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24/10/2005 | LUXEMBOURG | N°20482

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 24 octobre 2005, 20482


Tribunal administratif N° 20482 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 octobre 2005 Audience publique du 24 octobre 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde, sinon de sursis à exécution introduite par Madame ….. ….. ….. et consorts, …..l, en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 20 octobre 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Renaud LE SQUEREN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des a

vocats à Luxembourg, au nom de Madame ….. ….. ….., née le 6 juin 1974 à ….. (….. ….. du …..), de nati...

Tribunal administratif N° 20482 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 20 octobre 2005 Audience publique du 24 octobre 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde, sinon de sursis à exécution introduite par Madame ….. ….. ….. et consorts, …..l, en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 20 octobre 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Renaud LE SQUEREN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame ….. ….. ….., née le 6 juin 1974 à ….. (….. ….. du …..), de nationalité ….., demeurant actuellement à L-….. , , rue ….. ….., ainsi que de ses enfants mineurs …..-….., née le 22 janvier 2001 à ….. (…..) et ….. …..-….., né le 15 janvier 2003 à ….., tendant principalement à l'institution d'une mesure de sauvegarde par rapport à une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 7 septembre 2005 portant déclaration d'incompétence à connaître de la demande de Madame ….. en obtention du statut de réfugiée, cette mesure devant consister dans l'autorisation de Madame ….. et de ses deux enfants de se voir autoriser à continuer à séjourner sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg en attendant la solution du litige concernant le recours introduit au fond par requête déposée le 20 octobre 2005, inscrite sous le numéro 20481 du rôle, contre la prédite déclaration d'incompétence, et tendant subsidiairement au sursis à exécution de la prédite déclaration d'incompétence, ce sursis à exécution devant produire le même effet de l'autorisation de séjour provisoire en attendant la solution du litige au fond;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Ouï Maître Renaud LE SQUEREN pour les demandeurs, et Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.

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Le 24 juin 2004, Madame ….. ….. ….., née le 6 juin 1974 à ….. (….. ….. du …..), de nationalité ….., demeurant actuellement à L-….. , ….., rue ….. ….. , a déposé une demande en obtention du statut de réfugiée tant en son nom qu'en celui de ses enfants mineurs …..-….., née le 22 janvier 2001 à ….. (…..) et ….. …..-….., né le 15 janvier 2003 à ….., les trois demandeurs étant ci-après désignés comme "les consorts ……" Par décision du 7 septembre 2005, notifiée le 14 octobre 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration, se basant sur la disposition de l'article 16, paragraphe 1er du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ci-après désigné par "le règlement n° 343/2003", se déclara incompétent pour connaître de la demande d'asile, soulignant que ce serait la République française qui serait responsable du traitement de leur demande d'asile.

Les autorités luxembourgeoises ont dans la suite sollicité et obtenu, de la part des autorités françaises, un engagement de reprise en charge des consorts …… Par requête déposée le 20 octobre 2005, inscrite sous le numéro 20481 du rôle, les consorts ….. ont introduit un recours en annulation contre la décision d'incompétence du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 7 septembre 2005, et par requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 20482 du rôle, ils sollicitent du président du tribunal administratif, principalement l'institution d'une mesure de sauvegarde par rapport à la prédite décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 7 septembre 2005, cette mesure devant consister dans l'autorisation des consorts ….. de se voir autoriser à continuer à séjourner sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg en attendant la solution du litige concernant le recours introduit au fond, et subsidiairement le sursis à exécution de la prédite déclaration d'incompétence, ce sursis devant produire le même effet de l'autorisation de séjour provisoire en attendant la solution du litige au fond.

Dans la requête introductive d'instance, les demandeurs font exposer que Madame …..

a déposé une première demande d'asile en France, mais qu'elle est repartie vers son pays d'origine en 2002 pour y rester environ 18 mois et se voir obligée de fuir une nouvelle fois en juin 2004. Ils estiment que la demande d'asile déposée au Luxembourg se trouve fondée sur des éléments entièrement nouveaux et différents de ceux qui avaient justifié la demande déposée en France en 2001. Ce serait donc à tort que les autorités luxembourgeoises se sont déclarées incompétentes pour connaître de la nouvelle demande d'asile. La décision d'incompétence aurait encore été prise sur base d'une réglementation non encore en vigueur au moment de leur arrivée au Luxembourg. – Les consorts ….. estiment par ailleurs que l'exécution de la mesure de transfert vers la France leur causerait un préjudice grave et définitif, étant donné que les autorités françaises les expulseraient probablement vers leur pays d'origine sans examiner leur nouvelle demande d'asile.

