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15/03/2005 | LUXEMBOURG | N°19008C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 15 mars 2005, 19008C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19008 C Inscrit le 15 décembre 2004

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Audience publique du 15 mars 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 15 novembre 2004, n° 18135 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscri

te sous le numéro 19008C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 15 déce...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 19008 C Inscrit le 15 décembre 2004

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Audience publique du 15 mars 2005 Recours formé par Monsieur XXX XXX contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 15 novembre 2004, n° 18135 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 19008C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 15 décembre 2004 par Maître Frank Wies, avocat à la Cour, au nom de Monsieur XXX XXX, né le 10 février 1956 à XXX (Kosovo/Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif le 15 novembre 2004, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre de la Justice du 16 février 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 26 avril 2004 suite à un recours gracieux de l’actuel appelant ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 11 janvier 2005 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Frank Wies et Madame le délégué du Gouvernement Claudine Konsbruck en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 18135 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 mai 2004, Monsieur XXX XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 16 février 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 26 avril 2004 suite à un recours gracieux.

Par jugement rendu le 15 novembre 2004, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties, après avoir donné acte au demandeur de ce qu’il déclare bénéficier de l’assistance judiciaire, a reçu le recours en réformation en la forme et, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté MonsieurXXX.

Les premiers juges ont justifié leur décision en décidant que l’actuel appelant, en sa qualité de personne originaire du Kosovo, déclarant avoir été victime de menaces de la part de deux inconnus en raison de sa déposition au sujet d’un accident de la circulation, n’a pas fait état d’éléments suffisants de nature à conclure dans son chef à un risque de persécution au sens de la Convention de Genève, en constatant que les agissements dont il a fait état relèvent d’une criminalité de droit commun insusceptible à justifier à elle seule un état de persécution au sens de la Convention de Genève. Le tribunal a encore retenu que l’actuel appelant a décrit une situation d’insécurité et de conflit généralisé dans son pays d’origine, sans toutefois lui soumettre un indice concret concernant une éventuelle incapacité actuelle des autorités compétentes de lui fournir une protection adéquate et sans même avoir allégué une démarche concrète de sa part en vue d’obtenir la protection desdites autorités.

En date du 15 décembre 2004, Maître Frank Wies, avocat à la Cour, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Monsieur XXX XXX, inscrite sous le numéro 19008C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelant reproche tout d’abord aux premiers juges de ne pas avoir pris en considération un rapport établi par l’UNHCR daté du 30 mars 2004 intitulé «UNHCR Position on international protection needs of individuals from Kosovo in light of recent inter-ethnic confrontations », dont il ressortirait que ce serait à bon droit qu’il déclare ne pas pouvoir bénéficier d’une protection appropriée de la part des autorités actuellement en place au Kosovo.

Quant à sa situation personnelle, il rappelle ses craintes de persécution en raison de menaces qu’il aurait reçues après avoir témoigné d’un accident de la circulation, en exposant que « là-bas ils sont tous armés et pour un mot de travers ils se tirent entre eux ». Il se réfère encore à un rapport d’Amnesty International établi pour l’année 2003 qui serait de nature à conforter sa crainte de subir des atteintes à son intégrité physique. Il expose qu’au Kosovo, il existerait une pratique courante d’intimidation à l’égard de témoins appelés à déposer dans des procédures dirigées contre d’anciens membres de l’UCK, contre lesquelles les autorités actuellement en place au Kosovo seraient dans l’incapacité de protéger les personnes concernées. Il soutient en outre qu’il serait faux de lui reprocher de ne pas avoir subi des persécutions notamment en raison de ses opinions politiques, alors qu’il y aurait lieu de tenir compte essentiellement du point de vue du persécuteur qui pourrait lui attribuer une opinion politique, active ou passive, en raison d’un certain comportement adopté par lui, à savoir, en l’espèce, le fait de témoigner sur le déroulement d’un accident de la circulation. Il craint subir le même sort que celui qui aurait été réservé au deuxième témoin du même accident, un dénommé Gjefdet, qui aurait été tué. Dans le dispositif de sa requête d’appel, l’appelant demande à la Cour d’acter de ce qu’il bénéficie de l’assistance judiciaire.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 11 janvier 2005, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à bon droit que les juges de première instance ont retenu que dans la mesure où l’appelant fait état de prétendus actes de persécution en raison de son témoignage fait à la police en relation avec un accident de la circulation dont il aurait été témoin, il n’a fait état que d’agissements relevant d’une criminalité de droit commun, laquelle, quelque soient la gravité et le caractère condamnable desdits actes, à les supposer établis, ne saurait justifier à elle seule un état de persécution au sens de la Convention de Genève. Dans ce contexte, il échet de relever que l’appelant n’a apporté un quelconque élément de nature à faire établir que l’auteur de l’accident de la circulation en question contre lequel l’appelant aurait témoigné a été un ancien membre de l’UCK.

Les premiers juges ont encore constaté à bon droit que l’appelant a essentiellement fait état d’une situation d’insécurité et de conflit généralisé dans son pays d’origine, sans apporter un quelconque indice concret quant à des actes de persécution personnelle dont il pourrait faire l’objet dans son pays d’origine.

En ce qui concerne la prétendue incapacité des autorités en place au Kosovo de lui fournir une protection appropriée, il y a lieu de relever que les juridictions administratives ne sont amenées à analyser un éventuel défaut de protection de la part desdites autorités qu’à partir du moment où elles arrivent à la conclusion que le demandeur d’asile peut légitimement craindre faire l’objet de persécutions de la part de particuliers ne faisant pas partie des autorités publiques. Or, comme tel n’est pas le cas en l’espèce, les juridictions administratives n’ont pas à analyser des questions ayant trait à la sécurité générale régnant dans le pays d’origine notamment du point de vue de la capacité des autorités publiques de faire face à des crimes de droit commun.

Il suit des considérations qui précèdent que la requête d’appel n’est pas fondée et qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris du 15 novembre 2004.

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

donne acte à l’appelant de ce qu’il déclare bénéficier de l’assistance judiciaire ;

reçoit la requête d’appel du 15 décembre 2004 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 15 novembre 2004 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelant aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Christiane Diederich-Tournay, premier conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 4


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 19008C
Date de la décision : 15/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-15;19008c ?

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