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18/12/2000 | LUXEMBOURG | N°12106

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 18 décembre 2000, 12106


N° 12106 du rôle Inscrit le 6 juillet 2000 Audience publique du 18 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … BUSCH, … contre une décision de la commission d’examen pour l’examen de promotion pour l’accès aux fonctions supérieures à celles de chauffeur d’autobus en chef en matière de promotion

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12106 et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 juillet 2000 par Maître Marco FRITSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des

avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BUSCH, chauffeur d’autobus en chef aux TICE, demeurant à ...

N° 12106 du rôle Inscrit le 6 juillet 2000 Audience publique du 18 décembre 2000

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Recours formé par Monsieur … BUSCH, … contre une décision de la commission d’examen pour l’examen de promotion pour l’accès aux fonctions supérieures à celles de chauffeur d’autobus en chef en matière de promotion

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Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 12106 et déposée au greffe du tribunal administratif le 6 juillet 2000 par Maître Marco FRITSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur … BUSCH, chauffeur d’autobus en chef aux TICE, demeurant à L-…, tendant à l’annulation de “ la décision du 4 mai 2000 du Ministère de l’Intérieur, Direction des Affaires Communales ne réservant pas de suite favorable à sa demande de participation à l’examen de promotion pour l’accès aux fonctions supérieures à celles de Chauffeur d’autobus en chef ”;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal par le délégué du gouvernement le 30 août 2000;

Vu le mémoire en réplique déposé au nom du demandeur le 28 septembre 2000;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Christel DUMONT, en remplacement de Maître Marco FRITSCH et Monsieur le délégué du gouvernement Jean-Paul REITER en leurs plaidoiries respectives.

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Le 21 octobre 1999, Monsieur … BUSCH, chauffeur d’autobus en chef au Syndicat des Tramways Intercommunaux dans le Canton d’Esch (en abrégé TICE), demeurant à L-…, introduisit auprès de la direction des affaires communales du ministère de l’Intérieur, une demande de participation à l’examen de promotion pour l’accès aux fonctions supérieures à celles de chauffeur d’autobus en chef.

Au courant du mois de mars 2000, Monsieur BUSCH se soumit à un test d’aptitude psychologique auprès de l’Institut National pour le développement de la Formation Professionnelle Continue (INFPC).

Par lettre du 4 mai 2000, la présidente de la commission d’examen nommée par le ministre de l’Intérieur pour l’examen de promotion pour l’accès aux fonctions supérieures à celles de chauffeur d’autobus en chef, ci-après dénommée la “ commission d’examen ”, informa Monsieur BUSCH de ce que “ (…) sur le vu de vos résultats [du test d’aptitude psychologique précité] la commission [d’examen en sa séance du 4 mai 2000] a décidé que vous n’avez pas réussi au test en question de sorte que vous n’êtes pas autorisé à participer à la partie théorique de l’examen en question et ceci en exécution de l’article 85bis du règlement grand-ducal du 20 décembre 1990 portant fixation des conditions d’admission et d’examen des fonctionnaires communaux. (…) ”.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 6 juillet 2000, Monsieur BUSCH a fait introduire un recours en annulation contre la décision de la commission d’examen prévisée du 4 mai 2000.

En l’absence d’une disposition légale prévoyant un recours de pleine juridiction en la matière, seul un recours en annulation a pu être introduit devant le tribunal administratif à l’encontre de la décision querellée.

Le recours en annulation est également recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Le délégué du gouvernement conclut en premier lieu à la “ mise en intervention ” du TICE, l’employeur de Monsieur BUSCH, au motif que le TICE serait à considérer comme tiers intéressé.

S’il est vrai que l’article 4 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit que la requête introductive d’instance est à signifier par le demandeur, outre à la partie défenderesse, auteur de la décision litigieuse, aux tiers intéressés, pareille nécessité de procéder à la signification de la requête au TICE ne s’imposait ni ne s’impose en l’espèce, étant donné qu’il n’apparaît pas des éléments d’appréciation soumis au tribunal en quoi le TICE pourrait directement soit, négativement, être préjudicié, soit, positivement, tirer avantage de la solution du litige dont le tribunal est appelé à connaître, de sorte qu’il n’est pas à considérer comme tiers intéressé dans le cadre de la présente affaire.

Le demandeur conclut à l’annulation de la décision attaquée “ pour violation de la loi, sinon excès de pouvoir sinon détournement de pouvoir ”.

Il soutient en premier lieu que l’article 4 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes aurait été violé, au motif que l’avis sollicité auprès de l’INFPC ne serait motivé qu’en fait, mais non pas en droit.

Le délégué du gouvernement estime que si la décision de la commission d’examen ayant refusé au demandeur le droit de se présenter à la partie théorique de l’examen auquel il voulait participer constitue une décision administrative susceptible d’un recours contentieux, “ la recommandation émise par l’INFPC constitue une expertise plutôt qu’un avis d’un organisme public, et n’est donc pas concernée par le règlement grand-ducal du 8 juin 1979 ”.

