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10/09/2004 | LUXEMBOURG | N°18628

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 10 septembre 2004, 18628


Tribunal administratif Numéro 18628 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 septembre 2004 Audience publique du 10 septembre 2004 Requête en sursis à exécution introduite par les sociétés anonymes … … et … … … … contre une décision du bourgmestre de la commune de … … en présence de la société à responsabilité limitée … … … … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 18628 et déposée le 3 septembre 2

004 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles OSSOLA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ord...

Tribunal administratif Numéro 18628 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 septembre 2004 Audience publique du 10 septembre 2004 Requête en sursis à exécution introduite par les sociétés anonymes … … et … … … … contre une décision du bourgmestre de la commune de … … en présence de la société à responsabilité limitée … … … … en matière de permis de construire

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ORDONNANCE

Vu la requête inscrite sous le numéro 18628 et déposée le 3 septembre 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Charles OSSOLA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société anonyme … … , établie et ayant son siège social à L-… …, …, rue … …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, et de la société anonyme … … … … , établie et ayant son siège social à L-… …, route de …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, tendant à prononcer le sursis à exécution par rapport à une décision prise par le bourgmestre de la commune de … … en date du 4 août 2004 sous le numéro … et accordant à la société à responsabilité limitée … … … … , établie et ayant son siège social à L-… …, …, rue de …, l’autorisation de procéder à la transformation de la station-service sise à … … , … route de … sur un terrain inscrit au cadastre, section … de … … , sous le numéro …, un recours au fond ayant été par ailleurs introduit contre ladite décision par requête introduite le même jour, inscrite sous le numéro 18629 du rôle ;

Vu l'exploit de l'huissier de justice suppléant Geoffrey GALLE, remplaçant l’huissier de justice Roland FUNK, demeurant à Luxembourg, du 6 septembre 2004, portant signification de la prédite requête en effet sursis à exécution et du recours en annulation à l'administration communale de … … , ainsi qu'à la société à responsabilité limitée … … … … , préqualifiées ;

Vu l'article 11 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées et notamment la décision attaquée ;

Ouï Maître Charles OSSOLA pour les demanderesses, Maître Steve HELMINGER, en remplacement de Maître Roger NOTHAR, pour l'administration communale de … … , et Maître Gilles DAUPHIN, en remplacement de Maître François KREMER pour la société à responsabilité limitée … … … … en leurs plaidoiries respectives aux audiences publiques des 8 et 10 septembre 2004, chaque fois à 11 :00 heures.

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Par décision du 4 août 2004, le bourgmestre de la commune de … … , ci-après « la commune », délivra à la société à responsabilité limitée … … …, ci-après « la société … », l’autorisation de procéder à la transformation de la station-service sise à … … , …, route de … sur un terrain inscrit au cadastre, section … de … … , sous le numéro … Le 3 septembre 2004 les sociétés … … , établie et ayant son siège social à L-… …, …, rue … …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, et de la société anonyme et … … … … , établie et ayant son siège social à L-… …, route de …, représentée par son conseil d’administration actuellement en fonctions, ont introduit un recours, inscrit sous le numéro 18629 du rôle, tendant à l'annulation de ladite autorisation de construire, et le même jour, ils ont déposé une requête tendant à ordonner un sursis à l'exécution de l'autorisation de construire attaquée, en attendant la solution du litige au fond.

Les sociétés demanderesses, propriétaires du terrain accueillant la station-service devant être transformée, critiquent la décision déférée pour avoir été délivrée par le bourgmestre de la commune, et non pas par le collège des bourgmestre et échevins.

Elles exposent à ce sujet que le terrain accueillant la station-service aurait été, par décision du conseil communal de … … du 12 juillet 2002, intégré dans un plan d’aménagement particulier, ci-après désigné par «… », dénommé « … … ».

Elles soulèvent que toute autorisation de construire concernant un terrain couvert par un PAP ne peut émaner que du collège échevinal, et se prévalent à cette fin de l’article 20 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes autres agglomérations importantes.

