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08/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18676

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 08 octobre 2004, 18676


Tribunal administratif N° 18676 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 septembre 2004 Audience publique du 8 octobre 2004

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Requête en sursis à exécution introduite par les époux … … et … …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 29 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Alex KRIEPS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à L

uxembourg, au nom de Monsieur … …, consultant, et de son épouse, Madame … …, employée privée, les deux deme...

Tribunal administratif N° 18676 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 29 septembre 2004 Audience publique du 8 octobre 2004

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Requête en sursis à exécution introduite par les époux … … et … …, … contre une décision du bourgmestre de la commune de … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 29 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Alex KRIEPS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, consultant, et de son épouse, Madame … …, employée privée, les deux demeurant ensemble à L-… … , … rue du …, tendant à ordonner le sursis à exécution par rapport à une décision du bourgmestre de la commune de … du 15 juin 2004, portant autorisation de l'administration communale de … de construire un nouveau complexe scolaire à … , rue du …, cette décision étant attaquée au fond par une requête en annulation introduite le même jour, portant le numéro 18677 du rôle;

Vu l'exploit de l'huissier de justice Pierre KREMMER, demeurant à Luxembourg, du 30 septembre, portant signification de la prédite requête en sursis à exécution à l'administration communale de … ;

Vu l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Maître Alex KRIEPS, ainsi que Maître Steve HELMINGER, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, avocat de l'administration communale de … , entendus en leurs plaidoiries respectives.

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Le 15 juin 2004, le bourgmestre de la commune de … délivra à l'administration communale de … une autorisation de construire un centre scolaire à … , rue du ….

Par requête déposée le 29 septembre, inscrite sous le numéro 18677 du rôle, Monsieur … … et son épouse, Madame … … ont introduit un recours en annulation contre la décision du bourgmestre du 15 juin 2004, et par requête du même jour, inscrite sous le numéro 18676 du 2 rôle, ils ont introduit une demande tendant à ordonner le sursis à exécution de la décision en question.

Ils estiment que l'autorisation délivrée par le bourgmestre est illégale pour être basée, entre autres, sur le "règlement spécial du … de … " du 24 octobre 2001, qui serait lui-même illégal. En effet la décision ministérielle d'approbation du règlement en question aurait fait l'objet d'un recours contentieux et aurait été annulée par jugement du tribunal administratif du 20 janvier 2003. Une nouvelle décision d'approbation du ministre de l'Intérieur du 9 février 2004 ferait l'objet d'un nouveau recours contentieux introduit le 19 mars 2004, actuellement pendant devant le tribunal administratif. Le bourgmestre n'aurait pas attendu l'issue du litige en question pour délivrer l'autorisation litigieuse.

Ils craignent par ailleurs que l'exécution immédiate de la décision attaquée leur causera un préjudice grave et définitif.

L'administration communale soulève en premier lieu l'irrecevabilité pour cause de tardiveté tant du recours au fond que de la requête en sursis à exécution. Elle se prévaut d'un courrier recommandé notifié le 22 juin 2004 à Monsieur …. dans lequel celui-ci aurait été informé de la délivrance de l'autorisation de construire, de sorte que le délai du recours contentieux de trois mois aurait commencé à courir le lendemain pour expirer le 22 septembre 2004.

Les demandeurs rétorquent que par courrier de leur mandataire du 25 juin 2004, ils ont réclamé auprès de l'administration communale une copie intégrale de l'autorisation de bâtir et que le 29 juin 2004, celle-ci leur a répondu qu'une copie certifiée conforme était à leur disposition au bureau du service technique.

Dans des notes versées en cours de délibéré par les deux mandataires respectifs des parties, ceux-ci sont en accord que la lettre recommandée notifiée à Monsieur …. le 22 juin 2004 contenait l'information que l'autorisation avait été délivrée le 15 juin précédent, et non une copie de l'autorisation même.

L'administration communale estime que le délai contentieux a néanmoins commencé à courir le lendemain de la réception de cette attestation et que décider le contraire reviendrait à permettre aux tiers intéressés avertis de retarder le début du délai contentieux à leur guise, à savoir jusqu'au moment où ils décident d'aller consulter le dossier à la commune.

S'il est vrai qu'en vertu de l'article 13, alinéa 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le tiers intéressé à une décision administrative est forclos à agir plus de trois mois après avoir eu connaissance d'une décision administrative, ledit délai ne commence à courir qu'à partir du jour où la décision a été portée à sa connaissance d’une façon à lui permettre d’en vérifier les éléments essentiels concernant son contenu de façon à engager utilement, le cas échéant, une procédure contentieuse. Il est encore vrai que le tiers intéressé ne saurait se cantonner dans une attitude purement passive pour prolonger à sa guise le délai contentieux à partir du moment où il connaît l'existence d'une décision administrative sans en connaître le contenu exact.

