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08/07/2005 | LUXEMBOURG | N°20046

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 juillet 2005, 20046


Tribunal administratif N° 20046 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juillet 2005 Audience publique du 8 juillet 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur … … et Madame … … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 4 juillet 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit a

u tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … , né le 22 mars 1978 à … (…), et...

Tribunal administratif N° 20046 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juillet 2005 Audience publique du 8 juillet 2005

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur … … et Madame … … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 4 juillet 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … , né le 22 mars 1978 à … (…), et de son épouse, Madame … … , née le 19 mars 1986 à … (…), les deux demeurant ensemble à L-… …, …, rue … … , tendant à l'institution d'une mesure de sauvegarde consistant dans l'autorisation de Monsieur … … à résider sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé au fond sur le mérite du recours en annulation introduit le 6 mai 2005, inscrit sous le numéro 19774 du rôle, dirigé contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 22 décembre 2004, confirmée sur recours gracieux par décision du 9 février 2005, par laquelle l'autorisation de séjour a été refusée à Monsieur … … ;

Vu l'article 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment les décisions attaquées;

Maître Frank WIES, ainsi que Madame la déléguée du gouvernement Jacqueline JACQUES entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Par décision du 22 décembre 2004, confirmée le 9 février suite à un recours gracieux, le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration a refusé l'entrée et le séjour à Monsieur … … , de nationalité ….

Par requête déposée le 6 mai 2005, inscrite sous le numéro 19774 du rôle, Monsieur … … et son épouse, Madame … … , de nationalité …, ont introduit un recours en annulation contre la décision de refus d'entrée et de séjour, et par requête déposée le 4 juillet 2005, inscrite sous le numéro 20046 du rôle, ils sollicitent l'institution d'une mesure de sauvegarde consistant dans l'autorisation de Monsieur … … à résider sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg en attendant que le tribunal administratif se soit prononcé au fond sur le mérite du recours en annulation.

Ils font exposer que Madame … dispose d'une autorisation de séjour ainsi que d'une carte d'identité d'étranger valable jusqu'au 3 octobre 2006 et qu'ils se sont mariés le 29 juin 2004 devant l'officier de l'état civil de …. Madame … suivrait actuellement une formation pour devenir vendeuse dans le cadre d'un contrat d'apprentissage. Le couple habiterait chez les parents de Madame … et le père de celle-ci aurait signé, le 2 mai 2005, une déclaration de prise en charge à durée illimitée au bénéfice de Monsieur …. Celui-ci disposerait d'une offre d'emploi auprès d'une société luxembourgeoise.

Les demandeurs estiment que le rapatriement de Monsieur …, comme conséquence des deux décisions attaquées, leur causera un préjudice grave et irréparable, étant donné qu'elle entraînerait pour le couple un déracinement lourd de conséquences, ne se justifiant pas par aucune autre mesure impérieuse, contraire à toute conduite raisonnable de l'autorité administrative et partant disproportionné.

Ils sont par ailleurs d'avis que les moyens invoqués à l'appui de leur recours au fond sont sérieux, étant donné que la décision attaquée serait contraire à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme qui protège la vie familiale, ainsi qu'à la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au regroupement familial.

La déléguée du gouvernement expose que Monsieur … séjourne au Luxembourg sans disposer des moyens suffisants pour supporter les frais de séjour. Dans ce contexte, elle souligne qu'il ne dispose que d'une offre d'emploi et que, par ailleurs, un permis de travailler lui a été refusé. Elle ajoute qu'il se trouve de manière illégale au Luxembourg depuis le 29 juin 2004, date d'expiration de son visa touristique. La situation de son épouse, qui ne gagnerait d'ailleurs pas sa vie étant donné qu'elle n'est qu'en apprentissage, ne saurait influer sur la légalité de la situation de Monsieur …. Le fait qu'un tiers signe une déclaration de prise en charge ne saurait pallier l'absence de moyens personnels suffisants nécessaires pour justifier l'octroi d'une autorisation de séjour.

La requête est basée sur l'article 12, relatif aux mesures de sauvegarde, de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

En vertu de cette disposition légale, le président du tribunal administratif peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution d'une affaire dont est saisi le tribunal administratif, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l'article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d'admettre que l'institution d'une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l'appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d'une décision administrative alors même que les conditions posées par l'article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l'article 12 n'excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.En ce qui concerne les faits, il se dégage de pièces versées que Monsieur … ne dispose pas d'une autorisation de séjour. Il est vrai qu'il avait déposé une demande afférente le 30 juin 2004 et que son séjour était couvert, jusqu'à la décision de refus du 22 décembre 2004, par la copie de la demande de carte d'identité d'étranger. Actuellement cependant, il ne dispose d'aucun titre de séjour.

Concernant l'existence d'une vie familiale au sens de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 et approuvée par une loi du 29 août 1953, il se dégage de la jurisprudence du tribunal administratif dont son président, statuant au provisoire, ne saurait se départir, que dans le cadre du contrôle de proportionnalité à effectuer dans le contexte de l'ingérence dans la vie familiale, il importe de relever que la disposition en question ne confère pas directement aux étrangers un droit de séjour dans un pays précis. Lorsque des personnes nouent leur relation amoureuse sans ignorer la précarité de la situation d'un des partenaires, ils ne sauraient se plaindre de ce que, même en se mariant et en créant ainsi des liens familiaux nouveaux sur le territoire d'un Etat, ils ne sauraient en principe prétendre à séjourner sur le territoire de cet Etat sous le couvert de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. La Cour européenne des droits de l’homme n’accorde en effet qu’une faible importance aux événements de la vie d’immigrants qui se produisent durant une période où leur présence sur le territoire est contraire à la loi nationale, voire couverte par un statut de séjour précaire (trib.

adm. 4 juillet 2005, n° 19544 du rôle).

Eu égard à ces développements, l'argument tiré d'une ingérence injustifiée dans la vie familiale du couple ne semble pas sérieux en l'état actuel de l'instruction du dossier.

Le moyen tiré de la violation de la directive 2003/86/CE du Conseil du 22 septembre 2003 relative au droit au regroupement familial n'apparaît à son tour pas comme suffisamment sérieux, étant donné qu'elle n'a pas encore été transposée en droit national luxembourgeois et qu'en vertu de son article 20, le délai de transposition en droit national expirera le 3 octobre 2005 seulement.

Il suit des considérations qui précèdent qu'en l'état actuel de l'instruction du dossier, les moyens invoqués à l'appui du recours au fond n'apparaissent pas comme sérieux.

Dans ces conditions, et sans qu'il y ait lieu d'examiner de plus le risque d'un préjudice grave et définitif dans le chef des demandeurs, étant donné que le sursis à exécution et l'institution d'une mesure de sauvegarde supposent la réunion cumulative des deux conditions légales du risque d'un préjudice grave et définitif et d'existence de moyens sérieux, la demande est à rejeter.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande non justifiée et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 8 juillet 2005 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20046
Date de la décision : 08/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-08;20046 ?

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