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21/03/2007 | LUXEMBOURG | N°22619

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 mars 2007, 22619


Tribunal administratif N° 22619 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er mars 2007 Audience publique du 21 mars 2007

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Requête en sursis à exécution introduite par la société XXX, contre une décision du directeur de l'administration des bâtiments publics en présence des sociétés XXX et XXX en matière de marchés publics

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 1er mars 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Bernard FELTEN, avocat à la Cour, inscrit au

tableau de l'ordre des avocats à XXX, au nom de la société de droit XXX, ayant son siège social à XX...

Tribunal administratif N° 22619 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er mars 2007 Audience publique du 21 mars 2007

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Requête en sursis à exécution introduite par la société XXX, contre une décision du directeur de l'administration des bâtiments publics en présence des sociétés XXX et XXX en matière de marchés publics

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 1er mars 2007 au greffe du tribunal administratif par Maître Bernard FELTEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à XXX, au nom de la société de droit XXX, ayant son siège social à XXX, représentée par son gérant actuellement en fonctions, tendant à prononcer le sursis à exécution de ce qu'elle considère être la décision du directeur de l'administration des bâtiments publics du 14 février 2007 portant information que son offre faite dans le cadre de la soumission publique relative aux travaux d'installation d'équipements d'éclairage à réaliser dans l'intérêt du Centre National de l'Audiovisuel et du Centre Culturel Régional de XXX n'avait pas été retenue, la requête s'inscrivant dans le cadre d'un recours en annulation déposé au fond le même jour, inscrit sous le numéro 22620 du rôle, dirigé contre cette même décision;

Vu l'exploit de l'huissier de justice Guy ENGEL, demeurant à XXX, immatriculé près le tribunal d'arrondissement de XXX, du 2 mars 2007, portant signification de la requête introductive d'instance à la société à responsabilité limitée de droit XXX, avec siège à XXX, représentée par son gérant actuellement en fonctions, ainsi qu'à la société à responsabilité limitée XXX, avec siège à XXX, représentée par son gérant actuellement en fonctions;

Vu l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision attaquée;

Vu l'ordonnance avant dire droit du soussigné du 8 mars 2007;

Vu le résultat de la comparution des représentants de parties à l'audience publique du 20 mars 2007;

Maître Pascale MILLIM, en remplacement de Maître Bernard FELTEN, pour la demanderesse et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Dans le cadre d'une soumission publique lancée par le ministère des Travaux publics pour la réalisation des travaux d'installation d'équipements d'éclairage à réaliser dans l'intérêt du Centre National de l'Audiovisuel et du Centre Culturel Régional de XXX la société de droit XXX avait présenté une offre.

A l'ouverture des soumissions, il se révéla que son offre était la mieux disante, celle de la société à responsabilité limitée de droit XXX ayant été classée deuxième et celle de la société à responsabilité limitée XXX troisième.

Par courrier daté du 14 février 2007, elle fut informée par le directeur de l'administration des bâtiments publics que son offre n'avait pas été retenue, étant donné que plusieurs produits offerts ne correspondaient pas aux prescriptions du cahier des charges.

Par arrêté ministériel du 29 janvier 2007, les travaux ont été adjugés à la société XXX. Cet arrêté n'a pas été communiqué à la société XXX ensemble avec la lettre l'informant que son offre n'avait pas été retenue.

Par requête déposée le 1er mars 2007, inscrite sous le numéro 22620 du rôle, la société XXX a introduit un recours en annulation contre la "la décision du directeur de l'Administration des Bâtiments Publics du 14 février 2007, et notifiée le 16 février 2007, portant refus de prendre en considération l'offre de la partie demanderesse en raison de différentes non-conformités et d'attribuer le marché à un concurrent", tout en se réservant "le droit d'étendre son recours et sa demande à tout acte administratif de l'administration des Bâtiments Publics actant la décision objet du présent recours" et par requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 22619 du rôle, elle sollicite le sursis à exécution de "la décision du directeur de l'Administration des Bâtiments Publics du 14 février 2006 ", en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le mérite du recours introduit au fond.

Elle fait plaider que l'exécution de la décision d'adjudication risque de lui causer un préjudice grave et définitif et que les moyens invoqués à l'appui de la demande au fond sont sérieux.

Concernant le sérieux des moyens, elle fait plaider plus particulièrement qu'après le dépôt de son offre, le bureau d'ingénieurs XXX, chargé d'analyser les offres remises, l'invita, par courrier du 13 septembre 2006, à lui faire parvenir pour le lendemain à 18.00 heures, un certain nombre d'informations, à savoir une liste de ses références concernant l'exécution, dans le passé, de travaux similaires et la fiche technique d'un produit proposé.

