GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 22385 C Inscrit le 4 janvier 2006
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Audience publique du 27 mars 2007 Recours introduit par …, … contre deux décisions du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -
(jugement entrepris du 4 décembre 2006, no 21650 du rôle)
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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 4 janvier 2007 par Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, au nom de …, né le 14 avril 1985 à … (Liberia), de nationalité libérienne, demeurant à L-…, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié par le tribunal administratif à la date du 4 décembre 2006, à la requête de l’actuel appelant tendant à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 avril 2006 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 14 juin 2006 prise sur recours gracieux.
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 16 janvier 2007 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.
Ouï le conseiller-rapporteur Marc Feyereisen en son rapport ainsi que le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs observations orales.
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Par requête inscrite sous le numéro 21650 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 juillet 2006 par Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, …, né le …à … (Liberia), de nationalité libérienne, demeurant à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 27 avril 2006 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 14 juin 2006 prise sur recours gracieux.
Le tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 4 décembre 2006, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté.
Maître Arnaud Ranzenberger, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 4 janvier 2007 pour compte de ….
La partie appelante reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause en se basant sur les mêmes moyens de fait que ceux exposés en première instance en estimant remplir les conditions pour bénéficier du statut de réfugié.
L’appelant fait notamment exposer à l’appui de son appel qu’en raison des circonstances de la cause, un retour dans son pays d’origine impliquerait sans doute un traitement ou une condamnation contraire aux dispositions de la Convention de Genève.
Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 16 janvier 2007 dans lequel il se limite à demander la confirmation du jugement entrepris.
Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.
Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».
La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement et de manière crédible, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.
C’est à juste titre que le tribunal administratif a retenu que l’examen des déclarations faites par le demandeur lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours des procédures gracieuse et contentieuse et les pièces produites en cause, l’amène à conclure que … reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.
Ainsi, même abstraction faite des incohérences contenues dans le récit du demandeur, il échet de relever que par rapport à sa situation au Libéria, le demandeur ne fait état, au-delà d’un sentiment général d’insécurité insuffisant pour lui reconnaître le statut de réfugié, que de problèmes d’ordre privé.
A cela s’ajoute que l’appelant a affirmé avoir vécu pendant six mois au Sierra Leone avant de venir au Luxembourg, pays par rapport auquel il ne fait pas non plus état d’une crainte de persécution concrète.
2 Cette conclusion n’est pas ébranlée par l’argumentation de … tenant à la situation générale régnant au Liberia.
En effet, comme dégagé à bon escient par les premiers juges, le changement politique, amorcé par la signature en août 2003 d’un accord entre le gouvernement libérien, les forces rebelles, les partis politiques et des représentants de la société civile et par l’instauration en date du 14 octobre 2003 d’un gouvernement de transition auquel s’est ajouté la mise en place d’une force internationale (UNMIL) par la résolution n° 1509 du Conseil de Sécurité des Nations Unies du 19 septembre 2003 avec la mission notamment d’assurer la sécurité intérieure du pays et de soutenir la démobilisation et le désarmement des forces rebelles, a abouti à des élections parlementaires et présidentielles en octobre et novembre 2005 à la suite desquelles la situation s’est stabilisée.
L’UNHCR a, en février 2006, pris officiellement position en faveur d’une politique de promotion active du retour des réfugiés libériens dans leur pays d’origine en retenant que dans l’ensemble, les conditions sont réunies pour un retour des réfugiés dans la sécurité et la dignité. Face à cette évolution somme toute positive de la situation générale au Liberia et en l’absence d’éléments suffisants de nature à étayer un risque concret de recrudescence générale des violences, les craintes exprimées par le demandeur ne sont pas de nature à fonder à l’heure actuelle une crainte justifiée de persécution, étant relevé que le demandeur n’a fourni aucun élément permettant d’admettre que sa situation diffère de celle de ses compatriotes.
Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent que l’appel est à déclarer comme étant non fondé de sorte que le jugement du 4 décembre 2006 est à confirmer.
Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 4 janvier 2007, le déclare cependant non fondé, confirme le jugement du 4 décembre 2006 dans toute sa teneur, condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.
Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Henri Campill, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.
le greffier le vice-président 3