2 Il estime encore que le moyen ne serait pas fondé en fait, “ dans la mesure où la décision attaquée du 4 mai 2000 est motivée en droit par le renvoi à l’art. 85bis du règlement grand-ducal modifié du 20 décembre 1990 portant fixation des conditions d’admission et d’examen des fonctionnaires communaux ”. Le délégué ajoute encore que la décision litigieuse serait valable et l’administration pourrait valablement produire ou compléter sa motivation au cours de la procédure contentieuse. Enfin, il estime que la recommandation de l’INFPC comporterait une motivation explicite de sa conclusion finale.

Dans sa réplique, le demandeur fait réitérer son moyen d’annulation et il fait soutenir que la question de savoir si la recommandation de l’INFPC constituerait une expertise plutôt qu’un avis serait irrelevante, au motif que “ les avis émis par des organes consultatifs ne sont que de simples mesures d’instruction dont les irrégularités et les vices peuvent être analysés dans le cadre du recours dirigé contre la décision administrative ”.

L’article 4 alinéa 1er du règlement grand-ducal précité du 8 juin 1979 dispose que “ les avis des organismes consultatifs pris préalablement à une décision doivent être motivés et énoncer les éléments de fait et de droit sur lesquels ils se basent ”.

L’article 4 du règlement grand-ducal précité de 1979 vise les consultations préalables destinées à conseiller l’autorité administrative appelée à prendre une décision. Sous ce rapport, les organismes consultés sont appelés à examiner une certaine situation de fait par rapport à la situation de droit existante et de donner leur avis motivé en droit et en fait à l’autorité administrative.

Il importe de relever que ledit article 4 ne vise pas les mesures d’expertises, c’est-à-dire les mesures d’instructions confiées par l’administration à un technicien compétent afin qu’il lui fournisse des renseignements voire un avis technique sur des questions de fait.

En matière d’examens de promotion prévus par le règlement grand-ducal modifié du 20 décembre 1990 portant fixation des conditions d’admission et d’examen des fonctionnaires communaux et, concernant plus particulièrement les examens pour la promotion aux fonctions supérieures à celles de chauffeur d’autobus en chef, l’article 85 bis du règlement grand-ducal précité du 20 décembre 1990 prévoit que les candidats ne pourront se présenter à la partie théorique de l’examen de promotion “ que [s’ils ont] (…) réussi au test d’aptitude psychologique ”.

Force est de constater qu’un tel test d’aptitude psychologique, s’il constitue certes une mesure d’instruction, qu’on est admis à critiquer pour les vices qui lui sont propres, s’apparente à une mission d’expertise appelant un expert à donner son avis quant à l’aptitude psychologique des postulants à la carrière supérieure à assumer les fonctions de contrôleur d’autobus, c’est-à-dire un avis sur une question de fait qui constitue un élément d’appréciation pour la commission d’examen, titulaire du pouvoir de décision. Le test d’aptitude psychologique ne constitue pas un avis d’un organisme consultatif au sens de l’article 4 du règlement grand-ducal précité de 1979 puisque le technicien n’est pas appelé à se prononcer sur les conséquences de droit qui peuvent résulter du test effectué.

Le moyen d’annulation laisse d’être fondé et il doit être écarté.

3 Le demandeur, se basant sur un certificat établi le 6 juillet 2000 par le docteur Georges E. …, soutient ensuite qu’il y aurait des “ contradictions flagrantes entre le résultat des tests et le commentaire : 1) Au test : Emotionale Stabilität 10 (maximum). Dans le commentaire :

“ emotionale Instabilität ”. 2) Au test : Selbstkontrolle 8 (bonne). Dans le commentaire :

“ Tendenz zur Impulsivität ”. On pourrait multiplier les exemples et tout ceci n’est pas sérieux. Je suis en plus choqué par la terminologie dépréciative et tendancieuse utilisée dans le commentaire. ” ”. Sur ce, le demandeur estime que le test auquel il aurait dû se soumettre ne serait pas pertinent et qu’il ne saurait constituer une base pour la décision lui refusant le droit de participer à la partie écrite de l’examen de promotion.

Le délégué du gouvernement rétorque que le certificat du docteur …, outre qu’il ne serait pas contradictoire, n’aurait aucune valeur légale pour émaner d’une personne privée.

Dans sa réplique, le demandeur relève que le docteur … serait un éminent spécialiste en neurologie et psychiatrie et que son certificat “ permet de mettre à jour les incohérences dans l’interprétation donnée au test subi ”.

Le certificat du docteur … est libellé comme suit: “ Je soussigné Dr. Georges E. … certifie avoir examiné M. … Busch et avoir pris connaissance des résultats du test 16 PF-R Testprofil, du Bochumer Inventar ainsi que du rapport établi après moins d’une heure d’entrevue avec le candidat.

Toute la procédure où des tests psychologiques “objectifs” et des commentaires “subjectifs” remplacent des examens de promotion me paraît hautement contestable et remet sérieusement en question l’égalité des chances de candidats.

