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29/06/2000 | LUXEMBOURG | N°11920C

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 juin 2000, 11920C


GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11920C du rôle Inscrit le 13 avril 2000 Audience publique du 29 juin 2000 Recours formé par Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice en matière de refoulement - Appel -

(jugement entrepris du 9 mars 2000, n° 11673 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 13 avril 2000 par Maître Claude Derbal, avocat à la Cour, au nom de Slavica Colovic, agissant tant en son nom propre qu’au nom et pour co

mpte de ses enfants mineurs Aldina, Dalila et Aldin Licina, demeurant à L-1511 Lu...

GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG COUR ADMINISTRATIVE N° 11920C du rôle Inscrit le 13 avril 2000 Audience publique du 29 juin 2000 Recours formé par Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice en matière de refoulement - Appel -

(jugement entrepris du 9 mars 2000, n° 11673 du rôle)

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Vu l’acte d’appel déposé au greffe de la Cour administrative le 13 avril 2000 par Maître Claude Derbal, avocat à la Cour, au nom de Slavica Colovic, agissant tant en son nom propre qu’au nom et pour compte de ses enfants mineurs Aldina, Dalila et Aldin Licina, demeurant à L-1511 Luxembourg, 162B, avenue de la Faïencerie, contre un jugement rendu en matière de refoulement par le tribunal administratif à la date du 9 mars 2000, à la requête de Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice.

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 26 avril 2000 par le délégué du Gouvernement.

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe de la Cour administrative le 26 mai 2000 par Maître Claude Derbal, au nom de Slavica Colovic et consorts.

Vu les pièces versées en cause et notamment le jugement entrepris.

Ouï le conseiller rapporteur en son rapport, Maître Claude Derbal et le délégué du Gouvernement Gilles Roth en leurs observations orales.

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Par requête déposée le 18 novembre 1999 au greffe du tribunal administratif, Maître Claude Derbal, avocat à la Cour, au nom de Slavica Colovic, agissant tant en son nom personnel qu’en nom et pour compte de ses enfants mineurs Aldina, Dalila et Aldin Licina, a introduit un recours tendant à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 5 octobre 1999 par laquelle le ministre leur a ordonné de quitter le territoire luxembourgeois.

Le tribunal administratif, statuant contradictoirement en date du 9 mars 2000 a déclaré ce recours non justifié.

Maître Claude Derbal, au nom de Slavica Colovic et consorts, a interjeté appel contre ce jugement par requête déposée au greffe de la Cour administrative le 13 avril 2000.

La partie appelante reproche aux premiers juges de ne pas avoir suivi ses conclusions de première instance et invoque par ailleurs des moyens soulevés dans un deuxième recours tendant à obtenir le statut de réfugié politique en sa faveur.

La partie appelante se réfère à l'article 11 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l'Etat et des communes conférant à l'administré «le droit à la communication intégrale du dossier relatif à sa situation administrative chaque fois que celle-ci est atteinte ou susceptible de l'être par une décision administrative prise ou en voie de l'être».

Que la violation des droits de l'appelante serait flagrante et justifierait par conséquent l'annulation de la décision entreprise.

Qu’un jugement omettant de statuer sur des moyens légalement avancés serait à annuler alors qu'il équivaudrait à un déni de justice sur ces moyens.

Qu'en outre, le jugement entrepris du 9 mars 2000 trouverait sa justification dans un jugement du 24 février 2000 (numéro 11672 du rôle) déclarant irrecevable le recours en réformation introduit à l'encontre de la décision confirmative de rejet du 5 octobre 1999.

Que ce jugement aurait été porté à la connaissance du litismandataire de l'appelante en date du 28 février 2000, jugement entrepris sur lequel l'appelante n'aurait pu débattre.

L’appelante reproche aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à sa demande d’exoine présentée et fait valoir une atteinte grave aux droits à un procès juste et équitable alors qu’elle n’aurait pu formuler ses observations.

L'article 28 (1) de la loi du 26 juillet 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et déterminant la tenue des audiences imposerait que les mandataires des parties ainsi que les délégués du Gouvernement soient « entendus dans leurs observations orales ».

