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21/07/2003 | LUXEMBOURG | N°16723

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 juillet 2003, 16723


Tribunal administratif N° 16723 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 juillet 2003 Audience publique du 21 juillet 2003

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur et Madame … et … , … contre une décision du ministre de la Justice en matière d'autorisation de séjour

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 16 juillet janvier 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Cathy ARENDT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de

l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, ainsi que de l...

Tribunal administratif N° 16723 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 16 juillet 2003 Audience publique du 21 juillet 2003

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Requête en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur et Madame … et … , … contre une décision du ministre de la Justice en matière d'autorisation de séjour

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 16 juillet janvier 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Cathy ARENDT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … et de son épouse, Madame …, ainsi que de leurs deux enfants mineurs …, né le … et …, né le … tous de nationalité yougoslave, demeurant à L- … , tendant à l'institution du sursis à exécution par rapport à une décision ministérielle du 26 juillet 2002 leur refusant l'autorisation de séjourner sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg, un recours au fond dirigé contre ladite décision, inscrit sous le numéro 15880 du rôle, étant pendant devant le tribunal administratif, sinon par rapport à une décision ministérielle du 22 mars 2001 portant refus de leur octroyer le statut de réfugiés;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment les décisions critiquées;

Ouï Maître Cathy ARENDT, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-

Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Suivant courrier du 13 juin 2002, Monsieur … et son épouse, Madame …, agissant tant en leur nom propre qu'en celui de leurs deux enfants mineurs … et … sollicitèrent auprès du ministre de la Justice une autorisation de séjour pour « raisons humanitaires ».

Par lettre du 26 juillet 2002, le ministre de la Justice rejeta cette demande au motif que les consorts …-… ne disposeraient pas de moyens d’existence personnels suffisants au sens de l’article 2 de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1) l’entrée et le séjour des étrangers ;

2) le contrôle médical des étrangers ; 3) l’emploi de la main-d’œuvre étrangère et qu’ils n’auraient pas fait état de raisons humanitaires justifiant l’octroi d’une autorisation de séjour au Luxembourg.

2 A la suite d’un recours gracieux daté du 25 octobre 2002, le ministre de la Justice confirma son refus par lettre du 3 décembre 2002.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 17 janvier 2003, les consorts …-… ont fait introduire un recours tendant à l’annulation des décisions ministérielles des 26 juillet et 3 décembre 2002. Ils y ont fait exposer, entre autres, que leur fils … souffrirait de graves problèmes de santé et plus particulièrement d'un asthme allergique qui risquerait de s'aggraver en cas d'un retour dans leur pays d'origine, à savoir le Monténégro, pays dans lequel un traitement médical adéquat ne serait pas garanti. Par jugement du 19 juin 2003, le tribunal administratif, après avoir constaté qu'il ne disposait pas de connaissances médicales adéquates, chargea un expert avec la mission de vérifier l'état de santé de l'enfant …, eu égard notamment aux problèmes d'asthme allergique mis en avant dans le dossier et de vérifier si un retour actuel de l'enfant au Monténégro est de nature à nuire gravement à son état de santé.

Par requête déposée le 16 juillet 2003, les consorts …-… demandent au président du tribunal d'ordonner le sursis à exécution par rapport à la décision ministérielle de refus d'entrée et de séjour.

Ils estiment que l'exécution de la mesure leur causerait un préjudice grave et définitif.

Dans ce contexte, ils font exposer qu'en cas de retour immédiat dans leur pays d'origine, ils ne seraient plus en mesure de se soumettre à l'expertise ordonnée par le tribunal administratif, cette expertise étant précisément destinée à évaluer la réalité du danger pour l'état de santé de l'enfant … en cas de retour vers le Monténégro. Ils estiment par ailleurs que les moyens invoqués au fond, tirés entre autres de l'état de santé dudit enfant, qui justifierait une autorisation de séjour basée sur des considérations humanitaires, seraient sérieux. Pour preuve, le tribunal administratif ne les aurait pas écartés mais aurait ordonné une expertise afin de se donner les moyens pour apprécier le sérieux de la situation invoquée.

