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26/07/2006 | LUXEMBOURG | N°21687

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 26 juillet 2006, 21687


Tribunal administratif Numéro 21687 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juillet 2006 Audience publique du 26 juillet 2006 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 21687 du rôle et déposée le 19 juillet 2006 au greffe du tribunal administratif par Maître Yasmina MAADI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de

l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Algérie), de nationalit...

Tribunal administratif Numéro 21687 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 juillet 2006 Audience publique du 26 juillet 2006 Recours formé par Monsieur … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de rétention administrative

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 21687 du rôle et déposée le 19 juillet 2006 au greffe du tribunal administratif par Maître Yasmina MAADI, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Algérie), de nationalité algérienne, actuellement retenu au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig, tendant à l’annulation et subsidiairement à la réformation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 20 juin 2006, ordonnant son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 21 juillet 2006 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Yasmina MAADI, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 26 juillet 2006.

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Le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration prit le 20 juin 2006 un arrêté à l’encontre de Monsieur … par lequel fut ordonné son placement au Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière à Schrassig pour une durée maximale d’un mois à partir de la notification de la décision en question. Cette décision ministérielle est basée sur les considérations et motifs suivants :

« Vu l'article 15 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l'entrée et le séjour des étrangers ;

Vu le règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière ;

Vu le rapport no 8644/2006 du 19 juin 2006 établi par la police grand-ducale, SREC/Esch/Alzette ;

Considérant que le Parquet a prononcé une mesure de rétention en date du 19 juin 2006 ;

Considérant que l'intéressé est démuni de toute pièce d’identité et de voyage valable ;

- qu’il ne dispose pas de moyens d’existence personnels légalement acquis ;

- qu'il se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Considérant qu’en attendant le résultat des recherches quant à l’identité et à la situation de l’intéressé, l’éloignement immédiat n’est pas possible ;

Considérant qu'il existe un risque de fuite, alors que l'intéressé est susceptible de se soustraire à la mesure d'éloignement ; (…) ».

Une décision de prorogation de la mesure de placement initiale fut prise par le même ministre le 19 juillet 2006 notamment en considération de ce qu’un laisser-passez avait été demandé auprès des autorités algériennes et qu’en attendant l’émission de ce document, l’éloignement immédiat de l’intéressé n’était pas possible.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 19 juillet 2006, Monsieur … a fait introduire un recours tendant principalement à l’annulation et subsidiairement à la réformation de la décision ministérielle précitée du 20 juin 2006.

Encore qu’un demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation contre la même décision (cf. trib. adm. 4 décembre 1997, n° 10404 du rôle, Pas. adm. 2005, V° Recours en réformation, n° 3 et autres références y citées).

Etant donné que l’article 15, paragraphe (9) de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1. l’entrée et le séjour des étrangers ; 2. le contrôle médical des étrangers ; 3.

l’emploi de la main-d’œuvre étrangère, institue un recours de pleine juridiction contre une décision de placement, le tribunal est compétent pour connaître du recours subsidiaire en réformation introduit contre la décision litigieuse.

Dans la mesure où au jour des présentes, la décision litigieuse a expiré quant à ses effets, le recours en réformation ne peut être analysé que dans la limite des moyens de légalité invoqués et il est partant à déclarer sans objet pour autant qu’il conclut à la libération du demandeur.

Ledit recours ayant par ailleurs été introduit dans cette mesure dans les formes et délai de la loi, il est recevable. Il s’ensuit que le recours principal en annulation est irrecevable.

A l’appui de son recours, le demandeur fait exposer qu’il aurait été contrôlé à Esch/Alzette le 19 juin 2006 au moment où il aurait rendu visite à l’un de ses cousins. Il fait encore état de ce qu’une demande en reconnaissance du statut de réfugié serait actuellement pendante en France et que cette demande serait motivée par le fait qu’il aurait souhaité fuir « la situation politique désespérée de son pays d’origine en cherchant refuge auprès de sa tante maternelle résidant à … (France) ». Il estime partant qu’en application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’Etat membre responsable de l’examen d’une demande d’asile présentée dans l’un des Etats membres par un ressortissant d’un pays tiers devrait trouver application en l’espèce dans la mesure où il devrait pouvoir « regagner » la France ou faire l’objet d’une mesure de reconduite à la frontière française, afin que sa demande d’asile puisse être analysée dans ce pays.

