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14/04/2005 | LUXEMBOURG | N°19161C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 avril 2005, 19161C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19161 C Inscrit le 12 janvier 2005

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Audience publique du 14 avril 2005 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 13 décembre 2004, n° 18558 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite s

ous le numéro 19161C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 12 janvier 20...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19161 C Inscrit le 12 janvier 2005

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Audience publique du 14 avril 2005 Recours formé par Monsieur … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 13 décembre 2004, n° 18558 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19161C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 12 janvier 2005 par Maître Benoît Arnauné-Guillot, avocat à la Cour, au nom de Monsieur …, né le … à … (Burundi), de nationalité burundaise, demeurant actuellement à L-…, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 13 décembre 2004, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre de la Justice du 25 mai 2004, portant rejet de sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 19 juillet 2004 prise sur recours gracieux, tout en déclarant irrecevable le recours subsidiaire en annulation ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 27 janvier 2005 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom de l’appelant au greffe de la Cour administrative le 15 février 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Benoît Arnauné-Guillot et Madame le délégué du Gouvernement Claudine Konsbruck en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête, inscrite sous le numéro 18558 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 17 août 2004, Monsieur … a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 25 mai 2004, portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 19 juillet 2004 prise sur recours gracieux.

Par jugement rendu le 13 décembre 2004, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, a reçu le recours principal en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation.

Les premiers juges ont justifié leur décision en retenant que l’actuel appelant, en sa qualité de personne originaire du Burundi, déclarant y avoir fait l’objet de menaces en raison de son appartenance à l’ethnie des Hutus, n’a pas établi des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef la reconnaissance du statut de réfugié, étant donné que, d’une part, les seuls éléments personnels dont il a fait état concernent des menaces qu’il aurait reçues de la part de voisins appartenant à la communauté des Tutsis au courant des années 2000 et 2001, époque à laquelle il déclare avoir quitté le Burundi pour aller résider en Uganda et puis au Kenya et, d’autre part, ces faits ne sont pas d’une gravité suffisante pour lui rendre la vie intolérable dans son pays d’origine et ne sont pas suffisamment récents pour étayer la subsistance d’un risque de persécution à l’heure actuelle. Les premiers juges ont encore fait état de ce que l’actuel appelant ne leur a pas soumis d’élément concret de persécution qui l’aurait mis dans l’impossibilité de rester établi en Uganda ou au Kenya, pays dans lesquels il s’était durablement établi de 2001 à 2003. Enfin, en ce qui concerne la demande tendant à voir appliquer l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, le tribunal a décidé que cette disposition de droit international n’était pas applicable en l’espèce, puisque la mesure critiquée par l’actuel appelant ne visait pas une mesure d’éloignement du territoire national prise à son égard, en soulignant encore que le simple fait de tomber dans le champ d’application de cet instrument juridique international n’est pas de nature à voir reconnaître à la personne en question le statut de réfugié.

En date du 12 janvier 2005, Maître Benoît Arnauné-Guillot, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur …, inscrite sous le numéro 19161C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant reproche aux premiers juges d’avoir fait une mauvaise appréciation tant de la situation générale régnant actuellement au Burundi que de sa situation particulière. Il craint ainsi subir des persécutions dans son pays d’origine en sa qualité de membre de l’ethnie des Hutus, qui feraient toujours l’objet de persécutions au Burundi où la situation géopolitique ne serait toujours pas stabilisée, comme le démontrerait le fait que l’ethnie des Hutus aurait été directement impliquée dans le génocide du Rwanda. Il conteste que ses craintes de persécution soient l’expression d’un « simple sentiment d’insécurité », en insistant sur le fait que les autorités administratives actuellement en place au Burundi ne seraient pas en mesure d’y garantir la sécurité aux ressortissants de ce pays. En ce qui concerne ses séjours au Kenya et en Uganda, il expose qu’il ne s’agirait que de courts séjours, sans qu’il ne s’y serait établi durablement, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges. Il signale dans ce contexte qu’au moment où il se serait trouvé au Kenya, il n’aurait pas disposé de « papiers », ce qui l’aurait obligé à fuir ce pays pour se rendre vers « un autre pays ». Enfin, il estime que le but poursuivi par l’administration visant à le reconduire à la frontière ne serait en aucune façon proportionné par rapport à l’atteinte qui en découlerait à ses droits à une vie privée et familiale, telle que garantie par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 27 janvier 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

En date du 15 février 2005, Monsieur … a fait déposer un mémoire en réplique au greffe de la Cour administrative dans lequel il prend plus particulièrement position par rapport à la situation politique régnant actuellement au Burundi et à des meurtres qui y seraient commis quotidiennement.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Force est de constater que l’appelant fait état de problèmes qu’il aurait eus dans son pays d’origine en raison de sa qualité de membre de l’ethnie des Hutus, sans toutefois préciser des faits concrets de persécution dont il aurait fait l’objet, et que les problèmes dont il fait état d’une manière vague et non circonstanciée remontent aux années 2000 et 2001, partant à une période assez lointaine, sans qu’il ne précise en quoi il risquerait actuellement de faire l’objet de persécutions au Burundi.

Il se dégage au contraire du récit présenté par l’appelant que celui-ci éprouve un sentiment général d’insécurité de s’installer durablement au Burundi, une telle crainte n’étant toutefois pas de nature à justifier la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève.

Enfin, l’invocation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme n’est pas pertinente en l’espèce, étant donné que les décisions critiquées ne contiennent pas une mesure d’éloignement du territoire national à l’égard de l’appelant. Pour le surplus, le simple fait de tomber dans le champ d’application de cet instrument juridique international n’autorise pas une personne à se voir reconnaître le statut de réfugié. L’examen du statut de réfugié fait l’objet d’une appréciation au cas par cas à la lumière des normes juridiques existantes régissant les conditions d’octroi du droit d’asile, à savoir la Convention de Genève.

En conclusion, il y a lieu de retenir que le tribunal administratif a décidé à bon droit que le ministre de la Justice a valablement pu refuser la demande d’asile lui soumise par l’appelant, de sorte que la requête d’appel n’est pas fondée et que le jugement entrepris du 13 décembre 2004 est à confirmer.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 12 janvier 2005 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 13 décembre 2004 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Marc Feyereisen, conseiller Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par le premier conseiller en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier de la Cour Anne-Marie Wiltzius.

le greffier le premier conseiller 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19161C
Date de la décision : 14/04/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-04-14;19161c ?

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