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07/12/2004 | LUXEMBOURG | N°18887

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 07 décembre 2004, 18887


Tribunal administratif N° 18887 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 novembre 2004 Audience publique du 7 décembre 2004

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur …, Luxembourg et consorts contre une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 18887 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 novembre 2004 par Maître Charles OSSOLA, avoc

at à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) Monsieur …, de...

Tribunal administratif N° 18887 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 19 novembre 2004 Audience publique du 7 décembre 2004

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Requête en sursis à exécution introduite par Monsieur …, Luxembourg et consorts contre une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 18887 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 19 novembre 2004 par Maître Charles OSSOLA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de 1) Monsieur …, demeurant à L-…;

2) Madame … 3) Monsieur … 4) Monsieur … 5) Madame … 6) Madame… ainsi désignés tendant à ordonner le sursis à exécution par rapport à une décision du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 19 août 2004, portant autorisation de construire d’un immeuble résidentiel à 28 logements sur la propriété sise 18, 20 et 22, … à Luxembourg, cette décision étant attaquée au fond par une requête en annulation introduite le même jour, portant le numéro 18888 du rôle;

Vu l'exploit de l'huissier de justice suppléant Geoffrey GALLE, en remplacement de l’huissier de justice Pierre BIEL, les deux demeurant à Luxembourg du 22 novembre 2004, portant signification de cette requête en sursis à exécution à l'administration communale de la Ville de Luxembourg ainsi qu’à la société anonyme Ets … S.A., établie et ayant son siège social à L-…;

Vu l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée au fond ;

Ouï Maître Chrales OSSOLA, ainsi que Maître Christian POINT, en remplacement de Maître Jean MEDERNACH, avocat de l'administration communale de Luxembourg, de même 2 que Maîtres Alain RUKAVINA et Annick BRAUN, avocats de la société anonyme Ets … … S.A. en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 1er décembre 2004.

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Considérant que par décision du 27 janvier 2004 le bourgmestre de la Ville de Luxembourg a conféré l’accord de principe numéro 101.AP.2003 à la société anonyme Etablissement … S.A., ci-après la « société … » « pour la construction d’un immeuble à caractère résidentiel sur une parcelle regroupée sise aux abords de la … à Luxembourg » s’agissant plus particulièrement des parcelles inscrites au cadastre de la Ville de Luxembourg ancienne commune de Hamm, section HaA de Hamm, portant les numéros cadastraux … (place 21 ares 9 centiares et 144/4205 (maison-place, 52 ares 25 centiares) longeant la … à Luxembourg-Cents, sous les conditions y plus amplement émargées ;

Que parmi les conditions en question figurent notamment celle de soumettre endéans 12 mois le projet définitif sous peine de voir l’accord de principe perdre tous ses effets (condition numéro 2) et celle de présenter une demande de morcellement avec indication des cessions éventuelles en bordure de trottoirs (condition numéro 4) ;

Qu’en date du 4 août 2004 a été publiée au Mémorial la loi du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, entrée en vigueur 4 jours après sa publication, soit le 8 août 2004, à défaut de disposition spéciale de mise en vigueur contraire, cette loi abrogeant à travers à son article 110 la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes ;

Que sur demande présentée en date du 28 mai 2004 au nom de la société …, le bourgmestre de la Ville de Luxembourg, par décision du 19 août 2004 (n° 453.2A.2004-

référence n° 9/537/2002) a accordé l’autorisation de construire un immeuble résidentiel à 28 logements sur la propriété précitée sise 18, 20 et 22 … à Luxembourg sous les conditions y plus amplement émargées ;

Que se trouve incorporé à cette autorisation de bâtir un plan de morcellement ainsi désigné portant regroupement des parcelles numéros 144/4204 et 144/4205 prédésignées, établi par l’ingénieur géomètre officiel … en date du 17 juin 2003 et documentant la parcelle regroupée sous le lot 1 d’une contenance de 67 ares 34 centiares ainsi que sous le lot numéro 2 une parcelle d’un are 41 centiares se situant le long de la parcelle cadastrée sous le numéro 142/5043 ;

