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02/11/2005 | LUXEMBOURG | N°20529

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 02 novembre 2005, 20529


Tribunal administratif N° 20529 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 31 octobre 2005 Audience publique du 2 novembre 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde, sinon de sursis à exécution introduite par Monsieur K. U., …, en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 31 octobre 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Rachel JAZBINSEK, avocat à la Cour, assistée par Maître Florent GONIVA, avocat, tous les deux i

nscrits au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur K. U., né le ,,, à Ire...

Tribunal administratif N° 20529 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 31 octobre 2005 Audience publique du 2 novembre 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde, sinon de sursis à exécution introduite par Monsieur K. U., …, en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 31 octobre 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Rachel JAZBINSEK, avocat à la Cour, assistée par Maître Florent GONIVA, avocat, tous les deux inscrits au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur K. U., né le ,,, à Ireukpen (Nigeria), de nationalité nigériane, demeurant actuellement à …, tendant à l'institution d'un sursis à exécution par rapport à une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 21 octobre 2005 lui refusant l’entrée et le séjour au pays et lui enjoignant de quitter le Grand-Duché de Luxembourg en attendant la solution du litige concernant le recours introduit au fond par requête déposée le même 31 octobre 2005, inscrite sous le numéro 20528 du rôle, contre la prédite décision de refus ;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée ;

Ouï Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en sa plaidoirie à l’audience publique du 31 octobre 2005.

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Le 2 mars 2004, Monsieur K. U., de nationalité nigériane, alias I. U., de nationalité ghanéenne, alias libérienne, a déposé une demande en obtention du statut de réfugié au Grand-Duché de Luxembourg.

Par décision du 21 octobre 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration, se basant sur la disposition de l'article 16, paragraphe 1er du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable pour l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ci-après désigné par "le règlement n° 343/2003", se déclara incompétent pour connaître de la demande d'asile, soulignant que ce serait la République française qui serait responsable du traitement de sa demande d'asile. Les autorités luxembourgeoises ayant en effet sollicité et obtenu en date du 21 octobre 2005, de la part des autorités françaises, un engagement de reprise en charge de Monsieur U., le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, par décision du même 21 octobre 2005, refusa l’entrée et le séjour à Monsieur U. et lui enjoigna de quitter le pays dès notification dudit arrêté de refus aux motifs suivant :

« Vu l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant l’entrée et le séjour des étrangers ;

Attendu que l’intéressé ne dispose pas de moyens d’existence personnels ;

Attendu que l’intéressé se trouve en séjour irrégulier au pays ;

Attendu que l’intéressé est susceptible de compromettre la sécurité et l’ordre publics ; » Par requête déposée le 31 octobre 2005, inscrite sous le numéro 20528 du rôle, Monsieur U. a introduit un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation de la décision prévisée du ministre du 21 octobre 2005. Par requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 20529 du rôle, il sollicite du président du tribunal administratif le sursis à exécution de la prédite décision de refus d’entrée et de séjour en attendant la solution du litige au fond. Dans la requête introductive d’instance Monsieur U.

fait exposer qu’il est entré sur le territoire luxembourgeois en date du 2 mars 2004, qu’il y a introduit une demande en obtention du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève, et que le 24 septembre 2005 il s’est marié avec une ressortissante slovaque disposant d’un titre de séjour régulier au Grand-Duché de Luxembourg. Il expose dans ce même contexte qu’il serait autorisé à séjourner en République slovaque en tant qu’époux d’une ressortissante de ce pays, que la loi slovaque ouvrirait le droit à la naturalisation après un délai de 3 ans de résidence dans le chef d’une personne mariée à un ressortissant slovaque, qu’il envisagerait de faire usage de ce droit et que les autorités slovaques se seraient déclarées prêtes à lui accorder un visa d’entrée à condition qu’il présente un passeport valable, étant entendu que l’ambassade du Nigeria à Bruxelles serait disposée à lui délivrer un passeport s’il se présentait personnellement dans leurs locaux.

En droit, le demandeur fait valoir qu’il dispose de moyens d’existence personnels et qu’il ne compromettrait ni l’ordre ni la sécurité publics.

Ayant appris que la police grand-ducale comptait le conduire en France dès le jeudi 3 octobre 2005, Monsieur U. fait valoir que cet éloignement définitif du territoire luxembourgeois porterait un préjudice grave et définitif à ses intérêts, alors que la défense de ses droits s’en verrait compromise et qu’il subirait des conséquences sur lesquelles il serait difficile de revenir par la suite.