L'article 30 de la prédite loi interdirait au tribunal de « statuer sur un moyen soulevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations ».

L'inobservation par le tribunal de ces règles élémentaires de procédure aurait eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense, atteinte à laquelle seule une annulation du jugement entrepris permettrait de remédier.

Dans un mémoire en réponse déposé au greffe de la Cour administrative le 26 avril 2000, le délégué du Gouvernement se rallie aux développements du tribunal administratif et, en se référant à ses mémoires des 7 décembre 1999 et 14 janvier 2000, demande à la Cour de rejeter l’appel comme non fondé.

Dans un mémoire en réplique déposé le 26 mai 2000 au greffe de la Cour administrative, l’appelante relève l’absence de communication à son égard et aux premiers juges de 2 l’intégralité du dossier administratif, une violation du principe du contradictoire, du principe général de la confiance légitime et des droits acquis.

La requête d’appel ayant été introduite dans les formes et délai de la loi est recevable.

Quant au recours tendant à voir déclarer l’annulation du jugement attaqué Le recours en appel est la voie de droit « par laquelle les jugements de premier ressort peuvent être soumis au contrôle d’une juridiction du second degré et dont l’exercice permet à cette juridiction non seulement d’annuler le jugement s’il a été irrégulièrement rendu mais aussi de le réformer en tout et en partie, en conséquence d’un nouvel examen du litige lui-même » (R.

CHAPUS, Droit administratif général p.480).

L’annulation d’un jugement ne se conçoit que dans l’hypothèse d’un maniement défectueux de leurs attributions juridictionnelles par les premiers juges, indépendamment de la qualité ou de l’opportunité intrinsèque de leur décision : l’annulation ne peut être que la censure de la méconnaissance des règles de compétence et de procédure par le juge du premier degré.

L’appelante soulève d’abord à titre d’irrégularité procédurale une prétendue omission des premiers juges de statuer sur des moyens légalement avancés liés à un défaut de notification dans les formes légales, un refus de permettre l’assistance d’un avocat et un refus de communication ou d’accès au dossier administratif.

Le recours déposé en date du 18 novembre 1999 au greffe du tribunal administratif contre la décision du ministre de la Justice du 5 octobre 1999 ordonnant à Slavica Colovic de quitter le territoire luxembourgeois (numéro 11673 du rôle) se réfère à un autre recours déposé le même jour (numéro 11672) tendant à obtenir le statut de réfugié politique.

Dans le recours actuellement soumis à la Cour, la requérante a initialement demandé, en l’absence de l’épuisement des voies de recours au niveau de sa demande en obtention du statut de réfugié politique, de voir constater que la décision ministérielle du 5 octobre 1999 de quitter le territoire serait dénuée de tout fondement et que cette décision lui aurait par ailleurs été notifiée en violation de ses droits élémentaires de se faire assister d’un avocat.

Le recours déposé le 18 novembre 1999 tendant à obtenir le statut de réfugié politique se trouve définitivement vidé par un arrêt de la Cour du 30 mai 2000 (N° 11900C Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique) de sorte que les arguments développés au niveau de l’absence de l’épuisement des voies de recours se heurtent à l’autorité de la chose jugée.

Une confrontation du jugement attaqué du 9 mars 2000 avec le recours initialement déposé dans le rôle numéro 11673 en date du 18 novembre 1999 fait apparaître que les premiers juges ont répondu à tous les arguments et moyens développés face aux dispositions de l’article 10 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 en vertu duquel toute partie à une procédure administrative a le droit de se faire assister par un avocat et que l’autorité doit adresser ses communications à celui-ci. (page trois du jugement attaqué) Les arguments liés à une application inappropriée de l’article 11 du règlement grand-ducal de 1979 ne figurent pas dans le recours initial de sorte qu’ils ne pouvaient être valablement toisés par les juges de première instance.

3 Le mandataire de l’appelante reproche ensuite aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à sa demande d’exoine présentée et fait valoir une atteinte grave au droit à un procès juste et équitable alors qu’il n’aurait pu formuler ses observations.

