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21/04/2005 | LUXEMBOURG | N°18939C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 avril 2005, 18939C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18939 C Inscrit le 3 décembre 2004

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Audience publique du 21 avril 2005 Recours formé par les époux XXX XXX et XXX XXX contre deux délibérations du conseil communal de XXX et une décision d’approbation du ministre de l’Intérieur en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire - Appel -

(jugement entrepris du 27 octobre 2004, n° 17791 du rôle)

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Vu la requête d’appel, i...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18939 C Inscrit le 3 décembre 2004

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Audience publique du 21 avril 2005 Recours formé par les époux XXX XXX et XXX XXX contre deux délibérations du conseil communal de XXX et une décision d’approbation du ministre de l’Intérieur en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire - Appel -

(jugement entrepris du 27 octobre 2004, n° 17791 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 18939C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 3 décembre 2004 par Maître Alex Krieps, avocat à la Cour, au nom de Monsieur XXX XXX, consultant, et de son épouse, Madame XXX XXX, employée privée, les deux demeurant ensemble à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 27 octobre 2004, par lequel il a déclaré non fondé le recours en annulation introduit contre les délibérations du conseil communal de XXX des 31 juillet et 24 octobre 2001 portant respectivement adoption provisoire et définitive du règlement spécial concernant la zone de protection architecturale sise aux alentours de l’église de XXX, de même que de la nouvelle partie graphique définissant les secteurs sauvegardés et de servitudes architecturales remplaçant et annulant la partie graphique y relative approuvée par le ministre de l’Intérieur en date du 5 avril 1989, ainsi que contre la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 9 février 2004 ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Pierre Kremmer, demeurant à Luxembourg, du 2 décembre 2004, portant signification de ladite requête d’appel à l’administration communale de XXX ;

Vu le mémoire en réponse déposé le 30 décembre 2004 au greffe de la Cour administrative par Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, pour le compte de l’administration communale de XXX, ledit mémoire ayant été notifié par voie de télécopie au mandataire des appelants XXX XXX-XXX XXX en date du 30 décembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Alex Krieps et Maître Steve Helminger, en remplacement de Maître Roger Nothar, en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 17791 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 19 mars 2004, Monsieur XXX XXX, consultant, et son épouse, Madame XXX XXX, employée privée, les deux demeurant ensemble à L-XXX, ont fait introduire un recours tendant à l’annulation des délibérations du conseil communal de XXX des 31 juillet et 24 octobre 2001 portant respectivement adoption provisoire et définitive du règlement spécial concernant la zone de protection architecturale sise aux alentours de l’église de XXX, de même que de la nouvelle partie graphique définissant les secteurs sauvegardés et de servitudes architecturales remplaçant et annulant la partie graphique y relative approuvée par le ministre de l’Intérieur en date du 5 avril 1989, ainsi qu’à l’annulation de la décision d’approbation afférente du ministre de l’Intérieur du 9 février 2004.

Par jugement rendu le 27 octobre 2004, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, a reçu le recours en annulation en la forme et, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté les époux XXX XXX-

XXX XXX.

Les premiers juges ont reconnu aux actuels appelants un intérêt suffisant à agir contre les décisions attaquées en raison du fait qu’en leur qualité de propriétaires d’une maison d’habitation située dans le secteur de sauvegarde concerné directement par ces décisions, ils ont une vue directe sur les terrains que la commune entend exclure de la zone de protection. Ils ont relevé dans ce contexte que même si à l’heure actuelle déjà, des bâtiments scolaires modernes se trouvent dans cette zone, la nouvelle réglementation permettra d’y ériger de nouveaux bâtiments, situation qui est susceptible d’aggraver leur situation de voisins.

Les premiers juges ont encore constaté que tant la décision du conseil communal du 24 octobre 2001 que la décision d’approbation ministérielle du 9 février 2004 comportent une motivation précise qui, en ce qui concerne la décision communale, a d’ailleurs été étayée de manière circonstanciée par le mémoire en réponse de la commune.