Considérant que par requête déposée en date du 19 novembre 2004, inscrite sous le numéro 18888 du rôle Monsieur …, Madame…, Monsieur…, Monsieur…, Madame …et Madame…, ainsi désignés, appelés ci-après « Monsieur … et consorts » ont introduit un recours en annulation contre l’autorisation de construire du bourgmestre de la Ville de Luxembourg du 19 août 2004, et par requête du même jour, inscrite sous le numéro 18887 du rôle, ils ont introduit une requête tendant à ordonner le sursis à exécution de la décision en question ;

Considérant que le mandataire de la société … se rapporte à prudence de justice concernant la validité sinon la recevabilité de la requête en sursis à exécution en ce que pour toutes les parties requérantes les prénoms ne sont pas indiqués et que pour aucune d’elles la profession n’y figure, estimant que la partie tierce intéressée société … subit de la sorte un 3 préjudice concernant l’exercice des droits de la défense, ne sachant pas avec exactitude à qui elle a à faire ;

Considérant que le juge du provisoire est amené à contrôler la régularité de la requête introductive d’instance ainsi que la recevabilité de la demande en obtention du sursis à exécution portée devant lui ;

Considérant que l’article 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée porte que la requête introductive d’instance contient « les noms, prénoms et domicile du requérant » ;

Considérant que la loi n’exigeant point l’indication de la profession de la partie requérante dans le cadre de la requête introductive d’instance, le grief afférent de la tierce intéressée saurait porter à sa conséquence ;

Considérant que l’article 29 de ladite loi modifiée du 21 juin 1999 porte que « l’inobservation des règles de procédure n’entraîne l’irrecevabilité de la demande que si elle a pour effet de porter effectivement atteinte aux droits de la défense » ;

Considérant que s’il est vrai que tous les prénoms des parties demanderesses ne figurent pas dans la requête introductive d’instance au provisoire, il n’en reste pas moins, même à défaut pour le mandataire des demandeurs a suppléer à cette carence de façon spontanée en cours de délibéré, que de toute façon à partir des communications entre parties à un stade précontentieux, les demandeurs en question étaient connus, sinon reconnaissables par les parties intéressées, de sorte qu’aucun grief valable concernant l’exercice des droits de la défense de la partie tierce intéressé ne peut être décelé à ce stade ;

Que dès lors le moyen est à rejeter sur base des dispositions de l’article 29 précité.

Considérant qu’il est constant que les requêtes introductives d’instance ont été introduites exactement 3 mois après la date de délivrance de l’autorisation critiquée, de sorte à rentrer dans le délai légal de même que l’intérêt à agir des demandeurs, lesquels ne sont point voisins directs, se trouve cependant vérifié à suffisance de droit, en tant que voisins médiats, compte tenu de l’envergure de la construction projetée et de l’absence de contestation précise formulée à ce stade à leur encontre ;

Que dès lors la requête en obtention du sursis à exécution est recevable en la forme pour avoir été pour le surplus introduite suivant les formes prévues par la loi ;

Considérant qu’à l’appui de leur recours en annulation les demandeurs font valoir une série de six moyens repris dans le cadre de la requête en effet suspensif pour justifier du sérieux des moyens y émargés ;

Que les moyens en question se résument comme suit :

- Qu’il y aurait violation des articles 105 et 106 de la loi du 19 juillet 2004 lesquels prévoient que tout promoteur qui veut procéder au lotissement, relotissement ou morcellement de parcelles est soumis à l’obligation d’élaborer un plan d’aménagement particulier, conformément à la procédure prévue au chapitre 3 du titre 4 de ladite loi, lorsque le but de l’opération est d’aliéner et/ou de louer un ou plusieurs lots en vue de la mise en œuvre des dispositions du plan d’aménagement général afférent ;