Elles estiment que l’exécution de l’autorisation déférée leur causerait un préjudice grave et définitif, et ce à un double titre. Elles avancent d’une part que la réalisation des travaux de transformation sur leur terrain serait irréversible, ceci au vu de la jurisprudence des juridictions judiciaires qui refusent d'ordonner la démolition de constructions érigées sous le couvert d'une autorisation administrative annulée dans la suite ; d’autre part, elles font valoir que l’autorisation autoriserait l’exploitant de la station-service, la société …, à réduire le nombre des colonnes distributrices de combustible, ce qui aurait pour conséquence directe une baisse de la quantité de combustible vendue par l’exploitant, le nombre d’usagers pouvant être servi simultanément étant plus réduit. Elles relèvent que le plan d’aménagement général de la commune de … … , ci-après « le … », prohiberait dans son article … tout agrandissement ultérieur des équipements de la station-service, de sorte que la réduction du nombre de colonnes serait définitif. Or les demanderesses seraient liées à la société … par un contrat de bail, aux termes duquel le loyer qui leur serait redû dépendrait directement de la quantité de combustible vendue par le locataire et exploitant … , de sorte que la réduction du nombre de colonnes leur causerait un préjudice financier et commercial grave et définitif.

Elles soulignent que de l’exécution de l’autorisation leur causerait encore un préjudice grave et irréversible à leur propriété immobilière, privée définitivement des colonnes distributrices supprimées.

La société … résiste à la demande en soulevant de prime abord le fait que les travaux auraient été achevés à la date du 7 septembre 2004.

Elle conteste encore tout préjudice tant le chef des demanderesses, en soulignant le fait que si le nombre de colonnes distributrices sera effectivement réduit, la quantité de combustible stockée dans les cuves de la station-service, qui déterminerait la quantité potentiellement délivrable aux pompes, ne serait pas affectée par les travaux de transformation. Elle conteste encore formellement que le loyer perçu par les demanderesses serait lié à la quantité de combustible vendue, en relevant qu’aux termes du contrat de bail le loyer serait fixe. Elle estime enfin que le préjudice financier allégué par les demanderesses s’inscrirait le cas échéant exclusivement dans le cadre des relations entre bailleurs et locataire et relèverait par conséquent d’une question de droit civil qui échapperait au juge administratif, de sorte que les demanderesses ne feraient pas valoir un risque de préjudice grave et définitif au sens de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.

Concernant le moyen invoqué à l'appui du recours elle est d'avis qu'il n’est pas suffisamment sérieux pour faire admettre une chance réelle d'annulation de l'autorisation de construire litigieuse.

La commune se rallie aux moyens de la société … , tout en précisant que le terrain accueillant la station-service ne ferait pas, contrairement aux affirmations des demanderesses, l’objet d’un PAP, mais l’objet d’une modification du PAG. Elle renvoie à ce sujet à la délibération de son conseil communal, datée du 12 juillet 2002, qui se rapporte à un « projet de modification du Projet d’Aménagement Général portant sur des fonds sis à .., commune de … … , au lieu-dit « … … ». Elle en déduit que se serait à bon droit que le bourgmestre aurait délivré l’autorisation litigieuse.

Les demanderesses rétorquent à ce moyen en renvoyant au reclassement de leur terrain effectué par la prédite modification du PAG, dorénavant classé en « zone d’activité » -

« secteur soumis à un plan d’aménagement particulier » régi par les articles 10.1 et 14 de la partie écrite du PAG.

A l’audience du 10 septembre 2004, la commune concède que le terrain en question est soumis, suite à la prédite délibération provisoire du conseil communal du 12 juillet 2002, à la classification indiquée ci-dessus, mais estime qu’en l’absence de PAP et au vu de la faible ampleur des travaux de modification, seul le bourgmestre aurait été compétent pour délivrer l’autorisation litigieuse.

Elle fait encore plaider que l’article 10 du PAG, qui impose la réalisation d’un PAP, ne s’appliquerait qu’à des opérations d’urbanisation en vue de la création de nouveaux quartiers d’habitation sur des terrains vierges, mais non, comme en l’espèce à des travaux qualifiés de « simples modifications ». La commune est rejointe dans son argumentation par la société … qui souligne encore que l’article 14 du PAG quant à lui ne trouverait à s’appliquer qu’en cas de « mise en valeur de toute zone activité », qualificatif qui ne serait pas applicable aux simples travaux de transformation couverts par l’autorisation litigieuse.