En ce qui concerne le reclassement essentiellement incriminé par les actuels appelants, à savoir celui de l’îlot de terrains situé entre la route d’XXX et la rue du Village, en secteur de servitudes architecturales, le tribunal a retenu que ce reclassement répond à des considérations urbanistiques valables, en ce sens que la partie de l’îlot plus éloignée du noyau et n’abritant que peu de constructions dignes de protection, par ailleurs éparpillées, se trouve soumise à un régime relaissant un peu plus de libertés aux propriétaires tout en maintenant un niveau encore élevé de règles destinées à rendre l’aménagement de ces terrains compatible avec le noyau soumis au régime de secteur de sauvegarde et que les tranches de parcelles bordant le côté longitudinal de la rue du Village en face de l’église – dont celle abritant la maison des actuels appelants ainsi que celle devant accueillir, d’après les renseignements fournis lors de la visite des lieux à laquelle le tribunal avait procédé, la partie frontale du nouveau complexe scolaire – soient maintenues en zone de sauvegarde afin d’obtenir un aménagement harmonieux et similaire des deux côtés de cette partie de la rue du Village et de faire écran par rapport aux constructions situées en aval à l’intérieur dudit îlot. Le tribunal a encore retenu que la même conclusion s’impose pour le classement initial des parcelles longeant la rue du Village et situées pour l’essentiel au lieu-dit « XXX » en secteur de servitudes architecturales qui répond pareillement à la préoccupation urbanistique légitime de soumettre les constructions des deux côtés d’une même rue à un régime similaire.

Les premiers juges ont constaté par ailleurs que s’il est vrai que la nécessité de préciser la délimitation entre le secteur sauvegardé et le secteur de servitudes architecturales, telle que mise en avant par la commune, ne se rapporte en réalité qu’aux modifications apportées au niveau des parcelles situées en seconde ligne le long de la rue de XXX du côté opposé à l’église, les autres modifications du plan graphique répondent partant à des considérations d’ordre urbanistique pertinentes et valables et tendant à la finalité d’intérêt général d’un aménagement de cette partie de la localité de XXX assurant la sauvegarde du patrimoine architectural rural tout en permettant son évolution en fonction des changements socio-économiques. Ils ont en tiré la conclusion que c’est à tort que les actuels appelants ont soutenu que le reclassement litigieux de l’îlot de terrains situé entre la route d’XXX et la rue du Village aurait été effectué dans le seul but d’affranchir le projet de construction du complexe scolaire communal des servitudes restrictives du secteur de sauvegarde, vu que la partie des terrains longeant la rue du Village et destinés à accueillir une partie dudit complexe restent classés en secteur de sauvegarde et que le restant de l’îlot est soumis aux règles d’aménagement du secteur de servitudes architecturales qui comportent de larges plages de règles parallèles à celles du secteur de sauvegarde. Il n’a partant pas été fait droit au moyen invoqué par les actuels appelants et tiré d’un prétendu détournement de pouvoir commis par la commune de XXX.

Les premiers juges ont encore rejeté le moyen tiré d’un prétendu caractère illégal du règlement spécial, en décidant qu’un tel règlement spécial applicable seulement à une partie délimitée du territoire communal est assimilable de ce point de vue à un plan d’aménagement particulier, qui a nécessairement pour objectif de modifier ou de compléter le plan d’aménagement général, en constatant qu’en cas de contradiction entre les dispositions du plan d’aménagement général et ledit règlement spécial, ce sont les dispositions de ce dernier qui doivent trouver application dans la zone couverte par ce plan, par dérogation aux dispositions du plan d’aménagement général. Les premiers juges ont tiré la conclusion de cette argumentation que l’article 10 du plan d’aménagement général, alors même qu’il n’a pas requis l’adoption d’un règlement spécial pour le secteur de servitudes architecturales, ne s’opposait toutefois pas à l’adoption subséquente du règlement spécial litigieux, devant régir d’après ses propres dispositions également les terrains classés dans le secteur de servitudes architecturales, en amendant et en complétant ainsi le plan d’aménagement général par l’introduction de règles spécifiques.