Elle souligne que tout en ayant respecté le délai légal de 15 jours pour la remise de ces pièces supplémentaires en transmettant les informations demandées le 28 septembre suivant, elle n'a plus rien entendu avant le courrier l'informant de ce que son offre avait été écartée pour raison de non-conformité. Or, tout d'abord, elle aurait remis l'offre la moins disante. D'autre part, son offre ne contiendrait pas de non-conformités sinon, tout au plus, des non-conformités dépourvues du caractère substantiel nécessaire pour justifier le rejet de son offre. Finalement, la société adjudicatrice des travaux ne serait pas en possession des autorisations administratives requises au moment de l'ouverture de la soumission, de sorte que son offre serait à écarter.

Sans contester le risque d'un préjudice grave et définitif, l'Etat estime en revanche que les moyens invoqués à l'appui du recours au fond ne sont pas assez sérieux pour justifier une mesure provisoire. Le délégué du gouvernement, tout en réitérant l'argumentation du directeur de l'administration des Bâtiments publics concernant les non-conformités techniques, a ajouté que l'offre pâtit par ailleurs de non-conformités administratives.

Dans une ordonnance avant dire droit du 8 mars 2007, le soussigné a considéré comme non suffisamment sérieux les moyens tirés des non-conformités administratives de l'offre et a refixé l'affaire à une audience ultérieure pour conférer aux parties la possibilité de fournir, à l'audience, les explications techniques aptes à démontrer la conformité ou la non-conformité du contenu de l'offre de la demanderesse aux exigences du cahier des charges.

A l'audience du 20 mars 2007, les parties, y compris un représentant du bureau d'ingénieurs XXX, ont eu la possibilité de fournir les explications techniques à la base respectivement de l'offre de la demanderesse et des motifs de rejet de l'Etat.

L'Etat, faisant siennes les conclusions du bureau d'ingénieurs XXX, reproche quatre conformités techniques à la société XXX.

En premier lieu, il estime qu'au lieu d'offrir un produit standard dont la conformité et la fiabilité auraient pu être aisément vérifiées, la demanderesse a proposé un développement spécifique et n'a en conséquence pas pu présenter de fiche technique. Or, les équipes de levage motorisées devront être fixées au plafond de l'auditorium de 550 places, de sorte que les fortes contraintes de sécurité liées à ce type d'installation imposent des produits largement validés. L'Etat insiste sur ce que la société qui s'est vu attribuer le marché a livré à ce jour plus de 600 exemplaires du produit offert par elle.

Le moyen en question n'est pas convaincant au stade actuel de l'instruction du litige. En effet, d'une part, l'affirmation qu'aucune fiche technique n'aurait été versée est à relativiser dans ce sens que s'il est vrai qu'elle n'avait pas été fournie au moment où le bureau d'ingénieurs XXX remettait ses conclusions reprises dans la suite par l'Etat, la fiche en question a pourtant été livrée, après avoir été réclamée par le bureau d'ingénieurs, dans le délai légal. D'autre part, l'Etat n'a pas expliqué en quoi le cahier des charges (positions 1-23 à 1-26) prévoirait l'installation d'un produit standardisé ou d'un produit dont le fournisseur devrait prouver qu'il avait déjà été livré à un certain nombre d'exemplaires avant la soumission.

La société XXX a expliqué de manière convaincante que le produit offert par elle ne pouvait pas être considéré comme un produit non standard, étant donné que tous les éléments qui le composent, les moteurs et les bobines d'enroulement des câbles, sont des produits standard, la seule structure faite sur mesure étant les rails entre le moteur et les différentes bobines.

L'Etat soulève ensuite que les armoires gradateurs offertes par la demanderesse ne seraient pas conformes aux exigences du cahier des charges (positions 1-2 et 1-3) en ce qu'il s'agirait d'un produit non modulaire, que le temps de montée serait de 80 microsecondes au lieu des 225 microsecondes demandées et qu'il n'y aurait pas de protection différentielle au niveau de chaque sortie gradateur.

La société XXX rétorque que tout en n'étant pas pourvu de modules, son produit permettrait également le remplacement de gradateurs défectueux par une opération très simple d'ouverture d'un boîtier et de remplacement du gradateur défectueux. Son système présenterait l'avantage de permettre le remplacement séparé des gradateurs défectueux, alors que le système exigé dans le cahier des charges ne permettrait que le remplacement couplé de deux gradateurs à la fois. De plus, son produit pourrait être fourni avec un temps de montée de 225 microsecondes. Finalement, son produit serait équipé d'une protection différentielle au niveau de chaque sortie gradateur.

Il s'est dégagé des débats à l'audience que s'il paraît acquis que les produits offerts par la société XXX sont équipés d'une protection différentielle telle qu'exigée, le produit tel qu'offert dans la soumission ne répond pas à l'exigence du temps de montée de 225 microsecondes. Il est indifférent, à cet égard, de savoir si la demanderesse peut livrer ce produit, même sans augmentation de prix. Il s'agit de savoir, ce qui est de l'essence d'un marché public, si le produit tel qu'offert est conforme. De plus, il s'est dégagé clairement des débats que la demanderesse n'a pas offert des armoires gradateurs avec des modules interchangeables, mais un produit dans lequel ces gradateurs sont intégrés et peuvent être changés, il est vrai, mais moyennant une manipulation plus compliquée que le simple changement d'un module.