C’est toutefois à bon droit que le délégué du gouvernement soutient qu’il ne ressort d’aucune pièce et d’aucun élément du dossier que le demandeur a formulé une demande d’asile en France et il expose en outre qu’une telle information n’aurait pas été soumise aux autorités luxembourgeoises. Il s’ensuit que la demande tendant au transfert du demandeur vers la France sur base du règlement CE 343/2003 prévisé laisse d’être fondée.

Par ailleurs, il ressort du dossier administratif que le demandeur avait un titre de séjour délivré par la Préfecture de la Moselle à Metz valable du 3 mai au 2 août 2002 et qu’il a fait l’objet d’un arrêté de reconduite à la frontière pris par le Préfet de la Moselle le 12 janvier 2004 et notifié à Audun-le-Tiche le 12 janvier de la même année. Il ressort encore des éléments du dossier que le demandeur ne possède pas de titre de séjour valable en France et qu’il y est uniquement connu pour des faits d’entrée et de séjour irréguliers. Il ressort par ailleurs des éléments du dossier qu’un échange de correspondance soutenu a lieu entre les autorités compétentes luxembourgeoises et le Consulat général d’Algérie à Bruxelles en vue d’identifier le demandeur pour permettre son rapatriement vers l’Algérie. Il ressort ainsi d’une lettre adressée le 17 juillet 2006 au Consulat général d’Algérie par le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration que le passeport algérien périmé du demandeur se trouve actuellement auprès des autorités françaises. Le demandeur lui-même a déclaré aux agents de la police grand-

ducale en date du 20 juin 2006, tel que cela ressort d’un procès-verbal du 21 juin 2006, qu’il ignore où se trouve son passeport, en précisant résider en France depuis le 24 février 2001, date à laquelle il serait entré sur le territoire français moyennant un passeport muni du visa afférent et qu’une demande tendant à l’obtention d’une autorisation de séjour en France aurait été rejetée, mais qu’il aurait continué à résider auprès de sa tante à ….

Il échet de relever que c’est à bon droit que le délégué du gouvernement rappelle que la mise en place d’un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière repose sur la prémisse qu’au-delà de toute considération tenant à une dangerosité éventuelle des personnes concernées, celles-ci, eu égard au seul fait de l’irrégularité de leur séjour et de l’imminence de l’exécution d’une mesure d’éloignement dans leur chef, présentent en principe et par essence un risque de se soustraire à la mesure d’éloignement, fût-il minime, justifiant leur rétention dans un centre de séjour spécial afin d’éviter que l’exécution de la mesure prévue ne soit compromise.

Dans la mesure où il n’est pas contesté que le demandeur rentre dans les prévisions de la définition des « retenus » telle que consacrée à l’article 2 du règlement grand-ducal du 20 septembre 2002 créant un Centre de séjour provisoire pour étrangers en situation irrégulière, il a, à bon droit, pu faire l’objet de la mesure de placement litigieuse.

Aucun autre moyen n’ayant été développé à l’appui du recours sous analyse, celui-ci est à déclarer non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre des vacations, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

déclare le recours en réformation sans objet dans la mesure où il tend à voir ordonner la libération du demandeur ;

le déclare recevable pour le surplus ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

déclare le recours en annulation irrecevable ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M Ravarani, président, M. Schockweiler, premier vice-président, M. Schroeder, premier juge, et lu à l’audience publique du 26 juillet 2006 par le président, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani 4


Synthèse
Formation : Chambre des vacations
Numéro d'arrêt : 21687
Date de la décision : 26/07/2006

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2006-07-26;21687 ?

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