Le délégué du gouvernement conteste tant le risque de préjudice grave et définitif que l'existence de moyens sérieux au fond. Il verse des pièces dont il ressort qu'avant d'introduire une demande d'asile au Luxembourg, les consorts ….. avaient déjà déposé une demande d'asile en France et qu'en date du 2 septembre 2005, les autorités françaises se sont déclarées d'accord à les reprendre en charge.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

L'article 12 de la loi précitée du 21 juin 1999 dispose que le président du tribunal administratif peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution d'une affaire dont est saisi le tribunal administratif, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l'article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d'admettre que l'institution d'une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l'appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d'une décision administrative alors même que les conditions posées par l'article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l'article 12 n'excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.

En l'espèce, les consorts ….. restent en défaut de prouver en quoi la décision d'incompétence et l'exécution de la décision de reprise par les autorités françaises risqueraient de leur causer un préjudice grave et définitif.

Aux termes de son premier considérant, le règlement n° 343/2003 considère qu'une politique commune dans le domaine de l'asile, incluant un régime d'asile européen commun, est un élément constitutif de l'objectif de l'Union européenne visant à mettre en place progressivement un espace de liberté, de sécurité et de justice ouvert à ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection dans la Communauté. Tablant sur l'équivalence des procédures devant assurer la protection des demandeurs d'asile applicables dans les différents Etats membres, le règlement en question fixe des règles de compétence en vue de déterminer l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile émanant d'un ressortissant d'un Etat tiers. Il s'ensuit qu'un demandeur d'asile ne saurait se prévaloir d'un préjudice quelconque qu'il risquerait de subir au cas où sa demande d'asile serait examinée dans un Etat membre plutôt que dans un autre. Par conséquent, le seul fait que le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration luxembourgeois se soit déclaré incompétent en faveur des autorités françaises n'est pas de nature à causer un préjudice aux consorts …… Ceux-ci se prévalent encore de ce qu'ils ont vu leur demande d'asile rejetée par les autorités françaises et qu'ils risquent de se voir renvoyer vers leur pays d'origine au cas où ils seraient repris par ces autorités.

Indépendamment de sa véracité, cette affirmation ne saurait valoir à son tour. En effet, l'article 16, paragraphe 1er, sub e) du règlement n° 343/2003 prévoit que l'Etat membre qui a rejeté la demande d'asile du ressortissant d'un Etat tiers qui se trouve, sans en avoir reçu la permission, sur le territoire d'un autre Etat membre, est obligé de reprendre ledit ressortissant, ce qui implique logiquement qu'un tel rejet d'une demande d'asile dans un Etat membre produit ses effets dans les autres Etats membres. Admettre le contraire priverait de toute justification les règles de compétence établies par le règlement précité et les priverait par ailleurs de toute efficacité en ce qu'un demandeur d'asile débouté dans un Etat membre pourrait tenter d'obtenir l'asile politique dans chacun des autres Etats membres, dans le cadre de procédures successives, sur base des mêmes faits et arguments ayant motivé la demande initiale.

L'argument invoqué au fond par les consorts ….. consistant à nier l'applicabilité du règlement communautaire en question, qui est susceptible d'avoir une influence sur le raisonnement qui précède, n'est cependant pas de nature à énerver celui-ci, étant donné que le règlement n° 343/2003 ne fait que reprendre les dispositions de la Convention relative à la détermination de l'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres des Communautés européennes, signée à Dublin, le 15 juin 1990, qui procède des mêmes considérations que le règlement communautaire précité.

Le sursis à exécution et une mesure de sauvegarde ne pouvant être institués qu'en cas de risque d'un préjudice grave et définitif, et celui-ci faisant défaut en l'espèce, la demande est à rejeter.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande en institution d'une mesure de sauvegarde, sinon de sursis à exécution non fondée et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 24 octobre 2005 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20482
Date de la décision : 24/10/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-10-24;20482 ?

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