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19/10/2000 | LUXEMBOURG | N°12039C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 19 octobre 2000, 12039C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12039C Inscrit le 8 juin 2000

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Audience publique du 19 octobre 2000 Recours formé par … MUSLIU contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 10 mai 2000, N° 11748 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 8 juin 2000 par Maître Jean HOFFELD, avocat à la Cour, assisté de Maître Olivier TAMAIN, avocat, au nom de … MUSLIU, de na

tionalité yougoslave, originaire du Kosovo, demeurant à L-… contre un jugement ren...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE Numéro du rôle: 12039C Inscrit le 8 juin 2000

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Audience publique du 19 octobre 2000 Recours formé par … MUSLIU contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique (jugement entrepris du 10 mai 2000, N° 11748 du rôle) Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 8 juin 2000 par Maître Jean HOFFELD, avocat à la Cour, assisté de Maître Olivier TAMAIN, avocat, au nom de … MUSLIU, de nationalité yougoslave, originaire du Kosovo, demeurant à L-… contre un jugement rendu en matière de statut de réfugié politique par le tribunal administratif à la date du 10 mai 2000 à la requête de … MUSLIU contre deux décisions du ministre de la Justice.

Vu l’avis du dépôt dudit acte d’appel par la voie du greffe de la Cour administrative daté du 8 juin 2000.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 15 juin 2000 par le délégué du Gouvernement.

Vu l’avis du dépôt dudit mémoire en réponse daté du 15 juin 2000.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris du 10 mai 2000.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport oral ainsi que Maître Olivier TAMAIN, en remplacement de Maître Jean HOFFELD et Monsieur le délégué du Gouvernement Guy SCHLEDER en leurs plaidoiries respectives.

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Par requête inscrite sous le numéro 11748 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 28 décembre 1999 par Maître Georges PIERRET, avocat à la Cour, assisté par Maître Olivier TAMAIN, avocat, … MUSLIU, de nationalité yougoslave, originaire du Kosovo, demeurant à L-…, a demandé la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 4 page 1 novembre 1999 par laquelle il n’a pas été fait droit à sa demande en reconnaissance du statut de réfugié politique ainsi que d’une décision confirmative du 15 décembre 1999, rendue sur recours gracieux.

Le tribunal administratif, statuant contradictoirement en date du 10 mai 2000, a reçu le recours en réformation en la forme, au fond l’a déclaré non justifié et en a débouté.

Maître Jean HOFFELD, avocat à la Cour, assisté de Maître Olivier TAMAIN, avocat, a déposé une requête d’appel contre ce jugement au greffe de la Cour administrative en date du 8 juin 2000.

Après avoir rappelé le sens communément admis de la notion de crainte tel qu'il se dégage de la doctrine concernant le statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du protocole relatif au statut des réfugiés, rédigé à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’appelant fait valoir que ses droits auraient été violés par le gouvernement serbe.

Etant originaire de la ville de Mitrovica au Kosovo, ville où les forces onusiennes et l'administration civile actuellement en place ne parviendraient pas à faire régner l'ordre entre les populations albanaises et serbes, l'appelant serait dans l'impossibilité matérielle et morale de retrouver son foyer et sa famille, et que le fait de se voir obligé à s'installer dans une autre partie du pays, comme suggéré, serait à comparer à un acte de persécution au sens de l'article ler de la Convention de Genève, une population n'ayant pas à être déplacée pour ses convictions religieuses ou son origine ethnique.

Le délégué du Gouvernement a déposé un mémoire en réponse au greffe de la Cour administrative en date du 15 juin 2000 et y souligne que l'appelant oublierait le principe de la possibilité de fuite interne, possibilité qui aurait également été retenue par le législateur luxembourgeois dans l'article 4 du règlement grand-ducal du 22 avril 1996 portant application des articles 8 et 9 de la loi du 3 avril 1996 portant création d'une procédure relative à l'examen d'une demande d'asile qui dispose comme suit: "une demande d'asile peut être considérée comme manifestement infondée lorsque le demandeur d'asile, invoquant des persécutions qui sont limitées à une zone géographique déterminée, aurait pu trouver une protection efficace dans une autre partie de son propre pays, qui lui était accessible ".

Pour le surplus, le Gouvernement se réfère à son mémoire déposé en première instance.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine, mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur page 2 d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

Dans le cadre de l’évaluation de la situation personnelle du demandeur, l’examen fait par le juge administratif ne se limite pas à la pertinence des faits allégués, mais il apprécie également la valeur des éléments de preuve et la crédibilité des déclarations du demandeur.

Il y a lieu de constater que les premiers juges ont procédé à une analyse minutieuse des éléments leur soumis.

C’est à bon droit que le tribunal administratif a décidé que dans le cadre d’un recours en réformation, le bien-fondé et l’opportunité d’une décision entreprise sont à apprécier d’après la situation existant au moment où il statue.

En l’espèce, l’appelant allègue qu’il ne pourrait pas rentrer dans sa ville d’origine, à savoir Mitrovica, en raison des affrontements y ayant lieu actuellement entre les populations serbe et albanaise.

Il n’apporte dans ce contexte aucun élément ou motif permettant de conclure que les forces onusiennes et l’administration civile actuellement en place dans la ville de Mitrovica ne soient pas capables d’assurer au demandeur un niveau de protection suffisant dans le cadre de ces affrontements.

Les premiers juges ont retenu à juste titre et par une motivation que la Cour adopte que même s’il peut être à l’heure actuelle difficile pour un membre de la communauté albanaise et musulmane du Kosovo habitant dans les quartiers occupés majoritairement par la population serbe de Mitrovica de s’y réinstaller, au vu des affrontements ethniques qui sont toujours d’actualité dans cette ville du Kosovo, le demandeur n’apporte aucun élément permettant d’établir des raisons pour lesquelles il ne serait pas en mesure de s’installer soit dans un autre quartier de Mitrovica, soit dans une autre partie du Kosovo et de profiter ainsi d’une possibilité de fuite interne dans son pays d’origine.

Il suit de ces considérations qui précèdent que le jugement dont appel est à confirmer.

PAR CES MOTIFS la Cour, statuant contradictoirement, sur le rapport du conseiller, reçoit l’appel;

le dit non fondé et en déboute;

partant confirme le jugement du 10 mai 2000 dans toute sa teneur;

condamne l’appelant aux frais de l’instance d’appel.

page 3 Ainsi jugé par Messieurs Georges KILL, président, Jean-Mathias GOERENS, premier conseiller, Marc FEYEREISEN, conseiller, rapporteur et lu par le président Georges KILL en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président page 4


Synthèse
Numéro d'arrêt : 12039C
Date de la décision : 19/10/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-10-19;12039c ?

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