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04/07/2005 | LUXEMBOURG | N°20017

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 04 juillet 2005, 20017


Tribunal administratif N° 20017 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juin 2005 Audience publique du 4 juillet 2005

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur … … , …, contre une décision du bourgmestre de la commune de … en présence des époux … … et … … , … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 29 juin 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles UNSEN, avocat à la Cour, inscrit a

u tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … , retraité, demeurant à L-… …, …, rue de …,...

Tribunal administratif N° 20017 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 juin 2005 Audience publique du 4 juillet 2005

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur … … , …, contre une décision du bourgmestre de la commune de … en présence des époux … … et … … , … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 29 juin 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles UNSEN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … , retraité, demeurant à L-… …, …, rue de …, tendant à prononcer le sursis à exécution de l'autorisation n° … délivrée le … … … par le bourgmestre de la commune de … aux époux … … , vétérinaire, et … … , vétérinaire, les deux demeurant ensemble à L-…, …, rue … …, portant sur l'"agrandissement / transformation maison unifamiliale + cabinet vétérinaire à L-… …, …, rue … … … ", ladite requête s'inscrivant dans le cadre d'un recours en réformation, sinon en annulation dirigé contre l'autorisation en question, introduit le 10 juin 2005, portant le numéro 19934 du rôle;

Vu l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Maître Stéphanie COLLMANN, en remplacement de Maître Charles UNSEN, pour le demandeur, Maître Steve HELMINGER pour l'administration communale de … et Maître François REINARD pour les époux …-… entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Le 23 décembre 2004, le bourgmestre de la commune de … délivra aux époux … … et … … , une autorisation portant sur l'"agrandissement / transformation maison unifamiliale + cabinet vétérinaire à L-… …, …, rue … … … ." Estimant que l'autorisation viole son droit de propriété en ce qu'il permet un empiètement sur son terrain, qu'elle aggrave sa situation de voisin en ce qu'elle permet un changement d'affectation de l'immeuble qui sera transformé en cabinet vétérinaire, et qu'elle est contraire à l'article 32 c) du règlement sur les bâtisses de la commune de … en ce qu'il permet de conférer à l'immeuble transformé une hauteur non réglementaire, Monsieur … … a introduit le 10 juin 2005 un recours, inscrit sous le numéro 19934 du rôle, tendant à la réformation sinon à l'annulation de ladite autorisation de construire, et le 29 juin 2005, il a déposé une requête, inscrite sous le numéro 20017 du rôle, tendant à ordonner un sursis à l'exécution de l'autorisation de construire critiquée, en attendant la solution du litige au fond.

L'administration communale de … ainsi que les bénéficiaires de l'autorisation de construire, à savoir les époux …-… soulèvent en premier lieu l'irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté. En effet, l'autorisation litigieuse, délivrée le 23 décembre 2004, aurait été affichée sur les lieux du futur chantier dès le mois de janvier 2005, de sorte que le recours, introduit en juin 2005, ne respecterait pas le délai de trois mois dans lequel un recours contentieux doit être introduit par les tiers à partir du moment où ils ont connaissance d'une décision administrative qui leur fait grief.

La compétence du président du tribunal est restreinte à des mesures essentiellement provisoires et ne saurait en aucun cas porter préjudice au principal. Il doit s'abstenir de préjuger les éléments soumis à l'appréciation ultérieure du tribunal statuant au fond, ce qui implique qu'il doit s'abstenir de prendre position de manière péremptoire, non seulement par rapport aux moyens invoqués au fond, mais même concernant les questions de recevabilité du recours au fond qui sont susceptibles d'être soumis non seulement à son appréciation, mais encore à celle du juge du fond.

La question de la tardiveté d'un recours contentieux étant soumise ultérieurement à l'appréciation du juge du fond, le président du tribunal, statuant au provisoire, ne saurait y statuer de manière péremptoire, mais est amené à s'y prononcer dans le cadre du sérieux des moyens invoqués au fond.

La requête étant régulière en ce qui concerne les questions relevant de la seule appréciation du juge du provisoire, elle est recevable.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l'affaire est en état d'être plaidée et décidée à brève échéance.

La condition d'un risque de préjudice grave et définitif est remplie en l'espèce. En effet, le demandeur risque effectivement un tel préjudice en cas de poursuite des travaux jusqu'à l'intervention d'une décision définitive au fond, étant donné qu'en vertu d'une jurisprudence constante, récemment réaffirmée avec vigueur, les juridictions judiciaires refusent d'ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d'une autorisation administrative annulée dans la suite, au motif que le fait de construire sous le couvert d'une autorisation de construire qui se trouve annulée dans la suite ne constitue pas le maître de l'ouvrage en faute, que, par conséquent, il n'y a aucune responsabilité civile dans le chef de celui qui a construit et que, dans ces conditions, il ne saurait y avoir de réparation du préjudice, ni en nature moyennant démolition de l'ouvrage construit illégalement, ni d'ailleurs par équivalent (v. Cour d'appel 30 juin 1993, n° 13662 du rôle; 11 janvier 1995, n° 15963 du rôle; 8 juillet 2004, n° 27531 du rôle).