4 Que si au niveau de la requête introductive d’instance les demandeurs concluent au défaut d’existence de pareille autorisation de morcellement, faute de mention afférente dans la décision déférée au fond, ils ont complété leur argumentaire en ce sens que l’autorisation de morcellement faisant partie intégrante de la décision déférée ne suffirait pas aux exigences des articles 105 et 106 de la loi du 19 juillet 2004 précitée en ce qu’aucun plan d’aménagement particulier n’a été élaboré en l’espèce ;

- Qu’il y aurait violation du titre 4 de la loi du 19 juillet 2004 et plus particulièrement des articles 26 et 27 aux termes desquels en principe un plan d’aménagement particulier est requis pour les terrains devant accueillir une construction à autoriser, à moins que les terrains en question ne fassent partie de ceux définis dans le plan d’aménagement général pour lesquels pareille obligation n’est pas applicable ;

Qu’en l’espèce aucune exception pareille ne serait prévue par le plan d’aménagement général concernant les terrains devant accueillir la résidence projetée, de sorte que contrairement aux dispositions combinées des articles 26 et 27 l’élaboration de pareil plan d’aménagement particulier aurait été obligatoire ;

Que la carence afférente de la société … devrait entraîner l’annulation pour violation de loi de la décision déférée ;

- Qu’il y aurait violation de l’article 37 de la loi du 19 juillet 2004 pris en ses alinéas 1er et second en ce que les plan d’aménagement particulier et projet de relotissement y prévus n’auraient pas été valablement pris, élément conditionnant cependant l’existence même de l’autorisation de bâtir déférée ;

Que de même l’alinéa 3 de l’article 37 serait violé en ce qu’aucune convention spéciale telle celle y prévue n’existerait concernant la viabilisation de la construction projetée au regard des travaux de voirie et d’équipements publics nécessités ;

- Qu’il y aurait violation de l’article 35 de la loi du 19 juillet 2004 pris en ses paragraphes 1er et second en ce que le projet d’exécution y prévu relativement au plan d’aménagement particulier à fournir n’existerait point, ni n’aurait été soumis aux autorités compétentes pour approbation ;

- Que les demandeurs de conclure à la violation des dispositions de la partie écrite du plan d’aménagement général de la Ville de Luxembourg, ci-après « le PAG » et de son règlement sur les bâtisses, ci après « le Rb » ;

Que plus particulièrement il y aurait violation de l’article 57.2 Rb en ce que l’accord de principe y exigé ne serait pas repris dans les visas de la décision déférée ;

Qu’il y aurait encore violation des articles 59 à 62 Rb, dans la mesure où les projet d’aménagement particulier et autorisation de morcellement impérativement requis feraient défaut ;

Que l’article 62.4 Rb serait violé en ce que les plans ne fourniraient pas de données sur les installations de ventilation, les foyers et les cheminées ;

5 Qu’enfin il y aurait violation de l’article 52.5 Rb alors que les différentes indications requises et énumérées ne seraient pas reprises sur ces plans concernant notamment les façades et murs extérieurs, les hauteurs et épaisseurs des murs de clôture ;

- Qu’il y aurait violation de l’article A.0.10 PAG en ce que contrairement aux exigences y portées de la construction située en deuxième position ne justifierait pas d’un accès imprenable à partir de la voie desservante permettant le passage des véhicules d’intervention urgente ;

Que de même la maquette volumétrique à l’échelle 1 : 200 y prévue ne serait pas jointe au dossier, ni présentée ;

Que dans la mesure où la résidence en deuxième position n’aurait pas été réalisable aucune transposition des volumes conformément aux dispositions de l’article A.0.9 PAG n’aurait pu être valablement opérée en l’espèce ;

Qu’il s’agirait en l’occurrence de la construction d’un bâtiment à 3 blocs d’une profondeur totale de 53,21 mètres sur une largeur de 22,95 mètres conçu en violation des dispositions du paragraphe A. 2 PAG valables pour les zones d’habitation H2 ;

