tant qu’autorité de tutelle des communes. Ce serait dans le cadre du contrôle de légalité que le ministre, en tant qu’autorité tutélaire, vérifierait si les plans d’aménagement général et particulier sont conformes aux objectifs ancrés à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, précitée. Le moyen afférent serait dès lors encore à écarter. Le délégué du gouvernement reprend in extenso la teneur de l’avis du ministre du 6 avril 2006 également relaté dans le jugement entrepris pour constater que dans sa décision du 22 novembre 2006 le ministre a basé son refus d’approbation notamment sur le non-respect des objectifs de l’article 2 en question.
Pour l’Etat, le tribunal aurait appliqué correctement sa mission de juge de la légalité tant en ce qui concerne les limites du contrôle déployé que le contenu du jugement a quo dans le cas concret. Le représentant étatique souligne que les faits sur lesquels la décision ministérielle litigieuse est basée seraient matériellement établis et en proportion adéquate, de sorte que le dernier moyen soulevé par l’appelante laisserait également d’être fondé.
L’appelante réplique en faisant valoir en premier lieu que le cumul des qualités d’autorité consultative et d’autorité communale sur la tête du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire pourrait en pratique s’avérer contraire au principe de l’autonomie des communes tel qu’affirmé par l’article 107 de la Constitution, de sorte qu’il serait nécessaire de circonscrire les attributions dévolues au ministre en sa qualité d’autorité de tutelle de l’autorité communale. L’appelante insiste que ce serait à tort que le représentant étatique revient à la conclusion que le ministre n’aurait pas excédé ses compétences. Sous cet aspect il faudrait distinguer entre l’hypothèse où le ministre statue sur une réclamation produite et celle où le ministre prend une décision d’approbation en dehors de toute réclamation. Le pouvoir afférent du ministre serait différent, étant donné qu’il disposerait d’un pouvoir d’appréciation sur le bien-fondé de la réclamation incluant le contrôle de l’opportunité de la décision du conseil communal à la base.
Tel ne serait pas le cas de la décision d’approbation tutélaire. En s’inspirant de la loi belge, l’appelante conclut que par transposition des concepts y déployés, dans l’hypothèse de l’existence d’un plan d’aménagement général, il appartiendrait à l’autorité communale de vérifier que les prescriptions du projet d’aménagement particulier respectent celles du PAG. Il s’ensuivrait que le pouvoir d’appréciation de la légalité de la décision dévolue à l’autorité de tutelle serait nécessairement limité.
Ainsi, l’analyse du ministre devrait être liée par les prescriptions du PAG et par ces seules prescriptions. Le ministre ne serait dès lors pas autorisé à faire valoir sa propre notion de l’intérêt général. Dans le cas d’espèce, le ministre n’aurait pas pu imposer des suggestions complémentaires au PAG, ce d’autant plus qu’en son avis du 6 avril 2006 il aurait retenu que le PAP serait conforme aux dispositions réglementaires du PAG. Ceci équivaudrait à dire que le PAP n’est pas entaché d’illégalité. Il n’aurait dès lors plus appartenu au ministre d’ajouter à cette constatation en décidant que le PAP est non conforme aux objectifs définis à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée.
Considérant que l’appel est recevable pour avoir été introduit suivant les formes et délai prévus par la loi.
