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09/03/2005 | LUXEMBOURG | N°19450

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 09 mars 2005, 19450


Tribunal administratif N° 19450 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 mars 2005 Audience publique du 9 mars 2005

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Requête en en sursis à exécution introduite par Monsieur … … et consorts contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 7 mars 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre

des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … et de son épouse, Madame … …-…, de leur enfant mine...

Tribunal administratif N° 19450 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 7 mars 2005 Audience publique du 9 mars 2005

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Requête en en sursis à exécution introduite par Monsieur … … et consorts contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 7 mars 2005 au greffe du tribunal administratif par Maître Gilles PLOTTKE, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … … et de son épouse, Madame … …-…, de leur enfant mineur … …, né le 6 avril 1989, ainsi que de Monsieur … …, demeurant ensemble à L-… …, …, avenue , tous de nationalité serbo-monténégrine, tendant à voir ordonner le sursis à exécution par rapport à une décision d'incompétence du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration, prise le 14 février 2005, pour examiner leur demande d'asile au motif que la compétence afférente reviendrait aux Pays-Bas, un recours en réformation, sinon en annulation dirigé contre la décision d'incompétence, inscrit sous le numéro 19449 du rôle, introduit le même jour, étant pendant devant le tribunal administratif;

Vu l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Maître Radu DUTA, en remplacement de Maître Gilles PLOTTKE, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Le 20 décembre 2004, Monsieur … … , son épouse, Madame … …-…, leur enfant mineur … …, né le 6 avril 1989, ainsi que Monsieur … …, tous de nationalité serbo-

monénégrine, ci-après dénommés "les consorts …", introduisirent oralement une demande en obtention du statut de réfugiés politiques auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères.

Par décision du 14 février 2005, le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration, se basant sur la disposition de l'article 16, paragraphe 1er du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de 2 détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, ci-après désigné par "le règlement n° 343/2003", se déclara incompétent pour connaître de la demande d'asile, soulignant que ce serait le royaume des Pays-Bas qui serait responsable du traitement de leur demande d'asile.

Les autorités luxembourgeoises ont dans la suite sollicité et obtenu, de la part des autorités néerlandaises, un engagement de reprise en charge des consorts ….

Par requête déposée le 7 mars 2005, inscrite sous le numéro 19449 du rôle, les consorts … ont introduit un recours tendant à la réformation, sinon à l'annulation de la décision d'incompétence du ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration du 14 février 2005, et par requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 19450 du rôle, ils sollicitent du président du tribunal administratif le sursis à exécution de la décision critiquée.

Dans la requête introductive d'instance, les demandeurs expliquent pour quelles raisons Monsieur … … a fui son pays d'origine avec sa famille et pourquoi ils s'estiment en droit d'obtenir le statut de réfugiés politiques. Aucune indication ne renseigne cependant sur l'itinéraire utilisé pour arriver finalement au Luxembourg, ni sur un séjour préalable ou une introduction d'une demande d'asile aux Pays-Bas ou ailleurs.

Les consorts … estiment que l'exécution de la décision incriminée leur causerait un préjudice grave et définitif. Ils font exposer qu'ils sont persécutés dans leur pays d'origine et qu'ayant reçu l'ordre de quitter le territoire des Pays-Bas, leur vie serait en danger dès qu'ils y retourneraient, les autorités néerlandaises ne manquant pas de les renvoyer vers leur pays d'origine une fois transférés aux Pays-Bas. De plus, Madame …-… souffrirait d'une profonde dépression ne lui permettant plus un nouveau déplacement aux conséquences incertaines. Ils sont par ailleurs d'avis que les moyens invoqués à l'appui de leur recours au fond sont sérieux, étant donné qu'en vertu de l'article 16, par. 4 du règlement 343/2003, la compétence en la matière ne reviendrait plus aux Pays-Bas qui leur auraient formellement ordonné de quitter leur territoire, de sorte la compétence de l'examen de leur demande d'asile reviendrait de nouveau au Luxembourg.