Dès lors qu'une mesure dont le sursis à exécution est demandé a d'ores et déjà été exécutée au moment où le président du tribunal est appelé à statuer, la demande de sursis à exécution a perdu son objet et elle doit être déclarée irrecevable. En effet, il n’y a pas lieu de faire droit à des conclusions à fin de sursis dès lors que la décision est déjà exécutée et que la mesure n’est plus susceptible de produire d’effet utile. En d’autres termes, même à admettre que l’exécution de la mesure incriminée ait été susceptible de causer au demandeur un préjudice grave et définitif, qu’il s’agissait de prévenir, ce préjudice est consommé par l’exécution de la mesure litigieuse et la juridiction du président du tribunal est dès lors épuisée (ordonnance prés., 10 avril 2001, n° 13203, Pas. adm. 2003, v° procédure contentieuse, n° 235).

Plus particulièrement, en matière d’autorisations de construire, le sursis à exécution n’a d’utilité que pour garantir que l’exécution et l’achèvement de travaux de construction ne créent un état de fait sur lequel il sera difficile par la suite de revenir au cas où l’autorisation de construire litigieuse serait annulée par la suite. Par conséquent, il n’y a plus lieu d’ordonner le sursis lorsque la décision est déjà exécutée, c’est-à-dire lorsque les travaux sont achevés lors du jugement de la demande de sursis. Ainsi, une demande de sursis d’une autorisation de construire est à écarter lorsque l’immeuble est achevé, même si certains travaux de parachèvement restent à être réalisés (trib adm., 14 mai 1999, n° 11240, Pas. adm. 2003, v° procédure contentieuse, n° 241, et autres références y citées).

Les parties sont en l’espèce en contradiction en ce qui concerne l’état d’achèvement des travaux et versent diverses pièces aux débats tendant tantôt à attester de l’achèvement des travaux litigieux, tantôt à établir que les travaux sont toujours en cours.

Il s’avère cependant à l’analyse des pièces versées tant par les demanderesses que par la défenderesse … à l’audience du 10 septembre 2004, et plus précisément des photographies prises le 9 septembre 2004 sur les lieux, que les travaux ne sont pas encore intégralement achevés. En particulier, outre des travaux de parachèvements (installation de l’enseigne … , revêtement, finitions du shop), toutes les colonnes de distribution de combustible, élément central du litige entre parties, ne sont pas encore installées. Or aussi longtemps qu’une décision administrative n’a pas été entièrement exécutée, le sursis à exécution conserve toute son utilité pour garantir qu’une poursuite des travaux de construction et leur achèvement n’aggravent un état de fait qu’il serait alors pratiquement encore plus difficile de modifier à nouveau au cas où l’autorisation de construire litigieuse serait annulée par la suite.

Le recours en sursis à exécution, non autrement critiqué par les parties défenderesses, est par ailleurs encore recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 précitée, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l'affaire est en état d'être plaidée et décidée à brève échéance.

L'article 12 de la même loi confère au président du président du tribunal administratif le pouvoir d'ordonner au provisoire toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution d'une affaire dont est saisi le tribunal administratif, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Pour l'appréciation du caractère définitif du dommage, il n'y a pas lieu de prendre en considération le dommage subi pendant l'application de l'acte illégal et avant son annulation ou sa réformation. Admettre le contraire reviendrait à remettre en question le principe du caractère immédiatement exécutoire des actes administratifs, car avant l'intervention du juge administratif, tout acte administratif illégal cause en principe un préjudice qui, en règle, peut être réparé ex post par l'allocation de dommages-intérêts. Ce n'est que si l'illégalité présumée cause un dommage irréversible dans le sens qu'une réparation en nature, pour l'avenir, un rétablissement de la situation antérieure, ne sera pas possible, que le préjudice revêt le caractère définitif tel que prévu par l'article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 (ordonnance prés., 28 mai 2001, n° 13446, Pas. adm. 2003, v° procédure contentieuse, n° 230).