Que les demandeurs de mettre encore en doute la validité de la hauteur émargée de la construction projetée au regard des dispositions de l’article A.2.4 PAG ainsi que le côté pertinent des dispositions dérogatoires appliquées sous le couvert de l’article A.2.6 PAG lesquelles seraient d’interprétation stricte ;

Que dans la mesure où l’entourage direct du projet comprendrait des maisons individuelles, celui-ci ne s’intégrerait pas de façon harmonieuse dans l’ensemble de la zone ;

Qu’ainsi il ne résulterait point du projet qu’aucune gêne anormale pour les propriétés voisines n’existerait, compte tenu du volume total du projet s’évaluant par 3000 m3 ;

Qu’enfin, eu égard à l’importance du projet, un exposé des règles de sécurité même très succinct aurait dû être annexé à la décision attaquée, élément qui ferait cependant défaut ;

Considérant que le mandataire de la Ville de retenir en premier lieu que la loi du 19 juillet 2004 consacrerait expressément la survivance des plans d’aménagement généraux et particuliers ancienne formule, que dès lors au regard des dispositions de l’article 37 de ladite loi une autorisation de bâtir aurait pu être délivrée à travers les dispositions exécutoires du plan d’aménagement général de la Ville, se suffisant à elles-mêmes, sans qu’aucun recours à un plan d’aménagement particulier n’aurait été exigé en l’espèce ;

Que pareil plan d’aménagement particulier ne serait point requis sous l’ancienne réglementation alors que la construction projetée ne tomberait, d’après les anciennes dispositions, pas sous celles pour lesquelles un plan d’aménagement particulier serait obligatoirement exigé ;

Que la construction en question étant réalisée sur base des dispositions des articles A.0.9 et A.0.10 PAG par le biais d’une transposition de volumes, aucune utilité de recourir en plus à un plan d’aménagement particulier ne serait entrevue sous peine de rendre sans effet les deux articles prévisés ;

6 Que suivant lecture de la Ville, la survivance des plans d’aménagement généraux et particuliers, de même que du règlement des bâtisses de la Ville s’inscrirait dans les dispositions de l’article 108 de la loi du 19 juillet 2004 en ce qu’elle serait possible dans la mesure où seulement dans les six ans à partir de l’entrée en vigueur de la nouvelle loi la Ville serait obligée d’adopter un nouveau PAG et que les modifications en cours seraient à achever dans les 12 mois de l’entrée en vigueur de la même loi ;

Que suivant la Ville les dispositions des articles 26 et 27 de la loi du 19 juillet 2004 ne concerneraient que les PAG nouvelle formule à l’exclusion des PAG ayant survécu depuis l’ancienne réglementation ;

Que la volonté du législateur n’aurait en aucun cas pu être celle de bloquer entièrement la situation ;

Que selon la Ville, en l’absence de règlements d’exécution (les règlements grand-

ducaux d’exécution ont été pris le 25 octobre 2004 et publiés le 18 novembre 2004 notamment concernant le contenu des PAG et PAP) le bourgmestre, s’il n’avait pas délivré l’autorisation de construire tel qu’il l’a fait sur base de la réglementation communale d’urbanisme survivante (PAG et Rb), se serait trouvé dans une situation de blocage parfait, laquelle ne saurait être analysée comme correspondant à la volonté du législateur ;

Que l’absence même de pareils règlements grand-ducaux d’exécution à la date de la prise de la décision déférée aurait été de nature, dans le chef des propriétaires concernés d’engendrer une mise en échec du droit de propriété pourtant consacré par l’article 16 de la Constitution et les dispositions de l’article 544 du code civil ;

Que le mandataire de la Ville de souligner par la suite que le bourgmestre, à travers la longue procédure ayant abouti à la décision déférée en passant par l’accord de principe du 27 janvier 2004, aurait respecté les dispositions de la réglementation communale d’urbanisme applicable, notamment les articles A.09 et A.010 PAG de même que les dispositions relatives à la zone H2, étant entendu qu’une maquette 1 :200 existerait en l’espèce telle qu’elle serait documentée par les pièces versées au nom de la Ville ;

