La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/05/2000 | LUXEMBOURG | N°11650

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 29 mai 2000, 11650


N° 11650 du rôle Inscrit le 8 novembre 1999 Audience publique du 29 mai 2000

==========================

Recours formé par les époux … JAOUID et … contre une décision de la commune de X.

en matière d’inscription au registre de la population

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Vu la requête inscrite sous le numéro 11650 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 1999 par Maître Jean-Louis HASTERT, avocat à la Cour, inscrit au tabl

eau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux … JAOUID, rentier, et …, de nationalité maro...

N° 11650 du rôle Inscrit le 8 novembre 1999 Audience publique du 29 mai 2000

==========================

Recours formé par les époux … JAOUID et … contre une décision de la commune de X.

en matière d’inscription au registre de la population

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Vu la requête inscrite sous le numéro 11650 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 8 novembre 1999 par Maître Jean-Louis HASTERT, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom des époux … JAOUID, rentier, et …, de nationalité marocaine, demeurant ensemble à L-X., 114, route de Luxembourg, agissant tant en leur nom personnel que pour compte de leurs enfants mineurs Nour Eddine, Amal, Kamel et Fouad, tendant à l’annulation d’une décision du collège des bourgmestre et échevins de l’administration communale de X. du 8 octobre 1999 refusant de faire droit à leur déclaration de changement de domicile du 15 septembre 1999 et de les inscrire au registre de la population à l’adresse L-X., 114, route de Luxembourg;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Camille FABER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 2 décembre 1999, portant signification de ce recours à l’administration communale de X. ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 18 février 2000 par Maître Roger NOTHAR, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, pour compte de l’administration communale de X. ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Marc GRASER, demeurant à Luxembourg, du 23 février 2000 portant signification de ce mémoire en réponse aux époux … JAOUID et … ;

Vu le mémoire en réplique, intitulé mémoire en réponse, déposé au greffe du tribunal administratif le 20 mars 2000 par Maître Jean-Louis HASTERT au nom des époux … JAOUID et … ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Camille FABER, demeurant à Esch-sur-Alzette, du 22 mars 2000 portant signification de ce mémoire en réplique à l’administration communale de X. ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maîtres Jean-Louis HASTERT et Roger NOTHAR en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 25 avril 2000 ;

Vu la prise de position complémentaire déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mai 2000 par Maître Jean-Louis HASTERT.

---------------------------------------------------------------------------------------------------------------

--

Les époux … JAOUID, rentier, et …, ainsi que leurs enfants …, tous de nationalité marocaine, furent déclarés à la commune de X. à l’adresse L-X., 114, route de Luxembourg et inscrits sous cette même adresse au registre de la population. La maison par eux habitée, ayant appartenu à Madame …, fit l’objet d’une saisie immobilière validée suivant jugement rendu par le tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg le 2 juillet 1999 et fut vendue par adjudication publique ayant eu lieu le 11 août 1999. Ledit immeuble, acquis par Monsieur …, appartient actuellement, suivant déclaration de command du 12 août 1999, à la société civile SCI … Suivant déclaration du 25 août 1999, les époux JAOUID-… firent part à l’administration communale de X. de leur intention de transférer leur domicile ainsi que celui de leurs enfants mineurs … de l’adresse L-X., 114, route de Luxembourg vers L-Y., avec effet à partir du 25 août 1999. Le lendemain, en date du 26 août 1999, ils firent une nouvelle déclaration à l’administration communale de Luxembourg exprimant leur intention de transférer leur domicile de L-Y., rue …, vers L-Y., rue … Enfin, en date du 15 septembre 1999, ils déclarèrent à l’administration communale de Luxembourg leur intention de transférer leur domicile à nouveau de L-Y., rue … vers L-X., 114, route de Luxembourg.

Lors de sa séance du 8 octobre 1999, le collège des bourgmestre et échvins de l’administration communale de X. décida “ de ne pas faire droit à la déclaration de changement du domicile du 15 septembre 1999 et de refuser d’inscrire les requérants … JAOUID et …, agissant tant pour eux-mêmes que pour leurs enfants mineurs … à X., 114, route de Luxembourg ”.

A l’encontre de la décision précitée du 8 octobre 1999, les époux JAOUID-…, agissant tant en leur nom personnel que pour compte de leurs enfants mineurs …, firent introduire un recours en annulation par requête déposée en date du 8 novembre 1999.

Aucun recours au fond n’étant prévu en la matière, le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

A l’appui de leur recours, les demandeurs exposent n’avoir jamais quitté en fait leur domicile originaire sis à L-X., 114, route de Luxembourg, de sorte que leurs déclarations d’intentions successives de transférer leur domicile d’abord le 25 août 1999 vers L-Y., rue …, et ensuite le 26 août 1999, vers L-Y., rue …, seraient restées sans autre conséquence et n’auraient pas pu valoir transfert de domicile conformément aux prescriptions légales applicables.

Ils s’emparent à cet égard des dispositions de l’article 103 du code civil aux termes duquel deux conditions cumulatives seraient nécessaires pour qu’il y ait changement de domicile, à savoir le fait d’une habitation réelle dans un autre lieu et l’intention d’y fixer son principal établissement.

2 Dans la mesure où la seule intention de transférer son domicile serait dès lors insuffisante pour valoir changement de domicile, ce serait à tort que la décision déférée a refusé leur inscription au registre de la population à l’adresse L-X., 114, route de Luxembourg, au motif qu’ils auraient quitté et perdu leur ancien domicile à X..