Un préjudice de nature essentiellement pécuniaire n’est pas, en soi, grave et difficilement réparable, étant donné qu’il peut être réparé à la suite d’une éventuelle décision judiciaire d’annulation par des dommages et intérêts. Il ne saurait être dérogé à cette règle que si le demandeur peut établir qu’il risque de subir un préjudice matériel irréversible ou difficilement réparable (trib. adm. 31 juillet 2002, n° 15190, Pas. adm. 2003, v° procédure contentieuse, n° 232), voire lorsque le demandeur établit que ce préjudice financier risque d’être d’une envergure telle qu’il menace son existence même (voir ordonnance prés., 20 septembre 2002, n° 15342, ibidem).

Or, en l’espèce, il ne résulte pas du contrat de bail versé en cause par les demanderesses que le loyer serait d’une quelconque façon lié au volume de combustible vendu par le locataire. Au contraire, il apparaît que le loyer redû par la société … est fixe, abstraction faite de sa liaison à l’indice des prix à la consommation.

Il se dégage de ces éléments que le préjudice financier avancé par les demanderesses comme résultant de la suppression de certaines colonnes distributrices, doit, en l’état actuel du dossier, être considéré comme non établi. Il s’avère par ailleurs que ce préjudice allégué, lié le cas échéant, comme affirmé par les demanderesses, à l’exécution du contrat de bail conclu entre les demanderesses et la défenderesse … , devrait encore pouvoir faire l’objet d’une action en réparation devant les juridictions civiles, les demanderesses ayant à ce sujet précisé avoir engagé des procédures devant les juridictions civiles, et plus particulièrement devant le juge de paix siégeant en matière de bail et devant le tribunal des référés, de sorte qu’il ne saurait être considéré comme grave et difficilement réparable au sens de l'article 11, (2) de la loi du 21 juin 1999 précitée.

En revanche, c’est à juste titre que les demanderesses arguent d’un risque de préjudice grave et définitif à leur propriété immobilière, résultant du fait qu’il leur sera impossible, en cas d’annulation de la décision litigieuse, de remettre la station-service et ses équipements, en particulier les colonnes de distribution, en pristin état. Il résulte en effet de l’article 14b) de la partie écrite du PAG, traitant des zones d’activités communales et applicable au terrain en question, que « l’implantation de station-services et d’autres équipements (…) ainsi que l’agrandissement d’équipements existants de ce type n’y sont pas autorisés », de sorte qu’une augmentation future des colonnes distributrices en vue de remettre la station-service en pristin état par ses propriétaires, et un accroissement corrélatif de la capacité de livraison simultanée aux usagers, ne devrait, au vu cette disposition, plus être possible au cas où le recours engagé au fond contre la décision est couronné de succès.

Si les parties défenderesses contestent que cette disposition trouve à s’appliquer à des colonnes distributrices, force est de constater cependant que la commune elle-même se prévaut de cette disposition dans l’autorisation litigieuse déférée pour imposer à l’exploitant … « de ne pas augmenter le nombre de colonnes distributrices ».

Concernant le moyen invoqué à l'appui du recours dirigé contre la demande, le juge appelé à en apprécier le caractère sérieux ne saurait les analyser et discuter à fond, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Il doit se borner à se livrer à un examen sommaire du mérite du moyens présenté et accorder le sursis lorsqu'il paraît, en l'état de l'instruction, de nature à pouvoir entraîner l'annulation ou la réformation de la décision critiquée.

En l’espèce, les parties sont unanimes à reconnaître lors de l’audience du 10 septembre 2004 que la station-service se trouve classée, suite au vote provisoire du conseil communal de … … du 12 juillet 2002, en « zone d’activité » - « secteur soumis à un plan d’aménagement particulier ».

Aux termes d’une jurisprudence établie des juridictions administratives, de laquelle le juge du provisoire ne saurait se départir, le vote provisoire d’un conseil communal concernant un projet d’aménagement communal a un effet négatif par l’applicabilité directe de la servitude mise en place, dès le dépôt du projet provisoirement approuvé à la maison communale, en dehors de toute autre étape dans la procédure d’approbation définitive du plan, dans ce sens que, conformément à l’article 12 de la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant les villes et autres agglomérations importantes, toute implantation de constructions et tous travaux contraires aux dispositions dudit projet sont interdites.