En l'espèce cependant, une telle attitude passive est démentie par les faits. En effet, dès réception, le 22 juin 2004, de l'information qu'une autorisation de bâtir avait été délivrée en faveur de l'administration communale de … , les époux ….-… ont, par courrier du 25 juin 2004, 3 sollicité la délivrance d'une copie intégrale de cette autorisation et ils se sont fait répondre le 29 juin suivant qu'une telle copie était disponible au bureau du service technique de l'administration communale.

Il s'ensuit que le délai du recours contentieux n'a pas commencé avant le 29 juin 2004 et que la requête introductive d'instance, déposée le 29 septembre 2004, n'est pas tardive.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l'affaire est en état d'être plaidée et décidée à brève échéance.

Concernant le sérieux des moyens, il est un fait que l'autorisation de construire est basée, entre autres, sur le règlement précité du 24 octobre 2001 lequel fait actuellement l'objet d'un recours contentieux pendant devant le tribunal administratif. L'illégalité du règlement en question juridictionnellement constatée affecterait la légalité de l'autorisation de construire qui fait l'objet du présent litige.

Or, tribunal administratif, saisi au fond du litige relatif à la légalité du règlement du 24 octobre 2001 a, suivant décision du 7 octobre 2004, ordonné une mesure d'instruction, à savoir une visite des lieux. Il découle de cette décision du juge du fond statuant dans un litige différent, il est vrai, de celui sur lequel se greffe la requête en sursis à exécution faisant l'objet de la présente procédure, mais qui lui est connexe, qu'au stade actuel, les moyens tendant à contester la légalité du règlement, qui conditionne celle de l'autorisation de bâtir, ne semblent pas dénués de caractère sérieux.

Les demandeurs risquent par ailleurs un préjudice grave et définitif en cas de poursuite des travaux jusqu'à l'intervention d'une décision définitive au fond, étant donné qu'en vertu d'une jurisprudence constante, récemment réaffirmée avec vigueur, les juridictions judiciaires refusent d'ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d'une autorisation administrative annulée dans la suite, au motif que le fait de construire sous le couvert d'une autorisation de construire qui se trouve annulée dans la suite ne constitue pas le maître de l'ouvrage en faute, que, par conséquent, il n'y a aucune responsabilité civile dans le chef de celui qui a construit et que, dans ces conditions, il ne saurait y avoir de réparation du préjudice, ni en nature moyennant démolition de l'ouvrage construit illégalement, ni d'ailleurs par équivalent (v. Cour d'appel 30 juin 1993, n° 13662 du rôle; 11 janvier 1995, n° 15963 du rôle; 8 juillet 2004, n° 27531 du rôle).

Il suit de ce qui précède qu'au stade actuel de la procédure, les conditions légales pour l'octroi d'un sursis à exécution sont remplies.

Comme l'examen du sérieux des moyens tels qu'examinés dans la présente instance se limite, pour l'instant, à celui de la légalité du règlement du 24 octobre 2004 et que le litige concernant cette question est susceptible d'être résolu au fond bien avant celui engagé le 29 septembre 2004 et dirigé contre l'autorisation de bâtir, il y a lieu de limiter l'effet de la présente ordonnance jusqu'à une date probable de la décision du tribunal administratif à intervenir au fond sur la légalité du règlement du 24 octobre 2001. A cette date, le juge appelé à ordonner le sursis à exécution pourra disposer, le cas échéant, d'éléments d'information 4 additionnels lui permettant d'apprécier à nouveau le caractère sérieux des moyens invoqués à l'appui du recours introduit sous le numéro 18677 du rôle. Il y a lieu de relever, dans ce contexte, que s'il est bien vrai que l'article 11, alinéa 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999, précitée, détermine la date de l'effet ultime que peut produire une ordonnance de sursis à exécution, aucune disposition légale n'interdit au juge de prévoir qu'une telle ordonnance ne produira ses effets que pour une période moins longue.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit le recours en sursis à exécution en la forme, au fond le déclare actuellement justifié, dit qu'en attendant que la présente mesure soit confirmée ou rapportée à une audience ultérieure par le soussigné ou son remplaçant, il sera sursis à l'exécution de l'autorisation de construire n° 050-04 délivrée le 15 juin 2004 par le bourgmestre de la commune de … à l'administration communale de … , refixe l'affaire au 8 novembre 2004 à 14.30 heures aux fins de statuer sur la reconduction ou la suppression de la mesure instituée par la présente ordonnance, réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 8 octobre 2004 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18676
Date de la décision : 08/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-08;18676 ?

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