Considérant que les mandataires de la société … d’admettre que la décision déférée a été prise sous l’empire de la loi du 19 juillet 2004 en vigueur à la date du 19 août 2004 ;

Que dès lors le bourgmestre aurait eu le choix soit, suivant la thèse des demandeurs, d’appliquer à la lettre les dispositions des articles 26, 27, 37 et 108 de la loi du 19 juillet 2004, de sorte à consacrer l’exigence d’un plan d’aménagement particulier avant tout autre progrès en cause, signifiant que la situation de l’espèce aurait été bloquée de même que celle de plus au moins 90 % des autorisations de construire demandées sur le territoire de la Ville, seules 10 % des parcelles de la Ville étant couvertes par un plan d’aménagement particulier, étant entendu que les règlements grand-ducaux d’exécution n’ont été publiés que le 18 novembre 2004 ;

Que cependant le bourgmestre aurait suivi la thèse actuellement défendue par la Ville de Luxembourg et la société … en ce que s’il y avait lieu d’appliquer la loi du 19 juillet 2004 il importerait également de passer par son article 108 ;

7 Qu’à ce niveau deux interprétations seraient possible à savoir, en premier lieu, à partir de l’article 108 (1) le bourgmestre serait en droit de continuer à appliquer tel quel le PAG de la Ville de Luxembourg pendant la période transitoire de 6 ans y prévue ensemble les dispositions du règlement sur les bâtisses et notamment les dispositions dérogatoires qui seraient telles que dans la zone de l’espèce (zone H 2) l’établissement d’un plan d’aménagement particulier ne serait pas requis ;

Que dès lors en l’espèce la dispense d’un PAP résulterait non de l’article 27 de la loi du 19 juillet 2004 mais exclusivement du PAG même de la Ville ;

Que suivant les mandataires de la société … l’application directe des articles 26 et 27 de la loi du 19 juillet 2004 serait en contradiction flagrante avec les dispositions de son article 108 (1) permettant une application du PAG existant pendant une période transitoire de 6 ans sans exiger une adaptation ou un amendement du PAG pour le rendre conforme aux exigences desdits articles 26 et 27 ;

Qu’une seconde interprétation possible irait dans le sens de la combinaison des paragraphes 1er et 2 de l’article 108 aboutissant à l’application de la période transitoire de 12 mois prévue par l’article 108(2) dans le chef de la société … engagée dans cette hypothèse en une procédure d’approbation du PAP dans le cadre de la période transitoire de 12 mois y prévue ;

Que juger le contraire mettrait la société … dans une situation moins favorable que celle d’un administré qui, sans bénéficier d’un régime de dispense, aurait eu l’obligation de procéder à un plan d’aménagement particulier, mais qui bénéficierait aujourd’hui d’un régime transitoire prévu par la loi, pareille situation ne pouvant, suivant la partie tierce intéressée, correspondre à l’intention du législateur ;

Qu’en ordre subsidiaire, en combinaison des articles 27 et 108 (1) de la loi du 19 juillet 2004, si l’hypothèse de la thèse des demandeurs était vérifiée, il appartiendrait aux juges du fond d’analyser, tout en retenant que le PAG de la Ville de Luxembourg reste valable pendant une période transitoire de 6 ans conformément à l’article 108 (1), si les exceptions de son article 27 ne sont pas immédiatement applicables ;

Qu’à ce stade de la procédure, sans devoir faire une analyse au fond, il y aurait lieu de dire que le projet litigieux répondrait à l’exception et aux conditions de l’article 27 en question ;

Que les mandataires de la partie tierce intéressée de souligner encore, explications à l’appui, que le projet litigieux correspondrait en tous points aux dispositions du plan d’aménagement général et du règlement sur les bâtisses de la Ville de Luxembourg, par rapport auxquelles les demandeurs l’auraient critiqué, de sorte que les moyens afférents ne seraient point pertinents ;

Considérant qu’en vertu de l'article 11 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer aux requérants un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, le sursis étant rejeté si l'affaire est en état d'être plaidée et décidée à brève échéance.