Il résulte encore de la lecture combinée des articles 10.1 et 14 du PAG que la zone dans laquelle se situe la station-service doit être couverte par un PAP, PAP qui le cas échéant peut ne couvrir, aux termes de l’article 10.1.b du PAG, qu’une partie de la zone.

Le soussigné ne saurait suivre le raisonnement des parties défenderesses selon lesquelles ces dispositions ne s’appliqueraient pas à de simples travaux de modification. En effet, outre le fait que les dispositions réglementaires en question ne prévoient pas de telle exception, il n’appartient pas au juge appelé à apprécier le sérieux des moyens invoqués d’analyser et de discuter à fond les dispositions en question, sous peine de porter préjudice au principal et de se retrouver, à tort, dans le rôle du juge du fond. Bien au contraire, pour l'appréciation du sérieux des moyens invoqués à l'appui d'un recours au fond, le juge du provisoire doit se livrer à une évaluation des chances de succès de la demande au fond et doit pour cela prendre en considération les solutions jurisprudentielles bien établies, étant donné que lorsque de telles solutions existent, l'issue du litige – que ce soit dans le sens du succès du recours ou de son échec – n'est plus affectée d'un aléa.

Or, aux termes d’une jurisprudence des juridictions administratives, le bourgmestre est incompétent pour autoriser des plans et pour accorder un permis de construction au cas où le terrain devant faire l’objet d’un permis de construire est situé dans une zone soumise à un plan d’aménagement particulier (trib. adm., 21 février 2001, n° 11813, Pas. adm. 2003, v° urbanisme, n° 159).

Il s'ensuit que le moyen tiré de l’excès de pouvoir commis par le bourgmestre à l’occasion de la délivrance de l’autorisation de construire délivrée, apparaît comme sérieux.

Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent qu'en attendant la solution du litige au fond, il y a lieu d'ordonner le sursis à exécution de l'autorisation de construire litigieuse.

La commune sollicite, à titre subsidiaire, la limitation de l’effet suspensif dans le temps, à savoir jusqu’à la régularisation de la situation par l’autorité compétente. Elle fait plaider que suite à l’entrée en vigueur de la loi du 19 juillet 2004 concernant l’aménagement communal et le développement urbain, loi abrogeant la loi modifiée du 12 juin 1937 concernant l’aménagement des villes et autres agglomérations importantes, dorénavant seul le bourgmestre serait compétent pour la délivrance des permis de construire, et ce indépendamment de la question de savoir si l’immeuble concerné fait l’objet ou non d’un PAP.

Il ne saurait cependant être fait droit à cette demande, d’ailleurs superfétatoire, l’effet suspensif étant en effet délimité quant à son objet par celui de la décision déférée au fond (ordonnance prés., 13 août 2004, n° 18516, non encore publiée), et non par une situation de fait telle qu’en l’espèce les travaux de modification, de sorte qu’en cas de retrait de l’autorisation suspendue et de son remplacement par une nouvelle autorisation, l’effet suspensif prend corollairement fin avec le retrait de l’acte dont l’exécution est suspendue.

Par ces motifs, le soussigné, juge du tribunal administratif, siégeant en remplacement du président et des magistrats plus anciens en rang, tous légitimement empêchés, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit le recours en sursis à exécution en la forme, partant ordonne qu'il sera sursis à l'exécution de l'autorisation de construire délivrée le 4 août 2004 (n° 2913/04) par le bourgmestre de la commune de … … à la société à responsabilité limitée … … …, en attendant la solution du litige au fond, actuellement pendant devant le tribunal administratif et portant le numéro 18629 du rôle, réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 10 septembre 2004 par M. Sünnen, juge du tribunal administratif, en présence de M. Rassel, greffier.

s. Rassel s. Sünnen 7


Synthèse
Numéro d'arrêt : 18628
Date de la décision : 10/09/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-09-10;18628 ?

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