Considérant que le PAP sous analyse, quoiqu’élaboré suivant la nouvelle procédure prévue par la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, a été mis en place sur base de la disposition transitoire de l’article 108bis (3) y contenue et est appelé à s’inscrire dans la réglementation communale d’urbanisme par rapport au PAG de la commune d’… encore élaboré sous l’ancienne loi modifiée du 12 juin 1937, également précitée ;
Considérant que suivant la procédure prévue par la loi modifiée du 19 juillet 2004, le ministre de l’Intérieur non seulement intervient en tant qu’autorité de tutelle en fin de procédure au niveau de l’approbation de la délibération communale pertinente mais il est encore appelé en tout début de procédure à donner son avis par rapport au projet d’aménagement particulier lui soumis ;
Considérant que par rapport au PAP sous analyse le ministre, dans son avis préalable, a, d’un côté, retenu que le projet d’aménagement particulier était conforme aux dispositions réglementaires du projet d’aménagement général en vigueur, tout en avançant de l’autre qu’il n’était pas conforme aux objectifs définis à l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, notamment au niveau des points a), b), c) et d) ;
Qu’en fin de procédure la décision de non-approbation ministérielle déférée au fond reprend comme motif que les objectifs définis à l’article 2 en question, notamment en ses points a), b), c) et d) n’étaient pas respectés par le PAP sous analyse ;
Considérant que l’interférence des dispositions de l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, prise plus particulièrement en ses points a) b) c) et d) est à entrevoir à un double niveau en ce sens que, d’un côté, elle est conditionnée par les pouvoirs du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire en tant qu’autorité de tutelle sous l’empire de la loi modifiée du 19 juillet 2004 nouvelle, et que, d’un autre côté, il y a lieu de tenir compte du positionnement du PAP litigieux dans l’ordonnancement juridique ;
Considérant que le PAP sous revue n’est pas directement prévu par les dispositions du PAG régissant le classement des terrains formant son assiette, à savoir l’article 4.3 PAG relatif au secteur « … », mais a été confectionné sur base des dispositions transitoires de l’article 108bis (3) de la loi modifiée du 19 juillet 2004, tout en ayant suivi la procédure prévue à son article 30 ;
Considérant que l’obligation de procéder à l’établissement d’un PAP résulte des dispositions de l’alinéa 2 de l’article 108bis (3) de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée qui a lui-même repris les critères inscrits à l’article 2 de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, tandis que le PAP s’analyse en tant que nouveau projet d’aménagement particulier au sens de l’alinéa 1er dudit article 108bis (3) établi par rapport au plan d’aménagement général de la commune d’… en vigueur, établi sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée et n’ayant pas encore fait l’objet d’une refonte ;
Considérant que tout comme sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937, il est constant dans le cadre de la nouvelle loi modifiée du 19 juillet 2004 que le ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, en tant qu’autorité de tutelle, est appelé à inscrire sa décision tutélaire dans le cadre des prévisions légales comprenant, au niveau international, la Charte européenne de l’autonomie locale signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 telle qu’introduite en droit luxembourgeois par la loi du 27 mars 1987 et, à un niveau national, la Constitution prise en son article 107 ensemble les dispositions pertinentes de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988 ;
Considérant que sous l’aspect des compétences du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire en tant qu’autorité tutélaire, il convient de distinguer le double rôle dorénavant joué par le ministre au niveau de l’élaboration d’un PAP, en ce que, d’une part, conformément à l’article 30 précité, le ministre est appelé à donner un avis préalable avant que le conseil communal ne procède à l’adoption provisoire du PAP en question, tandis que, d’autre part, il continue à exercer son contrôle in fine de la procédure en tant qu’autorité tutélaire d’approbation, sinon de non-approbation ;
Considérant que l’avis initial porte plus précisément, d’après l’alinéa 3 dudit article 30, sur « la conformité et la compatibilité du projet d’aménagement particulier avec les dispositions de la loi, et notamment des objectifs énoncés à l’article 2, ses règlements d’exécution, ainsi qu’avec le plan d’aménagement général » ;
