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28/06/2007 | LUXEMBOURG | N°22462C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 juin 2007, 22462C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 22462 C Inscrit le 19 janvier 2007

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Audience publique du 28 juin 2007 Recours formé par … et consorts, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale - Appel -

(jugement entrepris du 22 janvier 2007, no 22024 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe d...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 22462 C Inscrit le 19 janvier 2007

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Audience publique du 28 juin 2007 Recours formé par … et consorts, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de protection internationale - Appel -

(jugement entrepris du 22 janvier 2007, no 22024 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 19 janvier 2007 par Maître Adrian SEDLO, avocat à la Cour, au nom de …, née le … à … (Kosovo/Serbie), agissant en son nom propre et pour compte de ses enfants mineurs .. et …, tous de nationalité serbe, demeurant ensemble à …, contre un jugement rendu en matière de protection internationale par le tribunal administratif à la date du 22 janvier 2007, à la requête de l’actuelle appelante tendant d’une part, à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 18 août 2006 leur refusant une protection internationale et, d’autre part, à l’annulation de l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois contenu dans la même décision ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 2 février 2007 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport et Maître Jean-Philippe FRANCOIS, en remplacement de Maître Adrian SEDLO, ainsi que la déléguée du Gouvernement Jacqueline GUILLOU-

JACQUES entendus en leurs observations orales.

Vu la rupture du délibéré prononcée par la Cour administrative en date du 24 avril 2007 et invitant les parties de conclure sur la recevabilité de l’acte d’appel déposé en date du 19 janvier 2007 au vu de l’article 19(4) de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection qui prévoit que « contre les décisions du tribunal administratif, appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation » et refixant l’affaire pour continuation à l’audience du 5 juin 2007 ;

Vu les conclusions déposées au greffe de la Cour administrative par le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER en date du 3 mai 2007 ;

Vu le mémoire complémentaire déposé par Maître Adrian SEDLO au greffe de la Cour administrative en date du 8 mai 2007 ;

Maître Maître Jean-Philippe FRANCOIS, en remplacement de Maître Adrian SEDLO, ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul REITER entendus en leurs conclusions à l’audience publique du 5 juin 2007.

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Par requête inscrite sous le numéro 21945 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 18 septembre 2006 par Maître Adrian SEDLO, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, …, née…à … (Kosovo/Serbie), agissant en son nom propre et pour compte de ses enfants mineurs … et …, tous de nationalité serbe, demeurant ensemble à L-…, a demandé, d’une part, la réformation sinon l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 18 août 2006 leur refusant une protection internationale et, d’autre part, l’annulation de l’ordre de quitter le territoire luxembourgeois contenu dans la même décision.

Le tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 21 décembre 2006, a reçu en la forme le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 18 août 2006 portant refus d’une protection internationale, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté. Il a déclaré le recours en annulation dirigé à son encontre irrecevable.

Le tribunal administratif a reçu en la forme le recours en annulation introduit contre la décision ministérielle du 18 août 2006 portant ordre de quitter le territoire et au fond l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Adrian SEDLO, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 19 janvier 2007 pour compte de … dans laquelle la partie appelante demande la réformation du jugement du 21 décembre 2006.

La partie appelante reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause en se basant sur les mêmes moyens de fait que ceux exposés en première instance en estimant remplir les conditions pour bénéficier du statut de réfugié.

L’appelante fait notamment exposer appartenir à la minorité goranaise et ayant dû vivre dans un environnement de sécurité hautement fragile et instable.

Par ailleurs, l’impossibilité pour les enfants de pouvoir suivre un enseignement dans leur langue ou en serbo-croate constituerait clairement une persécution au sens de l’article 1A de la Convention de Genève.

Le tribunal administratif aurait encore rejeté à tort, dans un ordre d’idées subsidiaires, le bénéfice de la protection subsidiaire réclamée.

Ce serait finalement à tort que les premiers juges n’ont pas accueilli le recours en annulation déposé à l’encontre de la décision ministérielle contenant l’ordre de quitter le territoire.

2 Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 2 février 2007 dans lequel il déclare se rallier aux développements et conclusions du tribunal administratif tout en se référant à son mémoire déposé en première instance.

La Cour, suite à la prise en délibéré du dossier en date du 17 avril 2007 a prononcé la rupture du délibéré en date du 24 avril 2007 et invité les parties de conclure sur la recevabilité de l’acte d’appel déposé en date du 19 janvier 2007 au vu de l’article 19(4) de la loi du 5 mai 2006 relative au droit d’asile et à des formes complémentaires de protection qui prévoit que « contre les décisions du tribunal administratif, appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation » Le mandataire des appelants s’est référé lors des débats à l’audience du 5 juin 2007 à un mémoire déposé dans un dossier qualifié de parallèle (…) en date du 4 juin 2007 dans lequel il a demandé principalement la réformation et subsidiairement l’annulation du jugement entrepris.

Il estime notamment que l’appel ainsi reformulé serait recevable alors que l’acte d’appel déposé en date du 6 mars 2007 a demandé « à titre principal la réformation du jugement du tribunal administratif du 8 février 2007 et subsidiairement l’annulation de la décision ministérielle du 26 octobre 2006. » Le délégué du gouvernement s’est rapporté à prudence de justice au niveau de la recevabilité de l’acte d’appel en ne s’opposant pas à la prise en considération du mémoire déposé dans le rôle n° 22646C concernant l’époux de l’appelante.

En général, aux termes de l’article 2 (1) de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif « le tribunal administratif statue sur les recours dirigés pour incompétence, excès et détournement de pouvoir, violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, contre toutes les décisions administratives à l’égard desquelles aucun autre recours n’est admissible d’après les lois et règlements », l’article 2 (3) de ladite loi du 7 novembre 1996 précisant que « sauf dispositions contraires de la loi, appel peut être intenté devant la Cour administrative contre les décisions du tribunal administratif ».