Le délégué du Gouvernement conteste tant le risque de préjudice grave et définitif que l'existence de moyens sérieux au fond. Il verse des pièces dont il ressort qu'avant d'introduire une demande d'asile au Luxembourg, Monsieur U. avait déjà déposé une demande d'asile en France sous une autre identité et qu'en date du 21 octobre 2005, les autorités françaises se sont déclarées d'accord à le reprendre en charge.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

En l'espèce, Monsieur U. reste en défaut de prouver en quoi la décision de refus d’entrée et de séjour et l’exécution de la décision de reprise par les autorités françaises risquerait de lui causer un préjudice grave et définitif.

Aux termes de son premier considérant, le règlement n° 343/2003 dispose qu'une politique commune dans le domaine de l'asile, incluant un régime d'asile européen commun, est un élément constitutif de l'objectif de l'Union européenne visant à mettre en place progressivement un espace de liberté, de sécurité et de justice ouvert à ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection dans la Communauté. Tablant sur l'équivalence des procédures devant assurer la protection des demandeurs d'asile applicables dans les différents Etats membres, le règlement en question fixe des règles de compétence en vue de déterminer l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile émanant d'un ressortissant d'un Etat tiers. Il s'ensuit qu'un demandeur d'asile ne saurait se prévaloir d'un préjudice quelconque qu'il risquerait de subir au cas où sa demande d'asile serait examinée dans un Etat membre plutôt que dans un autre. Par conséquent, le seul fait que le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration luxembourgeois se soit déclaré incompétent en faveur des autorités françaises et ait pris par voie de conséquence un arrêté de refus d’entrée et de séjour à l’encontre de Monsieur U. tout en lui enjoignant de quitter le pays, n’est pas de nature à causer un préjudice à ce dernier.

Il s’y ajoute que la demande sous examen ne porte pas sur la décision d’incompétence prévisée du 21 octobre 2005 et que le demandeur ne fait pour le surplus pas état d’une demande d’autorisation de séjour qu’il aurait introduite pour solliciter le cas échéant un regroupement familial par rapport à son épouse, de sorte que la décision litigieuse, en l’état actuel de l’instruction du dossier, se présente comme la suite logique de la décision d’incompétence du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration luxembourgeois et de l’acceptation subséquente par les autorités françaises de reprendre l’intéressé, sans que Monsieur U. n’ait établi à suffisance que son transfert vers la France l’empêcherait d’une manière ou d’une autre de poursuivre, voire d’entreprendre des démarches administratives à partir de la France plutôt que du Grand-Duché de Luxembourg en vue de se voir délivrer un passeport et de solliciter le cas échéant une autorisation de séjour au Grand-Duché de Luxembourg.

En termes de plaidoiries, le délégué du Gouvernement a fait valoir pour le surplus que le recours au fond serait irrecevable pour ne pas comporter un énoncé au moins sommaire des moyens invoqués en droit pour conclure à la réformation, sinon à l’annulation de la décision litigieuse. Il estime en outre que le demandeur resterait en défaut de fournir une argumentation suffisamment sérieuse permettant d’invalider les motifs de refus retenus par le ministre, étant entendu que Monsieur U. ayant été à charge de l’Etat luxembourgeois jusqu’au mois d’octobre 2005, il ne disposerait visiblement pas de moyens d’existence personnels suffisants et que, concernant le risque allégué de porter atteinte à l’ordre et à la sécurité publics, il serait suffisamment fondé par le fait que l’intéressé fut condamné en date du 4 juillet 2005 par la chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg à une peine d’emprisonnement de 12 mois avec sursis et à une amende de 1500 € du chef de recel de choses obtenues à l’aide d’un délit.

Force est dès lors de constater qu’en l’état actuel de l’instruction du dossier, les moyens présentés par le demandeur se réduisent à de simples affirmations non autrement étayées relatives à l’existence de moyens d’existence personnels et à l’absence de risque dans son chef de compromettre l’ordre et la sécurité publics, sans autre indication notamment de base légale, de sorte que ces moyens ne sauraient être reconnus comme présentant l’apparence du sérieux nécessaire pour justifier l’octroi d’un sursis à exécution.

Il se dégage des considérations qui précèdent que la demande est à rejeter.

Par ces motifs, la soussignée, premier juge du tribunal administratif, siégeant en remplacement du président et des autres magistrats plus anciens en rang, tous légitimement empêchés, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 2 novembre 2005 à 11.30 heures par Madame Lenert, premier juge du tribunal administratif, en présence de Monsieur Legille, greffier.

Legille Lenert 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20529
Date de la décision : 02/11/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-11-02;20529 ?

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