Quant à l’illégalité de certaines dispositions du règlement spécial litigieux, à savoir les articles 4.1.2.c) et d), 4.2.1.a), 4.2.3.b), 4.2.4.1.a), 6.3.1., 7.1.2.c) et d), 7.2.3, 9.1.5 et 9.3.1, les premiers juges ont constaté que contrairement à l’argumentation développée par les actuels appelants, les articles incriminés par eux n’ont pas pour objectif de conférer un blanc-seing au bourgmestre pour fixer ses décisions quant aux questions y visées, mais posent tous des règles qui sont à respecter et prévoient seulement des possibilités de dérogation dans certaines hypothèses.

Quant aux articles 4.1.2.c) et d) et 7.1.2.c) et d), relatifs aux longueurs uniformes maximales des façades et des faîtages, le tribunal a retenu que ces dispositions réglementaires prévoient certes chaque fois une possibilité de dérogation en faveur de bâtiments publics spécifiques, mais qu’ils limitent cette voie à l’existence d’un préjudice aux bâtiments publics causé par l’application des règles inscrites dans ces articles.

Quant aux articles 4.2.1.a), 4.2.3.b), 4.2.4.1.a) et 7.2.3 relatifs aux profondeur et nombre de niveaux des constructions, le tribunal a retenu qu’alors même que ces dispositions réglementaires permettent des dérogations aux limitations y contenues, ces mêmes dérogations sont confinées à l’hypothèse d’une meilleure intégration d’une construction par rapport à des bâtiments voisins existants présentant des dimensions supérieures.

Finalement, les premiers juges ont constaté que les articles 6.3.1, 9.1.5 et 9.3.1 portant les toitures et les ouvertures y admises, délimitent les possibilités de dérogation à l’hypothèse d’un intégration esthétique dans le secteur en question ou de l’importance excessive d’une toiture.

En conclusion, le tribunal a retenu que les articles litigieux du règlement spécial ne permettent pas au bourgmestre de déroger de manière générale aux dispositions dudit règlement afin de conférer un permis de construire en principe prohibé, mais délimitent ces possibilités de dérogation à des cas suffisamment circonscrits pour ne pas empiéter sur la compétence exclusive du conseil communal pour arrêter les règles d’urbanisme et obligent le bourgmestre à justifier in specie chaque dérogation effectivement accordée.

En date du 3 décembre 2004, Maître Alex Krieps, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur XXX XXX et de son épouse, Madame XXX XXX, inscrite sous le numéro 18939C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de leur requête d’appel, les appelants reprochent en premier lieu aux premiers juges de ne pas avoir examiné la motivation de la délibération du conseil communal de XXX du 31 juillet 2001 portant adoption provisoire du projet de règlement spécial litigieux. A ce titre, ils soutiennent que ladite décision ne comporterait aucun motif d’ordre urbanistique de nature à justifier le reclassement de l’îlot de terrains situé entre la route d’XXX et la rue du Village dans le secteur de servitudes architecturales et que le motif tiré des « divergences d’interprétation des différentes zones » se rapporterait en réalité aux seules modifications apportées au niveau des parcelles situées en seconde ligne le long de la rue de XXX du côté opposé à l’église.

En deuxième lieu, les appelants reprochent au tribunal administratif d’avoir accepté en cours d’instance la communication de nouveaux motifs pour justifier les décisions communales attaquées. Ils contestent plus particulièrement dans ce contexte que la commune puisse actuellement justifier le changement de la partie graphique, ainsi que la réduction du secteur sauvegardé par des réclamations qui avaient été jugées non fondées lors de l’adoption définitive de l’ancien plan d’aménagement général par délibération du conseil communal du 15 avril 1986.