Considérant que quoique le ministre soit, dans le cadre de la procédure d’élaboration d’un PAP, dorénavant appelé à donner lui-même l’avis préalable prévu par l’article 30 avant que ne soit utilement engagée la procédure au niveau communal – attribution conférée à la commission d’aménagement auprès du ministère de l’Intérieur suivant l’article 9 de l’ancienne loi modifiée du 12 juin 1937 –, cette phase préalable de la procédure n’enlève cependant rien, ni ne saurait rajouter aux compétences ministérielles tutélaires telles que maintenues en fin de procédure d’élaboration du PAP ;
Que c’est ainsi que pareillement à ce qui valait sous l’ancienne législation sous l’empire dudit article 9 de la loi modifiée du 12 juin 1937, il exerce les attributions d’une autorité tutélaire telles que dorénavant circonscrites à l’article 18 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 relatif à l’élaboration des PAG, lui-même rendu applicable, par renvoi, en la matière de l’élaboration des PAP, à travers son article 30 alinéa 1er ;
Considérant que ledit article 18 dispose que « le ministre statue dans les trois mois suivant la réception de l’avis du conseil communal prévu à l’article qui précède sur les réclamations en même temps qu’il décide de l’approbation définitive du projet d’aménagement général, qui prend dès lors la désignation de plan d’aménagement général » ;
Considérant qu’il convient de souligner que dans le cas d’espèce où aucune objection n’a été formulée à l’encontre du vote communal portant adoption provisoire du PAP il y a lieu de procéder conformément aux dispositions de l’article 13 alinéa 2 de la même loi modifiée du 19 juillet 2004 telles qu’applicables, toujours par renvoi, suivant son article 30 alinéa 1er prévoyant une procédure d’élaboration simplifiée d’un PAP en ce qu’ « au cas où aucune observation écrite n’a été présentée dans le délai, la délibération provisoire du conseil communal est transmise pour approbation au ministre » ;
Considérant que dans les deux hypothèses d’existence ou de non-existence d’objections suite au vote provisoire, le ministre, sous l’aspect de l’approbation de la délibération communale portant adoption du PAP, statue en tant qu’organe tutélaire dans le cadre des prévisions légales d’essence supérieure et notamment de celle de l’article 107 de la Constitution ensemble les dispositions de la Charte Européenne de l’autonomie locale signée à Strasbourg le 15 octobre 1985 précitée ;
Considérant qu’en tant qu’autorité de tutelle, ledit ministre est tenu de veiller à ce que les décisions de l’autorité communale ne violent aucune règle de droit et ne heurtent pas l’intérêt général, son droit d’approuver la décision du conseil communal ayant comme corollaire celui de ne pas l’approuver ;
Considérant que la tutelle n’autorise pas, en principe, l’autorité supérieure à s’immiscer dans la gestion du service décentralisé et à substituer sa propre décision à celle des agents dudit service, ce principe découlant de la nature même de la tutelle qui est une action exercée par un pouvoir sur un autre pouvoir, non pas en vue de se substituer à lui, mais dans le seul but de se maintenir dans les limites de la légalité et d’assurer la conformité de son action avec les exigences de l’intérêt général ;
Considérant que le rôle de l’autorité de tutelle consiste dès lors à vérifier, non pas que chaque décision soit prise exclusivement dans le seul intérêt général, mais que la décision ne soit pas contraire à l’intérêt général ;
Considérant que le refus ministériel d’approbation de l’espèce est opposé à un PAP établi en vertu de l’obligation légale inscrite dans la disposition transitoire de l’article 108bis (3) alinéa 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée, de sorte qu’il est appelé à s’insérer dans l’ordonnancement juridique par rapport au PAG de la commune d’…, pour lequel il est constant qu’il n’a pas encore fait l’objet d’une refonte au sens de l’article 108bis (3) précité ;
Qu’étant issu de l’obligation légale inscrite dans la disposition transitoire dudit article 108bis (3), le PAP sous rubrique n’a notamment pas été soumis aux dispositions des articles 26 et 27 de ladite loi modifiée du 19 juillet 2004 ;
Que plus particulièrement il ne s’agit dès lors pas d’un PAP, nouvelle mouture, appelé à s’inscrire par rapport à un PAG nouvelle mouture, c’est-à-dire à être entièrement soumis aux seules dispositions de la loi modifiée du 19 juillet 2004 précitée ;