L’administration communale de X. signale que sous peine de conférer au registre de la population un caractère fictif ou fantaisiste, le collège échevinal serait habilité à vérifier si les déclarations des administrés concordent avec la réalité et à refuser une demande d’inscription à une adresse fictive qui ne correspond pas à l’habitation réelle. Elle est par ailleurs en accord avec les demandeurs pour dire que le changement de domicile s’opère par le fait d’une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l’intention d’y fixer son principal établissement, le critère d’habitation réel supposant que le déclarant justifie de la mise à disposition effective d’un logement.

Dans son mémoire en réponse la partie défenderesse estime qu’il serait en l’espèce établi de manière incontestable, à travers les pièces versées au dossier, que la famille JAOUID-

… ne dispose pas d’un logement dans l’immeuble sis à X., 114, route de Luxembourg, alors que le nouveau propriétaire de l’immeuble s’oppose formellement à leur réintégration dans ledit logement. Aussi, d’après les éléments à la disposition du collège échevinal au moment de la prise de la décision déférée, elle estime que tout portait à croire que la famille JAOUID-… avait définitivement quitté l’immeuble à X. au courant du mois d’août 1999 et ne pouvait plus raisonnablement prétendre y fixer de nouveau son domicile au mois de septembre 1999 contre l’opposition déclarée du nouveau propriétaire de l’immeuble.

Conformément aux dispositions de l’article 103 du code civil “ le changement de domicile s’opérera par le fait d’une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l’intention d’y fixer son principal établissement ”.

Il résulte d’un rapport d’enquête de la police grand-ducale du 19 avril 2000 effectué à la demande même de la commune de X., via son mandataire, que les consorts JAOUID-… habitent toujours la maison sise à L-X., 114, route de Luxembourg, et que “ les époux JAOUID-… ne sont apparemment jamais partis de cette adresse matériellement ”.

Il se dégage de ces constatations, corroborant les affirmations des demandeurs à cet égard, que la condition légale d’une habitation réelle dans un autre lieu inscrite à l’article 103 du code civil ne fut à aucun moment réalisée dans le chef des consorts JAOUID-…, de sorte que la décision déférée est motivée à tort par la considération qu’ils auraient de fait quitté leur logement à X., 114, route de Luxembourg, au courant du mois d’août 1999.

S’il est encore vrai que les étrangers séjournant au pays doivent, à l’appui de leur demande d’inscription au registre de la population, justifier d’un logement adéquat, il se dégage en l’espèce des pièces versées au dossier et plus particulièrement du rapport d’enquête de la police grand-ducale précité du 19 avril 2000 que la maison sise 114, route de Luxembourg à X. est effectivement occupée par la famille JAOUID-… à des fins d’habitation et que les locaux en question ne servent pas encore aux activités y projetées par la firme ayant entre-temps acquis ledit immeuble.

Dans la mesure où aucun élément du dossier ne permet de retenir que le logement en question serait inadéquat au séjour des personnes concernées, la considération retenue comme 3 motif à la base de la décision déférée que “ la famille JAOUID-… ne dispose pas d’un logement adéquat dans l’immeuble sis à X., 114, route de Luxembourg ” ne saurait être retenue comme reposant sur des faits établis en l’espèce.

Cette conclusion ne saurait être énervée par la considération que la société civile immobilière “ S.C.I. … ”, en tant que propriétaire dudit immeuble, a déclaré s’opposer formellement à une réintégration de la famille JAOUID-… dans ladite maison, étant donné d’abord qu’en fait les personnes concernées n’avaient pas encore quitté l’immeuble, de sorte que la question de leur réintégration ne se pose pas, et que par ailleurs dans le cadre de l’appréciation de l’existence d’un changement de domicile au sens de l’article 103 du code civil, seul le caractère réel d’une habitation dans un autre lieu est déterminant, abstraction faite de tout autre différend pouvant le cas échéant exister entre le propriétaire et l’occupant de l’immeuble concerné.

La requête formulée par les demandeurs à travers leur prise de position complémentaire déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mai 2000, soit après la prise en délibéré de l’affaire, tendant à voir écarter des débats le rapport de police versé au dossier par le mandataire de la commune à l’audience publique du 25 avril 2000 à laquelle l’affaire fut plaidée, au motif qu’il a été établi postérieurement à la décision déférée du collège des bourgmestre et échevins du 8 octobre 1999, est à écarter en toute occurrence et abstraction faite des dispositions de l’article 8 (6) de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, alors que ledit rapport tend à établir des faits à la base de la décision déférée et que le tribunal administratif, statuant en tant que juge de l’annulation, est en tout état de cause amené à vérifier le caractère légal et réel des motifs invoqués à l’appui de l’acte administratif attaqué, cette vérification l’amenant nécessairement à examiner si les faits sur lesquels s’est fondée l’administration sont matériellement établis à l’exclusion de tout doute.

Il se dégage de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’à défaut d’autre motif invoqué justifiant la décision déférée, celle-ci encourt l’annulation.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié ;

partant annule la décision déférée du 8 octobre 1999 et renvoie l’affaire devant le collège des bourgmestre et échevins de la commune de X. ;

condamne la commune de X. aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 29 mai 2000 par :

M. Delaporte, premier vice-président Mme Lenert, premier juge M. Schroeder, juge 4 en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Delaporte 5


Synthèse
Numéro d'arrêt : 11650
Date de la décision : 29/05/2000

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2000-05-29;11650 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award