Ainsi, du fait que la situation de fait n’aurait pas changé depuis cette dernière date, la commune ne saurait actuellement être admise à décider qu’un secteur qui en 1986 méritait protection, ne mériterait plus protection à l’heure actuelle. Les appelants reprochent aux premiers juges de ne pas avoir pris position par rapport à ce point précis.

D’une manière générale, les appelants estiment que ce serait à tort que les premiers juges ont décidé que les motifs communiqués par l’administration communale en cours d’instance répondent à des considérations urbanistiques valables de nature à justifier légalement les décisions attaquées.

Enfin, les appelants reprochent aux premiers juges de ne pas avoir retenu son moyen suivant lequel le règlement spécial contiendrait 5 dispositions comportant des dérogations systématiques à ses prescriptions, de sorte à constituer une véritable subdélégation faite par le conseil communal au bourgmestre, en violation des articles 28, 29 et 67 de la loi communale. Ainsi, les appelants soutiennent que les articles 4.1.2.c) et d) et 7.1.2 c) et d) du règlement spécial litigieux contiendraient des formulations vagues, laissant « la porte grande ouverte aux abus de dérogation », et qu’ils ne sont pas susceptibles de faire l’objet d’une interprétation restrictive par le bourgmestre comme il a été retenu par les premiers juges. En ce qui concerne les articles 4.2.3.B. et 7.2.3, les appelants estiment que ces dispositions réglementaires accorderaient un blanc-seing au bourgmestre, en ce qu’ils ne spécifieraient pas les limites de ce qu’il y a lieu d’entendre par « hauteur appropriée d’une construction ».

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 30 décembre 2004, Maître Roger Nothar, avocat à la Cour, agissant en nom et pour compte de l’administration communale de XXX, conclut à la confirmation pure et simple du jugement entrepris du 27 octobre 2004, en se rapportant à la sagesse de la Cour en ce qui concerne l’observation des délais et des autres formalités, de même qu’en ce qui concerne l’intérêt à agir des appelants. Elle conclut à une indication suffisante des motifs des décisions communales attaquées, en soutenant que plus particulièrement, en ce qui concerne la décision du 31 juillet 2001, la motivation de celle-ci aurait été complétée par elle dans le cadre de son mémoire en réponse déposé en première instance. D’une manière générale, elle soutient qu’il n’existerait aucune disposition légale imposant la motivation formelle des actes à caractère réglementaire dont feraient partie les décisions communales attaquées dans le cadre de la présente instance.

Quant au fond, elle conclut au bien-fondé de ses décisions attaquées, qui ont d’ailleurs été confirmées par les premiers juges après avoir procédé à une visite des lieux.

Enfin, quant à la prétendue illégalité du règlement spécial, l’administration communale de XXX entend voir confirmer les conclusions retenues par les premiers juges, suivant lesquelles les articles incriminés dudit règlement ne se confinent pas à conférer un blanc-seing au bourgmestre pour fixer ses décisions, mais qu’ils posent tous des règles qui sont à respecter et prévoient seulement des possibilités de dérogation dans certaines hypothèses. Il ne saurait partant en être tiré la conclusion que ces possibilités de dérogation, limitées d’ailleurs à des cas suffisamment circonscrits, empiètent sur la compétence exclusive du conseil communal compétent pour arrêter les règles d’urbanisme.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi, étant entendu que les parties appelantes disposent d’un intérêt suffisant à agir contre les actes réglementaires litigieux en leur qualité de voisins ayant une vue directe sur les terrains que la commune entend exclure de la zone de protection, comme il a été retenu à bon droit par les premiers juges.

Dans le cadre de leur premier moyen, les appelants, d’une part, critiquent le fait que la délibération du conseil communal de XXX du 31 juillet 2001 portant adoption provisoire du projet de règlement spécial litigieux, n’indique pas les motifs d’ordre urbanistique se trouvant à sa base et, d’autre part, reprochent aux premiers juges d’avoir accepté que la commune apporte, en cours d’instance, de « nouveaux motifs » pour justifier les décisions communales attaquées.