Considérant qu’un PAP, nouvelle mouture, entièrement soumis aux dispositions de la loi modifiée du 19 juillet 2004 y compris ses articles 26 et 27 est, précisément à travers ces dernières dispositions, appelé à s’insérer complètement et parfaitement dans le cadre du PAG ;
Qu’au contraire, le PAP non soumis aux dits articles 26 et 27 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 et s’inscrivant dans l’ordonnancement juridique par rapport à un PAG, ancienne mouture, élaboré sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937 précitée, tel celui de l’espèce, peut a priori comporter des dispositions dérogatoires à celles du PAG ;
Considérant que d’après les éléments soumis à la Cour et les affirmations afférentes réitérées en appel par les parties au litige, le PAP sous revue est conforme aux dispositions du PAG de la commune d’… ;
Considérant que les dispositions dudit PAG applicables sont plus particulièrement celles relatives au secteur « … » prévues à l’article 4.3 qui prévoit quantité de précisions réglementaires aux points 1 à 10 ayant trait à l’implantation des constructions (article 4.3.2), à leur profondeur (article 4.3.3), à la hauteur à la corniche (article 4.3.4), au nombre de niveaux pleins (article 4.3.5), aux hauteurs sous plafond (article 4.3.6), au gabarit (article 4.3.7), aux formes des toitures (article 4.3.8), aux façades et matériaux (article 4.3.9), ainsi qu’à la surface bâtie (article 4.3.10), dispositions réglementaires comprenant encore des croquis explicatifs multiples ;
Que la réglementation découlant de l’article 4.3 PAG doit être considérée comme étant particulièrement cadrée et précise à la fois ;
Considérant que d’un autre côté les dispositions invoquées par le ministre de tutelle sous les points a) b) c) et d) de l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004, contiennent pour l’essentiel des objectifs qui s’analysent en des dispositions d’ordre général, en quelque sorte d’encadrement de l’aménagement communal et du développement urbain visés par la nouvelle loi, sans cependant se placer en rupture par rapport à la législation ancienne en ce que nombre de dispositions contenues audit article 2 ont déjà prévalu sous la loi modifiée du 12 juin 1937 ;
Considérant que le PAP sous revue, quoiqu’établi sur base des dispositions transitoires de l’article 108bis (3) de la loi modifiée du 19 juillet 2004 et s’insérant dans l’ordonnancement juridique par rapport au PAG de la commune d’…, ancienne mouture, entièrement élaboré sous l’empire de la loi modifiée du 12 juin 1937, a cependant dû parcourir la procédure d’élaboration prévue par la loi nouvelle du 19 juillet 2004 avec comme point de départ l’avis préalable du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire ;
Considérant que même si le PAP en question ne tient pas compte en tous points de l’avis préalable du ministre de l’Intérieur, il n’en reste pas moins que du fait constant qu’il s’insère entièrement dans le cadre réglementaire du PAG de la commune d’…, en l’occurrence particulièrement étendu et différencié concernant les constructions à admettre dans le noyau du village de … couvert par le secteur pertinent du « … » prévu à son article 4.3, le ministre, en fin de procédure d’élaboration, statuant en tant qu’autorité de tutelle, n’a pas été habilité à refuser l’approbation, pour raison de non-
observation des objectifs prévus aux points a) b) c) et d) de l’article 2 de la loi modifiée du 19 juillet 2004 ;
Considérant que dans les circonstances précises de l’espèce, le refus d’approbation ministériel a dépassé le cadre des attributions tutélaires du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire ;
Considérant qu’il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que l’appel est fondé et que par réformation du jugement entrepris, le refus ministériel d’approbation tutélaire déféré au fond encourt l’annulation ;
Par ces motifs, la Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties ;
déclare l’appel recevable ;
au fond le dit justifié ;
réformant, déclare le recours en annulation fondé, partant annule la décision déférée du ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire du 22 novembre 2006 et renvoie l’affaire en prosécution de cause devant ledit ministre ;
condamne l’Etat du Grand-Duché de Luxembourg aux dépens des deux instances.
Ainsi délibéré et jugé par :
Georges RAVARANI, président, Francis DELAPORTE, vice-président, Henri CAMPILL, premier conseiller, et lu par le président en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence de la greffière de la Cour Anne-Marie WILTZIUS.
s.WILTZIUS s.RAVARANI Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 10 juin 2008 Le greffier de la Cour administrative 9