Le délégué du gouvernement conteste tant le risque de préjudice grave et définitif que l'existence de moyens sérieux au fond. Il verse des pièces dont il ressort qu'avant d'introduire une demande d'asile au Luxembourg, les consorts … avaient déjà déposé des demandes similaires en Belgique et aux Pays-Bas.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux.

En l'espèce, les consorts … restent en défaut de prouver en quoi la décision d'incompétence et l'exécution de la décision de reprise par les autorités néerlandaises risqueraient de leur causer un préjudice grave et définitif.

Aux termes de son premier considérant, le règlement n° 343/2003, précité, considère qu'une politique commune dans le domaine de l'asile, incluant un régime d'asile européen commun, est un élément constitutif de l'objectif de l'Union européenne visant à mettre en 3 place progressivement en espace de liberté, de sécurité et de justice ouvert à ceux qui, poussés par les circonstances, recherchent légitimement une protection dans la Communauté. Tablant sur l'équivalence des procédures devant assurer la protection des demandeurs d'asile applicables dans les différents Etats membres, le règlement en question fixe des règles de compétence en vue de déterminer l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile émanant d'un ressortissant d'un Etat tiers. Il s'ensuit qu'un demandeur d'asile ne saurait se prévaloir d'un préjudice quelconque qu'il risquerait de subir au cas où sa demande d'asile serait examinée dans un Etat membre plutôt que dans un autre. Par conséquent, le seul fait que le ministre des Affaires étrangères et de l'Immigration luxembourgeois se soit déclaré incompétent en faveur des autorités néerlandaises n'est pas de nature à causer un préjudice aux consorts ….

Ceux-ci se prévalent encore de ce qu'ils ont vu leur demande d'asile rejetée par les autorités néerlandaises et qu'ils risquent de se voir renvoyer vers leur pays d'origine au cas où ils seraient repris par ces autorités.

Indépendamment de la véracité de cette affirmation qui ne ressort pas d'une quelconque pièce du dossier, cette argumentation ne saurait valoir à son tour. En effet, l'article 16, paragraphe 1er, sub e) du règlement n° 343/2003 prévoit que l'Etat membre qui a rejeté la demande d'asile du ressortissant d'un Etat tiers qui se trouve, sans en avoir reçu la permission, sur le territoire d'un autre Etat membre, est obligé de reprendre ledit ressortissant, ce qui implique logiquement qu'un tel rejet d'une demande d'asile dans un Etat membre produit ses effets dans les autres Etats membres. Admettre le contraire priverait de toute justification les règles de compétence établies par le règlement précité et les priverait par ailleurs de toute efficacité en ce qu'un demandeur d'asile débouté dans un Etat membre pourrait tenter d'obtenir l'asile politique dans chacun des autres Etats membres, dans le cadre de procédures successives, sur base de mêmes faits et arguments ayant motivé la demande initiale.

Concernant le sérieux des moyens invoqués à l'appui de la demande au fond, il n'apparaît pas, au stade actuel de l'examen de ceux-ci, que l'argument invoqué en substance, tiré de ce qu'au vu du rejet de leur demande d'asile par les autorités néerlandaises, celles-ci ne seraient plus compétentes pour la reprise des demandeurs, soit de nature à emporter la conviction, étant donné que l'article 16, par. 4 du règlement n° 343/2003 dispose que l'obligation de reprise cesse dès l'instant que l'Etat membre normalement compétent a pris et effectivement mis en œuvre les dispositions nécessaires pour que le ressortissant d'un pays tiers se rende dans son pays d'origine, hypothèse non remplie en l'espèce.

Les demandeurs n'ayant pas établi que l'exécution des décisions entreprises risque de leur causer un préjudice grave et définitif, et le moyen invoqué à l'appui de leur demande au fond n'apparaissant pas, au stade actuel de l'instruction de l'affaire, comme suffisamment sérieux, la demande de sursis à exécution est à rejeter.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, déclare la demande de sursis à exécution non fondée et en déboute, 4 condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 9 mars 2005 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 19450
Date de la décision : 09/03/2005

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2005-03-09;19450 ?

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