Il échet tout d’abord de constater que c’est à bon droit que les premiers juges ont retenu que s’il est vrai qu’il n’existe aucune disposition légale qui impose d’une manière générale la motivation formelle des actes administratifs à caractère réglementaire, tels que ceux sous analyse, par l’indication dans l’acte lui-même des motifs sur lesquels il est basé, il n’en demeure pas moins que l’autorité administrative ayant pris l’acte attaqué est tenue de préciser les motifs ayant justifié sa décision, notamment afin de permettre aux juges administratifs d’opérer le contrôle prévu par l’article 7, alinéa 1er de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif.

Il s’ensuit qu’aucun reproche ne saurait être adressé au conseil communal de XXX de ne pas avoir indiqué dans l’acte réglementaire lui-même les motifs sur la base desquels il a été pris, étant entendu que le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, et notamment son article 6, alinéa 2 portant sur l’indication formelle des motifs dans la décision, n’est pas applicable aux actes administratifs à caractère réglementaire suivant le champ d’application dudit règlement grand-ducal tel que fixé par l’article 4 de la loi du 1er décembre 1978 réglant la procédure administrative non contentieuse.

C’est encore à bon droit que les premiers juges ont retenu que dans la mesure où l’acte réglementaire litigieux ne doit pas en lui-même contenir l’indication des motifs sur lesquels il est basé, ceux-ci peuvent être communiqués au plus tard au cours de la procédure contentieuse pour permettre à la juridiction administrative d’exercer son contrôle de légalité.

En l’espèce, il échet de constater, comme l’ont déjà fait les premiers juges, que s’il est vrai que les délibérations du conseil communal de XXX des 31 juillet 2001 et 24 octobre 2001 ne comportent qu’une indication succincte des motifs se trouvant à la base desdites décisions communales, la commune de XXX a toutefois fait compléter cette motivation par un mémoire en réponse déposé en première instance et détaillant d’une manière circonstanciée les motifs qui se trouvent à la base des actes attaqués. Il se dégage encore de ladite motivation que contrairement à l’argumentation développée par les appelants, lesdits motifs sont d’ordre urbanistique, en ce qu’ils ont essentiellement trait à un aménagement plus cohérent et plus proche de la réalité des lieux du centre de la localité de XXX que celui ayant existé sur base des réglementations antérieures.

S’il est vrai que les dispositions d’un plan d’aménagement général communal doivent reposer sur des considérations légales d’ordre urbanistique ayant trait à l’aménagement des agglomérations et d’ordre politique tirées de l’organisation de la vie en commun sur les territoires donnés, tendant les unes et les autres à une finalité d’intérêt général, il n’en demeure pas moins que dans le cadre du recours en annulation porté devant lui et dirigé contre un plan d’aménagement général ou une modification à apporter à un tel plan, le juge chargé du contrôle de la légalité ne saurait avoir égard à des considérations de pure opportunité, notamment d’ordre politique.

En l’espèce, les appelants n’ont pas soumis aux juges administratifs, au-delà de certaines considérations d’opportunité échappant à leur contrôle, des motifs de nature à démontrer l’illégalité du règlement spécial litigieux voire une erreur commise par les autorités communales quant à la réalité des faits se trouvant à la base des motifs justifiant les délibérations communales attaquées. Le simple fait que le conseil communal de XXX ait repris, le cas échéant en partie, des motifs qui ont le cas échéant pu lui être suggérés dans le passé par des réclamants mécontents d’une modification antérieure du plan d’aménagement général de XXX, n’est pas à lui seul de nature à invalider les motifs se trouvant actuellement à la base des délibérations communales litigieuses. Ainsi, quelle que soit la source d’inspiration de la commune pour justifier les décisions ainsi prises, il échet de vérifier si, au moment de la prise des décisions en question, lesdits motifs ont valablement pu justifier les décisions prises. Or, il échet de constater dans ce contexte qu’aucun moyen ou argument invoqués par les appelants n’est de nature à invalider les motifs ainsi développés par la commune.