Selon l’article 3 de la loi précitée du 7 novembre 1996 « 1) le tribunal administratif connaît en outre comme juge du fond des recours en réformation dont les lois spéciales attribuent connaissance au tribunal administratif » et « 2) sauf dispositions contraires de la loi, appel peut être interjeté devant la Cour administrative contre les décisions visées au paragraphe premier ».

En particulier, concernant la matière spécifique dont il est question en cause, l’article 19 (3) de la loi précitée du 5 mai 2006 dispose que « contre les décisions de refus de la demande de protection internationale, un recours en réformation est ouvert devant le tribunal administratif. Contre l’ordre de quitter le territoire, un recours en annulation est ouvert devant le tribunal administratif. Les deux recours doivent faire l’objet d’une seule requête introductive, sous peine d’irrecevabilité du recours séparé (…) ».

D’après le paragraphe (4) du même article 19 « contre les décisions du tribunal administratif, appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation (…) ».

3 Par essence l’appel remet la chose jugée en question devant les juridictions d’appel pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Ainsi, sans préjudice de ce que l’appel peut être général ou partiel, suivant l’étendue des prétentions de la partie appelante formulées dans la requête d’appel – article 41 (1) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives –, le contrôle à exercer par la juridiction d’appel est donc a priori le même que celui exercé par les premiers juges, sauf à l’être par une juridiction d’un degré supérieur.

Il s’agit donc, en principe, pour la juridiction d’appel de statuer à nouveau en fait et en droit à l’instar des juges de première instance.

Il appert cependant que tant en ce qui concerne les décisions de refus de la demande de protection internationale que celles portant ordre de quitter le territoire, la loi prévoit à chaque fois que sur appel interjeté contre un jugement du tribunal administratif, la Cour administrative statue comme juge de l’annulation.

La mission de juge de l’annulation ne correspondant pas à la définition classique d’un appel, état des choses devenant d’autant plus apparent en matière de refus de la demande de protection internationale, où les premiers juges ont connu d’un recours en réformation, le bout de phrase de l’article 19 (4) suivant lequel « appel peut être interjeté devant la Cour administrative statuant comme juge de l’annulation » est dès lors sujet à interprétation, afin de circonscrire la mission attribuée en la matière spécifique à la Cour administrative.

L’intention du législateur peut être dégagée du commentaire des articles (doc. parl. 5437, page 33) aux termes duquel « les paragraphes 3 et 4 maintiennent le principe de double degré de juridiction tout en apportant certains aménagements à la procédure actuelle. L’appel peut être interjeté devant la Cour administrative qui statuera comme juge de l’annulation, c’est-à-

dire elle examinera uniquement les moyens de légalité mais ne se prononcera pas sur le fond.

Le Gouvernement s’inspire notamment de la loi française qui prévoit un recours et une possibilité de cassation devant le Conseil d’Etat. Les délais de recours, ainsi que l’effet suspensif des recours sont maintenus. » Par référence à l’article 2 (1) de loi précitée du 7 novembre 1996, la juridiction administrative appelée à statuer comme juge de l’annulation connaît des moyens tirés de l’incompétence, de l’excès et détournement de pouvoir, de la violation de la loi ou des formes destinées à protéger les intérêts privés, par opposition au recours en réformation prévu par l’article 3 (1) de la même loi, suivant lequel la juridiction administrative statue comme juge du fond.

Afin de ménager à l’appel ainsi désigné par l’article 19 (4) de la loi du 5 mai 2006 précitée un caractère effectif, compte tenu de l’intention exprimée par le législateur, il convient de le considérer comme étant dirigé, en tant que recours en annulation suivant les 5 cas d’ouverture prévus par l’article 2 (1) de la loi précitée du 7 novembre 1996 non pas à l’encontre de la décision déférée au fond, mais du jugement entrepris.

Par conséquent la mission de la Cour – dans la limite des prétentions formulées – consiste, d’une part, à contrôler la régularité externe du jugement entrepris comprenant les questions de compétence juridictionnelle, de procédure et de forme et, d’autre part, à contrôler le bien-

fondé dudit jugement comprenant, au titre essentiellement de la violation de la loi, un contrôle de l’erreur de droit avec détermination du champ d’application de la règle de droit et 4 interprétation de cette dernière, ainsi qu’un contrôle de l’exactitude matérielle des faits pris en considération, en tenant compte de la situation de droit et de fait au jour où le jugement a été rendu, la vérification des faits matériels incluant le contrôle de la proportion entre la situation de fait telle qu’elle se présente et l’application du droit par le jugement entrepris.

En l’espèce, force est de constater que l’appel interjeté ne tend pas à l’annulation du jugement a quo, mais exclusivement à sa réformation moyennant remise en cause de la décision ministérielle contestée en ses différents volets, d’une part, de même qu’il ne se dégage pas de l’acte d’appel, considéré isolément ou ensemble avec le mémoire supplétif produit par l’appelante, un quelconque moyen d’annulation susceptible d’être considéré comme visant ledit jugement, d’autre part, de sorte qu’il incombe à la Cour, au regard des développements qui précédent, de déclarer l’appel irrecevable.

Par ces motifs, la Cour, statuant à l’égard de toutes les parties en cause ;

déclare l’appel du 19 janvier 2007 irrecevable ;

condamne l’appelante aux frais et dépens de l’instance.

Ainsi jugé par :

Jean-Mathias Goerens, vice-président, Marc Feyereisen, conseiller rapporteur, Henri Campill, conseiller, et lu par le vice-président Jean-Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le vice-président 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 22462C
Date de la décision : 28/06/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2007-06-28;22462c ?

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