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10/03/2005 | LUXEMBOURG | N°18921C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 mars 2005, 18921C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18921 C Inscrit le 30 novembre 2004

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Audience publique du 10 mars 2005 Recours formé par Madame XXX XXX contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 10 novembre 2004, n° 18213 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite

sous le numéro 18921C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 30 novemb...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle : 18921 C Inscrit le 30 novembre 2004

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Audience publique du 10 mars 2005 Recours formé par Madame XXX XXX contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié - Appel -

(jugement entrepris du 10 novembre 2004, n° 18213 du rôle)

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Vu la requête d’appel, inscrite sous le numéro 18921C du rôle et déposée au greffe de la Cour administrative le 30 novembre 2004 par Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, assisté de Maître Renaud Le Squeren, avocat, au nom de Madame XXX XXX, née le 20 octobre 1970 à XXX (Fédération de Russie), de nationalité juive et de citoyenneté russe, demeurant actuellement à L-XXX, dirigée contre un jugement rendu par le tribunal administratif en date du 10 novembre 2004, par lequel il a déclaré non fondé le recours en réformation introduit contre une décision du ministre de la Justice du 9 avril 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que contre une décision confirmative du même ministre du 24 mai 2004, prise suite à un recours gracieux, tout en déclarant irrecevable le recours subsidiaire en annulation ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe de la Cour administrative le 21 décembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris ;

Ouï le conseiller en son rapport, Maître Renaud Le Squeren et Madame le délégué du Gouvernement Jacqueline Jacques en leurs plaidoiries respectives.

Par requête, inscrite sous le numéro 18213 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 11 juin 2004, Madame XXX XXX a fait introduire un recours tendant à la réformation, sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 9 avril 2004, rejetant sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée, ainsi que d’une décision confirmative du même ministre du 24 mai 2004, prise sur recours gracieux.

Par jugement rendu le 10 novembre 2004, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond, l’a déclaré non justifié et en a débouté Madame XXX et a déclaré irrecevable le recours subsidiaire en annulation.

Les premiers juges ont justifié leur décision en retenant que l’actuelle appelante, en sa qualité de ressortissante de la Russie, de nationalité juive, déclarant craindre des persécutions en raison de son appartenance ethnique et à la suite des activités politiques de son frère et avoir été persécutée par des individus à la recherche de ce dernier, a présenté un récit, à le supposer crédible, portant sur sa crainte de faire l’objet d’une vendetta de la part de Tchétchènes à cause de faits commis par son demi-frère contre d’autres Tchétchènes vraisemblablement au cours d’opérations militaires sans qu’elle n’ait établi que ces faits ne relèvent pas de la délinquance de droit commun. Le tribunal a encore décidé que même à supposer que l’actuelle appelante ait effectivement été persécutée en Russie par des Tchétchènes, partant par de simples particuliers et non pas par les autorités de son pays, ce qui demeure toutefois à l’état de simple allégation, il a constaté qu’elle n’a cependant pas démontré que les autorités administratives chargées du maintien de la sécurité et de l’ordre publics en place ne soient ni disposées ni capables de lui assurer un niveau de protection suffisant, étant entendu que les affirmations de l’appelante relatives à la corruption de la police restent à l’état de pures allégations.

En date du 30 novembre 2004, Maître Philippe Stroesser, avocat à la Cour, assisté de Maître Renaud Le Squeren, avocat, a déposé une requête d’appel en nom et pour compte de Madame XXX XXX, inscrite sous le numéro 18921C du rôle, par laquelle la partie appelante sollicite la réformation du premier jugement.

A l’appui de sa requête d’appel, l’appelante reproche aux premiers juges d’avoir commis une erreur d’appréciation des faits leur soumis, alors que ceux-ci auraient dû justifier dans son chef la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève. Elle estime en effet raisonnablement pouvoir craindre des persécutions de la part de deux Caucasiens qui lui auraient montré au cours du mois d’octobre 2002 des photos de son frère en tenue militaire en train de tirer sur des Caucasiens et elle expose qu’à la suite de son refus de fournir des informations à ces personnes sur son frère, elle aurait été menacée et frappée. Elle ajoute qu’au moment où elle aurait tenté de porter plainte contre ces individus, et à sa sortie du bureau de police, elle aurait à nouveau été agressée par des Tchétchènes et qu’à la suite de cette agression, elle aurait été hospitalisée pendant un mois. Elle précise encore qu’après avoir tenté de fuir à l’intérieur de son pays d’origine, en se rendant à Moscou, elle aurait été poursuivie par lesdits Tchétchènes qui l’y auraient retrouvé et qui lui auraient volé « ses papiers ». Elle n’aurait partant eu d’autre choix que de quitter la Russie en date du 29 mars 2003 en se rendant au Luxembourg, en passant par la Turquie. Enfin, elle soutient ne pas avoir pu bénéficier d’une protection appropriée de la police de son pays d’origine, de sorte qu’elle aurait été contrainte de fuir sa ville d’origine.

Dans son mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 21 décembre 2004, le délégué du Gouvernement conclut à la confirmation du jugement entrepris.

La requête d’appel est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délai prévus par la loi.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

C’est à bon droit que les juges de première instance ont décidé, après avoir procédé à une exacte appréciation des faits leur soumis, qui sont les mêmes que ceux soumis en instance d’appel, que les faits dont fait état l’appelante relèvent d’une criminalité de droit commun, dans la mesure où l’appelante n’a soumis un quelconque élément aux juges administratifs de nature à établir que ces actes relevant de la criminalité de droit commun aient été justifiés par un des motifs prévus par la Convention de Genève en vue de la reconnaissance du statut de réfugié.

Il ressort encore du récit de l’appelante que celle-ci a pu porter plainte devant les autorités compétentes au sujet des faits dont elle déclare avoir été la victime et il échet de relever dans ce contexte qu’elle n’a pas établi que les autorités en place dans son pays d’origine ne soient pas en mesure de lui fournir une protection appropriée contre de tels agissements.

En conclusion, il y a lieu de retenir que l’appelante a essentiellement fait état d’un sentiment général d’insécurité, insuffisant à lui seul à fonder la reconnaissance du statut de réfugié.

Il suit des considérations qui précèdent que c’est à bon droit que le tribunal administratif a déclaré non fondé le recours en réformation dirigé contre les décisions ministérielles incriminées, de sorte que la requête d’appel n’est pas fondée et que le jugement entrepris du 10 novembre 2004 est à confirmer.

Il y a encore lieu de donner acte à l’appelante, à la suite de la demande afférente formulée par le délégué du Gouvernement à l’audience des plaidoiries, que celle-ci a fait déclarer par l’intermédiaire de son mandataire au cours de l’audience publique qu’elle était d’accord à retourner volontairement dans son pays d’origine à la fin de la « procédure ».

Par ces motifs, La Cour administrative, statuant à l’égard de toutes les parties à l’instance ;

reçoit la requête d’appel du 30 novembre 2004 en la forme ;

la dit cependant non fondée et en déboute ;

partant confirme le jugement entrepris du 10 novembre 2004 dans toute sa teneur ;

donne acte à l’appelante de ce qu’elle a déclaré être d’accord à retourner volontairement dans son pays d’origine à la fin de la « procédure » ;

condamne l’appelante aux frais et dépens de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par :

Marion Lanners, présidente, Marc Feyereisen, conseiller, Carlo Schockweiler, conseiller, rapporteur, et lu par la présidente en l’audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en-tête, en présence du greffier en chef de la Cour Erny May.

le greffier en chef la présidente 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18921C
Date de la décision : 10/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-10;18921c ?

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