Il suit de tout ce qui précède que le premier moyen est à rejeter pour ne pas être fondé, étant plus spécifiquement relevé qu’il ne saurait être reproché aux premiers juges de ne pas avoir pris position par rapport au moyen soulevé en première instance quant à l’indication des motifs se trouvant à la base des décisions litigieuses et quant au caractère légal de ceux-ci, alors qu’au contraire, il se dégage du jugement entrepris du 27 octobre 2004 que les premiers juges ont longuement analysé le moyen afférent présenté par les appelants en première instance et qu’ils se sont même rendus sur les lieux pour apprécier les faits invoqués par la commune de XXX à la base de la motivation des délibérations du conseil communal entreprises.

C’est ainsi qu’à la suite de cette visite des lieux, ils ont pu prendre position, dans le cadre de leur jugement, sur la situation actuelle sur les lieux pour constater non seulement une conformité des faits par eux constatés par rapport à ceux invoqués par la commune, mais également la légalité des motifs invoqués par elle. Ainsi, les premiers juges ont pu constater dans ce contexte que le reclassement essentiellement incriminé par les appelants, à savoir celui de l’îlot de terrains situé entre la route d’XXX et la rue du Village en secteur de servitudes architecturales, répond à des considérations urbanistiques valables, en ce sens que la partie de l’îlot plus éloignée du noyau et n’abritant que peu de constructions dignes de protection, par ailleurs éparpillées, se trouve soumise à un régime relaissant un peu plus de libertés aux propriétaires tout en maintenant un niveau encore élevé de règles destinées à rendre l’aménagement de ces terrains compatible avec le noyau soumis au régime du secteur de sauvegarde et que les tranches de parcelles bordant le côté longitudinal de la rue du Village en face de l’église – dont celle abritant la maison des actuels appelants ainsi que celle devant accueillir, d’après les renseignements fournis lors de la visite des lieux précitée, la partie frontale du nouveau complexe scolaire – soient maintenues en zone de sauvegarde afin d’obtenir un aménagement harmonieux et similaire des deux côtés de cette partie de la rue du Village et de faire écran par rapport aux constructions situées en aval à l’intérieur dudit îlot.

Les premiers juges ont encore pu conclure à bon droit dans ce contexte que la même conclusion s’impose pour le classement initial des parcelles longeant la rue du Village et situées pour l’essentiel au lieu-dit « XXX » en secteur de servitudes architecturales qui répond pareillement à la préoccupation urbanistique légitime de soumettre les constructions des deux côtés d’une même rue à un régime similaire.

D’une manière générale, les premiers juges ont retenu que les modifications du plan graphique répondent à des considérations d’ordre urbanistique pertinentes et valables et tendent à la finalité d’intérêt général d’un aménagement de cette partie de la localité de XXX assurant la sauvegarde du patrimoine architectural rural tout en permettant son évolution en fonction des changements socio-économiques.

Il échet encore de constater dans ce contexte qu’en instance d’appel, les appelants n’ont pas apporté une nouvelle argumentation par rapport à celle développée en première instance, de nature à démontrer l’illégalité des motifs d’ordre urbanistique se trouvant à la base des décisions communales incriminées ou de nature à contredire les faits tels que constatés par les premiers juges notamment lors de leur visite des lieux.

Il suit de ce qui précède que le moyen tendant à voir constater que les premiers juges auraient à tort considéré que les motifs invoqués à la base des délibérations communales litigieuses constitueraient des motifs urbanistiques valables, est à rejeter, la Cour se ralliant pleinement à l’analyse détaillée et circonstanciée, ainsi qu’aux conclusions retenues par les premiers juges suivant lesquelles les motifs invoqués par la commune sont d’ordre urbanistique et d’intérêt général.

