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25/09/2002 | LUXEMBOURG | N°15354

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 25 septembre 2002, 15354


Tribunal administratif N° 15354 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 septembre 2002 Audience publique du 25 septembre 2002

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Requête en sursis à exécution, subsidiairement en institution d’une mesure de sauvegarde introduite par les époux …, employé privé, et …, sans état, agissant tant en leur nom propre qu’en leur qualité d’administrateurs légaux de la personne et des biens de leur fils mineur … …, écolier, … contre des décisions de la bourgmestre de la commune de …, du conseil communal de …, ainsi

que de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en...

Tribunal administratif N° 15354 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 septembre 2002 Audience publique du 25 septembre 2002

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Requête en sursis à exécution, subsidiairement en institution d’une mesure de sauvegarde introduite par les époux …, employé privé, et …, sans état, agissant tant en leur nom propre qu’en leur qualité d’administrateurs légaux de la personne et des biens de leur fils mineur … …, écolier, … contre des décisions de la bourgmestre de la commune de …, du conseil communal de …, ainsi que de la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en matière d’organisation de l’enseignement primaire

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée le 17 septembre 2002 au greffe du tribunal administratif par Maître Roland ASSA, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, …, et de son épouse, Madame …, …, agissant tant en leur nom personnel qu’en leur qualité d’administrateurs légaux de la personne et des biens de leur fils mineur, … …, écolier, né le…, demeurant ensemble à L-…, tendant à conférer un effet suspensif au recours « leur ouvert par la loi », introduit le même jour, portant le numéro 15353 du rôle, dirigé contre « la décision du bourgmestre de la commune de … du 11 juillet 2002, sans préjudice quant à la date exacte, par laquelle celui-ci détermine les effectifs et la répartition des classes et des enfants de troisième année primaire pour l’année scolaire 2002-2003 », la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002 relative à l’organisation de l’enseignement primaire pour la même année scolaire, de même que contre la décision d’approbation afférente prise par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en date du 12 septembre 2002, sinon à ordonner une mesure de sauvegarde ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 19 septembre 2002 portant signification de la prédite requête en sursis à exécution, sinon en obtention d’une mesure de sauvegarde à l’administration communale de … ;

Vu les articles 11, 12 et 18 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives ;

Vu les pièces versées et notamment les délibération du conseil communal de … et décision ministérielle d’approbation afférente précitées ;

Ouï Maîtres Christiane GABBANA, en remplacement de Maître Roland ASSA, et Roger NOTHAR, en représentation de l’administration communale de …, de même que Madame le délégué du Gouvernement Claudine KONSBRUCK en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 23 septembre 2002.

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Considérant que … …, préqualifié, fréquente l’école primaire dans la commune de … depuis le début de sa scolarisation et a terminé avec succès la deuxième année primaire en juillet 2002 pour se trouver admissible en troisième année ;

Qu’en date du 11 juillet 2002, l’inspecteur de l’enseignement primaire compétent pour la commune de … s’est adressé au collège échevinal de cette dernière en ces termes :

« Madame, Monsieur, ayant constaté que 23 enfants se trouveront en 3ième année d’études en votre commune en 2002/2003, je vous prie de bien vouloir changer l’organisation scolaire prévue comme suit :

3ième année d’études Madame … :

18 élèves 3ième et 4ième années d’études Madame…. : 5 élèves de 3ième année d’études, 9 élèves de 4ième année d’études.

A mon avis, cette répartition permet de mieux répondre aux infrastructures et aux exigences pédagogiques.

Je vous remercie de votre bienveillante attention et je vous exprime mes salutations distinguées » ;

Que le même jour, d’après les explications concordantes des mandataires des parties à l’audience, la bourgmestre de la commune de …, en présence de l’inspecteur ainsi que des deux titulaires précités, a procédé au tirage au sort pour déterminer les cinq élèves de la troisième année d’études devant rejoindre pour l’année scolaire 2002/2003 la classe de Madame … en prévision d’un entérinement de l’organisation scolaire en ce sens par le conseil communal, point à l’ordre du jour de sa séance du lendemain, 12 juillet 2002 ;

Que suivant l’article 4 du point 5 de l’ordre du jour de la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002, au titre de la répartition des classes et des enfants, le nombre d’enfants pour la classe de troisième année d’études enseignés à l’école primaire de … a été fixé à 18, tandis que celui enseigné à l’école primaire de … a été fixé à 5 pour la troisième année d’études, nombre auquel s’ajoutent 8 enfants au titre de la quatrième année d’études ;