8 Considérant que l’affaire ayant été introduite le 19 novembre 2004 et compte tenu du nombre et de la complexité des moyens soulevés, ainsi que des délais légaux d’instruction fixés par la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée, l’affaire ne saurait être considérée comme pouvant être plaidée à brève échéance ;

Considérant que les parties ne mettent pas sérieusement en cause le caractère vérifié de la première condition d’attribution d’un sursis à exécution consistant dans l’existence dans le chef des demandeurs d’un préjudice grave et définitif en l’espèce ;

Considérant qu’en effet les demandeurs risquent un préjudice grave et définitif en cas de réalisation de travaux de construction jusqu’à l’intervention de la décision définitive au fond, étant donné qu’en vertu d’une jurisprudence constante, récemment réaffirmée avec vigueur, les juridictions judiciaires refusent d'ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d'une autorisation administrative annulée dans la suite, au motif que le fait de construire sous le couvert d'une autorisation de construire qui se trouve annulée dans la suite ne constitue pas le maître de l'ouvrage en faute, que, par conséquent, il n'y a aucune responsabilité civile dans le chef de celui qui a construit et que, dans ces conditions, il ne saurait y avoir de réparation du préjudice, ni en nature moyennant démolition de l'ouvrage construit illégalement, ni d'ailleurs par équivalent (v. Cour d'appel 30 juin 1993, n° 13662 du rôle; 11 janvier 1995, n° 15963 du rôle; 8 juillet 2004, n° 27531 du rôle).

Considérant que la seconde condition d’attribution d’un sursis à exécution consiste dans la vérification de l’apparence sérieuse à ce stade des moyens présentés par les demandeurs ;

Considérant qu’il y a lieu de souligner que le juge du provisoire appelé à apprécier le sérieux des moyens invoqués ne saurait les analyser et discuter à fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond ;

Considérant qu’il est patent pour découler directement de la loi du 19 juillet 2004 elle-

même que celle-ci a abrogé, à travers son article 110, la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes sauf les procédures d’adoption et d’approbation de plans d’aménagement général ou particulier en cours au moment de l’entrée en vigueur de ladite loi du 19 juillet 2004, lesquels, d’après son article 108 (2) sont appelés à suivre les dispositions de l’ancienne loi de 1937 pour autant qu’elles puissent être achevées dans un délai de 12 mois suivant ladite entrée en vigueur, étant entendu que passé ce délai une nouvelle procédure d’adoption devra être engagée conformément aux dispositions de l’article 108 (2) en question ;

Qu’il appert encore que pour le surplus aucune disposition transitoire n’existe dans la loi du 19 juillet 2004 pour toiser la situation sous revue concernant l’autorisation de bâtir demandée sous l’empire de la loi du 1937 et accordée sous l’empire de celle de 2004 ;

Que s’il semble acquis que la loi du 19 juillet 2004 s’applique telle quelle à partir de son entrée en vigueur, 8 août 2004, aucune disposition légale transitoire ne prévoit cependant que la réglementation communale d’urbanisme ancienne laissée en vigueur - en l’espèce les PAG et Rb de la Ville de Luxembourg, ainsi que les plans d’aménagement particuliers pour autant qu’ils existent – s’applique nécessairement telle quelle durant la période transitoire de 6 9 ans prévue à l’article 108 (1) en attendant la refonte du PAG, et ce sans aucune interférence des dispositions de la loi nouvelle applicable ;

Considérant que sous ces aspects combinés la démarche des demandeurs consistant à voir appliquer textuellement et sans distinction autre que celle prévue par ledit texte légal les dispositions des articles 26, 27, 37, 108 et 110 de la loi du 19 juillet 2004 emporte que, pour autant que le PAG (non autrement précisé par la loi nouvelle) n’en dispose pas autrement et ne prévoit une exception y relative, un plan d’aménagement particulier aurait été requis en l’espèce ;