Quant au dernier moyen invoqué par les appelants par lequel ils reprochent aux premiers juges de ne pas avoir retenu leur conclusion suivant laquelle le règlement spécial litigieux contiendrait 5 dispositions comportant des dérogations systématiques à ses prescriptions, en violation des articles 28, 29 et 67 de la loi communale, à savoir les articles 4.1.2.c) et d), 7.1.2.c) et d), 4.2.3.B. et 7.2.3, il échet de constater à la lecture des dispositions réglementaires ainsi critiquées, qu’il y a lieu de confirmer les premiers juges dans leurs conclusions suivant lesquelles les articles incriminés par les appelants ne se confinent pas à conférer un blanc seing au bourgmestre pour fixer ses décisions quant aux questions y visées, mais posent tous des règles qui sont à respecter et prévoient seulement des possibilités de dérogation dans certaines hypothèses. Ainsi, ils ont pu retenir à bon droit que les dispositions prévoyant des exceptions à un règlement de police des bâtisses doivent en principe être interprétées restrictivement et leur application par le bourgmestre déclenche dans son chef une obligation de motivation circonstanciée quant à la réunion des différentes prémisses requises pour faire fruit de la dérogation concernée, et ceci sous le contrôle, le cas échéant, des juridictions administratives.

Il s’ensuit que le bourgmestre ne saurait exercer son pouvoir d’accorder des dérogations d’une manière arbitraire, mais il devra nécessairement les fonder sur des critères objectifs, en conformité avec les considérations d’ordre urbanistique devant nécessairement s’imposer pour la zone d’aménagement concernée. Le défaut par le bourgmestre de respecter ces critères ou le fait par lui de faire un usage abusif de ces possibilités de dérogations, devraient nécessairement entraîner l’annulation par les juges administratifs des permis de construire ainsi délivrés en cas de recours contentieux.

En ce qui concerne plus particulièrement les articles 4.1.2.c) et d) et 7.1.2.c) et d) du règlement spécial litigieux, il échet de confirmer les premiers juges dans leur analyse suivant laquelle ces dispositions réglementaires relatives aux longueurs uniformes maximales des façades et des faîtages, prévoient certes chaque fois une possibilité de dérogation en faveur de bâtiments publics spécifiques, mais limitent cette voie à l’existence d’un préjudice aux bâtiments publics causé par l’application des règles inscrites dans ces articles.

En ce qui concerne par ailleurs les articles 4.2.3 b) et 7.2.3 relatifs aux profondeur et nombre de niveaux des constructions permettant des dérogations aux limitations y contenues, il échet encore de confirmer les premiers juges dans leur analyse suivant laquelle ces mêmes dérogations sont confinées à l’hypothèse d’une meilleure intégration d’une construction par rapport aux bâtiments voisins existant présentant des dimensions supérieures.

Il suit de ce qui précède que non seulement une violation des articles 28, 29 et 67 de la loi communale n’est pas donnée en l’espèce, mais encore que les articles incriminés du règlement spécial ne permettent pas au bourgmestre de déroger de manière générale aux dispositions dudit règlement, afin de conférer un permis de construire en principe prohibé, mais délimitent ces possibilités de dérogation à des cas suffisamment circonscrits pour ne pas empiéter sur la compétence exclusive du conseil communal pour arrêter les règles d’urbanisme et obliger le bourgmestre à justifier in specie chaque dérogation effectivement accordée. Il s’ensuit que le moyen afférent des appelants est également à écarter.

Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que la requête d’appel n’est pas fondée et que le jugement entrepris du 27 octobre 2004 est à confirmer dans toute sa teneur.

Malgré le fait que la requête d’appel a été notifiée par la voie du greffe au Gouvernement en date du 3 décembre 2004, celui-ci n’a pas déposé de mémoire en réponse dans le cadre de la présente instance. Toutefois, conformément à l’article 47 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, l’arrêt statue également à l’égard de la partie intimée qui ne comparaît pas, tel en l’espèce l’Etat, de sorte que l’arrêt à intervenir statuera à l’égard de toutes les parties à l’instance.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 3 décembre 2004 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 27 octobre 2004 dans toute sa teneur ;

condamne les appelants aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 11


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18939C
Date de la décision : 21/04/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-04-21;18939c ?

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