Que cette délibération du conseil communal de … a été approuvée par la ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports, désignée ci-après par « la ministre » en date du 12 septembre 2002, sous réserve des remarques formulées par l’inspecteur de l’enseignement primaire compétent, réserves concernant l’article 5, étranger à la question de la répartition des classes et des enfants ;

Considérant qu’en date du 17 septembre 2002, les époux … et …, agissant tant en leur nom personnel qu’en leur qualité d’administrateurs légaux de la personne et des biens de leur fils mineur … …, tous préqualifiés, ont fait introduire « le recours qui leur est ouvert par la loi » à l’encontre « 1. d’une décision du bourgmestre de la commune de … du 11 juillet 2002, sans préjudice quant à la date exacte, par laquelle celui-ci détermine les effectifs et la répartition des classes et des enfants de troisième année primaire pour l’année scolaire 2002-2003 ;

2. de la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002 relative à l’organisation de l’enseignement primaire pour l’année scolaire 2002-2003 ;

3. de la décision d’approbation de la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002 prise par le ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle et des Sports en date du 12 septembre 2002 », en concluant au dispositif de leur dit recours à l’annulation des actes en question ;

Considérant que suivant requête déposée le même jour, inscrite sous le numéro 15354 du rôle, les mêmes demandeurs concluent à voir conférer un effet suspensif au recours au fond, prédit, sinon à voir ordonner une mesure de sauvegarde consistant à voir intégrer … … et à le voir suivre les cours de la classe de troisième année primaire à l’école de … jusqu’au jour où le litige aura été toisé définitivement par une décision coulée en force de chose jugée ;

Qu’à l’appui de leur recours au fond, les demandeurs concluent à l’annulation de la décision ainsi qualifiée de la bourgmestre de la commune de … du 11 juillet 2002 pour incompétence sinon violation de la loi, la répartition des classes et des enfants incombant au conseil communal d’une part, et le principe constitutionnel de l’égalité devant la loi se trouvant violé d’autre part ;

Qu’ils sollicitent également l’annulation de la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002, de même que de la décision ministérielle d’approbation afférente pour violation du même principe constitutionnel ;

Considérant qu’à l’appui de leur requête en sursis à exécution, sinon en institution d’une mesure de sauvegarde, les demandeurs font valoir que les décisions déférées auraient pour effet de désolidariser … … de sa classe habituelle avec son entourage connu, en mettant en avant des troubles psychologiques susceptibles d’entraver lourdement ses performances scolaires, tout en prévoyant « une réadaptation difficile en raison du décalage inévitable du programme enseigné entre les deux classes » du fait que la classe primaire de … regroupant des élèves de deux années scolaires différentes serait par essence moins performante de ce chef, ce qui se ferait sentir en cas de réintégration tardive, une fois les décisions déférées annulées définitivement suivant les conclusions des demandeurs ;

Considérant que la commune, à laquelle se joint l’Etat, invoque l’incompétence du juge administratif des référés pour connaître de la présente requête du fait que la délibération du 12 juillet 2002 et l’approbation ministérielle du 12 septembre 2002 constitueraient des actes administratifs à caractère réglementaire au sens de l’article 7 de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif ;

Que par ailleurs une décision de la bourgmestre du 11 juillet 2002, telle que visée par les demandeurs, n’existerait pas comme telle ;

Qu’en toute occurrence, les moyens développés par les demandeurs ne revêtiraient point le caractère sérieux requis par la loi pour voir aboutir utilement à la demande provisoire sous analyse, de même que le préjudice mis en avant par ceux-ci serait ni grave, ni définitif, étant donné que les demandeurs feraient tout au plus valoir dans le chef de leur fils un inconvénient sinon un désagrément ne répondant point aux exigences fixées par la loi en la matière ;

Considérant que la délibération du conseil communal de … du 12 juillet 2002, déférée au fond, ensemble l’approbation ministérielle afférente, également critiquée, par rapport auxquelles il est présentement demandé de statuer au provisoire, sont prises en vertu des dispositions de la loi modifiée du 10 août 1912 concernant l’organisation de l’enseignement primaire et notamment de son article 20, ensemble celles du règlement grand-ducal du 29 avril 2002 concernant l’organisation scolaire à établir respectivement par les conseils communaux et par les comités des syndicats scolaires intercommunaux et, en tant qu’elles portent sur la répartition des classes et les effectifs de classes - au vu du caractère général et impersonnel des mesures prises dans un but d’intérêt général (cf.

