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21/08/2003 | LUXEMBOURG | N°16812

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 août 2003, 16812


Numéro 16812 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er août 2003 Audience publique du 21 août 2003 Recours formé par Monsieur … … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16812 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, né le … … à Pec (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à

L-…., tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 14 avril 2003, notifié...

Numéro 16812 du rôle Tribunal administratif du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 1er août 2003 Audience publique du 21 août 2003 Recours formé par Monsieur … … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 16812 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif par Maître Frank WIES, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … …, né le … … à Pec (Kosovo), de nationalité yougoslave, demeurant actuellement à L-…., tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 14 avril 2003, notifiée le 12 mai 2003, par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande en reconnaissance du statut de réfugié, ainsi que d’une décision confirmative du 30 juin 2003, rendue sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 12 août 2003 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions attaquées ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Frank WIES et Monsieur le délégué du gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 20 août 2003.

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Le 24 février 2003, Monsieur … … introduisit auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur … fut entendu le 11 mars 2003 par un agent du ministère de la Justice sur les motifs à la base de sa demande d’asile.

Par décision du 14 avril 2003, notifiée le 12 mai 2003, le ministre de la Justice l’informa que sa demande a été déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, au motif qu’elle ne répondrait à aucun des critères de fond tels que définis par l’article 1er section A. 2 de la Convention de Genève. Le ministre a en effet retenu que Monsieur… se limitait à faire état d’une dispute avec un Albanais et de menaces de la part de ce dernier et que ces faits ne sauraient être considérés comme constituant des actes de persécution au sens de la Convention de Genève.

Le recours gracieux daté au 12 juin 2003 introduit par le mandataire du demandeur auprès du ministre de la Justice a été rejeté par une décision confirmative du même ministre du 30 juin 2003.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 1er août 2003, Monsieur… a fait introduire un recours tendant à l’annulation des décisions ministérielles précitées des 14 avril et 30 juin 2003.

L’article 10 (3) de la loi précitée du 3 avril 1996 dispose expressément qu’en matière de demandes d’asile déclarées manifestement infondées au sens de l’article 9 de la loi précitée de 1996, seul un recours en annulation est ouvert devant les juridictions administratives.

Le recours en annulation est par ailleurs recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.

A l’appui de son recours, le demandeur expose qu’il serait Albanais du Kosovo, de confession musulmane et d’origine « bochniaque ». Il fait valoir plus particulièrement qu’il aurait été agressé ensemble avec son cousin au début du mois de janvier 2003 dans la rue à Pec par des Albanais qui leur auraient reproché de ne pas parler la langue albanaise et une deuxième fois le 10 janvier 2003, agression lors de laquelle on lui aurait mis le canon d’un pistolet dans la bouche tout en lui reprochant de protéger les Serbes. Il continue que ses agresseurs auraient cependant été mis en fuite à la suite de l’intervention d’un voisin, mais qu’il aurait par après été régulièrement menacé de mort par téléphone par un des agresseurs, de sorte qu’il se serait résigné à quitter son pays d’origine.

Le délégué du gouvernement estime que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation du demandeur et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsqu’elle ne répond à aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève et le Protocole de New York, si la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté dans son propre pays est manifestement dénuée de tout fondement(…) ».

En vertu de l’article 3 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi précitée du 3 avril 1996 « une demande d’asile pourra être considérée comme manifestement infondée lorsqu’un demandeur n’invoque pas de crainte de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques comme motif de sa demande. Lorsque le demandeur invoque la crainte d’être persécuté dans son propre pays, mais qu’il résulte des éléments et renseignements fournis que le demandeur n’a aucune raison objective de craindre des persécutions, sa demande peut être considérée comme manifestement infondée ».

Une demande d’asile basée exclusivement sur un sentiment général d’insécurité sans faire état d’un quelconque fait pouvant être considéré comme constituant une persécution ou une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève est à considérer comme manifestement infondée (cf. trib. adm. 22 septembre 1999, n° 11508 du rôle, Pas. adm. 2002, V° Etrangers, n° 91 et autres références y citées).

En l’espèce, il ressort tant du rapport d’audition du 11 mars 2003 que de la requête introductive d’instance, que le demandeur se dit « persécuté » par quelques Albanais, qui lui reprocheraient ses origines « bochniaques » et de parler le serbo-croate et qui l’auraient menacé de mort. Or, force est de constater que de tels agissements relèvent d’une criminalité de droit commun, laquelle, quelle que soit la gravité et le caractère condamnable desdits actes, à les supposer établis, ne sauraient être qualifiés de persécution au sens de la Convention de Genève.

Il s’ensuit que la demande d’asile sous examen ne repose sur aucun des critères de fond définis par la Convention de Genève, de sorte que c’est à bon droit que le ministre de la Justice a rejeté la demande d’asile du demandeur comme étant manifestement infondée et que le recours sous analyse est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, chambre de vacation, statuant à l’égard de toutes les parties ;

donne acte au demandeur de ce qu’il bénéficie de l’assistance judiciaire ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Schockweiler, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Thomé, juge, et lu à l’audience publique extraordinaire du 21 août 2003 par le vice-président, en présence de M. May, greffier en chef de la Cour administrative, greffier assumé.

s. May s. Schockweiler 3


Synthèse
Formation : Chambre de vacation
Numéro d'arrêt : 16812
Date de la décision : 21/08/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-08-21;16812 ?

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