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11/06/2002 | LUXEMBOURG | N°14984

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 11 juin 2002, 14984


Tribunal administratif N° 14984 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juin 2002 Audience publique du 11 juin 2002

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Requête en sursis à exécution et en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur …, contre une décision des ministres du Travail et de la Justice en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée en date de ce jour au greffe du tribunal administratif par Maître Guy THOMAS, avocat à la Cour, inscrit au tableau d

e l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Brésil), de nationalité b...

Tribunal administratif N° 14984 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 4 juin 2002 Audience publique du 11 juin 2002

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Requête en sursis à exécution et en institution d'une mesure de sauvegarde introduite par Monsieur …, contre une décision des ministres du Travail et de la Justice en matière de police des étrangers

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ORDONNANCE

Vu la requête déposée en date de ce jour au greffe du tribunal administratif par Maître Guy THOMAS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … à … (Brésil), de nationalité brésilienne, demeurant à L-…, tendant à ordonner le sursis à exécution par rapport à une décision du 25 janvier 2002 signée conjointement par les ministres de la Justice d'une part et du Travail et de l'Emploi d'autre part, lui ayant refusé la délivrance d'une autorisation de séjour et l'ayant invité à quitter le territoire luxembourgeois dans le délai d'un mois, sinon d'ordonner une mesure de sauvegarde lui permettant de rester au pays en attendant que le tribunal administratif ait statué au fond sur le mérite de sa demande en obtention d'une autorisation de séjour et d'un permis de travail, la demande s'inscrivant dans le cadre d'un recours en réformation, sinon en annulation introduit le 7 mai 2002, inscrit sous le numéro 14877 du rôle, contre ladite décision ministérielle;

Vu les articles 11 et 12 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives;

Vu les pièces versées et notamment la décision critiquée;

Ouï Maître Guy THOMAS, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Par décision du 25 janvier 2002, signée par les représentants des ministres de la Justice d'une part et du Travail et de l'Emploi d'autre part, Monsieur … s'est sont vu refuser l'autorisation de séjour sur le territoire du Grand-Duché de Luxembourg sollicitée le 27 juin 2001. La même décision l'invita à quitter le territoire du Grand-Duché dans le délai d'un mois.

Par requête déposée le 7 mai 2002, inscrite sous le numéro 14877 du rôle, Monsieur … a introduit un recours contentieux contre la prédite décision ministérielle.

2 Par requête déposée le 4 juin 2002, inscrite sous le numéro 14984 du rôle, il a introduit un recours tendant à ordonner le sursis à exécution par rapport à la décision lui refusant l'entrée et le séjour au pays.

A l'appui de sa demande, il fait exposer que la mesure de rapatriement lui causera un préjudice grave et définitif que les moyens à la base de son recours au fond sont suffisamment sérieux pour justifier la mesure de sursis à exécution sollicitée. Il souligne qu'il est au Luxembourg depuis dix ans et qu'il y a noué des attaches solides. Il verse une pièce dont il ressort qu'il est le père d'une fille née le 13 juillet 2001 à Luxembourg et il invoque les dispositions de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme – qui garantit la vie familiale – pour rester au pays. Il se base encore sur la procédure dite de régularisation mise en oeuvre par le gouvernement luxembourgeois dont il estime remplir les conditions pour bénéficier d'une autorisation de séjour.

Le délégué du gouvernement estime que les moyens invoqués par le demandeur dans le cadre de son recours au fond ne sont pas sérieux, étant donné qu'il serait en séjour illégal au pays, et qu'il se serait de plus rendu coupable de faux, ayant été trouvé en possession de faux papiers, à savoir un passeport portugais contrefait devant lui servir à se faire passer pour un ressortissant communautaire, ce qui témoignerait qu'il constituerait un danger pour l'ordre public. Il conteste par ailleurs l'existence d'une vie familiale au Luxembourg. – Concernant le risque d'un préjudice grave et définitif dans le chef du demandeur, il estime que celui-ci ne court aucun risque pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine, et qu'en cas de succès de son recours au fond, il pourra retourner au Luxembourg.