Il existe des contradictions flagrantes entre les résultats des tests et le commentaire :

1) Au test : Emotionale Stabilität 10 (maximum) Dans le commentaire : “emotionale Instabilität” 2) Au Test : Selbstkontrolle 8 (bonne) Dans le commentaire : “Tendenz zur Impulsivität”.

On pourrait multiplier les exemples et tout ceci n’est pas sérieux. Je suis en plus choqué par la terminologie dépréciative et tendancieuse utilisée dans le commentaire.

Pendant ma longue expérience psychiatrique au Grand-Duché (45 ans, 31.000 malades), j’ai toujours pris soin de traiter les patients avec respect et de ne pas considérer mes premières impressions comme définitives.

A mon avis des tests psychologiques ne peuvent pas remplacer les examens de promotion. Ils peuvent fournir des informations supplémentaires mais ne doivent pas être transformés en jugements ”.

Force est de constater que le certificat précité du docteur … contient en premier lieu une mise en cause de l’opportunité du recours à un test d’aptitude psychologique dans le cadre des examens de promotion. Or, pareille critique ne saurait porter à conséquence dans le cadre du présent recours, étant donné que le recours à un test d’aptitude psychologique est 4 expressément instauré par l’article 85 bis du règlement grand-ducal précité du 20 décembre 1990 et qu’il incombe aux juridictions d’appliquer les textes légaux et réglementaires, dans la mesure de leur légalité, et non pas de se faire le juge de leur opportunité.

Il est vrai que le certificat du docteur … critique en second lieu les conclusions qui ont été tirées des test d’aptitude et entretien auxquels le demandeur s’est soumis. Dans ce contexte, le docteur relève deux contradictions et il fait allusion à d’autres, non autrement précisées, ni par lui-même ni ultérieurement par le demandeur en cours d’instruction de la présente affaire. Cependant, même à se baser sur cette pièce unilatérale dressée à sa propre demande, la partie demanderesse reste en défaut de démontrer à suffisance de droit une irrégularité ou illégalité des résultats de l’évaluation des aptitudes psychologiques professionnelles du postulant. Ledit certificat n’est pas non plus de nature à constituer un élément de contestation suffisamment sérieux appelant le tribunal administratif, statuant en tant que juge de la légalité, à procéder à une mesure d’instruction supplémentaire. En effet, le docteur relève certes deux contradictions entre le commentaire des résultats tirés de deux épreuves d’évaluation et d’un entretien et le “ Testprofil 16 PF-R ”, c’est-à-dire la fiche des résultats d’une des épreuves d’évaluation, mais il se dégage du libellé clair du prédit commentaire que, concernant plus particulièrement la constitution psychique, l’agent de l’INFPC se fonde non seulement sur les indices résultant du test dont les résultats ont été consignés dans le “ Testprofil 16 PF-R ”, mais en outre sur les enseignements qui ont été tirés de la seconde épreuve d’évaluation, consignés sur le document intitulé “ Bochumer Inventar zur berufsbezogenen Persönlichkeitsbeschreibung ” - aucune contradiction entre cette pièce et le commentaire n’ayant été alléguée -, mais encore et surtout sur les enseignements de la séance d’entretien de l’agent de l’INFPC avec le postulant, de sorte que les contradictions relevées sont à relativiser en ce sens et ne justifient pas une mise en cause effective du rapport d’évaluation de l’aptitude psychologique du postulant globalement considéré.

En dernier lieu, le demandeur soulève la violation de l’article 6 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, ci-après dénommée la Convention des droits de l’homme, au motif qu’il n’aurait pas été entendu contradictoirement, “ alors que le prédit test psychologique ne prévoit pas le recours à une contre-expertise psychologique et viole de ce fait les droits élémentaires de la défense ”.

C’est à bon droit que le délégué du gouvernement soutient que le moyen tiré de la violation de l’article 6 de la Convention des droits de l’homme n’est pas fondé, étant donné que ledit article 6 ne s’applique qu’aux contestations portant sur des droits et obligations de caractère civil et aux accusations en matière pénale et que le présent litige relatif à l’admission à un examen de promotion ne rentre dans aucune des deux catégories. - En outre, l’argumentation développée par le demandeur, consistant à soutenir que ses droits élémentaires de la défense ne seraient pas garantis laisse d’être fondée, étant donné qu’il dispose d’une voie de recours effective contre la décision de la commission d’examen devant le juge administratif, moyennant une procédure équitable, publique et contradictoire, dans le cadre de laquelle il peut faire valoir tous moyens tenant à la légalité interne et externe de la décision querellée.

Aucun autre moyen d’annulation n’ayant été soulevé à l’encontre de la décision litigieuse de la commission d’examen, le recours est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, 5 le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement;

reçoit le recours en annulation en la forme;

dit qu’il n’y a pas lieu de mettre en intervention le TICE;

au fond déclare le recours non justifié et en déboute;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schockweiler, vice-président M. Campill, premier juge Mme Lamesch, juge et lu à l’audience publique du 18 décembre 2000, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

s. Legille s. Schockweiler 6


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12106
Date de la décision : 18/12/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-12-18;12106 ?

Source

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