Concernant le moyen de la tardiveté du recours qui, s'il apparaissait comme sérieux au stade actuel de l'instruction du litige, aurait comme effet de faire apparaître comme non suffisamment sérieux les moyens invoqués par le demandeur à l'appui de son recours au fond étant donné qu'il tiendrait en échec l'examen de ces moyens, il se dégage de l'article 13, alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives que le délai dans lequel les tiers intéressés doivent introduire un recours contentieux contre une décision administrative leur faisant grief est de trois mois à partir du jour où ils ont pu en prendre connaissance.

En l'espèce, il se dégage des pièces versées que l'information concernant la délivrance de l'autorisation litigieuse a été affichée sur le chantier dès le mois de janvier 2005. Par ailleurs, selon un procès-verbal d'expertise versé par les époux …-…, le géomètre expert immobilier … … a réalisé, le 10 janvier 2005, un état des lieux en présence de l'épouse du demandeur. Il ressort de plus d'un jeu de photographies versées que le gros-œuvre de la construction est achevé et que l'immeuble litigieux est couvert d'une toiture.

Il se dégage de ces éléments que tout porte à admettre que le 10 juin 2005, date d'introduction du recours contentieux au fond, Monsieur … était au courant de l'existence de l'autorisation de construire délivrée le 23 décembre 2004 aux époux …-… depuis plus de trois mois. Dans ce contexte, il y a lieu de relever que le demandeur ne soutient pas n'avoir appris que récemment la teneur exacte de cette autorisation, ou d'avoir vainement sollicité de l'administration communale, en temps utile, la faculté de consulter le dossier relatif à l'autorisation litigieuse.

Il faut en conclure qu'au stade actuel de l'instruction du litige, le moyen tiré de la tardiveté du recours introduit au fond apparaît comme sérieux.

Les moyens invoqués par Monsieur … à l'appui de son recours au fond ont partant peu de chances d'être examinés par le juge du fond.

Il y a lieu d'ajouter, à titre complémentaire, que les trois moyens invoqués à l'appui du recours au fond manquent pour le surplus intrinsèquement du sérieux nécessaire pour justifier une mesure provisoire.

Il en est ainsi d'abord du moyen tiré de ce que l'autorisation délivrée autoriserait un empiétement de la construction nouvelle sur la propriété de Monsieur …. D'une part, en effet, le demandeur ne précise pas en quoi consisterait cet empiétement. D'autre part, il y a lieu de relever que l'autorisation de bâtir précise que la gouttière de la toiture latérale de la maison …-

… est à prévoir de telle manière qu'elle n'empiète pas sur la propriété voisine. Si, dans ces conditions, il y a malgré tout un empiétement, il s'agit d'un problème d'exécution de l'autorisation qui échappe à la compétence du juge administratif.

Il paraît que ce soit pareillement à tort que Monsieur … se plaint d'un changement d'affectation de l'immeuble qui serait destiné à abriter un cabinet vétérinaire, étant donné qu'il ne montre pas en quoi un tel changement d'affectation, à le supposer établi, serait contraire à une disposition légale ou réglementaire.

Finalement, il paraît que ce soit encore à tort que Monsieur … se plaint de l'inobservation de l'article 32 c) du règlement sur les bâtisses relatif à la hauteur de la corniche des constructions, en soutenant que cette disposition interdirait une surélévation de l'immeuble à transformer, étant donné que l'immeuble constituerait déjà actuellement la construction la plus élevée des différents immeubles intéressant Monsieur … et les époux …-

…. En réalité, en disposant qu'au cas où la cote d'altitude de la corniche n'est pas la même sur toute la longueur des façades, la corniche la plus élevée est déterminante, l'article 32 c) du règlement sur les bâtisses communal vise les immeubles isolément et dispose que pour mesurer la hauteur maximale admissible d'une construction, si un immeuble donné a des façades présentant des hauteurs différentes, la corniche la plus élevée de l'immeuble est déterminante. Or, en l'espèce, il se dégage des plans versés qu'aucune des façades de l'immeuble litigieux ne dépasse la hauteur réglementaire.

Il suit des considérations qui précèdent qu'au stade actuel de l'instruction du litige, les moyens invoqués à l'appui de la demande au fond ne paraissent pas suffisamment sérieux pour justifier un sursis à exécution.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit le recours en sursis à exécution en la forme, au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 4 juillet 2005 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 20017
Date de la décision : 04/07/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-07-04;20017 ?

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