GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 22331 C Inscrit le 21 décembre 2006
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Audience publique du 27 février 2007 Recours formé par …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié - Appel -
(jugement entrepris du 4 décembre 2006, no 21532 du rôle)
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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 21 décembre 2006 par Maître Barbara Najdi, avocat à la Cour, au nom de …, né le … à … (Nigéria), de nationalité nigériane, actuellement détenu au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié par le tribunal administratif à la date du 4 décembre 2006, à la requête de l’actuel appelant tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration intervenue le 3 avril 2006, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée.
Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 8 janvier 2007 par le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter.
Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.
Ouï le conseiller-rapporteur Marc Feyereisen en son rapport et Maître Sébastien Rimlinger, en remplacement de Maître Barbara Najdi, ainsi que le délégué du Gouvernement Jean-Paul Reiter en leurs observations orales.
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Par requête inscrite sous le numéro 21532 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 15 juin 2006 par Maître Barbara NAJDI, avocat à la Cour, …, né le … à Unwesa/Anambra State (Nigéria), de nationalité nigériane, actuellement détenu au Centre Pénitentiaire de Luxembourg à Schrassig, a demandé principalement la réformation et subsidiairement l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration intervenue le 3 avril 2006, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée.
Le tribunal administratif, statuant à l’égard de toutes les parties en date du 4 décembre 2006, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié, en a débouté et a déclaré le recours en annulation irrecevable.
Maître Barbara NAJDI, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel au greffe de la Cour administrative en date du 21 décembre 2006 pour compte de ….
La partie appelante reproche aux juges de première instance une appréciation erronée des éléments de la cause en se basant sur les mêmes moyens de fait que ceux exposés en première instance en estimant remplir les conditions pour bénéficier du statut de réfugié.
Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse en date du 8 janvier 2007 dans lequel il demande la confirmation du jugement entrepris.
Sur le vu des faits de la cause qui sont les mêmes que ceux soumis aux juges de première instance, la Cour estime que ceux-ci ont, dans un examen complet et minutieux de tous les éléments recueillis, apprécié ces derniers à leur juste valeur et en ont tiré des conclusions juridiques exactes.
L’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, précise que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».
La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.
C’est à juste titre que le tribunal administratif a retenu que l’examen des déclarations faites par … lors de son audition, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, l’amène à conclure que l’appelant actuel reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit, des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.
En effet, force est de constater avec les premiers juges que … a prétendument fui son pays d’origine pour échapper à la vindicte de la population musulmane de sa région qui aurait cherché à le tuer à cause de la relation qu’il entretenait avec une fille musulmane.
Il s’ensuit que les persécutions mises en avant par l’appelant ne trouvent pas leur origine dans la race du demandeur, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un certain groupe social ou dans ses opinions politiques, mais dans un drame humain où le père d’une fille mineure de 16 ans n’accepte pas le choix de sa fille et provoquant ainsi une vendetta contre le demandeur.
2 Par ailleurs, les persécutions dont fait état le demandeur, émanent de tiers et non pas de l’Etat, de sorte qu’il appartient de surcroît au demandeur de mettre suffisamment en évidence un défaut de protection de la part des autorités.
Or, … n’a pas démontré que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics en place ne soient ni disposées ni capables de lui assurer un niveau de protection suffisant, étant entendu qu’il n’a pas fait état d’un quelconque fait concret qui serait de nature à établir un défaut caractérisé de protection de la part des autorités en place.
A cela s’ajoute que … reste en défaut d’établir des raisons crédibles suffisantes pour lesquelles il n’aurait pas été en mesure de s’installer dans une autre partie du Nigeria, et notamment, comme relevé par les premiers juges, au Sud du pays, peuplé majoritairement de chrétiens, ceci compte tenu de l’étendue du Nigéria et de l’importance de sa population de plus de 100 millions d’habitants, où il lui aurait été possible d’échapper à ses persécuteurs.
Il suit de ce qui précède que …, indépendamment des incohérences contenues dans son récit, n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef de sorte que le jugement du 4 décembre 2006 est à confirmer.
Par ces motifs la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport de son conseiller, reçoit l’acte d’appel du 21 décembre 2006, le déclare cependant non fondé, confirme le jugement du 4 décembre 2006 dans toute sa teneur, condamne l’appelant aux dépens de l’instance d’appel.
Ainsi délibéré et jugé par Jean Mathias Goerens, vice-président Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur Henri Campill, conseiller et lu par le vice-président Jean Mathias Goerens en l’audience publique au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.
le greffier le vice-président 3 4