Le délégué du gouvernement estime que l’état de santé de l’enfant … correspondrait à une pathologie assez fréquente qui pourrait être soignée par un traitement médical standard international dans son pays d’origine. Dans ce contexte, il se base sur un rapport établi en date du 18 juillet 2002 par l’infirmière diplômée J. S. auprès du commissariat du gouvernement aux étrangers et sur l’avis du médecin du contrôle médical établi en date du 19 août 2002 dans le cadre d’une procédure de rapatriement, d’après lequel l’enfant … ne présenterait pas de pathologie médicale empêchant son retour dans son pays d’origine. Il en conclut que les moyens invoqués dans le cadre du recours au fond ne sont pas sérieux. – Il explique par ailleurs qu'une mesure de rapatriement ne causerait pas aux demandeurs un préjudice grave et définitif, étant donné qu'en cas de succès de la demande au fond, le gouvernement pourrait organiser leur retour vers le Luxembourg.

Une décision administrative négative ne modifiant pas une situation de droit ou de fait antérieure n'est pas de nature à donner lieu à une décision juridictionnelle de sursis à exécution. La décision ministérielle attaquée dans le cadre du recours au fond constitue une telle décision négative, étant donné qu'elle refuse aux consorts …-… l'entrée et le séjour au pays. La demande de sursis à exécution est partant à rejeter.

Une décision de refus d'entrée et de séjour peut cependant donner lieu à une mesure de sauvegarde. Il est indifférent, à cet effet, que le demandeur base sa requête sur le seul article 11 de ladite loi, relatif à la demande d'effet suspensif d'un recours, dès lors qu'il se dégage par 3 ailleurs du libellé de la requête qu'il sollicite une mesure provisoire nécessaire à la sauvegarde de ses intérêts, prévue par l'article 12 de la même loi.

Comme il ressort clairement du dispositif de la requête introductive d'instance que les consorts …-… demandent qu'une expulsion ou un refoulement ne puisse avoir lieu avant l'examen du bien-fondé de leur demande par le juge du fond, il appert que la demande est à examiner au regard de l'article 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999.

En vertu de cette disposition légale, le président du tribunal administratif peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution d'une affaire dont est saisi le tribunal administratif, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l'article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d'admettre que l'institution d'une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l'appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d'une décision administrative alors même que les conditions posées par l'article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l'article 12 n'excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.

En l'espèce, tant la condition de l'existence de moyens sérieux que le risque d'un préjudice grave et définitif se résument à l'existence, chez l'enfant …, d'une maladie d'une gravité exceptionnelle ne lui permettant pas de retourner dans son pays d'origine. L'existence de cette maladie constitue en effet le moyen invoqué à l'appui du recours au fond, et elle est pareillement de nature à caractériser le risque d'un préjudice grave et définitif dans le chef du demandeur, en raison du fait, précisément, qu'un tel retour serait de nature à priver l'enfant des soins médicaux nécessaires.

Quelle que soit la pertinence des circonstances de fait décrites par le délégué du gouvernement, le président du tribunal, dans le cadre des pouvoirs lui conférés par les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999, précitée, ne saurait se mettre en contradiction, ni de manière directe, ni même de manière indirecte, avec des éléments de décision émanant du tribunal administratif siégeant en formation collégiale.

Or, en l'espèce, le tribunal administratif, dans son jugement du 19 juin 2003, a implicitement reconnu comme suffisamment sérieuses les allégations des consorts …-… concernant la maladie de l'enfant …, étant donné que, sans rejeter le moyen, il a au contraire ordonné une mesure d'instruction en vue de déterminer la réalité de ces allégations.

Un rejet de la mesure de sauvegarde aurait comme conséquence que cette mesure d'instruction ne saurait plus être matériellement exécutée. Il y a lieu de souligner, dans ce contexte, que l'expert n'a pas encore procédé, à l'heure actuelle, à l'examen de l'enfant ….

Il suit des considérations qui précèdent que les moyens invoqués à l'appui du recours au fond sont sérieux et que l'exécution immédiate de la décision attaquée risquent de causer aux demandeurs un préjudice grave et définitif, de sorte que les conditions posées par l'article 4 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 sont remplies. Il y a partant lieu d'autoriser les consorts …-… à séjourner provisoirement sur le territoire du Luxembourg en attendant la solution du litige au fond.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit la demande en la forme, déclare non justifiée en tant qu'elle tend au sursis à exécution et en déboute, déclare justifiée en tant qu'elle tend à l'institution d'une mesure de sauvegarde, partant dit que les consorts …-… sont autorisés à séjourner sur le territoire du Grand-

Duché de Luxembourg en attendant que le tribunal ait statué au fond sur le recours introduit le 17 janvier 2003, inscrit sous le numéro 15880 du rôle, réserve les frais.

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 21 juillet 2003 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 16723
Date de la décision : 21/07/2003

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2003-07-21;16723 ?

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