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27/02/2008 | LUXEMBOURG | N°24115

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 février 2008, 24115


Tribunal administratif N° 24115 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 février 2008 Audience publique du 27 février 2008

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur …, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 27 février 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocat

s à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Okpanam, de nationalité nigériane, actuellement placé...

Tribunal administratif N° 24115 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 27 février 2008 Audience publique du 27 février 2008

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur …, contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 27 février 2008 au greffe du tribunal administratif par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à Okpanam, de nationalité nigériane, actuellement placé au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à assortir une décision du Ministre des Affaires Etrangères et de l’Immigration du 27 août 2007 lui refusant l’entrée et le séjour et lui ordonnant de quitter le territoire du sursis à exécution ;

Vu l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Maître Marc MODERT et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER entendus en leurs plaidoiries respectives.

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A la suite d’une demande d’asile présentée auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et de l’Immigration, Monsieur … s’est vu refuser par une décision ministérielle du 14 novembre 2006 la délivrance du statut de réfugié, cette décision ayant été définitivement confirmée par un arrêt de la Cour administrative du 28 juin 2007.

Un arrêté du ministre des Affaires Etrangères et de l'Immigration, daté du 27 août 2007, lui a refusé l'entrée et le séjour et lui a ordonné de quitter le pays au motif qu’il ne disposait pas de moyens d’existence personnels légalement acquis, qu’il se trouvait en séjour irrégulier au pays et qu’il était susceptible de compromettre la sécurité et l’ordre publics.

Par arrêté du 6 février 2008, le même ministre prit à l’encontre de Monsieur … un arrêté ordonnant son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification dudit arrêté, motivé par l’existence de l’arrêté de refus d’entrée et de séjour précité du 27 août 2007, par le fait que l’intéressé était démuni de toute pièce d’identité et de voyage valables, qu’il ne disposait pas de moyens d’existence personnels légalement acquis, qu’il se trouvait en séjour irrégulier au pays, que son l’éloignement immédiat n’était pas possible, qu’un accord de délivrance d’un laisser-passer a été donné par les autorités nigérianes et par l’existence d’un risque de fuite en considération de ce que Monsieur … était susceptible de se soustraire à la mesure d’éloignement.

Par requête déposée le 27 février 2008, inscrite sous le numéro 24115 du rôle, Monsieur … a introduit une requête en demandant d’assortir la décision du 27 août 2007 du sursis à exécution en se référant à l’article 11 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Le requérant fait valoir qu’il aurait été informé oralement par le responsable d’un service social auprès des Etablissements Pénitentiaires que son nom figurerait parmi 5 ou 6 compatriotes supposés faire l’objet d’un rapatriement forcé jeudi 28 février 2008 vers son pays d’origine.

Au niveau de la recevabilité de la requête, il serait de jurisprudence constante que la compétence au provisoire du président du tribunal administratif est conditionnée par l'existence d'un recours au fond dirigé contre la décision au sujet de laquelle une mesure provisoire est sollicitée.

Il aurait déposé un recours au fond en annulation, sinon en réformation contre l'arrêté lui refusant l'entrée et le séjour dont l'exécution par une mesure d'éloignement imminent ne serait que la mise en oeuvre.

Quant au bien fondé de la requête, le demandeur soutient que l’affaire au fond ne serait actuellement pas en état d’être plaidée ou décidée à brève échéance, l'exécution de la décision attaquée risquerait de lui causer un préjudice grave et définitif et les moyens invoqués à l'appui du recours seraient sérieux alors qu’il aurait soulevé dans son mémoire en réplique des moyens d'annulation tirés d’illégalités constatées tant sur les plans externe qu'interne.

Le délégué du gouvernement a soulevé l’irrecevabilité de la requête au motif que celle-ci serait dirigée contre une mesure d’éloignement qui se baserait sur l’article 22 de la loi du du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection prévoyant que si le statut de réfugié est refusé au titre des articles 19 et 20 de cette loi, le demandeur sera éloigné du territoire.

Or, le requérant n’aurait pas entrepris la décision d’éloignement implicite y relative.

En ordre subsidiaire, le délégué s’oppose à la demande telle que sollicitée alors qu’une sursis à exécution ne serait pas susceptible d’autoriser le requérant à résider sur le territoire luxembourgeois.