En vertu de l'article 11, (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux. Le sursis est rejeté si l'affaire est en état d'être plaidée et décidée à brève échéance.

La décision ministérielle du 19 décembre 2001 constitue essentiellement une décision négative en ce qu'elle refuse à Monsieur … l'autorisation de séjour. Accessoirement et par voie de conséquence, il est invité, dans la même décision, de quitter le territoire dans le délai d'un mois.

Or, le sursis à exécution ne saurait être ordonné par rapport à une décision administrative négative qui ne modifie pas une situation de fait ou de droit antérieure.

Une telle décision est en revanche susceptible de faire l'objet d'une mesure de sauvegarde, sollicitée à titre subsidiaire par le demandeur.

L'article 12 de la loi précitée du 21 juin 1999 dispose que le président du tribunal administratif peut au provisoire ordonner toutes les mesures nécessaires afin de sauvegarder les intérêts des parties ou des personnes qui ont intérêt à la solution d'une affaire dont est saisi le tribunal administratif, à l'exclusion des mesures ayant pour objet des droits civils.

Sous peine de vider de sa substance l'article 11 de la même loi, qui prévoit que le sursis à exécution ne peut être décrété qu'à la double condition que, d'une part, l'exécution de la décision attaquée risque de causer au requérant un préjudice grave et définitif et que, d'autre 3 part, les moyens invoqués à l'appui du recours dirigé contre la décision apparaissent comme sérieux, il y a lieu d'admettre que l'institution d'une mesure de sauvegarde est soumise aux mêmes conditions concernant les caractères du préjudice et des moyens invoqués à l'appui du recours. Admettre le contraire reviendrait en effet à autoriser le sursis à exécution d'une décision administrative alors même que les conditions posées par l'article 11 ne seraient pas remplies, le libellé de l'article 12 n'excluant pas, a priori, un tel sursis qui peut à son tour être compris comme mesure de sauvegarde.

En l'espèce, il se dégage des pièces versées que Monsieur … se trouve au Luxembourg depuis dix ans. Il ne conteste pas s'être trouvé en possession de documents d'identité falsifiés, y voyant le seul moyen de sortir de la clandestinité concernant sa situation au regard de son emploi et d'entrer en possession d'une autorisation de travail.

Il ressort par ailleurs des explications concordantes fournies à l'audience que Monsieur … a trois enfants au Brésil, et que sous la pression des autorités luxembourgeoises, sa compagne est rentrée au Brésil, emmenant l'enfant commun né l'enfant né au Luxembourg en 2001.

Au stade actuel de l'instruction de l'affaire, les moyens de Monsieur … concernant son recours au fond ne présentent pas le caractère sérieux nécessaire pour justifier une mesure de sauvegarde en sa faveur, étant considéré qu'au vu de l'usage de faux papiers, il ne semble même pas – outre la question de la légalité et de la force obligatoire de la procédure de régularisation des "sans-papiers" mise en oeuvre par le gouvernement – remplir les conditions pour bénéficier d'une telle régularisation, et qu'en raison du retour de sa compagne et de son enfant mineur au Brésil, où habitent par ailleurs ses autres enfants, il ne semble pas pouvoir invoquer les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme relatives à la garantie de la vie familiale pour rester au Luxembourg.

Il est par ailleurs vrai qu'en cas de retour dans son pays d'origine, le demandeur ne court pas de risque particulier pour son intégrité physique ou morale et qu'en cas de succès de sa demande au fond, il pourra retourner, le cas échéant, au Luxembourg, de sorte que la mesure de rapatriement envisagée n'est pas de nature à lui causer un préjudice grave et définitif.

Il suit des considérations qui précèdent que la demande est à rejeter comme non fondée.

Par ces motifs, le soussigné président du tribunal administratif, statuant contradictoirement et en audience publique, reçoit la demande en la forme, la déclare non justifiée et en déboute, condamne le demandeur aux frais.

4 Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique du 11 juin 2002 par M. Ravarani, président du tribunal administratif, en présence de Mme. Wealer, greffière.

s. Wealer s. Ravarani


Synthèse
Numéro d'arrêt : 14984
Date de la décision : 11/06/2002

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2002-06-11;14984 ?

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