Conseil d’Etat, 6 juillet 1988, P. 27, p. 264) - ne s’analysent point en des décisions administratives individuelles au sens de l’article 2 (1) de la prédite loi modifiée du 7 novembre 1996 ;

Que ces actes sont tout au plus susceptibles de rentrer sous la catégorie des actes administratifs à caractère réglementaire prévue à l’article 7 de ladite loi modifiée du 7 novembre 1996 suivant l’analyse sommaire pouvant être effectuée à ce stade par le juge administratif des référés au vu des éléments de fait et de droit présentement lui soumis et compte tenu de l’absence actuelle de contestations élevées relativement à l’effet direct s’en dégageant dans le chef des demandeurs ;

Considérant que ne s’agissant point de décisions administratives individuelles sur base des éléments présentement soumis et la loi modifiée du 21 juin 1999 ne prévoyant, en son article 18, qu’une requête en effet suspensif à l’encontre des actes administratifs à caractère réglementaire, force est en l’occurrence de constater l’incompétence du président du tribunal, sinon du magistrat qui le remplace, pour instituer une mesure de sauvegarde en l’espèce (cf. T.A (prés.) 28 mai 2001, EFA et consorts, n° 13446 du rôle, non encore publié) ;

Considérant que pareillement à la matière des décisions administratives individuelles, la demande d’effet suspensif demandée par rapport à un recours dirigé contre un acte administratif à caractère réglementaire est conditionnée, suivant le prédit article 18 de la loi modifiée du 21 juin 1999, par les exigences portées par l’article 11 de la même loi ;

Considérant que l’article 11 en question prévoit dans son alinéa second que le sursis à exécution ne peut être décrété qu’à la double condition que, d’une part, l’exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d’autre part, les moyens invoqués à l’appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux ;

Considérant qu’un préjudice est grave au sens de la disposition précitée, lorsqu’il dépasse par sa nature ou son importance les gênes et les sacrifices courants qu’imposent la vie en société et doit dès lors être considéré comme violation intolérable de l’égalité des citoyens devant les charges publiques ;

Qu’il est définitif lorsque le succès de la demande présentée au fond ne permet pas ou ne permet que difficilement un rétablissement de la situation antérieure à la prise de l’acte illégal, la seule réparation par équivalent du dommage qui se manifeste postérieurement à son annulation ou à sa réformation ne pouvant être considérée à cet égard comme empêchant la réalisation d’un préjudice définitif ;

Considérant qu’il appert à partir des éléments présentement soumis au juge du provisoire que si le changement de structure scolaire opéré et présentement critiqué, peut s’analyser du point de vue subjectif des demandeurs en tant qu’inconvénient, les troubles psychologiques mis en avant ne sont cependant étayés par aucun élément concret du dossier, ni ne se vérifient de manière objective au vu des données apparaissant présentement comme acquises en cause, étant entendu que … … n’a pas été le seul à rejoindre la classe de troisième année primaire dans le bâtiment de …, par ailleurs sa localité de résidence, mais se trouve accompagné par – entre-temps 5 - autres élèves de la même année scolaire, dont au moins 4 tirés au sort comme lui et que le décalage de niveau mis en avant comme existant entre une classe homogène telle celle de … et une classe dédoublée telle celle de … reste actuellement à l’état de pure allégation, ce d’autant plus au regard du fait que trois enseignants se trouvent à la disposition des deux classes dédoublées de … ;

Qu’il se dégage de ce qui précède qu’au stade actuel de l’analyse, la gène mise en avant par les demandeurs ne revêt point les caractéristiques d’un préjudice grave et définitif au sens de l’article 11 de la loi modifiée du 21 juin 1999 précitée ;

Qu’il s’ensuit que l’une des conditions cumulativement posées tant par l’article 11 que par l’article 18 de la même loi fait défaut, de sorte qu’il y a lieu de rejeter la demande en sursis à exécution, sans qu’il ne faille par ailleurs examiner le sérieux des moyens présentés à l’appui du recours au fond ;

Que les mêmes conditions étant cumulativement requises au regard de l’article 12 de la même loi, il devient encore surabondant de scruter plus loin, sous l’aspect de la demande d’une mesure de sauvegarde, la question de l’existence effective de la décision de la bourgmestre du 11 juillet 2002 ainsi qualifiée par les demandeurs et contestée comme telle par la commune, pareille mesure étant encore à rejeter pour être de la sorte non justifiée ;

Par ces motifs, le soussigné, premier vice-président du tribunal administratif, en remplacement du président dûment empêché, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit le recours en effet suspensif en la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute ;

se déclare incompétent pour connaître de la demande en institution d’une mesure de sauvegarde dans la meure des actes administratifs à caractère réglementaire critiqué ;

dit cette demande non justifiée pour le surplus et en déboute ;

condamne les parties demanderesses aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 25 septembre 2002 par M. Delaporte, premier vice-président du tribunal administratif, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 15354
Date de la décision : 25/09/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-09-25;15354 ?

Source

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