Considérant que cette démarche semble encore rencontrer a priori non seulement les règles abrogatoires, transitoires et de mise en vigueur ci-avant citées, mais encore les principes généraux d’interprétation des dispositions légales et réglementaires applicables ;

Qu’il est acquis qu’avant toute interprétation le juge est amené à appliquer les dispositions légales suivant le sens premier qu’elles revêtent dans la mesure où elles sont claires et précises ;

Qu’ainsi, en présence d’un texte clair et précis, ni le recours à un texte antérieur que le texte invoqué remplace, ni les avis et opinions exprimés au niveau des travaux parlementaires préparatoires du texte, ni encore des réflexions de politique législative ne sauraient entrer en ligne de compte (trib. adm. 12 janvier 1999, n° 10800 du rôle, Pas. adm. 2004, V° Lois et Règlements, n° 45, p. 490 et autres décisions y citées) ;

Que l’application textuelle du texte clair et précis par le juge ne saurait trouver exception que dans la mesure où il aboutirait à une situation absurde, contraire à toute logique, bref au bon sens même ;

Considérant que force est au juge du provisoire de retenir à l’encontre des deux premiers moyens développés par les demandeurs concernant l’exigence d’un plan d’aménagement particulier, à la fois pour la délivrance de l’autorisation de bâtir et pour celle de l’autorisation de regroupement (morcellement) que la première contient, que ces moyens revêtent pour le moins un caractère sérieux en ce qu’ils rencontrent a priori la lettre des dispositions de la loi du 19 janvier 2004 précitée, y compris les dispositions abrogatoires, modificatives et transitoires y figurant pour le surplus, sauf la question de l’effet pratique engendré en cas d’application littérale s’imposant dans un premier stade ;

Que cette dernière question ayant trait à l’effet pratique engendré rejoint celle soulevée par la Ville et la société … concernant le blocage absolu de la situation pour le cas où l’on suivrait la thèse des demandeurs, situation contraire, suivant ces parties, à la volonté du législateur ;

Considérant que si la volonté non exprimée dans un texte légal du législateur ne saurait primer sur le libellé clair et précis du texte par lui confectionné, l’effet absolument contraire au bon sens et à toute logique engendré par une lecture littérale dudit texte légal, -

cet effet fût-il vérifié au fond – serait le cas échéant susceptible de faire pencher le juge du fond vers une interprétation du texte de nature à lui conférer un effet utile ;

Que toutefois l’appréciation de pareille façon de procéder du juge du fond ne fait en l’espèce que confirmer le sérieux des deux premiers moyens invoqués, devant engendrer, au-

10 delà d’une première approche d’application littérale du texte par la juridiction collégiale, une interprétation de nature à dégager un effet utile pour la nouvelle loi ;

Considérant que le sérieux des deux premiers moyens soulevés par les demandeurs est encore accentué par la donnée constante qu’à la date où le bourgmestre a été amené à statuer, date de cristallisation de l’analyse du mérite au fond du recours en annulation à opérer par le tribunal, aucun règlement grand-ducal d’exécution n’avait encore vu le jour, ceux-ci datant du 19 octobre 2004, étant constant qu’ils n’embrassent a priori pas encore l’entièreté de la situation sur le terrain, notamment au regard des personnes habilitées à procéder à l’élaboration d’un plan d’aménagement particulier ;