Le représentant étatique estime par ailleurs que les conditions légalement prévues pour ordonner un sursis à exécution ne seraient pas remplies en l’espèce en contestant notamment l’existence d’un préjudice grave et définitif tel que prévue par l’alinéa (2) de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et s’oppose à la mesure sollicitée.

Au cours des plaidoiries, le mandataire du demandeur a exposé que l’objet de sa demande serait à interpréter principalement dans le sens qu’elle aurait été dirigée contre une décision « par ouï-dire » et « non matérialisée » consistant à ordonner son éloignement du territoire et subsidiairement dans le sens qu’elle aurait été destinée à obtenir le sursis à exécution de la décision du 27 août 2007.

Il échet tout d’abord de constater que la requête sous analyse est formulée de manière ambigüe en ce qu’elle semble être dirigée sous certains aspects contre une décision d’éloignement tout en spécifiant par la suite qu’elle demande le sursis à exécution de la décision du 27 août 2007.

En l’absence d’un quelconque recours quant au fond contre la décision d’éloignement et face au dispositif explicite du requérant demandant « d’assortir la décision du 27 août 2007 du sursis à exécution d’après l’article 11 de la loi du 21 juin précitée », il y a lieu de retenir que l’objet de la demande, consistant dans le résultat que le plaideur entend obtenir, est celui circonscrit dans le dispositif de la requête introductive d’instance, notamment par rapport aux actes ou décisions critiqués à travers le recours et que la seule décision utilement attaquée est celle qui figure dans le dispositif de la requête introductive d’instance. (TA 8-6-05 (16867a et 16912a, confirmé sur ce point par arrêt du 13-7-06 (20111C et 20130C); TA 29-6-05 (19199, confirmé par arrêt du 19-1-06, 20097C).

La demande en ce qu’elle tend principalement, tel que plus amplement développé à l’audience, à un sursis à exécution d’une mesure d’éloignement « par ouï-dire et non matérialisée » est partant à déclarer irrecevable comme ne figurant pas dans le dispositif de la requête introductive d’instance.

En tant que la requête en sursis à exécution vise la décision d’éloignement du territoire luxembourgeois prise à l’encontre du demandeur, qui se trouve matérialisée dans la décision du 27 août 2007, il échet de constater qu’en vertu de l’article 11 (2) de la loi précitée du 21 juin 1999, le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

Le requérant fait exposer que l'exécution de la décision critiquée lui causera un préjudice grave et définitif dans le sens que la mesure d'éloignement aura pour conséquence de mettre en péril sa vie alors qu’en tant que membre actif d'un parti qui prône la sécession du BIAFRA il risquerait à l'instar de ses camarades sur place de subir des exactions des forces de l'ordre ou des milices hostiles, et donc une mort certaine à court ou à moyen terme.

La gravité du préjudice serait donc en l'espèce liée au risque d'atteinte à son intégrité physique qu'un succès dans l'instance au fond ne saurait rétablir.

… est par ailleurs d'avis que les moyens invoqués à l'appui de son recours au fond sont sérieux.

Le délégué du gouvernement estime qu'au vu de la jurisprudence constante en la matière, les moyens invoqués à l'appui du recours au fond n'apparaissent pas comme sérieux.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

Une décision administrative négative ne modifiant pas une situation de droit ou de fait antérieure n'est pas de nature à donner lieu à une décision juridictionnelle de sursis à exécution.

Une décision de refus d'entrée et de séjour constitue essentiellement une telle décision négative, même si elle s'accompagne, comme conséquence logique, de l'obligation de l'étranger de quitter le territoire.

Il s'ensuit que la demande subsidiaire est à rejeter en tant qu'elle tend au sursis à exécution de la décision ministérielle du 27 août 2007 faisant l'objet du recours au fond.

Eu égard au fait que les conditions tirées de l'existence de moyens sérieux et du risque d'un préjudice grave et définitif doivent être cumulativement remplies, la demande est à rejeter sans qu'il y ait lieu d'examiner, par ailleurs, le risque d'un préjudice grave et définitif.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande principale irrecevable, reçoit la demande subsidiaire en la forme, la déclare non justifiée et en déboute, laisse les frais à charge du demandeur.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 27 février 2008 par Marc Feyereisen, président du tribunal administratif, en présence du greffier Claude Legille.

s. Legille s. Feyereisen 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 24115
Date de la décision : 27/02/2008

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2008-02-27;24115 ?

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