Il semble partant que sur ce point, l'offre de la société XXX ne soit pas conforme aux exigences du cahier des charges.

La troisième non-conformité reprochée à l'offre de la demanderesse consiste dans ce qu'elle aurait offert des lampes d'une puissance de 1000 W au lieu des 1200 W exigés et que l'angle d'ouverture ne serait que de 11° à 53° au lieu de 8° à 60° (position 1-11 du cahier des charges).

La société XXX explique qu'elle n'a pas offert un produit non conforme, s'étant bornée à indiquer, dans le bordereau de soumission, la marque du produit offert.

Le représentant du bureau d'ingénieurs XXX a expliqué qu'à défaut de documentation, il a cherché sur internet les produits offerts par la firme en question et a trouvé que celle-ci n'offrait pas des lampes à 1200 W, de sorte qu'il a admis que la demanderesse offrait le produit qui se rapprochait le plus des exigences du cahier des charges, soit une lampe d'une puissance de 1000 W.

Les représentants de la société XXX ont expliqué à l'audience que la firme dont le produit était offert a, dans son catalogue, non seulement des projecteurs de 1000 W, mais également des projecteurs à 2000 W et qu'ils comptaient mettre en place des projecteurs de 2000 W avec des ampoules de 1200 W. De même, les projecteurs offerts respecteraient l'angle d'ouverture exigé de 8° à 60°.

Il semble que la déclaration de non-conformité repose sur une erreur d'appréciation du bureau d'ingénieurs qui s'est procuré des informations – apparemment non pertinentes – sur internet, l'indication du bordereau de soumission ne pouvant pas, à elle seule, faire conclure à une non-conformité.

Le quatrième reproche de non-conformité de l'offre est tiré de ce que les projecteurs halogènes de l'espace d'exposition (positions 3-1 et 3-2 du cahier des charges) seraient dépourvus de potentiomètres intégrés, de réflecteur offrant une répartition lumineuse de révolution et qu'ils auraient un poids de 2,2 kg au lieu des 1,3 exigés.

La société XXX explique que s'il est vrai que les projecteurs offerts ont un poids de 2,2 kg, elle peut également, sans modification de prix, livrer le type de lampe exigé.

Elle précise que le type de lampe offert par elle répond à l'exigence de répartition lumineuse de révolution et que ses projecteurs disposent d'un potentiomètre qui, s'il n'est pas intégré, est cependant ajouté à chaque projecteur.

Il est vrai que le cahier des charges exige, de manière précise, à la page 76, des projecteurs d'un poids de 1,3 kg et pour mesurer la conformité d'une offre aux exigences du cahier des charges, le changement de l'offre fait après le dépôt du bordereau de soumission ne saurait pas entrer en ligne de compte. Il semble partant s'agir, en l'espèce, d'une non-conformité.

Ceci ne semble pas être le cas de la répartition lumineuse de révolution, le pouvoir adjudicateur n'ayant pas indiqué en quoi l'offre de la demanderesse ne serait pas conforme et le représentant du bureau d'ingénieurs XXX ayant indiqué qu'il s'agit d'une question d'esthétique difficilement mesurable. Pareillement, le fait que les potentiomètres ne soient pas intégrés dans les projecteurs, mais ajoutés aux différents projecteurs, ne semble pas constituer de non-conformité, étant donné que le cahier des charges n'exige pas que les potentiomètres soient intégrés. Le cahier des charges se borne en effet d'exiger un "potentiomètre rotatif".

Il suit de ce qui précède que si la plupart des non-conformités reprochées à la société XXX ne semblent pas données, il en reste au moins deux qui, en principe, justifient le rejet de l'offre, étant donné qu'il ne se dégage pas avec la netteté requise des pièces versées que ces deux non-conformités ne seraient pas assez substantielles pour justifier le rejet de l'offre.

Par voie de conséquence, au stade actuel de l'instruction du litige, il ne semble pas que la décision d'écarter l'offre de la société XXX ait été prise de manière illégale, de sorte que les moyens invoqués au fond à l'appui de la demande en annulation de cette décision ne présentent pas le caractère sérieux suffisant pour justifier une mesure provisoire.

La demande de sursis à exécution doit partant être rejetée.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant par défaut à l'égard des sociétés XXX et XXX et contradictoirement à l'égard des autres parties, vidant l'ordonnance avant dire droit du 8 mars 2007, déclare la demande non fondée et en déboute, condamne la demanderesse aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 21 mars 2007 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Ravarani 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 22619
Date de la décision : 21/03/2007

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2007-03-21;22619 ?

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