C’est à bon droit et pour des motifs que la Cour adopte que le tribunal administratif a décidé qu’il n’était pas obligé de faire droit à une demande d’exoine présentée trois heures avant l’audience à laquelle l’affaire a été fixée pour plaidoiries dans la mesure où ladite demande n’était pas motivée par la maladie ou d’autres circonstances graves, indépendantes de la volonté du mandataire de la demanderesse mais par des motifs de convenance personnelle.

C’est également à bon droit que le tribunal a décidé qu’un jugement est réputé contradictoirement rendu entre parties dès que la requête introductive est déposée et que la partie défenderesse a déposé un mémoire en réponse, ceci indépendamment des soins apportés par les avocats constitués aux fins d’assurer une présence à l’audience des plaidoiries.

La demande tendant à voir déclarer la nullité du jugement est partant à déclarer non fondée.

Quant à la demande tendant à surseoir à statuer Comme le recours déposé le 18 novembre 1999 se trouve définitivement vidé par un arrêt de la Cour du 30 mai 2000 (N° 11900C Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice en matière de statut de réfugié politique), la demande tendant à surseoir à statuer est à déclarer non fondée.

Quant au recours demandant la réformation du premier jugement Le refoulement d'un étranger du territoire luxembourgeois peut être ordonné par le ministre de la Justice sur base de l'article 12, alinéa 1er de la loi modifiée du 28 mars 1972 concernant 1.

l'entrée et le séjour des étrangers; 2. le contrôle médical des étrangers; 3. l'emploi de la main-

d'œuvre étrangère, qui dispose que « peuvent être éloignés du territoire par la force publique, sans autre forme de procédure que la simple constatation du fait par un procès-verbal à adresser au ministre de la Justice les étrangers non autorisés à résidence:

… 2) qui ne disposent pas de moyens personnels suffisants pour supporter les frais de voyage et de séjour;

3) auxquels l'entrée dans le pays a été refusée en conformité de l'article 2 de la présente loi;

4) qui ne sont pas en possession des papiers de légitimation prescrits et de visa si celui-ci est requis (..) ».

En l'espèce, l'ordre de quitter le territoire luxembourgeois a été motivé par la considération que l’appelante actuelle ainsi que ses enfants n'ont pas pu obtenir la reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève.

Que cette considération a été confirmée par un arrêt de la Cour du 30 mai 2000 (N° 11900C Slavica Colovic et consorts contre le ministre de la Justice).

Par ailleurs, l’appelante n'invoque pas, ni pour elle-même ni pour ses enfants, avoir, à un quelconque autre titre, un droit de séjourner au Grand-Duché de Luxembourg alors que les seuls motifs qui ont été invoqués à l'appui de la requête introductive d'instance, comme l’ont souligné à juste titre les premiers juges, ont trait à la procédure entamée par la demanderesse 4 en date du 21 janvier 1998 en vue d'obtenir la reconnaissance du statut de réfugié politique et qui sont sans pertinence en l'espèce.

Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent que le ministre de la Justice a valablement pu ordonner le refoulement de l’appelante ainsi que de ses enfants du territoire luxembourgeois en se basant sur ses refus antérieurs de reconnaissance du statut de réfugié politique et en l'absence d'un autre motif ayant légalement pu justifier leur présence sur le territoire luxembourgeois.

L’appel est partant à rejeter comme n'étant pas fondé.

Par ces motifs la Cour administrative, statuant contradictoirement ;

reçoit l’appel en la forme ;

déclare l’appel tendant à voir déclarer l’annulation du jugement du 9 mars 2000 non fondé ;

déclare la demande tendant à surseoir à statuer non fondée ;

déclare l’appel tendant à voir réformer le jugement du 9 mars 2000 non fondé ;

partant confirme le jugement du 9 mars 2000 dans toute sa teneur ;

condamne l’appelante aux frais de l’instance d’appel.

Ainsi jugé par Messieurs Georges Kill, président, Jean-Mathias Goerens, premier conseiller, Marc Feyereisen, conseiller, rapporteur, et lu par le président en audience publique à Luxembourg au local ordinaire des audiences de la Cour à la date indiquée en tête, en présence du greffier en chef de la Cour.

Le greffier en chef Le président 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11920C
Date de la décision : 29/06/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-06-29;11920c ?

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