Considérant que si les développements autour d’un blocage en fait de la situation suivant l’application textuelle des dispositions de la loi du 19 juillet 2004 prise plus particulièrement en ses articles 26, 27, 37, 108 et 110 relèvent de données de fait et ne conditionnent qu’indirectement l’analyse juridique à opérer, il n’en reste pas moins qu’une intervention du législateur, souhaitée en filigrane par les parties au litige, de nature à clarifier la situation des demandes d’autorisation de bâtir à cheval, en ce qu’elles ont été introduites sous l’empire de l’ancienne législation, de même que de celles introduites avant la refonte des PAG prévue par l’article 108 (1) de la nouvelle loi, ne conditionnerait en l’espèce encore qu’indirectement l’analyse de l’affaire au fond, dans la mesure où celle-ci se cristallise dans le temps à la date de la prise de la décision déférée – le 19 août 2004 - et qu’une disposition transitoire ajoutée par le législateur pour clarifier la situation, sauf à la rendre rétroactive moyennant le cas échéant le recours à une loi interprétative, ne vaudrait que pour l’avenir ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble des développements qui précèdent, que rien que les deux premiers moyens tenant à l’application textuelle des dispositions des articles 26, 27, 37, 108 et 110 de la loi du 19 juillet 2004 concernant la nécessité d’un plan d’aménagement particulier, inexistant en l’espèce, à la fois au regard de la délivrance même de l’autorisation de bâtir et de celle de l’autorisation de regroupement (morcellement) de terrains y incorporée, revêtent à suffisance de droit un caractère sérieux sans qu’il n’y ait lieu de pousser plus loin à ce stade l’analyse des autres moyens proposés, le tout sans préjudice de la solution à dégager définitivement au fond par la ou les juridiction(s) collégiale(s) appelée(s) à le toiser ;

Considérant que les deux conditions cumulatives prévues par l’article 11 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 étant vérifiées en l’espèce, la demande en effet suspensif se trouve être fondée ;

Considérant que le juge du provisoire peut, suivant les circonstances spécifiques d’une espèce, ordonner à titre complémentaire une instruction accélérée de l’affaire au fond, notamment si, comme en l’occurrence, la mesure de suspension prononcée risque de contribuer à un blocage complet de la situation sur le terrain ;

Considérant qu’en fait, un risque concret de blocage de la situation sur le terrain n’est point à nier, tout comme une solution venant du législateur n’a pas encore été concrètement envisagée, d’après les informations fournies au tribunal ;

Considérant qu’il est patent que les mandataires des parties, d’après les conclusions exposées devant le juge du provisoire, ont déjà passablement instruit le dossier en droit ;

11 Considérant que d’après l’article 5 (8) de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée « dans les affaires urgentes, les délais peuvent être abrégés par ordonnance du président du tribunal. La demande en abréviation des délais est signifiée ou notifiée aux autres parties. Le président rend une ordonnance non susceptible de recours après avoir entendu les parties ou les avoir dûment appelées » ;

Considérant que dans l’hypothèse où l’urgence d’une affaire a été dégagée dans le cadre de l’analyse d’une requête en effet suspensif par le président du tribunal ou son remplaçant, ce dernier peut être amené à engager en conséquence la procédure en abréviation des délais prévue à l’article 5 (8) prérelaté ;

Que devant l’urgence dégagée sur base des développements qui précèdent, il importe dès lors d’appeler les parties en chambre du conseil afin de statuer plus en avant sur une abréviation des délais d’instruction de l’affaire au fond ;

Par ces motifs, le soussigné, premier vice-président du tribunal administratif, siégeant en remplacement du président légitimement empêché, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit la demande en sursis à exécution en la forme, la dit également justifiée, partant dit qu’il sera sursis à l’exécution de l’autorisation de construire n° 453.2A.2004 délivrée par le bourgmestre de la Ville de Luxembourg en date du 19 août 2004 dans l’intérêt de la société … S.A. en attendant la solution du litige au fond, actuellement pendant devant le tribunal administratif et portant le numéro 18888 du rôle ;

convoque les mandataires des parties en la chambre du conseil à la date du jeudi 9 décembre 2004 à 16.00 heures aux fins de statuer plus en avant sur une abréviation des délais d’instruction de l’affaire au fond, conformément aux dispositions de l’article 5 (8) de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée ;

réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 7 décembre 2004 par M. Delaporte, premier vice-président du tribunal administratif, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18887
Date de la décision : 07/12/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-12-07;18887 ?

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